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réalisateur israélien De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Amos Gitaï est un artiste et réalisateur né le à Haïfa en Israël. Ses films ont été présentés dans plusieurs rétrospectives notamment au Centre Pompidou à Paris, au Museum of Modern Art (MoMA) de New York, au Lincoln Center de New York et au British Film Institute de Londres. À ce jour, Amos Gitai a créé plus de 90 œuvres pour le cinéma, le théâtre, ainsi que des installations et des livres d’artiste.
Naissance |
Haïfa, Israël |
---|---|
Nationalité | Israélienne |
Profession | Réalisateur |
Films notables |
Kadosh Kippour Kedma Free Zone Ana Arabia (voir filmographie) |
Site internet | https://www.amosgitai.net/ |
Onze de ses films ont été sélectionnés en compétition au Festival du film de Cannes pour la Palme d'Or ainsi qu'au Festival international du film de Venise pour le Lion d'or. Il a travaillé avec Natalie Portman, Hana Laszlo, Yael Abecassis, Rosamund Pike, Jeanne Moreau, Juliette Binoche, Samuel Fuller, Hanna Schygulla, Annie Lennox, Barbara Hendricks, Léa Seydoux, Valeria Bruni Tedeschi, Mathieu Amalric, Pippo Delbono, Irène Jacob, Natalie Dessay, Henri Alekan, Renato Berta, Nurith Aviv, Éric Gautier, et bien d’autres. Depuis 2000, il collabore avec la scénariste française Marie-José Sanselme.
Il a reçu plusieurs prix prestigieux, tels que le prix Roberto Rossellini (2005), le Léopard d'honneur au Festival international du film de Locarno (2008), le prix Robert Bresson (2013), le prix Paradjanov (2014), le prix Lucchino Visconti (2021). Il est officier des Arts et des Lettres et chevalier de la Légion d’honneur (2017). En 2018, Amos Gitai a été élu professeur à la chaire de création artistique du Collège de France, avec une série de 9 cours sur le cinéma, suivis d’un colloque.
Son film Shikun (2024) avec Irène Jacob, Bahira Ablassi, est en sélection officielle au Festival International de Berlin.
Fils de Munio Weinraub Gitaï[1] un architecte formé au Bauhaus, et d’Efratia Weinraub Gitai (Munschik), une intellectuelle et enseignante, Amos Gitai commence des études d'architecture au Technion de Haïfa, mais doit les interrompre pour participer à la guerre du Kippour (1973) au sein d'une unité d'évacuation sanitaire par hélicoptère. Il y est blessé, alors que l’hélicoptère dans lequel il se trouve est frappé par un missile syrien. Au cours de ses missions, il se met à utiliser une caméra Super 8 pour filmer la guerre.
Après 1973, désormais architecte diplômé du Technion, il soutient un doctorat d’architecture à l’Université de Berkeley, aux États-Unis. À son retour en Israël, il réalise son premier documentaire en 1980, House, pour la télévision israélienne, qui censure le film[pourquoi ?]. À nouveau censuré pour son documentaire Journal de campagne (1982), Gitaï s’installe à Paris où il va rester près de dix ans et tourner ses premiers films de fiction.
De retour en Israël après l’élection d’Yitzhak Rabin comme Premier ministre (1992), il développe dès lors une œuvre abondante, marquée par de nombreux films, fictions et documentaires, mais aussi des expositions, des pièces de théâtre, des ouvrages et des conférences.
