Heracleum, la berce, est un genre de plantes à fleurs de la famille des Apiacées regroupant plus de cent-vingt espèces herbacées aromatiques, vivaces ou monocarpiques, naines à hautes de plusieurs mètres. Ce nombre d'espèces en fait l'un plus grands genres de la famille des Apiacées qui est elle-même l'une des plus importantes familles de plantes à fleurs, puisque regroupant plus de 300 genres et 3000 espèces[1]. Les berces sont surtout réparties dans l'hémisphère nord (en Eurasie principalement).
Ce genre botanique (Heracleum) a connu de nombreuses utilisations ethnobotaniques et phytopharmacologiques, augurant d'autres perspectives, dont comme ingrédients industriels et fonctionnels dans les produits alimentaires[2].
La sève de plusieurs espèces de berce contient des furanocoumarines, substances photosensibilisantes provoquant des inflammations de la peau chez les personnes photosensibles. Il est donc recommandé de consommer de petites quantités des parties comestibles de ces berces pour limiter le risque d'allergie, et en ne s'exposant pas au soleil après en avoir mangé[3]. Ce procédé de protection par ingestion graduelle s'apparente à la mithridatisation.
Le nom botanique du genre, Heracleum, est dédié au hérosHercule, par allusion au port robuste de la berce[4]. L'étymologie du terme berce est quant à elle discutée (grammatici certant). Elle pourrait venir de berceau, par analogie de forme entre la graine de la plante et ce lit d'enfant[5].
En Picardie, elle est très souvent appelée " chouelle " (séchée, elle est parfois donnée comme nourriture aux lapins). En patois jurassien, elle est appelée "queuquet" et en gaumais "Fleûr du cône du gaye"[6]. Dans le sud-ouest de la France, la berce est communément appelée "charavie "[7].
Les plantes de ce genre, bisannuelles ou vivaces, ont des feuilles simples et lobées ou pennées (1 à 2), ou trisectées à mordues, poilues ou glabres selon les cas. Elles s'élèvent souvent jusqu'à 2,50 m) voire plus dans le cas de la berce du Caucase.
Les fleurs sont à pétales blancs (vert-pâle chez quelques espèces) et forment de grandes ombelles où les fleurs extérieures présentent des pétales très inégaux. Les sépales sont minuscules. Selon les espèces, les fruits sont épineux ou glabres[8].
La taxonomie du genre est difficile; Jahodová et al estimaient en 2007 que là où de nombreuses espèces coexistent, les botanistes ont encore besoin de matériaux plus nombreux et mieux collectés pour parfaire les authentifications[9].
Suivant l'altitude, la floraison a lieu d'avril à septembre.
Le genre Heracleum compte une soixantaine d'espèces largement répandues dans l'hémisphère nord et les montagnes tropicales, dont huit en Europe de l'Ouest.
On la rencontre dans les bois clairs, les lisières fraiches à humides, les prés rocailleux jusqu'à 1 700 m.
Le genre, surtout présent en Eurasie est notamment représenté dans le sud-est de l'Europe, avec 17 espèces en Turquie[10] et 10 en Iran[10], mais le Caucase en abrite 26 espèces[9], et la Chine 29[9].
la berce de Lecoq (Heracleum lecokii), espèce endémique du Massif central, parfois considérée comme une sous-espèce de la berce de Sibérie (Heracleum sibiricum).
la berce des Pyrénées (Heracleum pyrenaicum), espèce endémique des Pyrénées.
la berce des Alpes (Heracleum alpinum), qui croît en fait dans le Jura.
En Amérique du Nord, on retrouve la berce laineuseHeracleum maximum, d'aspect similaire à la berce commune, mais plus grande.
Les espèces de berces ont (ou ont eu) de nombreux usages[2]:
aromatisation de plats, de yoghourts (par exemple à partir des feuilles et fruits d' Heracleum rawianum localement nommé baldırqan dans la province d'Azerbaïdjan en Iran)[11], boissons (ex: liqueurs en France)[12] et desserts[2];
aliment (crus, en conserve, en soupe ou légume cuit)[2]; par exemple la berce laineuseHeracleum maximum est la sixième plante herbacée traditionnellement la plus couramment consommée par les peuples amérindiens autochtones du Canada[13];
confection de sortes de thés, par exemple à partir des feuilles et/ou des fruits de berce laineuse Heracleum maximum chez les amérindiens canadiens[13], et outre atlantique en Turquie, à partir des feuilles et fruits d'Heracleum platytaenium[14];
En 2016, environ 50 molécules avaient déjà été décrites dans les huiles essentielles de ces espèces, dont plusieurs types bioactifs de coumarines (et il en restait probablement d'autres encore à découvrir)[2].
