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Plusieurs classifications des fromages sont possibles. Ottogalli[1] (2000) a proposé une classification des fromages du monde en 8 classes et 45 familles reposant sur des critères microbiologiques. La FAO[N 1] propose une classification suivant la consistance de la pâte (liée à la teneur en eau), la teneur en matière grasse et les principales caractéristiques d'affinage[2] (voir le tableau en annexe). Cette approche de type « anglo-saxonne » qui groupe les fromages suivant un critère de texture utilise les termes de « fromage à pâte dure, molle » employés aussi dans la classification européenne mais avec un sens différent. L'approche européenne, plus spécifique de l'Europe du Sud d'ailleurs, groupe les fromages sur la base des processus technologiques[3]. C'est la classification présentée dans cet article, la plus utilisée en France.
Toute la technologie fromagère vise à transformer le lait, un produit très périssable, en un produit beaucoup plus sec et acide, se conservant bien plus longtemps, à savoir le fromage. Elle s'appuie sur deux grands principes généraux de conservation des aliments[4] :
Rappelons que la fabrication du fromage se fait en quatre grandes étapes :
Durant l'étape de la coagulation, il est possible d'agir sur le pH en faisant plus ou moins intervenir les bactéries lactiques acidifiantes. Le coagulum obtenu par la voie acide est extrêmement friable et ne présente qu'un faible pouvoir de synérèse (séparation du lactosérum du caillé). C'est pourquoi un grand nombre de fromages sont obtenus par une coagulation mixte résultant de l'action conjuguée de la voie bactérienne acidifiante et de la voie enzymatique. Mais pour chaque type de fromage, l'acidification doit être menée avec précaution entre d'étroites limites, au-delà desquelles des défauts apparaissent[5].
L'égouttage permet d'agir sur la masse d'eau libre mais n'intervient pas sur l'eau liée qui se trouve en interaction avec les constituants. Plusieurs facteurs permettent d'agir sur l'égouttage : le tranchage (le gel est coupé pour accroître la surface d’exsudation du lactosérum), le brassage (agitation modérée du lactosérum), le chauffage (une élévation de température accroît fortement l'égouttage), le pressage (la pression évacue le lactosérum intergranulaire) et la centrifugation.
Le salage du caillé[6] ou du fromage frais est le facteur essentiel permettant de diminuer l'activité de l'eau aw. La croissance des bactéries passe par un maximum pour une activité aw se situant entre 0,9 et 1, puis diminue rapidement avec l'abaissement de l'aw. À l'exception de quelques bactéries halophiles, aucun développement bactérien n'est observé en dessous de aw=0,85. La plupart des levures ne se développent plus en dessous de aw=0,80 et peu de moisissures en dessous de aw=0,70. L'activité enzymatique diminue aussi avec la diminution de l'activité de l'eau.
Durant la phase d'affinage, l'activité de l'eau aw est déterminée par la teneur en eau, la teneur en sel et la teneur en azote soluble.
Ramet[4] propose de distinguer quatre grandes catégories de fromages en fonction des deux paramètres essentiels de la conservation des aliments, le pH et l'activité de l'eau :
Les deux critères pH et aw ne permettent pas de définir des catégories aux frontières bien nettes. Aussi l'ensemble de tous les fromages se répartissent dans un continuum de valeurs pH-aw avec quatre nuages de points plus denses donnant seulement une indication claire sur l'aptitude à la conservation des fromages les plus courants.
Après la coagulation et l'égouttage, il faut prendre aussi en compte l'affinage qui modifie profondément la composition chimique du produit. Alors que les deux premières opérations se font en général sur une journée, l'affinage demande de plusieurs semaines à plusieurs mois. Au cours de l'affinage, une remontée du pH permet les réactions de lipolyse et de protéolyse (pH 5-6) qui jouent un rôle essentiel dans la constitution d'une croûte naturelle concentrant les odeurs et saveurs typique du produit.
La technologie fromagère pour chaque type de fromage peut se résumer ainsi[4],[N 3] :
Les fromages à pâte fraîche sont constitués de pâtes homogènes, de couleur blanche, lisses, onctueuses, développant une saveur acidulée qui contiennent de 14 à 30 % de matières sèches (donc jusqu'à 86 % d'eau).
Exemples : cottage cheese, faisselle, fromage blanc, mascarpone, petit-suisse…
Ce sont des pâtes homogènes, à onctuosité et saveur variable selon le degré d'affinage. Elles contiennent de 40 à 50 % de matière sèche (donc de 50 à 60 % d'humidité). Elles sont pour la plupart originaires de France.
Sous-catégorisation en fonction du type de croûte
Ce sont des pâtes homogènes et onctueuses avec la possibilité de quelques trous de fermentation. Elles contiennent de 44 à 55 % de matière sèche.
Exemples : cantal, reblochon, chevrotin, Ossau-Iraty, raclette, salers, tomme de Savoie…
Ce sont des pâtes fermes et onctueuses, parfois percées des trous de fermentation provoqués par le dégagement de CO2 de certains micro-organismes. Elles contiennent de 58 à 64 % de matière sèche.
Exemples : beaufort, comté, emmental, gruyère…
On distingue les fromages à pâte pressée demi-cuite (ou mi-cuite ou semi-cuite). Il s'agit d'un fromage à pâte pressée dont le caillé égoutté et pressé est chauffée à moyenne température (en dessous de 50 °C) durant une courte période[8],[9].
Exemple : Leerdammer (Pays-Bas), cheddar (Grande-Bretagne), tête de moine (Suisse), Abondance[10], fontine (Italie).