Le parcours d'Amos Gitaï éclaire son œuvre. Héritier, par son histoire familiale, des idées socialistes des pionniers sionistes du début du XXe siècle[2], il appartient à la première génération des enfants nés après la fondation de l’État d’Israël confrontés à la montée en puissance du nationalisme palestinien. Dans le même temps, il fait partie de la génération formée par les grands mouvements de la jeunesse contestataire des années 1960 : « Étudiant sur ce haut lieu de la contre-culture que fut le campus de Berkeley en Californie à la fin des années 1970, adolescent engagé et critique contre la politique de son pays, jeune soldat envoyé en opération lors de la guerre de 1973, Amos Gitaï a vécu personnellement ces expériences décisives. Il faut y ajouter aussi sa formation et sa vocation première d’architecte, dont les traces ne cessent de se retrouver dans ses films. » (Jean-Michel Frodon)[3]
Les thèmes de la trace, de la mémoire, de l'appartenance, de l'identité, de l'exil et des migrations des communautés humaines irriguent l'œuvre d'Amos Gitai. Dans des films, des expositions, des conférences et des représentations théâtrales, le cinéaste, architecte de formation, utilise ces diverses formes artistiques comme des invitations à ressentir et à réfléchir. Il s’agit pour lui d’affirmer, par un geste citoyen et artistique, le rôle de l’art et de l’artiste pour évoquer des destins humains pris dans la tourmente de l'histoire et le besoin de mémoire pour façonner un monde meilleur[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée].
Pour le cinéma, l’œuvre du cinéaste Amos Gitaï compte aujourd’hui près de 90 titres, réalisés sur plus de 40 ans. Ces films sont de formats et de natures très variés : longs et courts métrages, fictions et documentaires, travaux expérimentaux, réalisations pour la télévision, tournés en Israël ou partout dans le monde. Mais à cette diversité répond une extrême cohérence[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée]..
Au fil des années, des voyages, des combats, des exils, des rencontres, ces œuvres ne cessent de se répondre, de se faire écho[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée]..
Encore étudiant en architecture au Technion, Amos Gitaï réalise une série de courts métrages sans son, avec la caméra Super8 que lui a offert sa mère Efratia pour son anniversaire. Il y filme des visages, des textures, comme une série d’exercices de style. C’est avec cette même caméra qu’il filme depuis son hélicoptère pendant la guerre du Kippour. Tenir une caméra devient pour lui, dès lors, une façon de se protéger du chaos et d’en rendre compte[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée].. Il réalise ensuite des courts métrages pour la télévision israélienne, jusqu’à l’épisode de la censure de son film House (1980). Par la suite et tout au long de sa carrière, Amos Gitai réalise régulièrement des courts métrages, souvent conçus comme des plans séquence[4].
Son premier film House (1980) est un documentaire consacré à la reconstruction d'une maison de Jérusalem-Ouest qui avait appartenu à des Palestiniens avant 1948. Amos Gitai y rencontre ses occupants successif et au fur et à mesure, ces fragments de biographies dessinent une mosaïque plus large, celle d’un territoire et du conflit israélo-palestinien.
« Gitaï veut que cette maison devienne à la fois quelque chose de très symbolique et de très concret, qu’elle devienne un personnage de cinéma. Il arrive l’une des plus belles choses qu’une caméra puisse enregistrer en direct : des gens qui regardent la même chose et qui voient des choses différentes. Et que cette vision émeut. Dans la maison à moitié éboulée, des hallucinations vraies prennent corps. L’idée du film est simple et le film a la force de cette idée. Ni plus ni moins. »
House est un tournant dans l’histoire de Gitaï. Le film est aussitôt interdit en Israël. C’est pour faire exister ce film malgré la censure qu’il dit à ce sujet : « J’ai décidé de devenir cinéaste ». Cette relation sera bientôt envenimée par la controverse suscitée par son film Journal de campagne, réalisé avant et pendant l’invasion du Liban en 1982, et se traduisant par un long exil en France (1983-1993).
