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La conquête de la Sibérie est le processus de colonisation, par des populations majoritairement d'origine russe européenne, et encouragé par le gouvernement du tsarat de Russie puis de l'Empire russe, entre le XVIe et le XXe siècle, sur d'immenses territoires jusque-là habités par des peuples sibériens.
De la fondation de la grande-principauté de Moscou en 1328 à sa disparition en 1547 pour former le tsarat de Russie, Moscou conquiert d'abord les principautés slaves voisines, en établissant d'abord une protection à l'Ouest. À partir du règne d'Ivan IV le Terrible, les attentions se dirigent désormais vers l'Est, où aucun pays européen ne peut se dresser face au nouvellement formé tsarat de Russie, proclamé par Ivan IV. Ce dernier reste d'abord en Europe, soumettant tour à tour le khanat de Kazan avec la prise de Kazan en 1552, le territoire des Maris en 1585 avec l'achèvement de la troisième guerre des Maris. En parallèle, Ivan IV pousse vers le sud, en annexant le khanat d'Astrakhan en 1556. La Russie se résume alors à la Russie européenne, confinée entre le Caucase au sud, la mer Blanche au nord et la chaîne de l'Oural à l'est.
Quelles que soient les origines des populations et des langues proto-slaves, c'est seulement aux Ve et VIe siècles, à l'époque des grandes migrations qu'apparaissent, sur les territoires actuels de la Russie, de la Biélorussie, et de l'Ukraine, les Slaves orientaux, parlant des langues slaves orientales, et quel que soit le sort des populations antérieures non-slaves (chassées, asservies, assimilées).
La Rus' de Kiev (882-1240), la plus ancienne entité politique commune à l'histoire des trois États slaves orientaux modernes (Biélorussie, Russie et Ukraine), christianisée (christianisme orthodoxe) entre 900 et 1000, prospère en partie grâce à l'optimum climatique médiéval, puis se désagrège en une multitude de principautés avant de disparaître formellement du fait de l’invasion mongole de la Rus' de Kiev (1223-1240). Les principautés slaves de l'Est issues de cet éclatement parlent le slave oriental commun, dit vieux russe, celui de la Chronique des temps passés, compilée vers 1111-1118, et qui évoque aussi Varègues, Tchoudes, Mériens, et autres peuples finno-ougriens.
Dès avant l'arrivée des civilisations turco-mongoles, la Rus' de Kiev accorde progressivement certaine autonomie aux boyards de la principauté de Polotsk (987–1504), de la principauté de Smolensk (1054–1404), de la principauté de Riazan (1097-1521), de la république de Novgorod (1136–1478), ou de la principauté de Vladimir-Souzdal (1168–1389), pour la partie Nord-Est.
Parmi les principautés slaves médiévales, la république de Novgorod est une des plus performantes dans la colonisation slave du nord-est de la Russie (500-1400), en compagnie des peuples baltes (ou germano-baltes), caréliens, puis varègues, avec le développement de routes commerciales (seigle, lin, houblon, poissons, bétail, fourrures, minerais) par voies d’eau (Volga, Neva, Don), et à l'international avec la Hanse grâce à l'accès à la mer Baltique.
En Russie européenne, l'accès à la mer Blanche est réalisé par les Pomors (d’ascendance norvégienne, éventuellement viking), qui continuent l'exploration viking (qui s'accompagnait de tribut en peaux de bêtes) : Dvina septentrionale, Biarmie, Arkhangelsk. Plus tard, dès le XIe siècle, les Pomors découvrent et maintiennent la route maritime entre Arkhangelsk et la Sibérie. Grâce à leurs navires, les koches, les Pomors pénètrent les régions de l'Oural du Nord et de la Sibérie, où ils fondent le poste de Mangazeïa (1600-1601, incendié en 1662, interdit en 1672), à l'est de la péninsule de Yamal, le plus extrême de leurs établissements marchands (postes d’échange ou de traite). Ces comptoirs permettent d'explorer les voies navigables de Sibérie (en). Cette route commerciale (fourrures et ivoire (défenses de morses)) est interdite en 1619 (pour non-paiement de taxes, et risque d’intrusions commerciales étrangères non contrôlables), pour l'océan arctique. Par les fleuves, les Pomors commercent avec la Transbaïkalie et la Chine.
