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abbé, historien et écrivain français (1713-1796) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'abbé Guillaume-Thomas Raynal, né à Lapanouse en Aveyron le et mort à Chaillot le , est un historien, écrivain, penseur et prêtre français.
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Après des études chez les jésuites à Rodez, Raynal entre lui-même dans la Compagnie de Jésus puis devient prêtre en 1733. Professeur au collège de Pézenas, à Clermont puis à Toulouse, il quitte les jésuites en 1746 pour être nommé à l’église Saint-Sulpice à Paris où, il est également précepteur dans de grandes familles ce qui lui procure des relations dans le milieu parlementaire.
Il vendit des sermons à des confrères moins inspirés que lui, et déclencha un scandale lorsqu’on découvre qu’il avait accepté d’inhumer des protestants en les faisant passer pour catholiques. L’abbé Raynal fut d’ailleurs fort lié tout au long de sa vie aux protestants par ses attaches familiales dans le milieu du négoce.
Il s'éloigna de Saint-Sulpice et abandonna le sacerdoce, commence à fréquenter les salons de Mme de Tencin puis de Mme Geoffrin. Il s'y fit connaître comme apôtre de la liberté. Il se constitua une petite fortune en imprimant lui-même ses œuvres dont il assura lui-même la diffusion. Il rédigea également des ouvrages de commande pour les grands de l’époque comme, par exemple le duc de Choiseul, ce qui lui valut d’être nommé, pour services rendus, directeur du Mercure de France en 1750. La même année, il devint membre de l'Académie royale des sciences et des lettres de Berlin.
Il commença à publier ses premiers textes dans les Nouvelles littéraires, (1747-1755) qui servirent d’introduction à la revue Correspondance littéraire, philosophique et critique[1], réalisée avec Grimm et Diderot. Suivirent des ouvrages de politique et d’histoire publiés sur commande du gouvernement comme l’Histoire du Stadhoudérat (1747) et l’Histoire du Parlement d’Angleterre (1748).
Il publia plusieurs ouvrages historiques ou philosophiques.
En 1770, fut publiée la première édition anonyme de son Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes, véritable encyclopédie de l’anticolonialisme au XVIIIe siècle. Il s’agit d’un de ces « voyages philosophiques » à la mode à l’époque, abondamment documenté mais prétexte à réflexions sur la « loi naturelle » et dénonciations mordantes du despotisme, du cléricalisme, de l'esclavage des Noirs, ainsi que du colonialisme. L'ouvrage qui est une « machine de guerre » contre le pouvoir en place est aussi un outil de propagande en faveur de la Révolution outre-Atlantique et de la jeune république américaine. Pour la rédaction de cette encyclopédie qui décrit le monde il a recours à la collaboration d'une foule d'informateurs et autres écrivains tels que d'Holbach ou Diderot à qui on attribue une part importante des textes.
Interdite en 1772, l’Histoire des deux Indes fut à nouveau publiée par l’abbé Raynal dans une nouvelle édition en 1774 qui est immédiatement mise à l’Index par le clergé. C’est en 1780 qu’il publia sa troisième édition de l'Histoire des deux Indes, encore plus virulente que les deux précédentes et qu’il avoua implicitement comme étant de lui en y faisant graver son portrait en frontispice (cf. supra). Condamné par le Parlement de Paris, l’ouvrage fut brûlé par le bourreau en place publique, ce qui lui assura un succès considérable.
L’Histoire des deux Indes a également été l’occasion de la Lettre apologétique de l’abbé Raynal à Monsieur Grimm (1781) de Diderot. Dans cette lettre Diderot écrivait :
« Raynal est un historien comme il n'y en a point encore eu, et tant mieux pour lui, et tant pis pour l'histoire. Si l'histoire avait, dès les premiers temps, saisi et traîné par les cheveux les tyrans civils et les tyrans religieux, je ne crois pas qu'il en fussent devenus meilleurs; mais ils en auraient été plus détestés, et leurs malheureux sujets en seraient peut-être devenus moins patients... Le livre que j'aime et que les rois et leurs courtisans détestent, c'est le livre qui fait naître des Brutus... »
La gravure de son portrait en tête de la troisième édition de l’Histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes[2] signe son ouvrage. Il s’agit d'une attaque contre le colonialisme. Contraint à l'exil à la suite de la condamnation de son livre par le Parlement de Paris, en , il se réfugia en Suisse où il fit ériger un monument à la gloire de la liberté (1783–1796) en hommage à Guillaume Tell[3]. De là, il passa à la cour de Frédéric II de Prusse puis à celle de Catherine II de Russie sans cesser de veiller à la réédition de son ouvrage.
