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On dit d'un gène qu'il est soumis à l'empreinte parentale lorsque, chez les organismes diploïdes, la copie héritée de la mère et la copie héritée du père ne sont pas exprimées de la même manière. En règle générale, l'une des deux copies du gène est totalement éteinte alors que l'autre est active [1].
Les gènes soumis à l'empreinte parentale sont essentiellement impliqués dans le développement[2]. On connaît des gènes soumis à l'empreinte chez les mammifères, les insectes et les plantes à fleurs[3].
D'un point de vue moléculaire, l'empreinte parentale est due à l'apposition de marques épigénétiques dans les cellules germinales des parents. Ces marques peuvent par exemple conduire à la répression d'un gène. L'empreinte parentale est due à une différence entre les marques épigénétiques sur la copie d'un gène héritée de la mère et la copie d'un gène héritée du père.
Durant les années 1980, des chercheurs montrent qu'un embryon de souris issu artificiellement de la fusion de deux jeux de chromosomes haploïdes issus d'un mâle avorte systématiquement, tandis que les embryons issus de la fusion de deux génomes haploïdes d'une femelle donnent naissance à des jeunes normalement proportionnés mais bien plus petits que la normale[4]. Ceci suggère que les génomes maternel et paternel ne jouent pas le même rôle au cours du développement. C'est ainsi que naît l'idée d'empreinte. Les auteurs proposent déjà, sans idée du mécanisme qui en serait à l'origine, que l'empreinte ait lieu au cours de la gamétogenèse chez les parents. Il apparaît alors que l'empreinte parentale est indispensable au développement normal d'un embryon. C'est quelques années plus tard, au début des années 1990, que les premiers gènes soumis à empreinte parentale sont découverts chez la souris. Il s'agit d'IGF2[5], un facteur de croissance. Les auteurs montrent que les effets d'une mutation sur ce gène sont asymétriques. Un embryon héritant l'allèle sain de la mère et l'allèle muté du père aura un déficit de croissance tandis qu'un embryon héritant de l'allèle muté de la mère et de l'allèle sain du père se développera normalement. Ceci suggère donc que seul l'allèle du gène IGF2 hérité du père est exprimé au cours du développement chez la souris. La découverte d'autres gènes soumis à empreinte chez la souris a très rapidement suivi [6],[7]. Aujourd'hui on connaît 151 gènes soumis à l'empreinte parentale chez la souris [8], environ 100 chez l'Homme [9] et une douzaine chez les angiospermes[3].
L'empreinte parentale est due à des marques épigénétiques[11], c'est-à-dire des modifications chimiques de l'ADN qui n'affectent pas la séquence codante. Ces modifications sont cependant héritables et peuvent altérer le niveau d'expression de l'information génétique. Parmi ces modifications on trouve la méthylation de l'ADN, la modification des histones (méthylation ou acétylation) et le positionnement des nucléosomes. Les principales marques épigénétiques impliquées dans l'empreinte génétique chez la souris semblent être des méthylations au niveau des îlots CpG (lorsque des nucléotides cytosine et guanine sont adjacents dans la séquence codante)[11], c'est-à-dire l'ajout d'un groupement méthyle (CH3) au niveau d'une cytosine. Les enzymes impliquées dans la méthylation, la déméthylation et la maintenance des méthylations et donc dans le phénomène d'empreinte ont aujourd'hui été identifiées et font partie de la famille des DNA-méthyltransférases (DNMT)[11].
Chez les organismes à reproduction sexuelle on peut généralement distinguer les cellules germinales, cellules participant à la reproduction sexuelle, et les cellules somatiques, toutes les autres cellules d'un individu. Les mécanismes d'empreinte diffèrent généralement entre ces deux tissus. La figure ci-contre présente le cycle de l'empreinte parentale.
L'empreinte parentale apparaît très vite comme un mystère évolutif. En effet, en éteignant une copie d'un gène, les mutations délétères sur la copie exprimée sont plus exposées et peuvent entrainer d'importants coûts de fitness. L'empreinte parentale revient donc à renoncer aux avantages de la diploïdie pour certains gènes[12]. Avant même la découverte du premier gène soumis à empreinte parentale, le premier article s'intéressant à l'histoire évolutive de l'empreinte parentale est publié[13]. Cet article s'intéresse à l'évolution de l'empreinte parentale chez les plantes à fleurs mais la théorie développée peut tout aussi bien s'appliquer aux mammifères. Les auteurs proposent en effet qu'un conflit entre les parents pourrait être à l'origine de l'évolution de l'empreinte parentale. Ils partent de l'hypothèse que la quantité de ressources est limitée, or chez les plantes, comme chez les mammifères, la mère fournit les ressources au fœtus au cours du développement. Ainsi l'intérêt de la mère va être de donner assez de ressource à son descendant pour permettre sa survie et son développement tout en gardant des ressources pour de futurs descendants. Le père en revanche, en particulier dans une population polygyne, n'est pas assuré d'être le père des futurs descendants de la mère. Afin d'augmenter son succès reproductif, il est donc dans son intérêt que son descendant soit le plus résistant possible et donc prenne le plus de ressources possible de la mère. Dans ce contexte ils prédisent que, pour un gène déterminant la quantité de ressources prises hérité du père, la copie héritée de la mère soit complètement réprimée et celle héritée du père complètement exprimée.
On distingue aujourd'hui trois théories majeures pour expliquer l'évolution de l'empreinte parentale[14]:
Ces trois théories font des prédictions très précises sur les types de gènes qui pourraient être soumis à l'empreinte ainsi que leur patron d'expression, mais les données expérimentales disponibles à ce jour ne sont pas encore assez précises pour pouvoir trancher entre les différentes hypothèses. Dans tous les cas, ces trois théories ne sont pas exclusives et il est fort probable que plusieurs puissent être appliquées simultanément. Certains auteurs[17] font une distinction entre la théorie forte qui permet d'expliquer l'apparition de l'empreinte ainsi que son maintien et son développement et la théorie faible qui ne permet d'expliquer que son développement. Ainsi selon le principe de parcimonie, il est fort probable qu'une seule théorie soit forte et explique l'apparition de l'empreinte parentale, mais une fois le phénomène apparu, différentes théories peuvent surement expliquer son développement à différents loci.
L'empreinte génétique a été décrite pour la première fois chez le diptère Sciara, où l'extinction génique (ou absence d'expression) de la copie paternelle est impliquée dans le déterminisme du sexe[18].
Le bon fonctionnement du gène nécessite à la fois le gène maternel et le gène paternel. La plupart des gènes soumis à empreinte sont localisés sur les chromosomes 6, 7, 11, 14 et 15. La connaissance des gènes soumis à empreinte permet de comprendre certaines maladies génétiques et permet un conseil génétique pertinent. Ainsi, la disparition de la version du gène ou locus d'un des parents par délétion ou disomie uniparentale avec présence de deux copies de même origine est responsable de :
Chez les plantes à fleurs, une dizaine de gènes sous empreinte ont été identifiés chez Arabidopsis thaliana et Zea mays[19].
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