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En astronomie, l'équation de Kepler est une formule liant, dans une orbite, l'excentricité e et l'anomalie excentrique E à l'anomalie moyenne M. L'importance de cette équation est qu'elle permet de passer des paramètres dynamiques du mouvement d'un astre (l'anomalie moyenne) aux paramètres géométriques (l'anomalie excentrique). Cette équation a été établie par Kepler dans le cas des orbites elliptiques, en analysant les relevés de position de la planète Mars effectués par Tycho Brahe[1]. Elle fut ensuite généralisée aux autres formes d'orbites (paraboliques, hyperboliques, quasi-paraboliques, rectilinéaires) à l'aide des principes de la mécanique newtonienne.
L'équation de Kepler en tant que telle est celle établie par Kepler pour les orbites elliptiques. Elle peut cependant être déclinée en plusieurs formes pour couvrir tous les cas d'orbites.
L'équation de Kepler en orbite elliptique est :
avec l'anomalie moyenne M définie par :
avec n le moyen mouvement :
t le temps et t0 étant l'instant du passage au périastre. T est la période orbitale.
Le moyen mouvement peut être aussi exprimé par :
où
L'équation de Kepler, associée au lien entre l'anomalie excentrique E et l'anomalie vraie v
permet de déterminer la position au cours du temps d'un astre sur son orbite.
En cas d'orbite hyperbolique (e > 1), on peut démontrer analytiquement une relation équivalente à l'équation de Kepler :
où sinh désigne le sinus hyperbolique.
M est défini de la même manière que dans le cas elliptique, avec l'expression du moyen mouvement suivant :
L'argument H n'est plus un angle comme c'est le cas de E dans le mouvement elliptique. H est dans ce cas liée à l'anomalie vraie v par :
L'équation de Kepler n'est pas définie dans le cadre du mouvement parabolique (e = 1). Elle est remplacée par l'équation de Barker[2].
avec
Cette équation cubique peut être résolue de manière analytique par la méthode de Cardan.
Par un changement de variable, les équations de Kepler elliptiques, paraboliques et hyperboliques peuvent être regroupées en une seule équation "universelle"[3],[4]. Une des expressions possible est :
avec le périastre q = a(1-e), et α = 1/a. α est positif pour les orbites elliptiques, nul pour les orbites paraboliques et négatif pour celles hyperboliques. La nouvelle variable x est définie par :
et la fonction c3(t) est une des fonctions de Stumpff, qui s'écrit dans le cas général :
La détermination de x d'après l'équation universelle permet de déterminer la position du corps sur son orbite (X,Y) par :
Les fonctions c1(t) et c2(t) étant définies de la même manière que c3(t) plus haut.
Les orbites rectilinéaires sont des cas limites des autres orbites, en faisant tendre la distance au périastre q vers zéro tout en conservant le demi grand axe a constant : l'orbite tend alors vers un segment ou une demi-droite. Pour le cas des orbites elliptiques et hyperboliques, cela suppose de faire tendre l'excentricité e vers 1, car demi grand axe a, excentricité e et périastre q sont liés par q = a(1–e). Il existe donc trois types d'orbites rectilinéaires : elliptiques, paraboliques et hyperboliques. En pratique, une partie seulement de ces orbites est décrite par l'astre, aboutissant soit à une collision, soit à une évasion. Certaines comètes kamikazes détectées par les observatoires solaires spatiaux (SoHO, SDO…) ou bien des tronçons d'orbites de sondes interplanétaires sont proches des orbites rectilinéaires.
Pour l'orbite rectilinéaire elliptique, l'équation de Kepler devient :
avec l'anomalie moyenne M définie par :
L'anomalie vraie n'ayant plus de signification pour une orbite rectilinéaire, la position de l'astre est définie par sa distance le séparant de l'astre principal r:
Pour l'orbite rectilinéaire hyperbolique, l'équation de Kepler devient :
et la position de l'astre :
a étant négatif pour les orbites hyperboliques
Enfin, pour l'orbite rectilinéaire parabolique :
avec
et la position de l'astre :
L'équation de Kepler
permet de calculer de manière directe la date (liée à M) correspondant à une position donnée (liée à E), par exemple déterminer la date des équinoxes. Par contre le problème inverse, déterminer la position d'une planète pour une date donnée, nécessite la détermination de E, connaissant M et e. Ce problème ne peut pas être résolu de manière simple.
