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recherches menées par des personnes non-professionnelles De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les sciences participatives, parfois appelées sciences citoyennes ou sciences collaboratives, sont « des formes de production de connaissances scientifiques auxquelles des acteurs non-scientifiques-professionnels — qu’il s’agisse d’individus ou de groupes — participent de façon active et délibérée »[1].
Elles se sont notamment développées dans le domaine des sciences naturelles, où, dans le fil des sociétés savantes des siècles passés, une grande partie du travail se faisait sur le terrain sans nécessiter de moyens coûteux ni de laboratoire. Des non-professionnels contribuaient aux avancées en matière de connaissance et d'inventaires. Avec l'amélioration des technologies, les sciences participatives ont peu à peu investi d'autres domaines comme la médecine, l'astronomie ou la physique, mais aussi les sciences sociales.
Après le succès puis le déclin des sociétés savantes, des campagnes d'acquisition de données, favorisées par l'amélioration des télécommunications, se sont organisées à grande échelle en impliquant un grand nombre de participants. C'est ainsi qu'a été initié vers 1900, à l'échelle de toute l'Amérique du Nord, le Christmas bird count' (comptage d'oiseaux dans les 15 jours suivant Noël, chaque année, sous l'égide de la fondation Audubon)[2]. Ce suivi implique aujourd’hui environ 50 000 citoyens. En 1965, un autre suivi ornithologique, dit Breeding bird survey (en), a été mené en mai et juin (coordonné par le U.S. Geological Survey). Un autre suivi (Projet FeederWatch par le Cornell Lab of Ornithology, consistant dès les années 1970 à relever les espèces dans les mangeoires de l'Ontario) a été élargi à toute l’Amérique du Nord en 1988[2]. L'apparition de nombreux logiciels, outils et approches informatiques utiles permet d'élargir les domaines accessibles aux sciences participatives (ex : OpenStreetMap pour la cartographie collaborative).
Le concept de sciences citoyennes est né aux États-Unis. Il a été créé au début des années 1970 sous le terme « citizen science » par deux physiciens : Joël Primack (chercheur en astrophysique) et Frank von Hippel[3] directeur d’un institut de recherche sur l'énergie et l'environnement à l'Université de Princeton et aujourd'hui codirecteur du PSGS (Program on Science and Global Security (en)).
Mycle Schneider, nommé dans le directoire de la fondation japonaise Takagi Fund for Citizen Science[4] en 2001, a repris cette définition des sciences citoyennes[5] :
« La science citoyenne peut être définie comme l'effort participatif et combiné de recherche, d’analyse et d’éducation publique qui poursuit strictement, comme principe de base, l'objectif de bien-être collectif des générations présentes et futures d’êtres humains sur la planète et de la biosphère.
Le scientifique citoyen, à travers ses capacités particulières de recherche et d’analyse, doit participer à la protection de la société contre des modes de développement qui placent l'intérêt de l'État ou l’intérêt corporatif au-dessus du bénéfice collectif. Le scientifique citoyen est donc un contre-expert par excellence. »
Cette nouvelle définition a abouti en à la création de la Fondation Sciences Citoyennes[6], une association française prônant une vision très différente des sciences citoyennes basée sur un contrôle de la recherche scientifique par les citoyens avec des visées politiques.
Les citoyens sont encouragés à lancer des alertes lorsqu'ils considèrent qu'ils sont en danger (exemple des antennes téléphoniques…) et peuvent ainsi faire la demande d'une expertise scientifique, qui appuiera ou non leurs craintes à ce sujet.
Le document Green Paper on Citizen Science: Citizen Science for Europe[7] les décrit dans ces termes (traduction libre) :
« ... des activités de recherche scientifique auxquelles des citoyens contribuent activement par un effort intellectuel ou par l'apport de connaissances pertinentes, d'outils ou de ressources. Les participants fournissent des données et des lieux de recherche, soulèvent de nouvelles questions ; ils collaborent avec les chercheurs à la création d'une nouvelle culture scientifique. Tout en effectuant des activités à la fois intéressantes et utiles, ces chercheurs bénévoles acquièrent de nouvelles connaissances et compétences, ainsi qu'une meilleure compréhension du travail scientifique. Ces pratiques en réseau, ouvertes et transdisciplinaires, améliorent les interactions science-société-politique et favorisent une recherche plus démocratique, où la prise de décision se fonde sur les résultats des recherches[8]. »
C'est un des aspects d'une gouvernance plus collaborative et citoyenne du bien commun que constituent les ressources naturelles[9], qui semble pouvoir se développer dans le contexte du Web 2.0. Ces sciences participatives peuvent aussi être un moyen pour les citoyens de retrouver ou conserver un contact avec la faune et la flore qui les entourent, tout en contribuant à leur restauration et à leur protection [10].
On retrouve trois grands types de programmes de sciences citoyennes :
Dans tous les cas, les citoyens volontaires peuvent - en respectant un protocole préparé ou validé par des scientifiques - effectuer des observations, des mesures, des échantillonnages ou comptages et transmettre ces données (brutes ou préparées) afin qu'elles soient traitées et analysées par les scientifiques. À titre d'exemple, en 2010, environ 200 000 personnes ont contribué à la surveillance des cours d'eau proches de chez eux pour la journée mondiale de l'évaluation de la qualité des cours d'eau « World Water Monitoring Day »[11].