Les fromages à pâte dure sont technologiquement proches des fromages à pâte pressée cuite. Les principaux représentants sont d'origine italienne (parmesan, asiago, grana) et suisse (sbrinz). Ils sont encore plus riches en matière sèche que les pâtes pressées cuites puisqu'ils en contiennent de 64 à 72 %. Ce sont des fromages saisonniers traditionnellement élaborés pendant la période de forte production de lait qu'est l'été. Leur forte teneur en matière sèche en font des fromages de garde, pouvant être conservés deux à trois ans.
Exemple : asiago, Grana Padano, parmesan…
En fabrication industrielle, les mêmes techniques sont utilisées que pour les pâtes pressées cuites si bien que souvent les fromages à pâte dure sont classés parmi les fromages à pâte pressée cuite.
Ce sont des pâtes fondantes, à saveur forte, salée et légèrement astringente. Elles se caractérisent par un développement interne de la moisissure bleue Penicillium roqueforti. En France, les bleus sont fabriqués en général en zone de petite montagne, avec du lait de brebis, de chèvre ou de vache, pur ou mélangés.
Exemple : bleu d'Auvergne, bleu de Gex, bleu des Causses, fourme d'Ambert, roquefort, stilton cheese
Les fromages à pâte filée sont des fromages typiques d'origine italienne (formaggio di pasta filata), traditionnellement fabriqués avec du lait d'hiver, conférant à la pâte une couleur blanche recherchée. Ils peuvent être fabriqués avec du lait de vache, de brebis ou de chèvre, comme le provolone ou caciocavallo, mais aussi du lait de bufflonne pour la mozzarella.
Jusqu'au brassage en cuve, ils présentent de grandes similarités avec la fabrication de pâtes pressées.
Exemples : provolone, caciocavallo, mozzarella…
Ces produits sont obtenus par concentration des protéines solubles du lactosérum. Traditionnellement, ces préparations fromagères servaient à valoriser le lactosérum, un produit longtemps considéré comme un déchet encombrant. Toutefois, ils ne correspondent pas à une définition restrictive du fromage qui doit être issu de la coagulation de la caséine du lait [N 4].
Dans l'industrie fromagère, la séparation est faite par chauffage du lactosérum acidifié en cuve ou en échangeur fermé puis par filtration ou centrifugeur.
Exemple : sérac (Suisse et France), la brousse (Provence, France), greuille (Pyrénées, France), brocciu (Corse, France), ricotta (Italie), anari (Chypre), mytzithra (Grèce)…
Ce sont des fromages originaires du bassin méditerranéen oriental qui ont pour caractéristique d'être préparés à partir de lait fortement salé et/ou d'être conservés en saumure après égouttage.
Le fromage type de cette classe est le fromage grec feta, fabriqué à partir de lait de brebis et de chèvre. Sa fabrication s'est élargie à l'Europe et l'Amérique du Nord en utilisant du lait de vache. En 2002, l'Union Européenne a inclus le feta dans la liste des produits protégés d'origine contrôlée : il doit être produit dans certaines régions de Grèce avec du lait de brebis avec éventuellement du lait de chèvre (pour moins de 30 %).
Le second fromage important est le domiati fabriqué en Égypte. Sa fabrication s'apparente à celle des fromages à pâte pressée non cuite mais en utilisant du lait fortement salé (de 6 à 15 % de NaCl). Cette forte salinité retarde fortement le temps de coagulation et diminue la fermeté du gel.
Le feta comporte un taux final de sel de 3 à 5 %. Le domiati est conservée dans une saumure très concentrée (14 à 18 %) et comporte finalement de 6 à 9 % de chlorure de sodium.
Il s'agit de préparations fromagères fabriquées à partir d'autres fromages que l'on broie et remet à fermenter ou dont on a fondu ensemble la pâte.
Jadis, c'étaient des produits liés à la récupération ou la valorisation de restes de fromages « passés » (trop faits, trop durs) ou accidentés[12]. Dans de nombreuses régions de France, existaient des fromages forts, qui étaient fabriqués pour récupérer les restes. Après avoir coupé et broyé de vieux morceaux de fromage immangeables, on les trempait dans un liquide (vin, alcool, fromage frais, lait…) afin d'enclencher une seconde fermentation. Exemple : fourmagée (Perche), cachaille (midi provençal), foudjou (Drôme)…
Actuellement, les entreprises laitières en mélangeant des fromages frais et affinés, additionnés éventuellement de lait, beurre, crème, caséine, lactosérum et d'autres ingrédients (épices, aromates, jambon etc.) parviennent à produire des saveurs très variées. Depuis quelques années, grâce à une publicité intensive, les fromages fondus à base de pâtes fraîches ont gagné une part importante du marché[7]. Le traitement thermique se fait à 100 °C en présence de polyphostates de calcium et de sodium (à 3 %).
Exemples : Cancoillotte ou cancoyotte (appellation usuelle), Fromage aux noix, La vache qui rit (depuis 1921), Vache Grosjean (depuis 1926), Kiri, Société Crème.
Pour toutes ces pâtes, il est aujourd'hui possible de trouver des fromages allégés en matière grasse. Cette offre correspond à une demande plus générale des consommateurs de produits contenant moins de graisse. Le fromage n'échappe pas à ce phénomène.
Dénomination | pâte extra-dure | pâte dure | pâte demi-dure | pâte demi-molle | pâte molle |
---|---|---|---|---|---|
Teneur en eau (%) dans le fromage dégraissé | <51 | 49-56 | 54-63 | 61-69 | >67 |
Second élément de dénomination | extra-gras | tout-gras | mi-gras | quart-gras | maigre |
Matière grasse (%) dans l'extrait sec | >60 | 45-60 | 25-45 | 10-25 | <10 |
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