Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie
jurisdiction des Nations unies situé à La Haye (Pays-Bas) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
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Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) est une ancienne juridiction instituée le par la résolution 827 du Conseil de sécurité de l'Organisation des Nations unies[1] afin de poursuivre et de juger les personnes s'étant rendues coupables de violations graves du droit international humanitaire sur le territoire de l'ex-Yougoslavie à compter du 1er janvier 1991, c'est-à-dire durant les guerres de Yougoslavie (guerre de Croatie, guerre de Bosnie-Herzégovine et guerre du Kosovo), conformément aux dispositions de ses statuts. Son siège est situé à La Haye (Pays-Bas).
Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie | |
Devise : « Les criminels de guerre devant la justice, la justice pour les victimes » | |
Situation | |
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Région | Ex-Yougoslavie |
Création | |
Dissolution | |
Siège | La Haye (Hollande-Méridionale) Pays-Bas |
Coordonnées | 52° 04′ 04″ N, 4° 21′ 13″ E |
Organisation | |
Personnes clés | Antonio Cassese, premier président Carla Del Ponte, procureur générale de 1999 à 2007 Serge Brammertz, procureur général de 2008 à 2017. |
Organisations affiliées | Organisation des Nations unies |
Site web | http://www.icty.org/ |
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Depuis la tenue de sa toute première audience, le (à l’encontre de Dragan Nikolić, un commandant du camp de Sušica en Bosnie-Herzégovine orientale, inculpé de crimes commis contre des non Serbes en 1992)[2], le Tribunal a mis en accusation 161 personnes. Après les arrestations de Slobodan Milošević, le 1er avril 2001 et de Radovan Karadžić, le , en 2011, il ne restait que deux accusés en fuite : Goran Hadžić et Ratko Mladić[3]. Ce dernier a été arrêté le [4], faisant de Goran Hadžić le dernier fugitif recherché par le TPIY. Goran Hadžić fut finalement arrêté à son tour le [5].
Ante Gotovina, un général croate accusé de crimes contre l'humanité sur les Serbes de Croatie, qui dans un premier temps fut condamné à 24 ans de prison a été libéré en appel, en novembre 2012, provoquant l'incompréhension et le doute sur la crédibilité du Tribunal. Quelques jours plus tard c'est Ramush Haradinaj un des principaux chefs militaires des albanais du Kosovo qui est libéré car les neuf témoins dont trois protégés par la mission d'administration intérimaire des Nations unies au Kosovo (MINUK) qui devaient comparaître contre lui ont été assassinés ou sont morts dans des conditions suspectes. Une autre critique formulée est celle du problème des pressions externes auxquelles ont été soumis les juges ou les témoins. Selon un des anciens procureurs du tribunal Carla Del Ponte, « certains juges du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie avaient peur que les Albanais viennent eux-mêmes s'occuper d'eux »[6],[7],[8],[9],[10],[11].
Le TPIY est une instance judiciaire de l’Organisation des Nations unies chargée de juger les auteurs de crimes de guerre en ex-Yougoslavie.
Le TPIY est dissous le [12] et ses missions résiduelles, notamment le contrôle de l'application des peines et l'examen des procédures d'appel depuis le , ont été transférées au Mécanisme résiduel pour les Tribunaux pénaux internationaux.
Les juges du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie siègent à deux niveaux :
L'instance créée respecte le mode de vote « 1 man, 1 vote » (« un homme, un vote »).
Les juges de première instance sont élus par l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations-Unies. Celle-ci exige des juges de toutes nationalités. Les juges de deuxième instance constituent le Parquet et sont nommés par le Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations-Unies. Il désigne également le procureur général chargé de l'affaire.
Il existe le greffe, désigné par le secrétaire général de l'ONU.
Le projet de création du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (résolution 808) est adopté à l'unanimité, le , mais il ne se concrétise que le , par la signature du traité de Pristina (quatorze pays au total).
Ce n’est qu’à partir du mois d’août 1992 que l'opinion publique mondiale prend conscience de l'atrocité des actes commis en ex-Yougoslavie, grâce à des révélations dans la presse américaine.
Le Conseil de sécurité demande alors aux États et aux organisations intergouvernementales ou non gouvernementales de lui transmettre toutes informations qu’ils posséderaient sur les crimes en train d'être commis.