Dès 1223-1240, le monde slave oriental devient dans son ensemble une puissance secondaire, vassale, soumise à tribut, de l'empire mongol (1206-1243/1294), puis de la Horde d'or (1243-1502), dirigée par des descendants de Djötchi (1182-1227), fils aîné de Gengis Khan. La principauté de Vladimir-Souzdal (1168-1389, Suzdalia, Vladimir / Suzdalian Rus), qui fonde vers 1200 Gleden et Veliki Oustioug, éclate en plusieurs principautés dont la plus importante, la Principauté de Moscou (1263-1328), qui devient la grande-principauté de Moscou (1328-1547). Alexandre Nevski (1220-1263), prince de Novgorod, est le dernier prince russe à recevoir l’investiture du khan Batu de la Horde d'or pour la principauté de Kiev en 1249, et premier prince des Riourikides à ordonner à ses peuples de se soumettre à la Horde d'or, inaugurant trois siècles de domination de la Horde d’or sur la Moscovie, avec paiement d’un tribut et de taxes commerciales.
À l'Ouest et au Sud-Ouest, le grand-duché de Lituanie (~1236–1253, 1263–1569), en pleine expansion, se fait pressant, motivant la campagne lituanienne d'Alexandre Nevski (1245), puis les guerres lituano-moscovites (1487-1537). Au Nord-Ouest, les pressions scandinaves, surtout suédoises, puis baltes et finnoises, suscitent des conflits durables : guerres novgorodo-suédoises (997-1411), campagnes danoises contre Novgorod (en) (1241), guerres finno-novgorodiennes (en) (~1042-~1240), guerre de Livonie (1558-1583).
À l'Est et au Sud-Est, se mettent en place des khanats post-mongols, héritiers du khanat couman-kiptchak (~850-1240) : khanat de Kazan (1438-1552), khanat d'Astrakhan (1466-1556), khanat de Sibir (Sibérie occidentale), khanat de Crimée (1441-1783).
Vassili II (1415-1462), grand-prince de Moscou, pris dans la guerre de Succession moscovite (1425-1463), est fait prisonnier à la bataille de Souzdal (1445), et libéré seulement contre une énorme rançon. Novgorod devient, sous Ivan III (1462-1505), vassal de la Grande-principauté de Moscou (1328-1547), qui annexe définitivement la république de Novgorod en 1478, et le grand-duché de Tver en 1485. Dès 1480, la dépendance de la Moscovie à la Horde d’or prend fin.
La Moscovie cherche à développer l’accès maritime (Dvina, Arkhangelsk) à la Mer Blanche, à l’Océan Arctique, à la route maritime du Nord (passage du Nord-Est). Ainsi, la Compagnie de Moscovie (1555-1917), britannique, obtient d’Ivan le Terrible, faute de débouché maritime sur la mer Baltique, le monopole du commerce Angleterre-Moscovie jusqu’en 1698, par le port d’Arkhangelsk.
Le khanat de Kazan (1438-1552), dirigé par Yadiger Mohammed, prince tatar, dernier khan de Kazan (quelques mois en 1552), est pris en 1552, et annexé par Ivan IV, Ivan le Terrible (1530-1584). Le khanat d'Astrakhan (1466-1556), sur le cours inférieur et le delta de la Volga, est réduit à son tour. Les Cosaques du Don sont, à partir de ces succès, reconnus comme "cosaquerie", troupe militaire officielle : musée des cosaques du Don (1886).
Le cas du khanat de Crimée (1441-1783) est plus compliqué, jusqu'à la défaite russe dans la guerre de Crimée (1853-1856).
Le khanat de Sibir (1405/1428-1598, Sibérie), actuel oblast de Tioumen (capitale administrative : Tioumen), dans la région économique de Sibérie occidentale, est un État turcique musulman, héritier de la Horde d'or, multiethnique (Tatars de Sibérie (en), Khantys, Mansis, Nénètses, Selkoupes), situé à l'Est des montagnes moyennes de l'Oural. La capitale est Qashliq, forteresse tatare ; une autre ville est Chimgi-Tura (en) (Tumen, Tioumen). Une partie du bassin de l'Irtych (affluent de l’Ob) dépend du khanat de Sibir.