Avec House, le cinéaste inaugure un schéma qui lui deviendra habituel, celui de la conception de trilogies qui poursuivent et reformulent les mêmes recherches et interrogations. Ainsi, il retourne pendant 25 ans sur le site de la Maison en y tournant trois films: House (1980), Une maison à Jérusalem (1998) et News from Home, News from House (2006). Suivront régulièrement d’autres trilogies, documentaires et de fiction, comme les trois Wadi (1981, 1991, 2001), ou celle sur les procédures du capitalisme mondial (Ananas, 1984 ; Bangkok-Bahreïn/Travail à vendre, 1984 ; Orange, 1998), ou encore celle sur les résurgences de l’extrême-droite européenne (Dans la vallée de la Wupper, 1993 ; Au nom du Duce/Naples-Rome, 1994 ; Queen Mary ‘87, 1995). Parmi les trilogies de fiction figurent notamment la trilogie de l’exil (Esther, 1985 ; Berlin-Jérusalem, 1989 ; Golem, l’esprit de l’exil, 1991), la trilogie des villes (Devarim, 1995 ; Yom Yom, 1998 ; Kadosh, 1999), la trilogie des événements historiques décisifs pour Israël (Kippour, 2000 ; Eden, 2001 ; Kedma, 2002), mais aussi la trilogie des frontières (Terre promise, 2004 ; Free Zone, 2005 ; Désengagement, 2007.
Plus récemment, il a tourné la trilogie du confinement, avec Un tramway à Jérusalem (2019,) Laila in Haifa (2020) et Shikun (2024)[5]. Inspiré de Rhinocéros, la pièce d’Eugène Ionesco, Shikun raconte l’émergence de l’intolérance et de la pensée totalitaire à travers une série d’épisodes qui se déroulent en Israël dans un seul bâtiment, le Shikun. Dans ce groupe hybride de personnes d’origines et de langues différentes, certains se transforment en rhinocéros, mais d’autres résistent. Une métaphore ironique de la vie dans nos sociétés contemporaines, avec Irène Jacob et Bahira Ablassi.
Ces ensembles peuvent prendre aussi d’autres formes, comme le diptyque consacré à ses parents : Carmel (2009), une réflexion intime sur la guerre à partir de la correspondance de sa mère Efratia (Gallimard, 2010) et Lullaby to my Father (2012), qui retrace le parcours de son père Munio Gitai Weinraub depuis son enfance en Silésie, ses études au Bauhaus au moment de la conquête du pouvoir par les nazis.
L’œuvre d'Amos Gitaï s’appuie aussi sur des réalisations plus brèves, esquisses et carnets de notes filmés. De manière générale, ce parcours traduit à la fois l’importance du sens de la construction, des structures dramatiques, thématiques et formelles, et la constance dans les interrogations. Ainsi, 35 ans après Journal de campagne (1982), Amos Gitai retourne en Cisjordanie, avec À l'Ouest du Jourdain (2017), qui décrit les rapports entre Israéliens et Palestiniens et qui est présenté à la Quinzaine des Réalisateurs, au Festival de Cannes.
Artiste engagé, Gitaï est aussi l'inventeur de structures dramatiques inattendues, par exemple le dédoublement asymétrique deBerlin Jérusalem, les blocs spatiaux d’Alila ou temporels de Plus tard tu comprendras (2008), la fluidité déstabilisante de Terre promise, les surimpressions critiques de L’Arène du meurtre et de Free Zone, jusqu’au récit brusquement cassé en deux de Désengagement (2007) ou le plan séquence unique de 81 minutes d’Ana Arabia (2013), qui décrit un moment dans la vie d’une petite communauté de marginaux juifs et arabes, à la périphérie de Jaffa. Le plan séquence est l’une des figures de style les plus volontiers employées par Amos Gitaï.
« Pour moi, le plan séquence est l’un des moyens cinématographiques les plus subversifs. Il permet de créer un rythme qui oblige le spectateur à porter un regard différent du regard mécanique auquel les séries télévisées ou les reportages, et le cinéma commercial, nous ont habitués. Quand un plan s’étend au-delà du lieu ou de la durée conventionnelle, lorsqu’on force le spectateur à rester, à continuer à regarder l’image, il est obligé de s’en rendre compte et de prendre conscience des questions que cela soulève. De façon générale, je crois que toute forme de cinéma qui inclut la prise de conscience de la durée du film par le spectateur tente de préserver un certain degré de complexité dans la présentation d’un problème. La durée permet d’enregistrer un autre regard. »[6]
— Amos Gitai, “La caméra est une sorte de fétiche”, in Amos Gitai architecte de la mémoire, Gallimard/La cinémathèque française, 2014.
