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dramaturge et biographe français De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Léonor Jean Soulas, dit l'abbé d'Allainval, est un auteur dramatique français né à Chartres le [1] et mort à Paris le [2].
La famille Soulas est établie à Auneau, au nord de Chartres, depuis le XVIe siècle. Elle a ses armoiries d'office, de sinople à un chat d'argent[4]. C'est une famille de bonne bourgeoisie de judicature solidement implantée dans la baronnie d'Auneau. Léonor Jean est issu du mariage de "Jean Caezar Soulas, directeur des droits du Roy et de Louyse Desnoyers" (fille d'un maître vitrier de Chartres). Son parrain est "Christin Gravelle, conseiller du Roy et son lieutenant particulier assesseur criminel au baillage présidial de Chartres"[1]. Il ajoutera plus tard le prénom de Christin à ceux de Léonor Jean, en hommage à son parrain.
Léonor Jean Christin Soulas quitte Chartres pour Paris vers 1720 et adopte le pseudonyme sous lequel il sera connu dans le monde littéraire : l'Abbé d'Allainval. Bien que ce titre ecclésiastique lui fût contesté par des critiques bien après sa mort, il est pourtant attesté dans plusieurs actes de l'époque où Soulas est mentionné comme clerc tonsuré du diocèse de Chartres[5]. Quant au nom de D'Allainval, on le trouve dans un lieu-dit d'Auneau, face au château[6].
Un rapport rédigé par l'officier de police Marais, chargé de la surveillance des ecclésiastiques nous en apprend plus sur le physique de D'Allainval : « Labé d'Alinval a été autrefois bien fait, d'une jolie figure et plein de gentillesse. Sa taille est de cinq pieds trois pouces [170 cm] bien prise. Il est brun et porte perruque, le visage ovale, a les yeux forts beaux et à fleur de tête, la bouche et le nez bien faits, et l'abord gracieux[7]. »
Il commence sa carrière en participant aux ouvrages du poète Autreau puis se consacre à la poésie, sans véritable succès. Mais c'est avec L'Embarras des richesses, jouée en 1725 que commence véritablement sa carrière d'auteur. A cette comédie en trois actes, viendront s'ajouter une autre comédie du même volume, L'Ecole des bourgeois, ainsi que cinq autres pièces en un acte : Le Tour de carnaval, La Fausse comtesse, Les Réjouissances publiques ou le gratis, Le Mari curieux, L'Hiver - et un petit opéra-comique : La Fée Marotte, qui ponctuera sa production pour le théâtre en 1734.
Le succès de ces pièces est assez relatif et ne suffit pas, ni à établir sa notoriété, ni à l'assurer de moyens de subsistance suffisants. Sa vie bascule dans la tourmente. En 1738 il est arrêté[8] et enfermé à La Bastille pour avoir publié des libelles et pièces satiriques. Il sera libéré quatre mois plus tard. Bien que pouvant compter sur l'appui d'amis sûrs (comme L'Affichard et Pannard), on lui prête la réputation "de passer la nuit dans quelqu'une des chaises à porteur qui sont au coin des rues". A l'indigence il faut ajouter la débauche si l'on en croit le rapport de l'officier de police Marais[7] : "Son visage ovale a beaucoup de couleurs quand il est en santé ce qu'il lui arrive rarement car il paye maintenant bien cher ses excès et ses débauches".
Lui qui portait l'image d'une assez grande misère, mourut en quittant la table d'un Financier chez qui il dînait. C'était un mercredi et la veille avait été la dernière fête de Pâques. Frappé d'apoplexie il fut conduit à l'Hôtel-Dieu où il rendit le dernier soupir, le 2 mai 1753[9]
Sous le pseudonyme de George Wink :
Un des biographes de Léonor Jean Christin Soulas dit l'Abbé d'Allainval résume la vie de celui-ci : "On s'est beaucoup déchaîné contre les mœurs et les manières de vivre de D'Allainval. Il fut malheureux aussi au théâtre, où sa meilleure pièce, L'Ecole des bourgeois, ne jouit d'une considération réelle et méritée que trop tard pour l'utilité de l'auteur. Si ces considérations ne disculpent pas d'Allainval, au moins elles doivent réclamer pour lui quelque indulgence"[19].
