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fuite des monarchistes pendant la Révolution française De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le terme émigration, utilisé dans le contexte de la Révolution française, désigne le départ pour l'étranger d'environ 140 000 Français, en raison de leur désaccord politique avec les événements survenus à partir du 14 juillet 1789 ou des menaces pesant sur leur sécurité personnelle.
L'émigration politique commence dès le lendemain de la prise de la Bastille, avec notamment le comte d'Artois, frère du roi, et le prince de Condé. Au départ, il s'agit d'une émigration contre-révolutionnaire, mais, au fur et à mesure que la révolution se radicalise (de juillet 1789 à juillet 1794), elle concerne des gens qui ont soutenu les changements de 1789 : ainsi, le général La Fayette émigre le 19 août 1792, après avoir été proclamé « traître à la patrie ». De même Louis-Philippe d'Orléans quitte le pays en mars 1793, alors que son père Philippe-Égalité, député montagnard à la Convention, a voté la mort de Louis XVI (et sera lui-même guillotiné en novembre 1793).
Les émigrés sont souvent des nobles ou des ecclésiastiques (44 %), mais on trouve aussi parmi eux des roturiers, officiers (4 %), bourgeois (17 %), paysans (20 %), ouvriers, artisans et commerçants (15 %).
Un certain nombre d'émigrés se regroupent pour combattre la Révolution, dans le cadre de l'armée des émigrés (ou armée des Princes), qui à partir du 20 avril 1792, soutient l'effort de guerre des puissances coalisées contre la France. En contrepartie, les gouvernements français sont amenés à prendre des mesures de plus en plus dures contre l'émigration, notamment la confiscation des biens laissés par les émigrés en France (terres, châteaux, etc.)[1].
Dans l'ensemble, la chute de Robespierre (27 juillet 1794/9 thermidor an II) marque la fin de la radicalisation révolutionnaire. Néanmoins, les gouvernements qui suivent restent fermement républicains et maintiennent les mesures anti-émigrés, de sorte que le retour leur est interdit pendant plusieurs années, sauf exceptions, jusqu'à ce que Napoléon Bonaparte, au pouvoir à partir de novembre 1799, décide une amnistie.
Les termes « émigration » et « émigrés » sont utilisés par l'historiographie de la Révolution, mais ils ont aussi été utilisés par les contemporains, y compris dans le domaine juridique (« décrets sur les émigrés », « liste des émigrés »). Pour désigner les émigrés considérés comme les plus dangereux, les révolutionnaires utilisaient dans leurs discours le mot « Coblence », nom d'une ville allemande où se trouvait l'état-major de l'armée des émigrés.
Les émeutes des 12 et 13 juillet 1789, qui suivent le renvoi de Necker le 11 juillet, aboutissent le 14 à la prise de la Bastille et à la formation des milices bourgeoises de Paris (première version de la Garde nationale de Paris).
Dès le , le prince de Condé Louis V, prince du sang, quitte son château de Chantilly vers les Pays-Bas autrichiens (possession de la maison de Habsbourg, au nord du royaume. Capitale : Bruxelles).
Le , le comte d’Artois, frère du roi (futur Charles X), suivi par les Polignac et quelques autres grands courtisans, part pour Turin, où réside la cour du roi de Sardaigne, beau-père du comte de Provence, du comte d'Artois et de leur sœur Clotilde de France, puis l'électorat de Trèves où règne leur oncle maternel Clément Wenceslas de Saxe[pas clair].
Craignant pour la stabilité du régime et donc pour leur sécurité, le marquis de Bouillé, tous les membres du ministère de Broglie[réf. nécessaire], Calonne, et d'autres courtisans ne tardent pas à les suivre[Quand ?].
Cette période est marquée par le vote de la constitution civile du clergé (), dénoncée par le pape (qui est aussi en conflit avec la France à propos du Comtat Venaissin). Le clergé se divise entre prêtres constitutionnels et prêtres « réfractaires », qui sont l'objet de représailles des sans-culottes.
