Il fut comte mentionné à Lyon et il est souvent considéré comme le premier "comte de Forez". Il est possible qu'il ait bénéficié de ce titre par son mariage avec la comtesse Thiberge de Forez. Ses parents avaient des possessions en Forez mais son père (issu de la lignée des vicomtes de Limoges?) ne parait pas avoir porté le titre de comte.
Artaud était issu de la haute aristocratie, il est certain qu'avant lui des membres de sa famille aient déjà exercé des charges publiques à la période de Hugues le Noir[1] tel le vicomte ArtaudIer mentionné avant 979/984[2]. Pour Hubert Gerner, l'anthroponymique indiquerait une origine familiale commune aux Bermond/Guigue/Guichard et Artaud qui ferait remonter la lignée au préfet Bermond du début du IXesiècle[3].
Ont été signalés comme ascendants potentiels d'Artaud[4],[5]:
Son frère Géraud († vers 938), époux d'Ermengarde et père d'Artaud (futur vicomte et oncle d'ArtaudII?) et Girard (père du comte ArtaudII?), possessionné à Quincié-en-Beaujolais ou Quincieux[8];
En 944, Artaud et Géraud apparaissent dans l'assistance du marquis Hugues le Noir lors d'un plaid à Thoissey, arbitrant le désaccord entre Cluny et le vicomte Adémar[9];
Un "Artaud laïc" souscrit à la charte de fondation de l'abbaye de Ris en 978[10];
Une mention à la terra Artaldi à Saint-Georges-de-Reneins permet de localiser les possessions du groupe familiale des "Artaud" à proximité de celles de la famille du vicomte Guigues.
Un Artaud (son oncle?) est mentionné à deux reprises à Dracé:
Une première fois vers 960, Artaud approuve la donation à Cluny de biens situés à Thoissey[11];
Une seconde fois lors de la tenue d'un plaid où il exerce déjà les fonctions de justice (ap. 974): arbitrant en faveur de l'abbaye de Cluny une rétrocession de biens à Corcelles-en-Beaujolais[12].
Enfin, le vicomte ArtaudIer est enregistré dans l'obituaire de l'église de Lyon le 9 des calendes d'avril pour avoir fait don à l’Église de Lyon de la villa de Lucenay avant 970. Il s'agit probablement de l'oncle du comte Artaud.
Hubert Gerner émit l'hypothèse que le jeune Artaud, fils de Géraud et promis à une certaine Adélaïde, recevant du roi Conrad et de la reine Mathilde des dépendances de l'abbaye de Saint-André-le-Bas de Vienne vers 975/80[13],[14], était celui qui allait devenir le fondateur de la lignée des comtes de Lyon et de Forez[15].
Dans une première charte de donation à Savigny (avant 994) il est dit "comte", "fils de feu Géraud, de noble lignage, et de Gimberge"[16]. Ses parents paraissent avoir été possessionnés à la fois en Forez[17], lorsqu'ils firent don à Savigny de leurs possessions à Rozier-en-Donzy et à Albucennacum[18] (Bussy-Albieux?), et en Lyonnais (Apinost[19]). Ils donnèrent également de l'église de Monthieux à l'abbaye Saint-Pierre de Lyon par l'intermédiaire de leur fille Adaltrude qui y fut nonne, puis vraisemblablement abbesse[20].
Dans les sources, il paraît avoir été possessionné dans l'actuel Beaujolais, au sud de la Dombes, en Forez et en Roannais[21].
C'est probablement lui qui apparaît avec d'autres "milites" dans un acte de BurchardII[22].
Le fait que l'on ignore les détails de son accession au titre de comte et le contexte de violence qui accompagne ses premières mentions conduisirent les historiens du Lyonnais à le considérer comme un usurpateur[23]. Les sources suggèrent plutôt que le titre comtal lui fut octroyé par le roi lors de l'accession de Burchard au trône épiscopal[24].
Il agit en habile diplomate par les donations qu'il fit à l'abbaye de Savigny, à l'église de Saint-Just et à Saint-Irénée[25], s'assurant du soutien des prélats issus des grandes familles féodales de la région afin d'y affirmer sa position[26].