L’expérience vécue durant la guerre de Kippour en 1973, dans laquelle il frôle la mort à l'âge de 23 ans, influencera toute son œuvre à venir. L’événement est notamment au centre d’une série de courts métrages expérimentaux, tournés pendant et immédiatement après la guerre, puis d’un documentaire (Kippour, Souvenirs de guerre, 1997), avant la grande forme du film de fiction Kippour qui, en 2000, consacre définitivement la place de Gitai parmi les grands noms du cinéma mondial après l’accueil positif du film au Festival de Cannes[7].Cette évocation de la guerre et de ses conséquences se poursuit dans d’autres films, comme une blessure jamais refermée, un rappel de la violence de sa réalité, un appel à la paix[réf. nécessaire].
Le 4 novembre 1995, le premier ministre israélien Yitzhak Rabin est assassiné à Tel-Aviv, au sortir d’une manifestation pour la paix, par un étudiant juif d’extrême-droite proche des milieux ultra-orthodoxes. Cet événement et ses conséquences sur la réconciliation israélo-palestinienne sont au cœur d’un projet artistique et citoyen qu’Amos Gitai ne va cesser de déployer pendant plus d’un quart de siècle, à travers différentes formes artistiques qui “se succèdent et se répondent, voire se disséminent et s’hybrident, comme par un phénomène de capillarité »(Marie-José Sanselme)[8].
La présence du fantôme de Rabin dans certaines créations de l’artiste, et l’ensemble de leurs éléments formels, constituent à l’intérieur même de l’œuvre de Gitai ce qu’on peut nommer une « œuvre Rabin »(Antoine de Baecque)[9]. Soit sept films d’une durée de près de dix heures : les quatre documentaires de Donnons une chance à la paix (1994), L’Arène du meurtre (1996), Yitzhak Rabin, chronique d’un assassinat (2016) et Le Dernier Jour d’Yitzhak Rabin (2015), cœur de cet ensemble et film de deux heures trente qui, s’il s’inscrit dans l’œuvre « normale » de Gitai, en devient l’expression la plus expérimentale et concentrée[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée], mêlant documentaire et fiction, documents d’archive et scènes reconstituées par la mise en scène, divers formats et types d’image.
« Je ne suis pas un homme politique. J’ai une formation d’architecte et je suis cinéaste. Alors, je me suis souvenu de ce que m’avait dit un jour Jeanne Moreau : « Tout nouveau projet est pour moi l’occasion d’apprendre certaines choses que je ne sais pas encore. » J’ai donc décidé de faire ce film. C’était l’occasion de poser une question à la société israélienne » »
— Amos Gitai, Le Monde, 9 septembre 2015
À ces films il faut ajouter le spectacle Yitzhak Rabin, chronique d’un assassinat (2016), créé dans la Cour d’honneur du palais des Papes lors du Festival d’Avignon, et donné la même année au Lincoln Center à New York et au Ford Theater de Los Angeles, puis à la Philharmonie de Paris en 2018, ainsi qu’une exposition/installation, Yitzhak Rabin : chronicle of an assassination foretold, présentée en 2016 au MAXXI de Rome, au BOZAR de Bruxelles, puis à la Collection Lambert en Avignon.
« Si l’on considère l’« œuvre Rabin » dans son ensemble, ces croisements multiples entre la réflexion sur l’Histoire, l’essai sur l’actualité politique, le journal intime, l’effervescence des genres, le recours aux archives et les traverses vers la scène ou la muséographie en font un noyau de l’oeuvre d’Amos Gitai, son emblème même. »
— Antoine de Baecque, Gitai Rabin,Chroniques d’un assassinat, Gallimard/BNF, 2021.