Parallèlement, l'armée connaît des mouvements d'insoumission des soldats, voire de mutineries. Une de ces mutineries, concernant la garnison de Nancy (août 1790) est réprimée dans le sang par la Garde nationale, dont le commandant en chef (national) est La Fayette.
De nombreux officiers (le plus souvent des nobles) et prêtres réfractaires partent pour l'étranger.
Les tantes du roi quittent leur résidence de Saint-Cloud en janvier 1791.
Le 20 juin 1791, Louis XVI, qui est depuis octobre 1789, plus ou moins assigné à résidence aux Tuileries, surveillé par la Garde nationale de Paris, tente à son tour de fuir. Reconnu au relai de poste de Sainte-Menehould, où il prend la route vers Sedan, il est arrêté par les autorités municipales de Varennes et ramené à Paris prisonnier. Dès lors se pose la question de son maintien sur le trône. L'Assemblée constituante, sous l'influence de La Fayette, décide son maintien (thèse officielle : il a été enlevé par des royalistes).
Le deuxième frère du roi, le comte de Provence (futur Louis XVIII), quitte aussi la France le soir du , mais directement vers les Pays-Bas autrichiens, qu'il réussit à atteindre, s'installant ensuite à Coblence.
La rodomontade de Bouillé[Quand ?], qui menace Paris de destruction, déclarant qu’il n’en laisserait pierre sur pierre, incite les royalistes à passer à l’étranger[réf. nécessaire]. Ils établissent ouvertement des bureaux, à Paris et dans les principales villes, pour hâter l’émigration[réf. nécessaire]. Leurs journaux exagèrent beaucoup les préparatifs des puissances étrangères contre la France, le nombre des émigrés réunis aux frontières et prédisent avec emphase leur triomphe et la chute de la Constitution.
L'Assemblée constituante achève ses travaux en septembre 1791 et la constitution est promulguée. Une nouvelle assemblée, l'Assemblée législative est élue et commence ses travaux le .
Des députés constituants d'origine noble quittent alors le royaume.[réf. nécessaire]
Le 20 avril 1792, la France déclare la guerre à l'Autriche.
En quelques semaines, la révolution entre dans une phase de forte intensité qui aboutit à l'insurrection du 10 août 1792. Contraint de se réfugier à l'Assemblée, Louis XVI est d'abord « suspendu », puis incarcéré le 13 août sous la surveillance de la Garde nationale.
Entre 1789 et le 10 août 1792, 30 000 Français quittent le pays.
Ceux qui émigrent à la suite de la journée du 10 août 1792, des massacres de septembre et du début de la Terreur, sont des opposants à la République venant de tous les milieux sociaux : artisans, commerçants ou encore un bon nombre de paysans dont les opinions connues mettent leurs jours en danger.
Dans ses Mémoires, Chateaubriand décrit d’un côté « cet assemblage confus d’hommes faits, de vieillards descendus de leurs colombiers », […] de vieux gentilshommes, […] habit déchiré, […] se traînant avec un bâton et soutenus sous les bras par un de leurs fils », quand l’état-major vivait, lui, dans l’opulence[2].
À Coblence, les émigrés réunissent des troupes sous les ordres du prince de Condé avec l'appui du comte de Provence, futur Louis XVIII et frère du roi Louis XVI. Ces rassemblements armés inquiètent l'Assemblée législative. Elle émet un décret le qui invite le roi Louis XVI à demander aux princes allemands qui accueillent les émigrés, de disperser les attroupements et d'interdire les recrutements pour l'armée des Princes. Le , Louis XVI fait donc savoir à l'électeur de Trêves que si le il n'a pas dispersé les émigrés, il sera considéré comme ennemi de la France. L'électeur, peu enclin à voir son territoire envahi, cède et interdit les rassemblements militaires et le recrutement de l'armée des Princes dans ses États.