Entre 984 et 993[27], le comte Artaud reconnaît les dommages qu'il a occasionnés aux dépendances de l'abbaye de Savigny[28] lors d'un premier conflit mené "tant pour l'acquisition que de la défense de l'honneur lié à sa fonction" et fait don à l'abbaye de terres situées en Forez et dans l'actuel Beaujolais[29],[30],[31]. La donation est reconnue par le concile d'Anse de 994[32].
Il établit en 993 un impressionnant acte de fondation pour l'église Saint-Irénée de Lyon[33]. Il y fait don des terres de Létra[34] pour la sépulture de son frère Étienne et l'âme de tous ses parents. Il établit dans l'église lyonnaise sa sépulture et celle de sa famille, la nécropole des comtes de Lyon et de Forez (qui fut détruite par les protestants en 1562).
Certains auteurs situent sa mort dans la décennie 990[36],[37]. Il semble que cette date (99?) ait pu correspondre plus vraisemblablement à celle du décès de sa mère Gimberge[38].
En mars 1010, Artaud était peut-être décédé lors de la donation à Cluny faite par sa femme de ses possessions "au chemin" (Grand-chemin, Sevelinges?)[39].
Hugues, abbé (Ugonis abbatis fratis eius) vers 960[49] et 993;
Onfroi (Umfredus), vers 960[49] et en 993, qui donna la chapelle Saint-Ennemond de Cercié à Cluny en 976-77[50];
Étienne (Stephanus) dont Artaud dispose des possessions de Létra dans la fondation de Saint-Irénée en 993[51], mort avant le (peut-être le fils d'un second mariage de Gimberge[52],[53]);
Adescline, abbesse (Adesclinæ abbatissæ) pour Bernard[54]. Pour Fournial, ce fut plus probablement Adaltruda, fille de Girart et de Gimberge[55], nonne à l'abbaye Saint-Pierre de Lyon en 965-968 qui en serait devenue l'abbesse[56];
Enfin, concernant les origines familiales d'Artaud, Fournial signale:
Géraud et Ingelberge faisant don à l'abbaye Saint-Vincent de Mâcon "sous le règne du roi Robert"[58];
un document présentant un grattage suspect, la donation faite par Girart pour le repos de feu Gimberge ("sa......") de 994[59]. Il ne peut s'agir du père d'Artaud qui était mort avant 994 alors que sa mère était encore vivante;
un acte de donation de 980-984 mentionne un Girard et son épouse "Tiverge"[60],[61];
une Gimberge et ses fils Albert et Durand dans une charte de donation mal datée mais qui semble plus tardive[62];
une mention douteuse d'un "comte Géraud" dans une charte datée de 972-975 fortement remanié[63] a probablement contribué à donner naissance à sa généalogie légendaire.
"Certains membres de la lignée exercent des fonctions publiques: le vicomte Artaud par exemple, ou encore cet homonyme - s'agit-il du même personnage? - qui tient un plaid à Dracé au début des années 980, et qui portera bientôt le titre comtal. Avant cela, les Artaud gravitent dans l'orbite de la vassalité des marquis-comtes. Ce n'est pas un hasard si, parmi les fidèles de Hugues le Noir qui assistent lors du plaid de Thoissey, en 944, un Girard et un Artaud figurent côte à côte". P. GANIVET, 2000, p.330.
"Si l'on ajoute la spécificité anthroponymique à cette géographie, il reste fort peu de chance pour qu'Artaud (910/922 - 938), frère d'un Gérard qui est père d'Artaud et de Girard, Artaud vicomte de Lyon au Xesiècle (avant 979/984) et Artaud, fils de Girard et père d'Artaud et de Gérard/Géraud, comte à partir de 984/993, n'appartiennent pas à une même lignée! L'hypothèse de Poupardin semble se muer en quasi-certitude: c'est pour telle que nous la tiendrons." P. GANIVET, 2000, p.329.
"Les premiers comtes locaux en Lyonnais ont tenu au cours du Xesiècle, au moins temporairement, la charge vicomtale, leur prétention au titre comtale pouvant même être ramenée, par le biais des Bermond, au début du IXesiècle, jusqu'au préfet Bermond", H. GERMER, Lyon im Frühmittelalter, p.38 et 135.
In nomine sanctæ et individue Trinitatis. Rodulfus, divina propitiante clementia, pius augustus atque invictissimus rex (...) Confirmamus etiam donationem quam vir bonus, Leutbaldus, de Blanusco fecit, sed et illam de capella Sancti Victoris quę est in Alsgogia, vel de aliis rebus quas Artaldus vel alii ad predictam capellam tradentes Cluniaco delegaverunt. Recueil des chartes de l'abbaye de Cluny, n° 396 Lire en ligne.