Plusieurs espèces de berces sont consommées depuis des siècles et dans de nombreux pays, parfois abondamment, sous diverses formes et pour tous leurs organes, sans problèmes apparents de santé publique, mais des analyses ont mis en évidence dans les années 1980-1990 des molécules insecticides et antimicrobiennes, qui permettent à la plante de se défendre[16]. Certaines de ces molécules ont - au delà de certains seuils (parfois bas) - des effets connus néfastes sur la santé (effets manifestes dans le cas de la berce du Caucase[17]; présentés plus bas dans l'article):
Certaines molécules contenues dans H. persicum peuvent affecter le poids et les équilibres hormonaux lors de la grossesse avec un éventuel effet abortif, Jafarzadeh et al. en 2014 invitaient à une consommation prudente de cette plante lors des grossesses[18].
Les études phytochimiques des molécules et métabolites des berces ont cependant concerné moins de 30 espèces d'Heracleum (au milieu des années 2010 et pour 120 espèces répertoriées)[2]. Le cas de la berce du Caucase et l'éventualité d'une toxicité cachée de certaines espèces invitent à prendre quelque précautions (consommation raisonnable et précautions par temps ensoleillé).
Cas particulier de la Berce du Caucase
La berce du Caucase est une bisannuelle atteignant 5 m de haut, aux tiges tachées de rouge et - comme son nom l'indique - originaire d'Asie.
Cette espèces pose un double problème:
appréciée par les amateurs de curiosités botaniques et d'apiculteurs pour sa très grande taille et ses grandes fleurs très mellifères visitées par de nombreux insectes, cette espèce a été introduite dans certains jardins européens, d'où elle s'est naturalisée en Europe dans les prés, les terrains vagues, sur les talus des routes, et le long de bords des ruisseaux pour devenir localement invasive et très difficile à éradiquer;
elle est jugée d'autant plus indésirable que sa sève riche en furanocoumarines (angélicine, psoralène...) présence une forte phototoxicité. Cette sève est incolore et indolore au moment du contact, mais dans les 48h suivant un contact avec la peau y apparaissent des brûlures au 3e degré, douloureuses avec des cloques laissant parfois des cicatrices durables. Les molécules phototoxiques de cette sève, liposolubles, pénètrent aisément la barrière épidermique et des muqueuses[19],[20], causant une inflammation et des dommages à la membrane cellulaire en se liant à l'ARN et l'ADN du noyau cellulaire, conduisant ainsi à une photodermatite nécessitant parfois un traitement chirurgical[20]. L'inhalation de particules de sève de berce du Caucase peut entraîner des symptômes pulmonaires obstructifs, et une projection dans les yeux peut causer une cécité[21]. La manipulation de la berce du Caucase doit se faire avec la plus grande prudence, et des précautions basiques devraient être prises pour manipuler les autres berces (éviter le soleil après contact avec la sève). Les jardiniers et les enfants y sont particulièrement exposés. En cas de contact avec de la sève, l'éliminer aussi rapidement que possible et sans étendre la surface touchée, avec un papier absorbant sans frotter, puis laver au savon, et rincer abondamment à l'eau. Puis éviter d'exposer la zone touchée à la lumière durant plus de 48 h. Si les yeux sont atteints, les rincer abondamment à l'eau claire puis porter des lunettes de soleil pour réduire leur exposition à la lumière. En cas de contact important, chez l'enfant notamment, consulter sans tarder un médecin ou un centre antipoison[22].
En France, trois espèces de Berce sont inscrites sur la liste annexée à l'Arrêté du relatif aux espèces végétales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain[23]:
Ce classement interdit ainsi leur introduction, détention, transport et vente.
Berce autorisée mais régulée
Par un arrêté du 4 septembre 2020, l'État français donne l'obligation aux distributeurs et vendeurs de Berce sphondyle d'informer leurs clients, via un étiquetage spécifique, de sa toxicité en cas de contact cutané[24],[25],[26].
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