Les critiques n'ont retenu du théâtre de D'Allainval que L'Ecole des bourgeois pour sa peinture des mœurs d'une époque où les Marquis s'encanaillent au détriment de bourgeois impatients de les rejoindre, et L'Embarras des richesses pour le contraste qu'elle offre entre la condition d'indigent prêtée à d'Allainval et le thème de la richesse repris dans la pièce.
Pourtant, Martial Poirson voit dans ces deux pièces "une intéressante lecture en miroir de la mobilité sociale, et par conséquent de tenir un propos sur les grands bouleversements sociaux du siècle nouveau"[20].
Charles Monselet[21] reconnaît dans l'Ecole des bourgeois la lignée de Molière : "Il y a juste cent trente-six ans qu'un pauvre diable, moitié gentilhomme, moitié abbé, mais tout à fait écrivain, dînant de deux jours l'un, et couchant pendant les nuits d'hiver dans une chaise à porteurs, Soulas d'Allainville [sic], faisait jouer à la Comédie-Française la très-brillante comédie intitulée l’École des Bourgeois. Cette comédie, qui donnait une vigoureuse leçon à la bourgeoisie, sans ménager la noblesse, a été jugée depuis longtemps comme une des meilleures et des plus charmantes qui aient été faites après Molière et Regnard. Cela n'a pas empêché son auteur, le pauvre d'Allainval, de mourir dans la peau d'un indigent".
Louis Petit de Julleville[22] conforte ce jugement : "Les héritiers de Molière ne chôment pas. Et d'abord d'Allainval, dont l’École des Bourgeois (1728) est une des meilleures contrefaçons du Bourgeois Gentilhomme, en petit. S'il n'est pas le premier qui ait mis en scène un marquis à l'affût d'une dot bourgeoise, chez lui le portrait est plus fouillé que d'habitude. En face d'une riche bourgeoise, hypnotisée par les titres et qui gagne sa fille à ses folies, et d'autres comparses amusants, se détache la figure du marquis de Moncade, le plus aimable, le plus badin, le plus fat, le plus spirituel et le plus insolent des marquis, comme aussi le plus dédaigneux des gendres, même des fiancés. Démasqué, joué à son tour à la fin, il s'en va, riant, l'air vainqueur, remerciant ceux qu'il n'a pu duper de l'empêcher de « ternir sa gloire ». Il est bien régence. Le portrait est fait de main de maître. Il faut attendre maintenant jusqu'à Piron et Gresset pour trouver des œuvres dignes d'une étude attentive".
Geoffroy[23], va encore plus loin : "L'Ecole des bourgeois est une pièce fort supérieure à tout ce qu'ont fait Marivaux et Boissy : on y trouve un naturel, une vérité, une force comique, un but moral qu'on cherche en vain dans les productions philosophiques et pédantesques de tous nos petits dramaturges".
L'Embarras des richesses n'a fourni que le prétexte de railler d'Allainval : "car assurément, s'il est un embarras que d'Allainval n'ait jamais connu, c'est celui dont il a tracé le tableau"[9].
"L'abbé d'Allainval nous présente une singulière particularité, un étrange contraste : durant son extrême indigence, ne s'avise-t-il pas d'écrire une pièce sur L'Embarras des richesses? Ce qui prouve, une fois de plus, comme l'a si bien déclaré Beaumarchais après Voltaire qu'il n'est pas nécessaire de tenir les choses pour raisonner, et qu'il est plus aisé d'écrire sur l'argent que d'en avoir"[24].
Il est dommage que les critiques n'aient pas considéré avec plus d'attention l'ensemble des pièces de D'Allainval, car L'Embarras des richesses, Le Tour de carnaval, L'Ecole des bourgeois et Le Mari curieux, forment une quadrilogie assez cohérente sur la société du XVIIIe siècle. Et comment ne pas s'étonner de l'indifférence manifestée à propos de L'Hiver, cette comédie allégorique tellement originale. C'est donc bien l'auteur de la lignée moliéresque que retient l'histoire, et c'est dans cette veine-là, celle de la comédie satirique, que s'inscrivait d'Allainval. Ce fut sa perte, car un théâtre nouveau naissait, "intermédiaire entre la tragédie héroïque et la comédie plaisante"[25], illustré par Nivelle de La Chaussée.
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