Résoudre l'équation de Kepler, c'est trouver E(e,M) :
C'est Lagrange[5],[6] qui trouve l'expression, bien que le nom Jn(x) soit associé au nom de Bessel.
où Jn(x) est la fonction de Bessel de 1re espèce d'ordre n.
C'est encore Lagrange qui trouve la solution, que Laplace complétera en donnant le rayon de convergence. Ces travaux inspireront Cauchy[7], qui fondera la théorie des séries analytiques pour résoudre ce problème épineux ; celui-ci verra son aboutissement avec les travaux de Puiseux[8].
L'application du théorème d'inversion de série de Lagrange fournit :
avec
Le rayon de convergence minimum de la série, qui dépend de M, est atteint pour M = π/2, et vaut e0 = 0,6627434193 tel qu'indiqué par Laplace (1823) et démontré par Cauchy et Puiseux :
Ceci rend cette formule inapplicable pour déterminer la position des comètes, dont l'excentricité est souvent voisine de 1.
Les premiers termes sont :
Note : il est possible d'obtenir ce développement en série en remplaçant dans la série de Fourier précédente les fonctions de Bessel par leur développement limité :
On obtient alors le développement limité beaucoup plus simplement que par la méthode de l'inversion de série :
Il est à noter que bien que la série de Fourier converge pour 0 < e < 1, et que les développements des fonctions de Bessel aient un rayon de convergence infini, le résultat après réorganisation des termes ne converge que pour e < 0,662...
Le premier à se confronter au problème est Horrocks, puis surtout Halley[9], pour les calculs sur sa comète d'excentricité e = 0,9673.
Plusieurs solutions ont été proposées en modifiant légèrement l'équation de Barker (e = 1). La solution proposée par Bessel (1805) couvre le domaine e > 0,997. Gauss[10] s'illustra en donnant une belle solution pour 0,2 < e < 0,95.
Une généralisation de l'équation de Barker est un développement en série convergeant d'autant plus rapidement que l'excentricité e est proche de 1, ce qui s'avère bien adapté aux cas des comètes (cette série s'applique aussi aux orbites légèrement hyperboliques) :
qui a pour rayon de convergence :
avec S = tan(v/2)
v étant l'anomalie vraie, k la constante gravitationnelle de Gauss, e et q étant respectivement l'excentricité et le périastre de l'orbite, t le temps et t0 étant l'instant du passage au périastre.
Lorsque e = 1, la série se réduit à l'équation de Barker.
L'équation de Kepler peut être résolue à l'aide d'un algorithme de recherche d'un zéro d'une fonction. Les méthodes du type encadrement, méthode de dichotomie, méthode de la fausse position nécessitent un encadrement de départ dans lequel la racine est présente. Du fait de la périodicité et la parité de l'équation de Kepler, il est toujours possible de ramener l'intervalle de départ à [0 , π]. Ceci fournit un encadrement de départ pour ces méthodes, mais il est aisé d'en trouver de plus fins.
Les méthodes du type point fixe nécessitent une estimation de départ de la racine, le germe de la méthode E0, pour lancer les calculs : il en existe de multiples dans la littérature, dont la plus simple est E0 = M.
La méthode de type point fixe la plus simple, celle utilisée par Kepler, est :
converge lentement lorsque e est proche de 1. Il est alors avantageux de lui adjoindre un algorithme d'accélération de la convergence : le Delta-2 de Aitken, par exemple, ou la variante de Steffensen.