Ces différents lieux dépendent surtout de la provenance géographique de l'émigrant[pas clair]. En effet les zones d'émigration sont variées :
En 1789 et 1790, il est relativement[pas clair] aisé de partir avec ses biens meubles (bijoux, argenterie, etc;). Cela devint plus difficile à partir de 1791. Les autorités françaises se rendent compte qu'il s'agit d'une fuite des capitaux nuisible à l'économie nationale si elle se poursuit. De plus, les émigrés devenaient menaçants et formaient de grands rassemblements à la frontière[pas clair]. Ils menaçaient ceux qui ne favorisaient pas leur entreprise de la confiscation de leurs biens et même de supplices.[réf. nécessaire]
C'est l'Assemblée législative (en place du 1er octobre 1791 au 20 septembre 1792) qui prend les premières grandes mesures contre l'émigration.
Le , l'Assemblée législative vote un décret ordonnant aux émigrés de rentrer avant le 1er janvier de l'année suivante sous peine d’être déclarés rebelles et déchus de leurs droits.
Un décret rétablit l'utilisation du passeport (décret du 1er février 1792).
Les princes[pas clair] ayant refusé d’obéir, l'Assemblée ordonne le aux émigrés de rentrer sous peine de payer une triple contribution.
Elle déclare traîtres à la patrie tous ceux qui correspondaient avec le prince de Condé ou les autres chefs émigrés. Il est enjoint aux fonctionnaires publics, aux gardes nationaux et aux soldats d’arrêter les personnes qui tenteraient de sortir du royaume. On[Qui ?] interdit toute exportation d’espèces, d’or ou d’argent, d’armes, de munitions, d’effets, de voitures et de chevaux.
On prend des mesures particulières pour les « complices d'émigrés » ; on ordonne la confiscation des biens des émigrés (le ) ; puis la peine de mort pour tout émigré « pris les armes à la main ». En effet, à la frontière se masse ce qu'on appelle l'armée des Princes, formée de royalistes, qui attendent la première occasion pour renverser la jeune République. Mais avant même les considérations purement sécuritaires, « ce sont avant tout les contingences économiques qui déterminèrent les persécutions menées contre les émigrés »[8]. La fuite de ces émigrants était, en quelque sorte, contrôlée par l'État, pour mieux s'approprier leurs richesses en les transformant en biens nationaux, vendus à vil prix.
Après l’acceptation de la Constitution par le roi, on se départ de ces rigueurs et le décret du 1er août est rapporté.
L'intensification des violences en France, avec la journée du 10 août 1792, la captivité de la famille royale à la Tour du Temple, les massacres de septembre, n'incitent pas les émigrés à rentrer, bien au contraire, et leur organisation continue sur la frontière.
Poursuivant sa fuite en avant, la Législative va alors encore plus loin : elle déclare suspects de complot contre la patrie les Français rassemblés au-delà des frontières ; la peine de mort est édictée contre eux, contre les princes et les fonctionnaires publics établis hors du royaume et contre tous ceux qui pratiquent des enrôlements pour l’armée royaliste.
Soutenus par la Prusse et l’Autriche, ils lèvent bientôt une petite armée, l'« Armée des princes ».
Vers le milieu de 1792, 4 000 d’entre eux arrivent à Trèves et s'unissent aux Prussiens. La même année, ils attaquent sur les frontières du Nord-Est. C'est la bataille de Valmy, le . -
Lors de la séance du , Vergniaud exprime devant l’Assemblée constituante le peu de crainte que doivent inspirer « ces factieux aussi ridicules qu’insolens [que] l’augmentation de leur nombre ne fait que […] pousser plus rapidement vers la pénurie la plus absolue ». Il affirme : « Bientôt on verra ces superbes mendians expier dans la honte et la misère les crimes de leur orgueil »[9]. Toutefois, La Convention nationale répond le aux émigrés en les bannissant à perpétuité du territoire de la République, et en condamnant à mort ceux qui rentreraient. Les émigrés pris les armes à la main avaient été déjà condamnés à la même peine par un décret précédent et neuf d’entre eux guillotinés sur la place de Grève ; elle ordonna, en outre, à ceux qui étaient rentrés de sortir sous quinzaine du territoire de la République. Un autre décret annula peu après les donations faites par eux depuis le , puis une lettre du ministre de l’Intérieur provoqua à la même époque la démolition de leurs châteaux.
