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idéologie politique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La démocratie chrétienne est un courant de pensée politique et religieux qui a inspiré des partis politiques[1],[2] qui ont été ou sont importants notamment en Europe de l'Ouest et en Amérique du Sud. Il s'exprime en Europe à partir de la fin du XIXe siècle.
La démocratie chrétienne cherche à promouvoir, au sein d’une société démocratique et pluraliste, les valeurs véhiculées par les Églises chrétiennes : la liberté, le respect de l'être humain, les droits de l'homme, la fraternité, l'aide aux plus démunis.
Sur le plan politique, les démocrates-chrétiens occupent une position variable selon les pays avec un positionnement parfois à droite, parfois au centre ou même à gauche. Tout en acceptant l'économie de marché, ils placent l'humain au centre des préoccupations et considèrent que l'État doit conserver un pouvoir d'intervention dans la société, notamment dans l'économie[3],[4].
Il semble que l'expression « démocratie chrétienne » ait été employée pour la première fois le , devant l'Assemblée législative, par Antoine-Adrien Lamourette, évêque constitutionnel de Rhône-et-Loire. La formule n'a alors guère de sens politique. Elle évoque l'Église des humbles, la fraternité chrétienne.
Ce n'est que plus tard, à partir de 1848, que la formule sera popularisée par Frédéric Ozanam et les rédacteurs de L'Ère nouvelle et prendra son sens actuel, c'est-à-dire celui d'un gouvernement démocratique cherchant à mettre en œuvre la doctrine sociale de l'Église. Frédéric Ozanam et ses amis se veulent proches des idées développées par Lamennais et que l'on désigne généralement par catholicisme libéral. Au XXe siècle l'historien Jean-Baptiste Duroselle a parlé à leur propos d'une « première démocratie chrétienne » qui sera éliminée par la réaction contre-révolutionnaire.
En effet, à cette époque, l'idée d'un gouvernement cherchant à mettre en œuvre, dans un cadre démocratique, la doctrine de l'Église, n'est absolument pas évidente. L'Église catholique reste alors attachée à l'idée d'un pouvoir politique d'origine divine, et rejette donc toute forme de pouvoir politique démocratique. Accepter que des mouvements politiques cherchent, dans un cadre démocratique, à mettre en œuvre la doctrine de l'Église reviendrait à accepter tacitement l'idée de démocratie, et donc à renoncer à cet idéal de légitimation religieuse du pouvoir politique. Jusqu'au début du XXe siècle, l'Église sera partagée entre, d'une part, réaffirmer la légitimation religieuse du pouvoir politique, et de l'autre, admettre que les catholiques puissent participer à la vie de la cité pour y imposer leur doctrine.
Ce débat demeurera très vif tout au long du XIXe siècle, notamment en France, à partir de 1870 : beaucoup de religieux rejettent alors l'idée républicaine et font du rétablissement de la monarchie une question de principe. L’Église apporte son soutien aux classes dirigeantes lors de la restauration et condamne les principes du libéralisme (notamment la liberté de conscience). En Italie également, après l’unification du pays réalisée en 1870 par les chemises rouges, le pape interdit d'abord aux catholiques de participer à la vie politique. Ce non expedit est levé devant la menace de la propagation des idées socialistes dans les milieux ouvriers et populaires[5].
Une « deuxième démocratie chrétienne » voit le jour à la fin du XIXe siècle, à l'initiative du pape Léon XIII. Dans l'encyclique Rerum novarum du , il reconnaît la misère ouvrière, tout en rejetant les mouvements nationalistes et socialistes, et invite les catholiques à investir l'action sociale. Cette encyclique est habituellement considérée comme l'un des fondements de la doctrine sociale de l'Église catholique.
Le , Léon XIII fait publier l'encyclique « Au milieu des sollicitudes », dans laquelle il appelle les catholiques français à se rallier à la République.
Un clivage s'établit alors entre les catholiques :
Ces interventions pontificales sont le signe que beaucoup de catholiques français attendaient. Associations, journaux, mouvements ouvriers voient alors le jour.
Des partis politiques d'inspiration démocrate-chrétienne voient également le jour. Ainsi, une « Union Démocratique Chrétienne » apparaît en Belgique dans le canton de Liège en 1892. En 1894, l'abbé Adolf Daens, représentant le Christene Volkspartij , est élu au parlement belge. En France, un « Parti démocratique chrétien » se crée en 1896, mais disparaît rapidement, victime de la division entre partisans de l'action politique et ceux du combat social. Le , Léon XIII fait paraître l'encyclique Graves de communi re qui, pour la première fois dans un document pontifical, explique le terme de démocratie chrétienne qu'il oppose à celui de social-démocratie. Ce document eut un grand retentissement en Italie et en Allemagne.
