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icône de la femme tahitienne dans l'imagerie occidentale De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La vahiné est une figure du regard européen sur les femmes tahitiennes. Attesté en Europe depuis la fin du XVIIIe siècle, ce cliché exotique sur les Polynésiennes est le produit de processus de sexualisation et de racisation de la part des colons. Il est aujourd'hui récupéré dans la promotion touristique de Tahiti.
Le terme vient du tahitien vahine (femme) issu du proto-polynésien fafine[1].
Selon Serge Tcherkezoff, entre autres, la vahiné est un fantasme du colonialisme[2]. Cette figure a été construite à travers la littérature, la science et l'art des colons.
Dans le récit de voyage de Bougainville, ce dernier raconte à ses lecteurs européens du XVIIIe siècle une scène de sexe en public ritualisé entre une fille et un homme tahitiens[2]. Cette image a fortement excité l'intérêt des métropolitains, dont Voltaire, qui ont commencé à bâtir un mythe de la sexualité libre polynésienne à partir des débats de l'époque sur le libertinage[2]. Ce mythe, selon lequel les femmes polynésiennes exprimeraient une sensualité féminine universelle qui serait artificiellement opprimée dans le reste du monde, fut construit à travers l'invention d'une opposition racisante entre Tahiti, douce, féminine et pâle, et la Mélanésie, dure, noire et masculine[2].
Ce racisme européen opposant Mélanésiennes et Polynésiennes s'est exprimé dans la production scientifique et pseudo-scientifique d'une ethnologie qui a considéré les cultures polynésiennes comme supérieures aux mélanésiennes[3]. L'édification de ce savoir par des hommes blancs fut liée à une occultation des enjeux de pouvoir à l'œuvre dans les relations conjugales et sexuelles entre colons et femmes autochtones, ces dernières étant imaginées en vahinés comme des objets sexuels innés[4]. Cette sexualisation et racisation, qui est aussi observable dans la littérature érotique coloniale, est dans une certaine mesure une arme libidinale de la colonisation[5].
Nombre d'artistes blancs, dont Paul Gauguin, réservent une place de prédilection dans leurs tableaux à cette image de la vahiné.
Quelques illustrations :
Dans le cas de Gauguin, l'intensité de son intérêt pour l'iconographie de la vahiné, combiné à ses relations avec de très jeunes personnes, ont justifié des critiques des inégalités coloniales de pouvoir dans sa représentation et sa fréquentation des femmes tahitiennes[6].
Adolphe Sylvain et son fils Teva, photographes blancs pour cartes postales et souvenirs de Tahiti, sont connus pour leurs clichés à vahinés dont certains reproduisent des tableaux de Gauguin[7]. Afin de bien répondre aux fantasmes masculins occidentaux, Teva Sylvain choisit des modèles à la peau claire, métis ou blancs, qu'il pare d'une couronne de feuilles[7].
La photographe contemporaine Namsa Leuba a interrogé la figure de la vahiné chez Gauguin dans son exposition The myth of the Vahine[8]. Roger Boulay a aussi organisé une exposition sur l'opposition entre vahinés et Mélanésiennes dans l'art[9].
À travers les cartes postales et le concours Miss Tahiti, entre autres, la figure de la vahiné continue d'imprégner les représentations de Tahiti et de produire des assignations sexistes et racisantes du corps des femmes tahitiennes, notamment à des fins touristiques[10]. L'imagerie de la vahiné, mobilisée à travers la mise en compétition des corps des femmes tahitiennes dans le sport ou les concours de beauté, permet en effet de convoquer l'idéal européen de l'authenticité exotique, valorisable dans l'économie du tourisme[11].
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