La famille Stroganoff est à la tête du plus puissant empire commercial de la Russie d'alors, bâti sur le commerce du sel (de saunerie) et des fourrures. Un ancêtre Stroganoff aurait versé la rançon de 200 000 roubles destinée au rachat du grand-duc de Moscou Vassili II retenu prisonnier par les Tatars (1445). Le 4 avril 1558, Anika et Grigori Stroganovo obtiennent d'Ivan le Terrible, Ivan IV (1530-1584), d'importantes concessions de terres sur la Kama et à l'ouest de l'Oural, avec pour mission d'y installer des colons, d'y aménager des établissements, et de lever une armée privée pour les protéger des incursions des Tatars de Sibérie, ou Turco-Tatars : région de Perm, vallée de la Kama. Diverses manufactures des Stroganoff sont attaquées et détruites par le khan Koutchoum (?-1600).
L’ataman cosaque Ermak Timofeïévitch (1532/1542-1585), profitant des dissensions internes au khanat, en quelques années, le démantèle, et repousse la frontière de la Russie de l'Oural à l'Irtych, avec sa troupe de Cosaques (entre 540 et 900 guerriers, Slaves de la steppe pontique à l'origine) : conquête du Khanat de Sibir, bataille du Cap Tchouvache (en) (1582).
Tobolsk est fondée en 1585-1586 par les Cosaques, première capitale historique de la Sibérie russe : cathédrale Sainte-Sophie de Tobolsk (1683-1686), kremlin de Tobolsk (1699-1712/1717), Gouvernement de Tobolsk (1799-1919), Oblast de Tioumen.
Parmi les ostrogs : Obdorsk (1595, actuelle Salekhard, Iamalie), Sourgout (1594, Khantys-Mansis).
La troupe d'Ermak Timofeïévitch est reconnue comme Cosaques de Sibérie (1582-1917), troisième plus ancienne armée cosaque, désormais fer de lance de l'expansion russe en Sibérie : langue, église orthodoxe, commerce, colonie.
Ce qui va devenir la route de Sibérie réinvestit les voies empruntées en sens inverse par la plupart des migrations turco-mongoles. La Vladimirka est son premier tronçon médiéval (190 km) de Moscou à Vladimir et Nijni Novgorod (foire de Nijni Novgorod).
Un ostrog est un fort cosaque, en bois, servant de caserne, de relais de l'administration, d'entrepôt d'État, de lieu d'étape, de poste frontalier. Il remplace généralement un premier campement d'hiver.
Chaque fortification est supposée comprendre à terme un comptoir commercial (intermédiaire entre producteurs-vendeurs et clientèle), et motiver la constitution d'une agglomération, susceptible de devenir une ville.
Le iassak est un impôt légal, ou tribut, d'origine turco-mongole (mais également viking sous un autre nom), essentiellement en fourrures animales. Son établissement impérial, dès la Conquête par les Cosaques jusqu'aux princes, administrateurs, gouverneurs et autres relais locaux, est le levier qui permet à l'État russe de prendre pied dans les territoires à l'Est de l'Oural : principalement la Sibérie et l'Extrême-Orient russe, mais aussi le Nord de l'Asie centrale. Le paiement est versé selon une table de valeurs selon les pelisses ou fourrures déposées par les tributaires auprès des collecteurs. Le travail de collecte du tribut auprès des populations (villages, campements) est du ressort des troupes militaires, ici cosaques.
La russification contribue à la construction d'un Empire russe, empire colonial.
En 1619, sur demande de Michel Ier (tsar de Russie), les deux bassins sont investis par un détachement cosaque venu de Tobolsk, mené par Piotr Albytchev, fils d'un boyard, et par le streltsy Tcherkas Streltsy Roukine : fondation de l'ostrog d’Ienisseïsk, qui devient rapidement une ville (monastère d'Iveron de Ienisseïsk (1623), monastère de la Transfiguration du Sauveur de Ienisseïsk (1642) , cathédrale de l'Épiphanie de Ienisseïsk (1647)), puis un centre commercial et administratif majeur, jouant un rôle important dans la colonisation russe de la Sibérie orientale. Au XVIIe siècle, ce sont ses cosaques qui fondent Krasnoïarsk (1628), Bratsk (1631), Irkoutsk (1651) et Nertchinsk (1658).