Artaud, exécuteur testamentaire de son frère Gérard, donne à l'abbaye de Cluny le manse de Quinciacus situé dans l'agro Canaviacense au lieu-dit Monte Madio (le petit Montmay?), en Lyonnais. Chartes de Cluny, t.I, p. 466, n° 482. Lire en ligne.
Un acte signalé par Fournial mentionne Géraud et Gimberge faisant don de biens situés à Rozier-en-Donzy et Albucennacum(?), Cart. de Savigny, T. I, p.161, no237. Lire en ligne.
"(...) dès avant 954, un certain Artaud lègue à Cluny l'église roannaise de Saint-Haon, villa qui, vers 1100, est le siège d'une "viguerie" (domaine) appartenant aux derniers comtes issus de la lignée des Artaud" note no49 "La donation de cet Artaud n'a pas été conservée, mais elle est mentionnée dans une bulle confirmative du pape AgapetII, de mars 954: aecclesiam sancti Abundi, quad Artaldus moriens ad predictum reliquit cenobium (ZIMMERMAN no130); Saint-Haon (Le-Châtel) (Loire, ch.-l. cant.), viguerie comtale vers 1100: Cartulaire des Francs-Fiefs de Forez, n°I." P. GANIVET, op. cit. p.329.
(...) c’est bien un pas décisif que le fils de Girard et de Gimberge franchit, vers 985, en s’emparant du titre comtal, à l’instar de bien d’autres lignages vicomtaux au cours du Xesiècle. Artaud doit-il sa promotion à la faveur du roi, ou à celle de l’archevêque? Les historiens du Lyonnais considèrent plutôt qu’elle résulte d’une violente usurpation. P. GANIVET, 2000, p.331.
"D'où l'hypothèse suivante: les promotions de Bourchard et d'Artaud sont concomitantes et résultent d'une transaction entre l'entourage royal et une aristocratie locale, d'un compromis que traduit quelque temps plus tard, au tournant des années 980 et 990, la clémence (pénitence légère) voir la bienveillance (élection de sépulture à Saint-Irénée) de l'archevêque envers le comte". P. GANIVET, "Représentation, répartition et évolution des pouvoirs à Lyon autour de l'an Mil", Le Royaume de Bourgogne autour de l'an mil (ouv. coll.) Chambéry, 2008, p.131-151.
"Fev. III IDUS Artaldus, comes, qui dedit Sancto Stephano Flacanges villam ad usus fratrum et cupam argenteam du centorum solidorum. Orb. de l'Église de Lyon. Lire en ligne.
"Bien sûr, sa faute est lourde puisqu’il a commis des dégradations sur des terres monastiques, s’en prenant sans doute aux paysans qui y résidaient et les travaillaient. On imagine d’ailleurs que les dépendants de Savigny ne furent pas les seuls touchés. Mais la seule faute qui appelle réparation est cependant celle qu’il commit envers saint Martin, dont heureusement, il n’avait apparemment attaqué ni les moines, ni le sanctuaire. L’Église lui infligea une sanction à l’image de ses fautes: levius, précise le texte. Il fut quitte pour une aumône et un sincère repentir" P. GANIVET, 2000, p.411-412.
Il donne à l'abbaye l'ensemble de ses possessions de l'ager Cogniacensis (Cogny?) dont la villa de Toriniaco (Turrin près de Villefranche-sur-Saône?), ses possessions à Cassoco ainsi qu'à Miseriaco (Mizérieux) et à la Motte (commune de Feurs) ainsi que celles situées entre la rivière Morgon et Saint-Georges-de-Reneins.
"terras fitas in Lugdunensi comitatu, & in agro Tarnantense, videlicet æcclefiam sancti Martini, quæae vulgo dicitur a Lestrada, Artaldi Comitis Chartae, Lugduniensis historiae, op. cit. p.378.