L'équation de Kepler se prête particulièrement bien aux algorithmes nécessitant le calcul des dérivées successives élevées, du fait du faible coût en calcul machine nécessaire. En effet :
Les dérivées suivantes se déduisant cycliquement des précédentes. Les variantes de la méthode de Newton et de Halley d'ordres plus élevés sont donc très performantes dans ce cas. Il est à noter que ces méthodes peuvent dans certains cas avoir des difficultés à converger (e proche de 1 et M proche de 0). Il est préférable dans ces zones soit de proposer une valeur de départ moins grossière (germe de Mikkola (Seppo Mikkola) ou de Markley), soit de brider les méthodes itératives pour les forcer à converger (modification de Hamming de la méthode de Newton), ou d'utiliser des méthodes itératives à convergence moins locale (méthode de Laguerre).
Lors de son dernier passage en 1986, la comète de Halley a eu la visite de la sonde Giotto. Les données nécessaires pour déterminer la position de la comète lors de cette rencontre sont[11]:
L'anomalie moyenne vaut M =n (t – t0) = 0,0073673887 rad
L'équation de Kepler à résoudre est :
En partant de E0 = M et en utilisant la méthode de Newton,
on trouve successivement :
… (les valeurs suivantes étant identiques) On en déduit l'angle de position de la comète sur son orbite (l'anomalie vraie) v = 1,2771772327 rad = 73,176865125°
La distance de la comète au soleil se calcule par r = a(1 – e cos(E)) = 0,902374257 UA (légèrement inférieure à la distance terre-soleil)
La vitesse de la comète vaut soit 43,780 8 km/s
Les itérations ne se passent pas toujours aussi bien pour les comètes, comme l'expose le graphique ci contre. Pour des excentricités au-delà de 0.97, la convergence est incertaine avec comme point de départ des itérations E0 = M. D'autres points de départ plus précis permettent d'éviter cet écueil.
Dans le cas des comètes, la résolution de la généralisation quasi-parabolique de l'équation de Barker pose deux problèmes :
en remarquant que la dérivée s'exprime simplement :
les dérivées suivantes s'en déduisent facilement.
On pourra choisir comme valeur initiale de l'itération S0, la solution de l'équation cubique obtenue en retenant les premiers termes (différant légèrement de l'équation de Barker), à l'aide de la méthode de Cardan
Les calculs via les intégrateurs symplectiques exigent de rester toujours en butée du nombre de décimales, dans le moindre coût de calcul. Elle dépend beaucoup du doublet (M,e), M compris entre 0 et π et de e, surtout quand ce dernier paramètre est voisin de 1.
Nijenhuis (1991) adopte la méthode de Mikkola (1987) qui est la méthode de Newton d'ordre 4, en choisissant « adéquatement » le germe E0 en fonction du doublet (M,e).
Il est clair que dans les calculs numériques, le volume de calculs est essentiel, autant que le nombre de décimales, vu l'instabilité du système solaire évaluée à un coefficient de Liapunov de 10(t/5 Myr). On se heurte à une muraille exponentielle : difficile d'aller plus loin que 25 Myr, même avec un traitement 128 bits.
Ce sont ces calculs (astronomiques... mais informatisés) qui tournent sur les machines de l'IMCCE-Paris. Le calcul de l'ensoleillement terrestre à la latitude 65° Nord, I(65,t) est calculé et on essaie d'en déduire la corrélation avec le climat passé : l'échelle géologique jusqu'au néogène (25 M ans) en est déduite (échelle géologique Gradstein 2004). Prochaine étape prévue : les 65 M ans.
Avant Kepler, l'équation était déjà étudiée pour d'autres motifs :
c'est le problème de la réduction des coordonnées locales aux coordonnées géocentriques : il faut réduire la correction de parallaxe. Habash al Hasib s'y est déjà attaqué.
Avant 1700, il y a déjà beaucoup de tentatives : Kepler naturellement, Curtz (1626), Niele, Boulliau (1645, 1657), Seth Ward (1653), Paganus (1657), Horrebow (1717), Cassini (1669), Newton (1665?), Wren (1658), Wallis (1659), Jeremiah Horrocks (1638)...
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