Pendant ce temps, deux projets prennent forme :
Le Conseil reçut ces deux projets et préféra le premier. Il adopta à l'unanimité, le , la résolution 808 par laquelle il décida la création d’un Tribunal indépendant. Mais le statut de celui-ci n’avait pas encore été voté.
Ce fut chose faite trois mois plus tard, par l’adoption le de la résolution 827, par laquelle le Conseil de sécurité approuva le statut du Tribunal et décida de créer un Tribunal international dans le seul but de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis le .
L'objectif de règlement du contentieux pour le TPIY et le TPIR a été fixé à 2010, quitte à déférer certains cas aux juridictions nationales.
Un long débat, qui n'est pas encore terminé, a opposé les partisans et les opposants à ce tribunal. Si l'idée qu'un crime contre une population doit être puni est partagée, la question se pose en ce qui concerne les conflits pour lesquels cette règle sera appliquée. Ainsi, il est notable de constater que certains ont très largement critiqué ce tribunal, en demandant, puisque des crimes devaient être jugés, de s'intéresser au génocide des Amérindiens, aux guerres d'Indochine, du Viêt Nam, d'Algérie, etc.
Par ailleurs, pareil tribunal n'a pas été institué pour juger des militaires américains qui auraient commis des crimes en Afghanistan ou en Irak[15].
Depuis la tenue de sa toute première audience, le (dessaisissement dans l’affaire Tadić), le Tribunal a mis en accusation un total de 161 personnes, et a clos les procédures concernant 113 d’entre elles : neuf ont été acquittées, 55 condamnées (quatre sont en attente de transfert, trente ont été transférées, dix-neuf ont purgé leur peine, un condamné est décédé en cours d’exécution de peine, l'ancien président serbe, Slobodan Milosevic est décédé en cours de procès, sans avoir été condamné), et treize ont vu leur affaire renvoyée devant une cour de l’ex-Yougoslavie ; par ailleurs, 36 affaires ont été proclamées terminées à la suite soit du retrait de l’acte d’accusation soit du décès de l’accusé (avant ou après le transfert au Tribunal). Depuis l'arrestation de Radovan Karadžić, Ratko Mladić et Goran Hadžić, il n'y a plus d'accusé en fuite. De plus, 24 autres individus ont été jugés pour outrage au Tribunal.[réf. nécessaire]
La question de la compétence du Conseil de sécurité à créer ce tribunal a été posée.
En effet, seul le chapitre VII de la Charte de l’ONU, qui fait référence à des situations qui créent une menace contre la paix et la sécurité internationales, justifie l’intervention du Conseil de sécurité, et les articles de ce chapitre ne font pas spécialement référence à un système pénal qui pourrait être mis en place. De plus, l’article 29 dispose que « le Conseil de sécurité peut créer les organes subsidiaires qu’il juge nécessaires à l’exercice de ses fonctions ». Or le Tribunal est un organe indépendant.
L’article 41 du chapitre VII, autorise le Conseil de sécurité « à décider quelles mesures n’impliquant pas l’emploi de la force armée doivent être prises », il peut donc suffire à créer un tribunal. Comme le Conseil de sécurité a constaté que « la prolongation de la situation en ex-Yougoslavie crée une menace contre la paix et la sécurité internationales », le chapitre VII devient « utilisable ».
L'indépendance du tribunal est aussi parfois critiquée, ses détracteurs lui reprochant d'être financé — et donc d'une certaine sorte contrôlé — par l'OTAN. L'allocution du porte-parole de l'OTAN lors de la campagne de bombardement de 1999, Jamie Shea, prononcée lors d'une conférence de presse à Bruxelles, le , est par exemple souvent citée comme une preuve de collusion entre OTAN et le TPIY. Jamie Shea déclara notamment :
« Je crois que la juge Louise Arbour commencera ses investigations quand on le lui permettra. Ce n'est pas Milosevic qui lui a donné son visa pour aller au Kosovo. Si, comme nous le souhaitons, elle bénéficie d'un accès libre, ce sera grâce à l'OTAN, qui est une organisation amie du tribunal et qui a détenu les personnes accusés de crimes de guerre en Bosnie. […] Les pays de l'OTAN sont ceux qui ont fourni les fonds pour créer le tribunal – nous sommes surtout des financiers – et bien sûr pour former une seconde chambre, de telle sorte que les jugements puissent être accélérés, aussi laissez-moi vous assurer que nous et le tribunal sommes unis dans cette affaire : nous voulons voir les criminels de guerre traînés en justice et je suis sûr que quand Louise Arbour ira au Kosovo et examinera les faits, elle accusera des Yougoslaves, et personne d'autre me semble-t-il pour l'instant. »
Ce sont surtout les pays du tiers-monde qui se sont montrés en désaccord avec le fait que seul le Conseil de sécurité décide de la création de ce Tribunal. Ils ont insisté pour que l’Assemblée générale soit associée d’une manière ou d’une autre à cette création.