Tourné avant le 7 octobre 2023 et l'attaque du Hamas contre Israël, Shikun, inspiré de la pièce Rhinocéros d'Eugène Ionesco, est un pamphlet contre la politique du premier ministre Benyamin Netanyaou dans les territoires occupés et son projet de réforme de la Cour suprême. Faisant appel à des textes de Mahmoud Darwich et Amira Haas, le film est « porté par l'actrice Irène Jacob » Son jeu expressionniste contraste avec un huis clos tourné en plans-séquences[10].
Amos Gitai a adapté plusieurs œuvres littéraires au cinéma. Devarim (1995) est une adaptation du roman Pour inventaire de Yaakov ShabtaiYaakov Shabtai (en) (ed. Babel, 2007)[11]. Plus tard tu comprendras (2008) est inspiré d'un livre autobiographique de Jérôme Clément, ancien président de la chaîne de télévision Arte, et raconte l'histoire d'un écrivain français qui découvre l'histoire de sa mère (Jeanne Moreau) et de sa famille juive pendant la Seconde Guerre mondiale. Roses à crédit (2010), d’après le roman éponyme d'Elsa Triolet, observe la petite bourgeoisie française et ses aspirations matérialistes, avec Léa Seydoux dans le rôle principal.
En 2014, Amos Gitai tourne en yiddish Tsili, inspiré du roman et de la vie d'Aharon Appelfeld, qui raconte l'errance d’une jeune femme plongée dans le cauchemar de la Seconde Guerre mondiale. Comme un petit animal, Tsili rassemble toutes les forces de l'intuition et de la vitalité pour survivre dans cet univers désespéré[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée] (avec Sarah Adler, Meshi Olinski, et Lea Koenig).
« Aharon Appelfeld est un auteur que je respecte infiniment, d'abord parce qu'il n'instrumentalise pas la Shoah. Il n'utilise pas de choses extérieures à son expérience, il y a un minimalisme dans son écriture que je trouve essentiel, profondément juste et émouvant. Adapter ce texte m'a permis de créer une distance, de ne pas être illustratif. Je voulais faire un film de tendresse au milieu de cet enfer. C'est ce contraste qui m'intéressait. Appelfeld tisse ses histoires avec de minuscules détails. C'est une fiction mais elle est en partie basée sur son expérience autobiographique : le personnage, Tsili, réagit à des bruits menaçants ou à des chants d'oiseaux, elle sent, elle contemple le paysage... C'est toute cette juxtaposition de détails délicats qui nous fait ressentir l'environnement claustrophobique dans lequel elle vit. La forêt dans laquelle elle s'est réfugiée la protège de la cruauté et l'emprisonne en même temps. Avec Tsili, je clôture un cycle de quatre films très intimes : Carmel, basé sur la correspondance de ma mère ; Lullaby to my father, dédié à mon père, un architecte du Bauhaus chassé d'Europe par les nazis ; Ana Arabia, qui évoque une communauté de Juifs et d'Arabes à Jaffa. Après Kadosh et Kippour, j'ai eu besoin d'aller vers un langage cinématographique plus radical, d'éviter les conventions du cinéma", a déclaré Amos Gitai dans une interview lors de la sortie du film[12].
Au tournant des années 2020, Amos Gitai poursuit, à travers plusieurs spectacles, son intérêt pour la forme théâtrale. Comme dans son œuvre de cinéma, il y revient sur certains thèmes à plusieurs années de distance : l’exil, le nationalisme, la guerre, la position de l’artiste comme témoin.