Après l’exécution de Louis XVI, les émigrés proclament, à Willengen, le dauphin prisonnier au Temple, roi de France et de Navarre.
La Convention redouble alors de rigueurs contre eux : ceux arrêtés en France, étaient exécutés dans les vingt-quatre heures, ceux pris en pays étrangers, armés ou non armés, étaient traités de la même manière.
Malgré ces mesures, les royalistes qui n’avaient pas émigré travaillent à susciter des troubles dans les départements et ceux qui sont en pays étranger s’efforcent de désorganiser les armées révolutionnaires, se livrant à des menées dans toute l’Europe, participant à des opérations militaires, à l’insurrection de la Vendée, à l'Expédition de Quiberon.
Soutenus par la Grande-Bretagne, ils sont défaits lors de leur débarquement à Quiberon le 20 juillet 1795.
Quand Robespierre tombe (27 juillet 1794/9 thermidor an II), beaucoup d’entre eux rentrent en France avec la volonté de rétablir le fils de Louis XVI sur le trône. La disparition de cet enfant, Louis XVII, fait tomber leurs espérances, mais leurs menées les font expulser à nouveau du territoire, d’autant plus qu’ils prennent part aux insurrections contre la Convention dans les journées du 1er prairial et du 13 vendémiaire.
Sous le Directoire, on retrouve des émigrés parmi les conspirateurs du coup d'État du 18 fructidor an V. Après une série de lois et de résolutions relatives à leur expulsion, à leur rentrée puis à leur radiation partielle de la liste des émigrés, on revient envers eux à des mesures de plus en plus tolérantes, jusqu’à ce qu’ils soient amnistiés par le Premier consul, Bonaparte.
L'hostilité des émigrés amène bientôt les législateurs à prendre des mesures de plus en plus rigoureuses à leur encontre. Malgré cet arsenal de lois et de décrets contre eux, les émigrés ne cessent, pendant tout le temps de la Révolution, de conspirer audacieusement contre la République.
Sous la Terreur, une série de décrets atteignent les émigrés : le séquestre de leurs biens s’étend même à ceux de leurs parents. Ceux-ci étaient privés de liberté, frappés d’impositions spéciales et déclarés incapables d’exercer des fonctions publiques.
Le Directoire conserve ces lois rigoureuses et de nombreux décrets sont pris les concernant et fixant le mode de leur inscription ou de leur radiation sur les listes.
Après la bataille de Valmy (20 septembre 1792), on trouve sur un soldat de l'armée austro-prussienne, un livre d’ordre[pas clair] donnant les principaux noms des membres de l’armée de Condé.
La Convention décrète que ce livre d’ordre sera étudié, les noms relevés répartis par commune d'origine, et ces noms envoyés aux municipalités concernées.
En novembre 1792, le nom de tous les émigrés bannis y[Où ?] est inscrit. À cette époque, le Moniteur universel publie la liste de ceux qui viennent de Paris.
En 1793, la Convention fait inscrire le nom des émigrés par communes dans des listes[11].
L’inscription sur cette liste qui compte jusqu’à 32 000 personnes, signifie la peine de mort pour tous ceux qui seraient faits prisonniers.