À l'approche de la Première Guerre mondiale, la démocratie chrétienne n'existe alors en France qu'à l'état de courant de pensée, ou de groupements dont l'action est limitée, soit dans l'espace (groupements locaux), soit dans le domaine d'intervention (la méfiance à l'égard du politique restant forte).
La dernière tentative de créer, avant-guerre, un mouvement dynamique entraînant les catholiques sur le terrain politique est le Sillon de Marc Sangnier. Ce mouvement connaît alors une belle expansion, avant d'être condamné par le pape Pie X dans une lettre adressée à l'épiscopat français le . Cette condamnation semble marquer un retour en arrière dans la volonté papale de favoriser l'intervention des catholiques dans le champ politique. Elle témoigne surtout de la difficulté à concilier les deux aspirations contradictoires évoquées plus haut. Le Sillon renaîtra quelques années plus tard sous la forme d'une ligue, Jeune République, abandonnant toute référence confessionnelle.
Après la Première Guerre mondiale, le pape Benoît XV multiplie les initiatives pour rapprocher les chrétiens des différents pays divisés par la guerre. En France, Marc Sangnier œuvre notamment à un rapprochement avec l'Allemagne. À cette époque, des partis démocrates-chrétiens voient le jour dans différents pays d'Europe. Le Parti populaire italien est fondé en 1919 par le prêtre Luigi Sturzo. En France, le Parti démocrate populaire est ainsi créé en 1924. Dans un souci de peser plus lourd pour imposer leur idéologie, ces partis se rassemblent dans un Secrétariat international des partis démocratiques d'inspiration chrétienne, créé à Paris en 1925. C'est à cette occasion que se créent des contacts entre des hommes tels que Robert Schuman, Konrad Adenauer ou Alcide De Gasperi. C'est sans doute dans ce combat pour l'unité mené dans les années 1920 que l'idéologie européenne des démocrates-chrétiens trouve son origine.
En France, le mouvement démocrate-chrétien s'exprimera cependant assez peu par le biais du Parti démocrate populaire, qui demeurera un parti de cadre plus qu'un parti de masse, mais davantage par le biais d'autres structures telles que les organes de presse (par exemple L'Ouest-Éclair - qui deviendra Ouest-France après la guerre 39-45), les syndicats de travailleurs (la Confédération française des travailleurs chrétiens) ou les syndicats agricoles (la Jeunesse agricole catholique). La Ligue de la jeune République représente pour sa part l'aile gauche de la mouvance démocrate-chrétienne. Démocrate et en pointe dans le domaine du droit du travail ou du régime coopératif, elle participe au Front populaire[5].
À l'approche de la Seconde Guerre mondiale, les militants démocrates-chrétiens des différents pays européens se retrouveront dans leur refus des totalitarismes menaçants à cette époque.
Après la guerre, la conception démocratique du pouvoir politique n'est plus guère contestée au sein de l'Église catholique. En France, la droite conservatrice et une partie de l'épiscopat sont discrédités par leur collaboration avec le régime de Vichy et l'occupant. On assiste à la création d'un parti d'inspiration démocrate-chrétienne : ce sera le Mouvement républicain populaire. Marc Sangnier est son président d'honneur. Dès 1946, ce parti devient le premier de France. Il connaîtra d'importants succès électoraux tout au long de la IVe République, se présentant paradoxalement, au moins à ses débuts, comme le « parti du général de Gaulle » tout en s'opposant à lui en approuvant la constitution, avant de décliner rapidement après le retour au pouvoir de Charles de Gaulle[5].
En 2002, Christine Boutin fonde le Forum des républicains sociaux qui deviendra par la suite le Parti chrétien-démocrate (PCD). En 2012, Jean-Louis Borloo fonde l'UDI dont l'une des composantes est démocrate chrétienne, progressiste sur les questions de société.
Même si le mouvement démocrate-chrétien est très hétérogène, il s'accorde tout de même sur certains thèmes.
D'une manière générale, sa conception de l'État est différente de celle des libéraux : celui-ci doit être décentralisé, constitué de différents organes, mais reconnaître un pouvoir certain aux corps intermédiaires, expression de la liberté des individus. Cela inclut les institutions religieuses.
Les démocrates-chrétiens voient l'économie comme étant au service des hommes et ne remettent pas en cause le capitalisme.
Jusque dans les années 1960, les démocrates-chrétiens se présentaient comme une alternative à la fois aux libéraux et aux socialistes. L’influence de la guerre froide et la force grandissante du communisme dans plusieurs pays occidentaux les a cependant conduits dans ces régions à se positionner plus à droite sur la scène politique, avec des fortunes diverses selon les configurations nationales.
Mais avec la fin de la guerre froide, ces partis se sont retrouvés en difficulté. Dans certains pays ils ont disparu (comme en Italie) ou ont dû évoluer pour survivre (Allemagne)[7].
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