Son premier spectacle, créé à Gibellina en Sicile en 1992, intitulé La Guerre des fils de lumière contre les fils des ténèbres, est une adaptation multilingue de La Guerre des Juifs, de l’historien antique Flavius Josèphe, avec Samuel Fuller, Enrico Lo Verso, Hanna Shygulla, Jérôme Koenig, Macha Itkina. Gitai y racontait la prise de Jérusalem par les Romains en l’an 70, et la perte de la souveraineté juive en raison de luttes internes. Ce spectacle, recréé en 2009 en inauguration du Festival d’Avignon à la carrière de Boulbon, était interprété par Jeanne Moreau dans le rôle de Josèphe, avec Mireille Perrier et Éric Elmosnino.
En 2016, Gitai crée dans la Cour d’honneur du palais des Papes à Avignon Yitzhak Rabin, chronique d’un assassinat, avec deux comédiennes, la palestinienne Hiam Abbass et la franco-israélienne Sarah Adler, et deux musiciennes, la pianiste Edna Stern et la violoncelliste Sonia Wider-Atherton. Cette nouvelle variation sur l’histoire de l’assassinat du Premier ministre israélien par un étudiant juif extrémiste complète un dispositif de grande ampleur entamé avec son film Le dernier jour d’Yitzhak Rabin (2015) et des expositions/installations présentées au MAXXI (Rome, 2016), puis au musée Bozar (Bruxelles, 2016) et à la Collection Lambert (Avignon, 2016). La pièce est jouée en anglais en 2017 au Lincoln Center Festival (New York) puis au Ford Theater (Los Angeles), avec une distribution et un choix de musiques en partie renouvelés.
En 2018, la pièce est recréée à la Philharmonie de Paris, avec Barbara Hendricks au chant, puis au Théâtre du Châtelet en 2021, dans une production du Théâtre de la Ville qui voit la première collaboration de Natalie Dessay et Irène Jacob avec Amos Gitai. Avec ce spectacle, Amos Gitai pousse encore plus loin la fusion entre plusieurs formes artistiques, musique, théâtre, chant, vidéos, en faisant du récit de l’assassinat d’Yitzhak Rabin par sa veuve Leah Rabin une expérience émotionnelle et sensorielle qui invite chacun à la réflexion[Interprétation personnelle ?] ou [réf. souhaitée].
En 2016, Amos Gitaï est invité par le Teatro San Carlo de Naples à mettre en scène l’Otello de Rossini, à l’occasion du bicentenaire de la création de cet opéra. Artiste ambassadeur du Théâtre de la Ville, à Paris, en 2019-2020, Amos Gitai crée deux spectacles à l’Espace Cardin. Le premier est la version théâtrale de son film Lettre à un ami de Gaza. Joué en hébreu et en arabe, le spectacle est interprété notamment par le comédien palestinien Makram Khoury et sa fille Clara. Il est ensuite donné en anglais au Spoleto Festival USA, puis au Coronet Theater à Londres, avec la comédienne israélienne Einat Weizman.
En octobre 2020, Gitai crée Exils intérieurs au Théâtre de la Ville (Abbesses), avec Natalie Dessay (chant), les comédiens Pippo Delbono, Jérôme Kircher, Markus Gertken, Hans-Peter Cloos et les musiciens Alexey Kochetkov (violon), Bruno Maurice (accordéon), Philippe Cassard (piano). Associant extraits musicaux, projection d’images et lecture de textes, Exils intérieurs est un dialogue imaginaire entre Thomas Mann et Hermann Hesse, Rosa Luxemburg, Antonio Gramsci, Else Lasker Schüler et Albert Camus au sujet de la position de l’artiste lorsqu’il est confronté à l’oppression. La pièce est également donnée au Teatro della Pergola, à Florence, en avril 2022, toujours en plusieurs langues. Au printemps 2023, Amos Gitai a créé au Théâtre de la Colline, à Paris, une adaptation théâtrale de sa trilogie documentaire House. Sur la scène, l’histoire de la Maison devient une métaphore et le lieu d’un dialogue artistique entre des comédiens et des musiciens issus de tout le Moyen-Orient, aux langues, aux origines et aux traditions musicales différentes, réunis pour tenter de dire ensemble la mémoire du passé et la possibilité d’une réconciliation. « Une mosaïque de récits individuels qui portent tous sur l’idée d’un foyer, perdu ou trouvé[13]. » La pièce réunit notamment Irène Jacob, Micha Lescot, Menashe Noy, Bahira Ablassi, Kioomars Musayyebi et Alexey Kochetkov avec la participation musicale du chef de chœur Richard Wilberforce, la soprano Dima Bawab et des lumières de Jean Kalman.