En 1619, la route commerciale maritime par l'Océan Arctique devient plus réglementée, interdite aux transports non autorisés, à peu près limitée au monopole de la Compagnie de Moscovie. Sur le front occidental, en 1617, le traité de Stolbovo met fin à la guerre d'Ingrie (1610-1617) : la Russie cède Ingrie, comté de Kexholm (Carélie), Chlisselbourg mais aussi l’accès à la Baltique, la Suède cède Novgorod, Staraïa Ladoga , Gdov, en plus de la reconnaissance de Michel Ier comme tsar de la Russie (après le temps des troubles en Russie et les revendications suédoises au trône de Russie). En 1618, le traité de Déoulino termine la guerre polono-russe (1605-1618) : la Russie cède Smolensk et Tchernihiv, l’Union de Pologne-Lituanie maintient ses revendications au trône de Russie (Sigismond Vasa).
Piotr Beketov (1600-1661), chef cosaque, explorateur (forteresses/impôts/minerais/fourrures/ivoire), mène une expédition auprès des Bouriates (et autres minorités) du bassin de la Léna.
Parmi les ostrogs : Tomsk (1604), Touroukhansk (1607, Novaïa-Mangazeïa, Krasnoïarsk), Tara (1594), Kouznetsk (1618), Verkhotomski (1655), Sosnovski (1657), Moungatski (1715), Omsk (1716).
Parmi les ostrogs : Iakoutsk (1632, Iakoutie), Tchita (1653, Transbaïkalie) et Nertchinsk (1654, Transbaïkalie), Nijné-Kamtchatsk (Kamtchatka).
La mer d'Okhotsk est atteinte par Ivan Moskvitine et ses Cosaques en 1638. Okhotsk est le premier établissement russe sur l’Océan Pacifique, pour un hivernage dès 1647, avec Vassili Poïarkov (?-1668).
En 1609, les Cosaques conquièrent le territoire de la Transbaïkalie, nominalement sous l'autorité du dernier khagan (Grand Khan) mongol, Ligden Khan (1588/1588-1634), ce qui déstabilise durablement l'ensemble Mongolie-Mandchourie-Chine. Les résistances s'atténuent dès la construction du fort de Kansk (1628), jusqu'au traité de Nertchinsk (1689).
L'armée cosaque de Transbaïkalie, ou Cosaques de Transbaïkalie, est créée en même temps que l'oblast de Transbaïkalie (1851-1917/1920, 1917-1922), qui devient gouvernorat, gouvernement de Transbaïkalie (1922).
Le conflit frontalier sino-russe (1652-1689) s'achève avec le traité de Nertchinsk (1689) : la Russie abandonne l'accès à la mer du Japon et à la forteresse d’Albazino, la Chine accepte d’établir des relations commerciales sino-russes. Cette conférence marque également les débuts du thé en Russie et donc du samovar, grâce au monde mongol.
Le Grand Jeu géostratégique se poursuit avec ses traités inégaux imposés à la Chine, à la Corée, au Japon, et à divers autres pays, par diverses puissances occidentales (technologiques, maritimes, militaires, impérialistes) :
Pour une meilleure entente, se développe le pidgin russo-chinois de Kyakhta (en).
En 1850, est créé Nikolaïevsk-sur-l'Amour. En 1858, est fondé le poste de Khabarovsk, au confluent Amour-Oussouri. En 1859, est fondé un poste naval russe à Vladivostok, alors modeste village de pêcheurs mandchous. La convention de Pékin (1860) signifie annexion de la rive gauche de l'Amour (Tianjin, 1858-1860), Kraï de l'Oussouri, et ouverture du port de Tianjin à la flotte russe.
En 1638-1640, Ivan Moskvitine explore ou reconnaît la mer d'Okhotsk, le fleuve Amour, le fleuve Okhota, le golfe de Sakhaline, les îles Chantar. D'après son travail, est dessinée la première carte russe de l'Extrême-Orient en mars 1642.
En 1641, Mikhaïl Stadoukhine (?-1666), en quête de fourrures de zibelines, dirige une expédition cosaque des fleuves Indiguirka, Kolyma, Penjina, Anadyr. En 1651, il explore le Nord de la mer d'Orkhotsk, et marque de l'intérêt pour la fourrure des loutres de mer.