Ce journal donnait un tableau contenant les noms des émigrés par département, le lieu de leur domicile et celui de la situation et de l’universalité de leurs biens dont la vente était ordonnée par décret de la Convention. Ce journal est dirigé par Lachevardière qui profitait de son accès auprès des membres les plus avancés de la Montagne pour désigner les proscrits. Il disparut en 1793.[pas clair]
En février 1795, des représentants en mission, ayant rayé des citoyens qui n’avaient pas rempli les formalités prescrites par les lois, ou fait inscrire sur cette liste ceux qui ne devaient pas y être portés, la Convention décréta qu’à l’avenir, les inscriptions et radiations seraient soumises à l’examen du comité de législation pour être infirmées ou confirmées par lui.
Le de la même année, afin d’empêcher la rentrée en France de nombreux émigrés, qui parvenaient à obtenir de faux certificats de résidence, attestant leur état d’ouvrier ou de laboureurs, l’Assemblée décida que l’état par département des radiations prononcées définitivement jusqu’à ce jour par le comité de législation, serait imprimé et, qu’il ne serait plus fait de radiations que par décret de la Convention nationale sur le rapport de son comité de législation.
Lorsque les royalistes réfugiés à l’étranger refusèrent d’obéir au décret de 1791 qui leur ordonnait de rentrer en France avant le , sous peine de mort et de confiscation de leurs biens, ceux-ci viennent s’ajouter aux propriétés ecclésiastiques et à celles du domaine royal déjà réunies sous le nom de biens nationaux.
Plusieurs décrets paraissent successivement dans les années suivantes, concernant la vente de ces biens, leur nationalisation, l’accélération de leur vente, le dépôt des créances, fonds et titres appartenant aux émigrés. Leurs biens meubles furent aussi décrétés aliénables et ainsi que leurs immeubles, déclarés acquis à la République nonobstant les dispositions des parents.
On accorda des récompenses à ceux qui signalaient des biens d’émigrés ayant échappé au séquestre, ainsi qu’à ceux qui découvraient de l’argent ou des valeurs cachées leur appartenant.
En 1793, devant l’appui que leur prêtaient certains fonctionnaires des domaines, la Convention décréta que ceux d’entre eux qui refuseraient d’affermer les biens des émigrés seraient punis de dix ans de fers. Leurs créanciers furent déclarés créanciers de l’État.
Un grand nombre de règlements formant une législation tout entière furent pris concernant les émigrés, les acquéreurs de leurs biens, la liquidation de leurs dettes, celle des rentes viagères que certains étaient obligés de faire, et l’état d’indivision dans lequel se trouvaient plusieurs d’entre eux vis-à-vis d’associés non émigrés.
Cette spoliation des biens des émigrés appauvrit beaucoup de familles en s'étendant aux parts futures d'héritage des enfants émigrés de français restés en France, dont la part future d'héritage est également confisquée.
Le 6 floréal an X, Bonaparte, dans son sénatus-consulte, déclare que les émigrés rentrés en France reprendront possession de leurs biens qui étaient encore entre les mains de la nation, à l’exception des forêts et des immeubles affectés à un service public ; quant à ceux achetés jusqu’à ce jour comme biens nationaux, leurs acquéreurs devaient en rester propriétaires sans être inquiétés.
Le (25 messidor an IX[12]) est signé le Concordat[13] entre le gouvernement français et le pape Pie VII, qui remet en cause la Constitution civile du clergé de 1790. En effet, en 1790, les ecclésiastiques français avaient dû prêter serment de fidélité à la Constitution, ce qui les faisait devenir en quelque sorte fonctionnaires. Le Concordat annule cet acte de 1790. Le gouvernement reconnaît donc que la religion catholique, apostolique et romaine est la religion de la grande majorité des citoyens français, ce qui constitue le début de la disparition progressive de l'Église gallicane[14] en France. La papauté redevient la source de l'institution canonique en nommant à nouveau les évêques. Dans ce contexte, les prêtres réfractaires émigrés ou réfugiés à l'étranger signent les actes de soumission, acceptent la nouvelle organisation de l'Église de France et regagnent leur pays.