Amos Gitaï conçoit régulièrement, depuis le début des années 2000, des expositions/installations multimédias associant projection vidéos, photos, sons, performances théâtrales et musicales, souvent conçues en fonction des lieux et de leur histoire : Centre Pompidou (Paris), Kunstwerke (Berlin), base sous-marine [Quoi ?](Bordeaux), Palais de Tokyo (Paris), Musée du Cinéma (Turin), Bauhaus (Dessau), Ein Harod Museum of Art (Israël) ; Musée MAXXI (Rome), Musée Bozar (Bruxelles), Collection Lambert (Avignon), galerie Thaddaeus Ropac (Paris), Bibliothèque nationale de France (Paris), Museum of Modern Art (New York). En 2022 (février-avril), à l’invitation de la Ville de Florence, Amos Gitai investit la Sala d’Arme du Palazzo Vecchio dans une installation intitulée Promised Lands. Il y évoque, à partir de fragments de son œuvre théâtrale et cinématographique, les migrants et leurs destins, l’Histoire et le présent, en diverses langues parlées autour de la Méditerranée.
En 2008-2009, la Pinakothek der Moderne de Munich consacre à Amos Gitai et à son père Munio Weinraub Gitai une grande exposition intitulée Architektur und Cinema in Israel, qui est présentée l’année suivante au Tel Aviv Museum of Modern Art.
En 2014, le Musée Reina Sofia (Madrid) lui consacre une grande exposition Amos Gitai biografías. La même année, la Cinémathèque française présente ses archives cinématographiques dans une exposition intitulée Amos Gitai, architecte de la mémoire.
A l’occasion du 50e anniversaire de la guerre de Kippour, Amos Gitai présente une exposition multimédia intitulée Kippur, War memories au Musée d’art de Tel-Aviv (septembre 2023-février 2024).
Les films d’Amos Gitai sont conservés dans plusieurs cinémathèques dans le monde : Cinémathèque française, Cinémathèque suisse, Cinémathèque de Jérusalem, entre autres. En outre, le cinéaste a déposé les archives papier de plusieurs films à la Cinémathèque française en 2014.
En 2017, l’Université de Stanford (Stanford Libraries’ Department of Special Collections a acquis les archives numériques de huit films d’Amos Gitai (la trilogie House, Plus tard tu comprendras, Tsili, la trilogie des frontières (Terre promise, Free Zone, Désengagement), soit un 19 disques durs, avec 10,5 terabytes de données.
En 2018, Amos Gitai a donné à la Bibliothèque nationale de France l’ensemble des matériaux documentaires réunis ou produits depuis 1994 autour d’Yitzhak Rabin : recherches, rushes, photographies, scénarios, étapes de montage, soit 30 000 documents et 150 000 fichiers concernant sept films, documentaires et fiction : Donnons une chance à la paix (1994), L’Arène du meurtre (1996), Le Dernier Jour d’Yitzhak Rabin (2015). Principalement numériques, ces documents font l’objet d’un programme de recherche et de développement pionnier sur les nouvelles archives du cinéma, en lien avec l’Université de Stanford. En écho à l’exposition conçue par Amos Gitai présentée à cette occasion à la BnF (mai-novembre 2021), les éditions Gallimard publient un ouvrage, Amos Gitai/Yitzhak Rabin, qui propose réflexions et analyses sur les archives Rabin déposées à la BnF, ainsi que deux longs poèmes composés par Gitai.