Simon Dejnev (1605-1673), explorateur précurseur, premier Européen à traverser le détroit de Béring, après naufrage, passe son premier quartier d'hiver à Anadyrsk (1649-1764), premier quartier d’hiver après naufrage, sur l’Anadyr (Tchoukotka), puis Ostrog, actuelle Anadyr, près de Markovo (en), un temps Ultima Thulé du monde russe.
Vladimir Atlassov (1661-1711), cosaque sibérien, dirige une première expédition d’exploration (1697-1699) du Kamtchatka, avec environ 125 Cosaques de Sibérie et Youkaguirs de la Kolyma.
En 1697, la Russie annexe le Kamtchatka.
Après une première expédition du Kamtchatka (1725-1731), menée par Vitus Béring, la deuxième expédition du Kamtchatka (1733-1743, Grande Expédition du Nord), forte de près de 3 000 participants, dirigée par Vitus Béring (1681-1741) et Alekseï Tchirikov (1703-1748), permet l'exploration d'une partie du Pacifique Nord, et l'installation dès 1741 de quelques comptoirs russes aux îles Aléoutiennes, cartographiées en 1778 lors du troisième voyage de Cook (1776-1780).
L'île est habitée, au nord par des Nivkhes (Jiliemi, Gilyak) tributaires un temps de l'empire mandchou), au centre par des Oroks (Uilta) et au sud par des Aïnous (Utaris, Aïnous de Russie (en)) . De 1264 à 1308, les invasions mongoles de l'île de Sakhaline favorisent les Nivkhes au détriment des Aïnous. Les Japonais sont présents dès 1635 dans la seule partie Sud, Kita-Ezo.
En 1638-1640, Ivan Moskvitine explore le golfe de Sakhaline, suivi en 1643-1645 par Maarten Gerritszoon de Vries (1589-1647), bien avant Jean-François de La Pérouse (1787), Johann Adam von Krusenstern (1805) ou Guennadi Nevelskoï (1813-1876).
Le traité de Shimoda (1855), russo-japonais, définit la frontière des deux zones d'influence, et autorise l'accès des ports de Nagasaki, Shimoda et Hakodate à la flotte russe.
Par le traité de Saint-Pétersbourg de 1875 (1875), russo-japonais, le Japon renonce à sa moitié de l'île de Sakhaline en échange des îles Kouriles, alors possession russe.
Les Îles Aléoutiennes, reconnues dès 1741 intéressent d'abord la traite de fourrures. La plus importante installation russe serait Unalaska (1759). Les Aléoutiennes sont ce qui reste émergé de la Béringie, le pont terrestre préhistorique qui a permis les migrations humaines vers l'Amérique.
La colonisation russe de l'Amérique est d’abord le fait de la Compagnie russe d'Amérique (1799-1881) (oukase de 1799 (en)). Elle s’occupe de traite de fourrures (traite des fourrures en Sibérie, dont la zibeline), puis surtout de la traite de la fourrure maritime (loutre de mer) promychlenniki par des promychlenniki (trappeurs-chasseurs).
Un établissement permanent est créé en 1804 à Novo-Arkhangelsk (actuelle Sitka en Alaska) et un commerce prospère de fourrure est organisé, mais dès les années 1820, la rentabilité commerciale décline.
L'Amérique russe (1741-1867), ce sont des explorations, des contacts, des conflits, des traités, des contrats avec les dirigeants des peuples locaux, des fortifications, des colonies, des transports, sur près d'un siècle.
Parmi les forts : fort Nikolaevskaia, fort Stikine (1834-1843), redoute de Saint-Michel-Archange (en) ou fort de Sitka (1799-1802). Le fort Ross (1812), en Californie du Nord, est la forteresse la plus au Sud des forts et fortins russes sur la côte Ouest de l’Amérique du Nord, assurant une sécurité aux colonies de peuplement : Kasilof, Kodiak, Baie des Trois-Saints (1784), Sitka (1787-1802, puis Novo-Arkhangelsk (1804)), Nouvelle-Russie d’Alaska (en), St. Michael (1833), Russian Mission (1837).
L'archipel d'Hawaï est également approché : fort russe Élizabeth (Hawaï) (en) (1815) fort russe Alexandre (Hawaii) (en) (1816-1817), fort Barclay-de-Tolly (Hawaï (1817).
