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monstres marins de la mythologie grecque à l'origine d'un proverbe De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Charybde (en grec ancien Χάρυϐδις / Khárubdis, fém., pron. : [kaʀibd] « karybde ») et Scylla (Σκύλλα / Skúlla, fém.) sont deux monstres marins de la mythologie grecque, situés de part et d'autre d'un détroit traditionnellement identifié comme étant celui de Messine[1].
La légende est à l'origine de l'expression « tomber de Charybde en Scylla », qui signifie « aller de mal en pis »[2].
Charybde était la fille de Poséidon et de Gaïa. Elle était perpétuellement affamée. Lorsqu'elle dévora le bétail d'Héraclès, le fils de Zeus, celui-ci la punit en l'envoyant au fond d'un détroit « formé par un bras de mer qui sépare Rhégion de Messénè »[1].
Non loin de là vivait Scylla. À l'origine, elle était une nymphe dont Glaucos était follement amoureux. Cet amour n'étant pas réciproque, Glaucos alla demander à la magicienne Circé un philtre d'amour, mais celle-ci, éperdument amoureuse de Glaucos et jalouse de Scylla, profita de l'occasion pour changer la nymphe en un monstre terrifiant[3].
Dans l'Odyssée, Circé décrit à Ulysse la route qu'il doit suivre en ces termes : « La route vous mène entre les Deux Écueils. L'un dresse jusqu'au vaste ciel sa cime pointue ; un nuage l'entoure, bleu sombre. Aucun mortel ne pourrait y monter ni s'y tenir, […] car la roche est lisse et semble polie tout autour. Au milieu de cette roche, une sombre caverne donnant au nord-ouest vers l'Érèbe. Droit sur elle vous mettrez le cap de votre creux navire, ô noble Ulysse ! D'une flèche, un homme robuste tirant d'un creux navire ne toucherait pas le fond de cette caverne. Scylla au cri retentissant y habite »[4].
Scylla est présentée comme une créature monstrueuse dont le cri retentissant est un aboiement qui résonne sur les parois de la caverne ; Circé la qualifie de « mal éternel, terrible fléau, réalité sauvage et qu'on ne peut combattre »[5]. Malgré les recommandations de Circé, Ulysse se munit de deux longues piques pour affronter le monstre, mais en vain ; il perd six de ses marins et donne l'ordre de s'écarter au plus vite du rocher. Quant à Charybde, « elle engloutit l'eau noire ; trois fois par jour elle la vomit, trois fois elle l'engloutit »[6]. Ce gouffre est d'une force telle que Poséidon lui-même serait impuissant à sauver celui qui serait pris dans son tourbillon[réf. nécessaire].
Depuis Homère, Charybde et Scylla forment deux termes associés, à la fois opposés et complémentaires. Scylla est une haute roche fixe qui se dresse jusqu'au ciel ; Charybde gît dans les profondeurs de la mer, telle une masse liquide descendant et remontant par mouvements de spirales. Ces deux dangers qui menaçaient les marins ont été dès l'Antiquité identifiés par Thucydide à « la passe redoutable, étant donné son étroitesse et ses courants » que nous appelons aujourd'hui le détroit de Messine. Ce tourbillon et ce récif sont signalés sur nos cartes marines et définis par les Instructions nautiques : « La rencontre de deux courants opposés produit, en divers endroits du détroit, des tourbillons et de grands remous appelés garofali. Les principaux garofali sont sur la côte de Sicile, entre le cap du Faro et la pointe Sottile, avec le jusant, et devant la tour de Palazzo, avec le flot ; ce dernier garofalo est très fort : c'est le Charybde des Anciens »[7].
Suivant les instructions de Circé, Ulysse a doublé les sirènes en qui des navigateurs expérimentés reconnaissent les Galli, et mis le cap sur Scylla : c'est une roche qui apparaît à bâbord, avant la porte étroite donnant accès au sud. Elle aussi est signalée par nos modernes Instructions nautiques : « La ville de Scilla est bâtie en amphithéâtre sur les falaises escarpées d'une pointe saillante au Nord ». Sur ce promontoire élevé et rocheux, les Grecs ont imaginé le monstre Scylla en son antre. À mi-hauteur, se trouve en effet une grotte et la falaise résonne des coups de boutoir que lui assènent les vagues déferlantes[8].
Notons aussi les nombreuses interprétations philosophiques, parfois alchimiques, à la fois païennes et chrétiennes, dont Scylla et Charybde ont été l'objet depuis l'Antiquité, notamment chez Héraclide du Pont, Eustathe et Christophe Contoléon[9].
Au XXe siècle, le philosophe Emmanuel d'Hooghvorst les commente lui aussi en ce sens : « En oniromancie grecque, les dents signifient les os. Dans chacune de ses gueules, ce monstre [Scylla] a trois rangées de dents : c'est la triple série des vertèbres de l'homme, dont deux sont mobiles, et une fixe. « En ces dix-neuf vertèbres mobiles, j'use ma vie en vanité de ce siècle Tel est le péril, tel est le piège des âmes »[10].
Les marins antiques devant emprunter ce passage étaient confrontés à une alternative : passer par Charybde ou passer par Scylla, et donc « choisir entre Charybde et Scylla ».
La formule connue « tomber de Charybde en Scylla » semble avoir été ancrée dans la langue par Jean de La Fontaine avec sa fable La Vieille et les deux Servantes où la mise en place de l'expression tient peut-être davantage de l'harmonie du vers. Il avait été pourtant devancé par Gautier de Châtillon dans son roman latin de l'Alexandréide, avec la mention : « …incidit in Scyllam cupiens vitare Charybdim… » (il tombe sur Scylla en voulant éviter Charybde).
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