« Le choix d’un don à la Bibliothèque a aussi été dicté par la volonté de mettre à l’abri cet ensemble très symbolique dans un pays, la France, dont il a pu éprouver les qualités d’accueil et de soutien à la création lors de ses années d’exil loin d’Israël ».[réf. nécessaire]
Amos Gitai enseigne et participe régulièrement à des conférences dans le monde entier.
En 2017, Gitaï est professeur invité à l'Université de Californie, Berkeley, pour une série de cours et de conférences intitulée : House, City, Border: Poetics and Politics of Israel.
En 2018-2019, Amos Gitai est élu professeur au Collège de France sur la chaire de Création artistique, devenant ainsi le premier cinéaste à entrer au Collège de France. Sous l’intitulé Traverser les frontières, il présente une série de neuf cours, disponibles en ligne, mettant en avant les spécificités d’une pratique radicale du cinéma : Le documentaire comme métaphore ; Ce n’est pas moi qui politise mes films, ce sont mes films qui m’ont politisé ; Filmer la guerre ; Espace et structure, cinéma et architecture ; Cinéma et histoire ; Le cinéma est-il plus autoritaire que la littérature ? ; Mythologies et mémoires collectives ; Chronique d'un assassinat[réf. nécessaire]. Sa leçon inaugurale prononcée le 16 octobre 2018 a été publiée sous le titre La caméra est une sorte de fétiche (Collège de France/Fayard, 2019). À la suite de ces leçons, a été organisé les 6 et 7 juin, toujours au Collège de France, un colloque international intitulé Le processus de création : contradictions, éthique, (ré)interprétations, Amos Gitai et l’enjeu des archives [réf. nécessaire].
« Filmer, c’est prendre une série de décisions qui déterminent non seulement ce qui sera inclus dans le cadre mais aussi ce qui n’y sera pas. Cela signifie que nos choix comprennent une part de mise à distance et de marginalisation. La caméra, comme le cinéma, produit un document subjectif. Elle exprime un point de vue particulier[14]. »
Amos Gitai a été également professeur invité en 2018 à Columbia University ; en 2021 à l’Université de Tel-Aviv et en 2021-2022 au Van Leer Institute, Jérusalem, pour une série de conférences sous le titre : Transition, Crossing, Border.
En 2014, la Cité de l’Architecture et du patrimoine (Paris), organise huit rencontres d’Amos Gitai avec divers invités, basées sur sa série documentaire Architecture en Israël/Conversations avec Amos Gitai (2012), composée de 16 films de 23 minutes. Dans cette série, Gitai rencontre des architectes, des sociologues, des archéologues, des chercheurs, des écrivains, des théologiens, et converse avec eux, à partir de l’histoire et de l’actualité de la Palestine et d’Israël – période ottomane, mandat britannique, habitat bédouin, architecture éclectique, brutaliste, moderne…– sur des thématiques architecturales et urbanistiques. Dans chaque épisode, des matériaux d’archives – photos, plans, dessins d’architecture, etc. illustrent ces conversations. Lors des rencontres organisées par la Cité de l’Architecture et du Patrimoine, des invités confrontent leurs points de vue sur une discipline qui reste, sous bien des aspects, un tropisme essentiel du réalisateur.
Dans les années 2010, Amos Gitai crée à Haïfa, en collaboration avec la municipalité de Haïfa et la Société des musées de Haïfa, le Munio Weinraub Gitai Architecture Museum[15] dans l’ancien atelier d’architecte de son père. Chaque année, le musée accueille des expositions temporaires sur l'architecture israélienne et internationale, et organise des rencontres avec des architectes et des artistes qui s’intéressent à l'architecture et à l’urbanisme. Les expositions, thématiques ou monographiques, visent à provoquer des discussions et des échanges concernant l'architecture et sa place dans la société.
Le travail d'Amos Gitaï est le sujet de trois films documentaires réalisés par Laurent Roth :
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