Cela suppose certaine russification des autochtones d'Alaska (liste de tribus d'Alaska) principalement Aléoutes, mais aussi Tlingits, Yupiks : travail forcé, exil forcé, maladies, évangélisation, révoltes.
La population connue, aurait été, au mieux, de 10 000 personnes, un bon millier de Russes (et assimilables, Ukrainiens, Tatars, Finois, Yakoutes…), un millier de créoles Russo-Aléoutes, et un nombre non précisé d’autochtones (Aléoutes, Tlingits, Haïdas, Iñupiat, Yupiit, Athabasques…). À l'intérieur du continent nord-américain, les colons russes auraient interféré avec les trappeurs, coureurs des bois, voyageurs nord-américains.
Le traité de Saint-Pétersbourg de 1824, russo-américain, est ratifié en février 1825, et accompagné du traité de Saint-Pétersbourg de 1825 (en), russo-britannique.
En 1867, après l'épuisement des populations de loutres de mer, et la défaite russe dans la guerre de Crimée (1853-1856), la Russie décide de vendre le territoire, non pas au Royaume-Uni, mais aux États-Unis, tout juste sortis de la guerre de Sécession (1861-1865) : achat de l'Alaska.
L'évolution des transports en Russie est de grande importance également en Sibérie.
La liste des explorateurs russes (en) ne cerne pas seulement les explorateurs de la Sibérie ou de l'Arctique, mais elle rend bien compte de la richesse de la recherche scientifique russe, géographique, cartographique, topographique, pédologique, ethnographique, pour l'étude de la flore, de la faune, des minerais : scientifiques de l'Empire russe.
De nombreuses régions sibériennes, particulièrement en Extrême-Orient, sont très peu développées. Bien que représentant 17 % du territoire, l'Extrême-Orient russe ne concentre que 6 % de la population du pays. Chaque année, elle perd en moyenne 17 000 habitants avec l'exode rural, mais le président russe Vladimir Poutine souhaite transformer la région en un El dorado, en ayant dit que pour lui, développer l'Extrême-Orient, c'est sa priorité pour le XXIe siècle. Il a mis en place la loi sur l'hectare extrême-oriental pour encourager les gens à venir s'y installer, et investit dans les infrastructures[1].
L'évolution territoriale de la Russie, d'abord de l'empire russe, ensuite de l'empire soviétique, relève d'un nationalisme expansionniste, le nationalisme russe, l'impérialisme russe. Par certains aspects, il relève d'une stratégie de défense de la Russie centrale autour de la grande-principauté de Moscou (plateau central de Russie) contre les attaques extérieures périphériques (suédoises, baltes, lituaniennes, polonaises, turco-mongoles), et, par la suite, de colonialisme interne avec russification des populations non-russes ou non-slaves.
La conquête militaire (de la Sibérie comme de tout autre territoire) est liée à des technologies, économie, politique, voire géopolitique, de prédation de chasseur-cueilleur (gibier, poissons, fourrure), au sens d'exploitation maximale des ressources, d'abord animales, puis des populations locales (ou importées) à soumettre pour développer l'extractivisme à destination des industries et économies centrales, comme dans toute forme connue de colonisation.
La plupart des populations qui en ont les moyens cherchent à échapper à la soumission, par la fuite ou la résistance. Certaines finissent par accepter, par intérêt d'abord de survie de leur groupe humain. Vers 1600, les populations autochtones de l'ensemble sibérien seraient (selon des estimations) au nombre de 217 000 individus, au mieux de 300 000. Vers 1700, le nombre de Russes présents en Sibérie dépasse ce nombre.
La conquête relève de suprémacisme, ici de slavophilisme (façon L'Épopée slave), de panslavisme, d'eurasisme : certain antioccidentalisme comme tentative de réponse à une occidentalisation réputée contrainte.
La russification peut être considérée comme une longue tentative d'assimiler (par la force ou la persuasion) des peuples non russes (d'abord linguistiquement), dans un grand empire. La question serait de disposer des données suffisantes pour parler de génocide culturel et/ou de linguicide, dû à la russification et/ou au communisme (tel que vécus en Grande Russie), avec sédentarisation et collectivisation.