L'exemple de Mgr d'Agoult de Bonneval : évêque de Pamiers (au sud de Toulouse) en 1786, puis président des États de Foix, il avait émigré au début de la Révolution. Il regagne la France après s'être démis de son siège. Auteur de nombreuses brochures et pamphlets politiques, l'évêque était également connu pour ses études économiques. Dans une lettre du , il adresse sa soumission au consulat de France à Hambourg : « Charles, Constant, César, Loup, Joseph, Mathieu d'Agoult, ancien évêque de Pamiers, désirant rentrer dans ma patrie, déclare que je suis dans la communion des évêques de France nommé en exécution du concordat passé entre le gouvernement françois et Sa Sainteté Pie VII, que je serai fidèle au gouvernement établi par la constitution et n'entretiendrai ni directement, ni indirectement aucune liaison ni correspondance avec les ennemis de l'État »[15].
A l'inverse, quelques évêques refusent leur démission, tels Monseigneur de Béthizy de Mézières, évêque d'Uzès, député à l'assemblée constituante, laquelle avait supprimé son évêché, qui regagne Londres à la Restauration et y meurt en 1817.
Sous le Consulat, le retour des émigrés en France s'accélère. Napoléon Bonaparte a en effet pour objectif de mettre un terme aux divisions nées de la Révolution. Déjà, l'établissement de certificats de résidence avait favorisé une première vague de retours : ces certificats devaient permettre de distinguer les émigrés des présumés émigrés. Ils devaient être signés par des témoins — les signatures étaient ensuite authentifiées — et vérifiées par l'autorité municipale. Souvent faux et délivrés avec facilité, ils avaient permis les rentrées clandestines[16]. Pendant le régime consulaire, plusieurs autres mesures de pacification régularisent ces rentrées. La première, l'arrêté du 28 vendémiaire an IX (), permet aux Français émigrés qui ont fait l'objet d'une radiation provisoire ou définitive (des registres civils), de rentrer en France. En échange, ils doivent jurer fidélité dans les vingt jours à la publication de l'arrêté selon la formule suivante : « Je promets fidélité à la constitution ». Le sénatus-consulte du 6 floréal an X () complète un peu plus l'œuvre de pacification du Consulat puisqu'il accorde l'amnistie générale aux émigrés[17]. La loi des otages du 24 messidor an VII () est également supprimée : cette loi permettait d'arrêter les parents d'émigrés et les rebelles coupables d'émeutes ou de troubles insurrectionnels.
Le , Napoléon abdique et Louis XVIII, qui réside alors à Londres, devient roi de France, où il rentre « dans les fourgons de l'étranger ». Dès lors, les émigrés restés à l'étranger peuvent eux aussi revenir.
Mais en , Bonaparte reprend le pouvoir. Louis XVIII et une partie de la cour reprennent le chemin de l'exil, s'installant à Gand. Cette période, les Cent-Jours, s'achève avec la défaite de Waterloo, qui permet une Seconde Restauration, et le retour définitif des émigrés.
Ceux-ci, qui n'ont « rien appris, ni rien oublié », demandent la restitution des biens confisqués au cours de la Révolution. Louis XVIII s'y refuse, ne voulant pas susciter la réprobation des républicains ou des bonapartistes, voire des orléanistes.
En revanche, dès le début de son règne, Charles X décide de répondre favorablement à cette demande : le , il promulgue la « loi du milliard aux émigrés », qui prévoit une somme en fait légèrement inférieure à un milliard de francs, à partager entre cinquante mille émigrés, souvent nobles ou membres du clergé, en cinq ans. De fait, seulement, 600 millions seront dépensés pour cette indemnisation[18].
Cette mesure provoque l'indignation d'une partie de la population, et est un des éléments à charge contre Charles X lors de la révolution de 1830.
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