Autorisé à revenir en France en 1784, mais interdit de séjour à Paris, il s’installa à Toulon, puis à Marseille et devint fondateur de nombreux prix académiques et de bienfaisance qui prolongèrent le succès de son œuvre dans les grandes académies européennes. Il refusa de siéger aux États généraux de 1789 en invoquant son grand âge.
Seul philosophe survivant de la Révolution française, il dénonça les excès de ses disciples qui voyaient en lui un père fondateur. Dans sa Lettre à l’Assemblée nationale adressée le il écrivait : « …j’ai parlé aux rois de leurs devoirs, souffrez qu’aujourd’hui je parle au peuple de ses erreurs ».
Même sous la Terreur, son prestige et sa popularité furent tels que les révolutionnaires ne voulurent pas lui faire subir le même sort qu'à une partie des Brissotins en ; ils préférèrent le dénigrer en l’accusant de sénilité. Pressenti pour siéger comme membre de l’Institut de France en 1795, quelques mois avant sa mort, il prétexta de son grand âge pour refuser cette promotion.
Il mourut dans l'indifférence générale à Chaillot au no 1 de la rue des Batailles le , près de l'actuelle place d'Iéna.
Dans ses écrits, Raynal se fait ardent défenseur du droit de propriété, « droit sacré et imprescriptible », face à ceux qui entendent le réguler. « Il faut qu’un particulier puisse laisser sa terre en friche, si cela lui convient, sans que l’administration s’en mêle. » Sans doute, il existe des hommes « qui, possesseurs d’une abondance qui suffirait à deux ou trois mille familles, ne sont occupés que d’en accroître la misère. Je n’en bénirai pas moins la force publique qui garantit le plus ordinairement ma personne et mes propriétés ». Partisan des thèses des physiocrates, il est convaincu que le laissez-faire est la meilleure voie pour le développement de la société, y compris au bénéfice des moins fortunés[4].
« C’est un bonheur pour une nation que le commerce, les arts et les sciences y fleurissent... Les arts multiplient les moyens de fortune et concourent, par une plus grande distribution des richesses, à une meilleure répartition de la propriété ».
Pourtant, Raynal pouvait par ailleurs critiquer durement les maux causés par les inégalités, et faire l'éloge de l'esprit communautaire des Incas, des Chinois, ou encore de la mission jésuite du Paraguay. Selon A. Lichtenberger, Raynal fut, avec Diderot, « le plus bel exemple du socialisme sentimental de l’époque »[5].
Il ne fut jamais député, mais bénéficia dans tout le monde révolutionnaire de son image d'anti-esclavagiste fervent, particulièrement après le décret du 16 pluviôse an II. Son neveu, Simon Camboulas, conventionnel régicide, contribua le 15 pluviôse an II à l'ouverture des débats du lendemain sur l'abolition de l'esclavage. Un tableau de Girodet représentant Jean-Baptiste Belley, l'un des deux premiers députés de couleur de Saint-Domingue à la Convention et dans les assemblées directoriales, le montre accoudé au buste de l'abbé Raynal.
En 1996, la Société d'Étude Guillaume-Thomas Raynal organise les manifestations de son bicentenaire (décès), placées sous le patronage de l'UNESCO[6]
En 2006, la Bibliothèque nationale de France accueille le colloque international « Raynal et ses réseaux », dont les actes sont publiés aux éditions Champion en 2011.
En 2008, le musée de la Révolution française organise une exposition temporaire sur l'abbé Raynal.
En 2013, la Société d'Étude Guillaume-Thomas Raynal organise les manifestations de son tricentenaire (naissance), placées sous le patronage de l'UNESCO et de l'Institut de France[7].
Le , la ville de Paris inaugure sur un tronçon de l'allée centrale de l'avenue du Président-Wilson l'« allée de l'Abbé-Guillaume-Thomas-Raynal » (16e arrondissement de Paris)[8]. Elle se trouve à la hauteur de l'ancien domicile de Raynal, 1 rue des Batailles[9] (détruite lors du percement de l'avenue d'Iéna[10]).
(11039) Raynal, astéroïde.
Dans un chapitre de son roman Ingénue (1853), Alexandre Dumas le cite dans les adhérents du Club Social (sic pour « Cercle Social »), très engagé dans le combat pour l'abolition de l'esclavage des Noirs.
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