Les années 1920-1930 connaissent une phase d'indigénisation (korenizatsia), conformément à la déclaration des droits des peuples de Russie (en) (1917, « l'égalité et la souveraineté des peuples de Russie »), avec latinisation en Union soviétique, afin de lutter contre le chauvinisme grand-russe. Dès 1930-1932, le mouvement s'inverse : russification, soviétisation, cyrillisation en Union soviétique (en), athéisme d'État, collectivisation, déportation des peuples en URSS... La dékoulakisation (1930-1933) est également à l'origine d'importants transferts de populations (déportation).
Parmi les populations impactées par la russification, les Kalmouks (déportation des Kalmouks (en)) et les Komis (histoire des Komis).
La dérussification d'après 1990 (mais déjà dans les années 1900-1920), dans plusieurs républiques désormais indépendantes de la Russie (ou de la CEI) s'accompagne de russophobie, voire d'antislavisme, mais aussi d'anticommunisme, au moins dans les pays baltes. Les divers musées de l'occupation soviétique (Tbilissi, Kiev, Riga, Tallinn, Vilnius, etc.) confirment ou approfondissent le Livre noir du communisme (1997).
Chaque installation de garnison militaire impose l'organisation d'un système fiable de ravitaillement, donc de bonnes relations avec les populations locales ou l'implantation de fermes de colons russes ou assimilés.
L'abolition du servage de 1861, puis les réformes agraires (1906-1911) de Piotr Stolypine (1862-1911), dont l'abolition du mir, permettent de favoriser l'émigration de paysans vers les zones conquises et sous-peuplées d'Asie centrale et de Sibérie méridionale.
Les populations russes (ou assimilables, en tant que slaves orientaux) qui ont vécu en Sibérie, de manière voulue ou contrainte (colonies spéciales en Union soviétique (en)), ont développé une mentalité de "Russes de Sibérie", par opposition au centralisme de Moscou (tsariste au départ), un peu comme des pionniers de la possibilité d'un nouveau monde russe d'Asie.
Les Cosaques mériteraient une histoire plus complète, comme fondateurs ou formateurs de la Sibérie moderne : décosaquisation.
Une histoire plus complète des peuples turciques honorerait la turcologie, en dehors des travaux en langues turciques ou au moins en turc.
Enfin, serait bienvenue toute une histoire (et une archéologie) de la Sibérie comme lieu d'exil, relégation et déportation (bagne, travaux forcés, goulag).
La Russie des origines était multi-ethnique : colonisation slave du nord-est de la Russie, langues balto-slaves, langues baltes, langues finno-ougriennes, peuples finno-ougriens. Il en va de même pour la communauté des États indépendants (1991, CEI), qui remplace en partie l'URSS.
La Russie contemporaine est encore un pays multiethnique : liste de groupes ethniques en Russie (en), liste des peuples autochtones mineurs de Russie (en), groupes ethniques en Russie (en), peuples indigènes de Sibérie, populations de Sibérie et de l'Extrême-Orient russe.
Ce ne sont pas forcément les mêmes ethnies, ou au moins transformées : petits peuples du Nord de la Russie, liste des peuples autochtones disparus de Russie (en), liste des langues menacées en Russie (en).
Bien avant la conquête russe, la coexistence des groupes humains (peuples, ethnies) s'est faite au moins autant dans la confrontation (pour l'exclusivité des territoires de chasse-pêche-cueillette) que dans la collaboration (partage, échange).
La conquête russe-cosaque de la Sibérie est une suite de conflits de populations, ce qui entraîne également des massacres de masse, la diffusion d'alcools, et la propagation de maladies, dont la variole, à propagation rapide, défigurante pour les survivants. Autant de motifs de démoralisation de populations infériorisées.
Le génocide culturel a pu être une tentation et/ou une conséquence. L'assimilation culturelle en est une autre, tout aussi peu effective.
La Société russe de géographie (1845-) a su encourager les explorateurs russes de la Sibérie, dont Nikolaï Prjevalski (1839-1888), Piotr Kouzmitch Kozlov (1863-1935), Vladimir Arseniev (1872-1930), Alexandre von Staël-Holstein (1877-1937).
L'orientalisme est une tendance forte en littérature, peinture[52] et musique (Groupe des Cinq) russes : orientalisme russe (en).
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