Samuel Guichenon dans l'Histoire de la Souveraineté de Dombes (1662) (Livre III, p.159-160), fait mention de l'épitaphe (alors disparue) indiquant en "l'année .99." la mort d'"Artaud contes de Lyon et conte de Forez" ainsi que de son frère Umfred, seigneur de Beaujeu et leur mère. Il cite également une autre version issue d'"une ancienne généalogie manuscrite" trouvée dans les archives du chapitre de Saint-Jean à Lyon. L'édition de 1879 présente une troisième version tirée cette fois de "la chronique trouvée à Belleville". Elles mentionnent toutes trois "Artaud comte de Lyon et de Forez". Guichenon doutait de leur authenticité. http://fmg.ac/Projects/MedLands/BURGUNDY%20Kingdom.htm#_ftnref506.
Jean-François Reynaud, François Richard (dir.) et Michel Rubellin, «Les archevêques de Lyon, les abbayes lyonnaises et la Réforme grégorienne», dans L'abbaye d'Ainay: des origines au XIIesiècle, Lyon, Presses universitaires de Lyon, 2008, p.194.
Dans la charte de fondation de Saint-Irénée il est dit "domni Artaldi…comitis…cum…conjuge…Tetbergiæ…domni Ugonis abbatis fratris eius, Adcelinæ abbatissæ…" La Mure (1675/1860), Tome III, Preuves, 6 bis, p.7. En ligne.
Donation de la comtesse Thiberge à l'abbaye d'Ainay "pro remedio... anime senioris mei Arthaldi" que Fournial de la Pâques 1013, Cart. de savigny, t. II, p.663, no147.
"la contesse Thiberge, veuve d'Artaud de Forez (11 février 1000), et sans doute sœur du comte Hubert de Vienne", Christian Lauranson-Rosaz, L'Auvergne et ses marges (Velay, Gévaudan) du VIIIeauXIesiècle. La fin du monde antique? Les Cahiers de la Haute-Loire - Le Puy-en-Velay, 1987, p.255, n°104.
"Une autre hypothèse semble donc plus simple et plus probable: le comte Humbert pourrait bien être le fils de Charles-Constantin, ce qui permettrait de résoudre le vieux problème de la mystérieuse disparition de la descendance de la lignée de Louis l'Aveugle". L. RIPART, Les fondements idéologiques du pouvoir des comtes de la maison de Savoie (de la fin du Xe au début du XIIIesiècle), Thèse, Université de Nice, 1999 (dir. Henri Bresc), p.179. Lire en ligne.
Attesté par la charte de donation à l'abbaye de Savigny faite par le comte Giraud, son fils "Girardus comes (...) patris mei Artaldi et matris meæ Theotbergiæ et fratris mei Artaldi" Cart. de Savigny, p.296. Lire en ligne.
"Hycterius et uxor mea Ginbergia, pro remedio anime filii nostri Stephani". Cart. d'Ainay, p.594, no54, CARTA HYCTERII PRO SEPULTURA FILII SUI STEPHANI. Lire en ligne.
"Adaltruda" (religieuse à Saint-Pierre de Lyon), fille de Girard et de Gimberge, apparaît dans une charte de donation dans l'ager de Monthieux (Église Saint-Pierre de Monthieux?) que Fournial date de 965-968, Lire en ligne.
Fournial indique une Astrudis (Cart. de Savigny, no648Lire en ligne) qui, si elle correspondait à Adaltruda, permettrait de lui attribuer un autre frère Humbert, prévôt, père de Ilio, E. FOURNIAL, op. cit., p.248.
Bruno Galland, «Archevêché et comté de Lyon: Développement et affirmation du pouvoir épiscopal», dans Les Pays de l'entre-deux au Moyen âge: Questions d'histoire des territoires d'Empire entre Meuse, Rhône et Rhin: actes du 113e Congrès national des sociétés savantes, Strasbourg, 1988, Section d'histoire médiévale et de philologie, Paris, CTHS, (ISBN2-735-50197-3, BNF35077405).
Pierre GANIVET, Recherches sur l'évolution des pouvoirs dans les pays lyonnais de l'époque carolingienne aux lendemains de l'an mil, thèse de doctorat (ss. la dir. de Christian Lauranson-Rosaz), 2000, 606 p.
Jean-François Reynaud, François Richard (dir.) et Michel Rubellin, «Les archevêques de Lyon, les abbayes lyonnaises et la Réforme grégorienne», dans L'abbaye d'Ainay: des origines au XIIesiècle, Lyon, Presses universitaires de Lyon, , 302p. (ISBN978-2-729-70806-1, BNF42414418), p.181-201.