La plupart de ces pays ont en effet demandé que le statut du Tribunal soit également soumis au vote de l’Assemblée. Les membres du Conseil n’ont pas satisfait à cette demande. On peut penser que c’est à cause du temps qu’aurait pris le vote, surtout si les membres de l’Assemblée avaient voulu apporter des modifications au statut, le projet aurait dû être revu et cela aurait donc retardé la mise en place du Tribunal.
Cependant, c’est à l’Assemblée générale de choisir les juges qui le composent et de voter son budget, ce qui lui donne un pouvoir de contrôle non négligeable sur son fonctionnement.
Il semble que la création du Tribunal par l’Assemblée générale ou par un traité aurait posé plus de problème. En effet, l’Assemblée générale a la compétence de créer un organe judiciaire mais elle ne peut pas imposer aux États d’y avoir recours, elle peut seulement le leur « recommander ». Seule l’intervention du Conseil permettait d’imposer aux États la remise des accusés et la collaboration avec le procureur pour la recherche des preuves.
Si le tribunal avait dû être créé par un traité, les États directement concernés auraient dû le ratifier également, sinon la création n’aurait pas eu de raison d’être. Le refus des Républiques d’ex-Yougoslavie aurait donc été fatal au Tribunal et à l’envie mondiale de juger les personnes présumées responsables de crimes. Mais la principale raison était qu’il eût fallu beaucoup de temps pour obtenir un nombre suffisant de ratifications et le but du TPIY était de rétablir la paix en ex-Yougoslavie au plus vite.
Le TPIY est très différent du Tribunal de Nuremberg. En effet, ce ne sont pas les vainqueurs du conflit qui ont décidé de juger les responsables de celui-ci mais la communauté internationale.
Le TPIY de La Haye, créé pour juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit international humanitaire juge les actes « dirigés contre des personnes ou des biens protégés aux termes des dispositions de la Convention de Genève pertinente », et en particulier :
Il peut poursuivre ceux qui commettent des violations des lois ou coutumes de la guerre, comprenant, sans y être limité les actions suivantes :
Il est compétent pour poursuivre et juger les auteurs de génocide défini comme l’un ou plusieurs des actes suivants (« commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel »).
Sont également punissables par le tribunal :
La définition du génocide reprend celle de l’article 2 de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948. Elle englobe « tout acte commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ».
Ce tribunal est habilité à juger les personnes présumées responsables de crimes contre l’humanité, qu’ils aient été commis au cours d’un conflit armé (international ou interne), ou dirigés contre une population civile quelle qu’elle soit. Ces crimes sont :
Le Tribunal international a uniquement compétence à l’égard des personnes physiques conformément aux dispositions de son statut. («§ ratione personae », art 6)
L'article 7 les précise comme suit
L’article 10 (Non bis in idem) précise que « Nul ne peut être traduit devant une juridiction nationale » pour « graves violations du droit international humanitaire » (…) s’il a déjà été jugé par le Tribunal international pour ces mêmes faits. » De plus, « Quiconque a été traduit devant une juridiction nationale pour des faits constituant de graves violations du droit international humanitaire ne peut subséquemment être traduit devant le Tribunal international que si :
Le Tribunal international tient compte de la mesure dans laquelle cette personne a déjà purgé toute peine qui pourrait lui avoir été infligée par une juridiction nationale pour le même fait.
L'article 8 précise la compétence ratione loci et la compétence ratione temporis : elle s’étend respectivement au territoire de l’ancienne République fédérative socialiste de Yougoslavie (dont l’espace terrestre, l’espace aérien et les eaux territoriales), et à la période commençant au .
Le Tribunal international a la primauté sur les juridictions nationales précise l’article 9. (À tout moment de la procédure, il peut demander officiellement aux juridictions nationales de se dessaisir en sa faveur…).
Le Tribunal compte trois organes : les Chambres, le Bureau du Procureur et le Greffe. Les Chambres sont composées de juges indépendants, ressortissants d’États différents.
Les juges élus par l’Assemblée générale sur une liste faite par le Conseil de sécurité doivent être de haute moralité, impartiaux, intègres, compétents en droit pénal et international, notamment en droit international humanitaire et des droits de l’Homme et posséder les qualifications requises dans leurs pays, pour être nommés aux plus hautes fonctions judiciaires.
Chaque État membre de l’ONU ou y ayant une mission d’observation permanente peut présenter deux candidatures de juges, le Conseil de sécurité retenant une liste de 22 à 33 candidats en veillant à « assurer une représentation adéquate des principaux systèmes juridiques du monde ».
L’Assemblée générale de l’ONU élit (pour quatre ans, rééligibles) sur cette liste les 11 juges du Tribunal international.
Ces juges élisent le président et adoptent un règlement.
Le procureur est indépendant au sein du tribunal et est responsable de l’instruction des dossiers et de l’exercice de la poursuite contre les auteurs de violations graves du droit international humanitaire commises sur le territoire de l’ex-Yougoslavie depuis le . « Il ne sollicite ni ne reçoit d’instructions d’aucun gouvernement ni d’aucune autre source ». Il ouvre une information d’office ou sur la foi des renseignements qu’il a évalué après les avoir obtenus « de toutes sources, notamment des gouvernements, des organes de l’Organisation des Nations unies, des organisations intergouvernementales et non gouvernementales ». Il peut interroger les suspects, les victimes et les témoins, réunir des preuves et instruire. Il peut demander le concours des autorités de l’État concerné. Depuis le , la fonction de procureur, précédemment exercée depuis 1999 par Carla Del Ponte, est assurée par le Belge Serge Brammertz.
Le suspect interrogé a le droit à un traducteur et au conseil de son choix, rémunéré par le tribunal s’il le faut.
Si « au vu des présomptions », le procureur établit un acte d’accusation argumenté, le juge de la Chambre de première instance examine cet acte et le confirme ou le rejette. S’il a confirmé l’acte, le juge, sur réquisition du procureur, décerne les ordonnances et mandats d’arrêt, de détention, d’amener ou de remise de personnes et toutes autres ordonnances nécessaires pour la conduite du procès qui doit être « équitable et rapide », conforme aux « règles de procédure et de preuve », les droits de l’accusé étant pleinement respectés et la protection des victimes et des témoins dûment assurée.
En état d’arrestation, l’accusé est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité ait été établie conformément aux dispositions du statut du tribunal. Il est informé des chefs d’accusation, déféré au Tribunal international qui lui lit l’acte d’accusation, s’assure du respect de ses droits, vérifie qu’il a compris le contenu de l’acte d’accusation et lui ordonne de plaider coupable ou non coupable. La date du procès est alors fixée, avec des audiences publiques sauf si la Chambre de première instance décide le huis clos (conformément à ses règles de procédure et de preuve). L’accusé a le droit de ne pas être forcé de témoigner contre lui-même ou de ne pas s’avouer coupable. Les victimes et témoins ont droit à une protection (tenue d’audiences à huis clos, protection de l’identité, etc.).
La Chambre de première instance prononce (en audience publique et à la majorité des juges de cette Chambre) les sentences, les peines et sanctions, écrites et motivées (avec éventuellement l’adjonction d’opinions individuelles ou dissidentes). Cette Chambre ne fixe que des peines d’emprisonnement (sur la base de la grille générale des peines d’emprisonnement des tribunaux de l’ex-Yougoslavie), en tenant compte de la gravité de l’infraction et de la situation personnelle du condamné. La Chambre de 1re instance peut aussi ordonner la restitution aux propriétaires légitimes de biens et ressources spoliés.
La Chambre d’appel traite des recours déposés par les condamnés ou par le procureur, relatifs aux erreurs sur un point de droit, erreur de fait ayant entraîné une erreur judiciaire[16]. Elle peut confirmer, annuler ou réviser les décisions de première instance.
Un fait nouveau, après le procès en 1re instance ou en appel, autorise une demande en révision de la sentence.
L’emprisonnement se fait dans un État désigné par le Tribunal et choisi parmi des états acceptant de recevoir le condamné. La peine est effectuée conformément aux règles nationales, mais sous contrôle du Tribunal international qui donne un avis sur les grâces ou commutation de peine possibles dans le pays de l’emprisonnement.
Les États aident « sans retard » le Tribunal international à la recherche et au jugement des personnes accusées d’avoir commis des violations graves du droit international humanitaire.
La Convention du sur les privilèges et immunités des Nations unies s’applique au Tribunal international, aux juges, au procureur et à son personnel ainsi qu’au greffier et à son personnel qui bénéficient donc des facilités accordés aux agents diplomatiques, conformément au droit international.
Les articles des statuts du TPIY font expressément référence aux « personnes présumées responsables » et non aux États, car la philosophie générale du Tribunal pénal international est de punir les responsabilités individuelles. Le TPIY recherche essentiellement les personnes de haut rang soupçonnées de porter une lourde responsabilité dans les crimes commis en ex-Yougoslavie, mais le TPI de La Haye qui devait agir rapidement a eu des difficultés à obtenir la coopération de certains États pour rechercher et arrêter certains accusés.
Ce type de tribunal semble aussi être un lieu et moment important de (re)constitution de la mémoire de faits généralement cachés par les auteurs de crimes, ce qui peut aider à apaiser les tensions bloquant un vrai retour de la paix. Le problème de l'ensemble des séquelles de guerre autres qu'économiques, semble ainsi pouvoir, à l'avenir, trouver à être mieux traité par le droit international, parce que moins « indicible ».
À la suite du cas du TPIY, les polémologues et spécialistes en victimologie suivent avec intérêt les efforts du TPIR et également sa contribution, par la possibilité qu'ont les victimes de parler, à aider au travail de deuil et d'apaisement des populations concernées. Certaines personnalités, groupes ou ONG environnementalistes ont évoqué l'intérêt qu'il y aurait à ce que la compétence des tribunaux internationaux puisse être étendue aux crimes contre l'environnement, en tant qu'ils peuvent être en quelque sorte considérés comme des sortes de crimes différés, contre l'humanité future.
Le manque de moyens et de juges ainsi que le temps pris par les traductions sont source de retard et de difficultés[17].
Une autre critique formulée est celle du problème des pressions externes auxquelles ont été soumis les juges ou les témoins. Ainsi, selon un des anciens procureurs du tribunal lui-même – en l'occurrence Carla Del Ponte – « certains juges du Tribunal pour l'ex-Yougoslavie avaient peur que les Albanais viennent eux-mêmes s'occuper d'eux »[6]. De même, lors du procès de l'ancien commandant de l’UÇK et ancien premier ministre du Kosovo, Ramush Haradinaj, accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, ce ne sont pas moins de neuf témoins – dont trois protégés par la MINUK – qui ont été assassinés ou sont morts dans des conditions suspectes, le procès s'étant finalement soldé par un acquittement[18].
Le , Florence Hartmann, l'ancienne porte-parole de Carla Del Ponte, a été condamnée par le TPIY pour « divulgation d'informations concernant des décisions confidentielles du TPIY ». Des informations qui, selon elle, auraient permis de prouver l'implication de la Serbie dans les événements de Srebrenica[19]. La question se pose de la compatibilité de cette condamnation avec les règles de procédure du Tribunal, ainsi qu'avec la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
En 2010, une enquête a été ouverte sur des pressions (chantage, menaces, pot-de-vin etc.) de la part du tribunal, notamment son procureur Carla Del Ponte, sur les témoins à charge lors du procès de Vojislav Šešelj[20].
En 2012, David Harland publie une tribune intitulée "Selective Justice for the Balkans" dans laquelle il soutient que les récents acquittements de croates (Ante Gotovina, Mladen Markac) et de kosovars (Ramush Haradinaj) démontrent le biais du tribunal en la faveur des « amis de l'Occident »[21]. En réponse, une chercheuse en science politique indique que le but de la juridiction n'est pas « de rendre la justice, pour les torts passés, de manière égale vis-à-vis de "toutes les parties" ou de favoriser la réconciliation, mais d'évaluer soigneusement chaque cas d'espèce en fonction de leurs propres caractéristiques ». Ainsi, « nous devons juger le travail du tribunal par rapport à son expertise juridique et non en fonction des résultats politiques que nous souhaitons »[22].
La condamnation de Ratko Mladić en 2017 marque la fin du tribunal qui ferme ses portes après notamment 161 mises en accusation et 83 condamnations[23]. Si d'un point de vue judiciaire la mission a été remplie, la réconciliation entre les Serbes, Monténégrins, Croates, Bosniaques et Albanais reste à parachever[24].
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