Le suivi d'habitats, espèces ou écosystèmes via des indicateurs qui semblent pour la plupart indiquer une situation en déclin[12] doit être fait à large échelle, notamment pour évaluer le chemin qui reste à faire pour atteindre les objectifs de l'ONU en matière de biodiversité[13]. Certains indicateurs, concernant les poissons ou les oiseaux[14] donnent aussi des informations sur l'impact phénologique du dérèglement climatique[15]. Souvent un suivi temporel long et/ou sur de vastes territoires est nécessaire. Les scientifiques peuvent alors se faire assister, par des publics d'amateurs, des usagers ou des associations. La motivation de ces acteurs (parfois nommés « observ'acteur »[16] peut être déterminante pour l'ampleur et la qualité de certaines études[17].
On parle parfois de « parataxonomistes »[18] pour décrire des personnes n'ayant pas de formation scientifique mais employées comme assistant de chercheur sur le terrain. Ces parataxonomistes sont par exemple des étudiants, des écovolontaires ou membres de populations locales qui assistent des chercheurs dans leur tâche. Selon les cas ils peuvent être formés ou non, ou bénéficier d'une petite formation initiale. Ils sont surtout utilisés en zone tropicale pour inventorier la biodiversité qui est particulièrement riche alors que les spécialistes capables de déterminer ces espèces sont rares.
L'esprit de ces projets est généralement participatif, scientifiquement très ouvert et non concurrentiel, mais ils peuvent parfois aussi associer des citoyens à des structures privées ou publiques juridiquement contraintes par leurs statuts.
Les sciences citoyennes ne semblent pas adaptées à tous les sujets :
En octobre 2009, une première rencontre nationale sur les sciences citoyennes a fait écho à Montpellier aux nouvelles pratiques associant scientifiques et citoyens[26]. Ce colloque a présenté divers programmes de « recherche citoyenne ». Il a permis à des porteurs de projets, scientifiques, observateurs, citoyens et représentants de collectivités de partager leurs attentes et réfléchir à la définition et aux enjeux des sciences citoyennes. En , la Société française d'écologie (SFE) a ouvert une plate-forme multimédia qui se veut aussi une tribune libre ouverte aux échanges d'idées et débats sur les thèmes « Quelle place pour la science participative ? Quelles interactions entre « experts » et observateurs ? Quels résultats ? Quel avenir ? »[réf. souhaitée]
En 2016, François Houllier (directeur général de l'INRA) a rendu à Najat Vallaud-Belkacem (ministre de l’Éducation Nationale, de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche) et à Thierry Mandon (Secrétaire d'État chargé de l'Enseignement Supérieur et de la Recherche) un rapport sur "Les Sciences Participatives en France", construit en trois parties (état des lieux, bonnes pratiques et recommandations). Ce travail co-écrit avec Jean-Baptiste Merilhou-Goudard (conseiller du PDG de l'INRA) traite du travail collaboratif ainsi que des moyens techniques, financiers et réglementaires[27].
Le Collectif National Sciences Participatives-Biodiversité a été créé en 2012. Il rassemble des programmes de sciences participatives, et est co-animé par la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l'Homme (FNH) et l'Union Nationale des Centres Permanents d'Initiatives pour l'Environnement (UNCPIE). Il a notamment pour objectifs de structurer et réunir les acteurs de sciences participatives, recenser leurs initiatives, soutenir la contribution des sciences participatives auprès des instances politiques ou encore alimenter chaque année l’indicateur de l’Observatoire national de la biodiversité[28]. En , le collectif crée le site internet OPEN (Observatoires Participatives des Espèces et de la Nature), qui recense les initiatives de sciences participatives en France[29],[30],[31],[32].
En 2015 a été initié le collectif Vigie-Mer afin structurer le réseau des acteurs des sciences participatives en milieux marin et littoral, en explosion depuis les années 2000, en améliorant la visibilité et faciliter le lien avec chercheurs et gestionnaires d'aires marines protégées, mutualiser les méthodes et travailler sur la complémentarité des données[33].
Le Muséum national d'histoire naturelle porte de nombreux programmes de sciences participatives en biodiversité, à la fois via INPN espèces, programme d'inventaire participatif ayant pour objectif de compléter la répartition des espèces françaises et sous le chapeau Vigie-Nature, né en 1989 à partir du Suivi Temporel des Oiseaux Communs[34],[35], mais également en astronomie via le programme FRIPON de détection des bolides célestes [36].
En ce qui concerne la biodiversité, les associations botaniques et ornithologiques sont particulièrement actives, notamment via le réseau Visionature, Tela Botanica, Migraction, etc., et les actions de nombreuses associations locales sur le territoire. Outre ces programmes, des protocoles existent également pour aider des groupes de naturalistes amateurs à s'organiser par eux-mêmes pour exploiter leurs données : cette approche a notamment rencontré le succès à la Réunion[37].
Au Québec, il existe plusieurs programmes de science citoyenne, notamment :
Parfois loin des institutions, les sciences citoyennes se sont discrètement développées dans les années 1990-2000, dans une nouvelle dynamique, profitant notamment des progrès de l'informatique et des outils qui ont dopé les potentialités du travail collaboratif.
L’étude et le suivi de la biodiversité, qui sont des domaines de prédilection pour l’application des principes de sciences citoyennes (du fait d'une quantité de données à recueillir considérable sur l'ensemble du territoire, d'espaces « hors laboratoires », c'est-à-dire accessibles à tous (Michel Callon et al., 2001[39]) sont ainsi à l'honneur lors de cet événement.
La démocratisation de l'accès au GPS, permet via un simple téléphone portable de contribuer à des inventaires de la biodiversité, par exemple dans le cadre du projet InterregRINSE[40] qui a développé une application smartphone dite « Th@s Invasive » ; gratuite, disponible en français ou en anglais, et facilement téléchargeable[41] permettant à chacun de recenser et cartographier un grand nombre d'espèces exotiques envahissantes, en prenant une photo de l'espèce en question, qui sera géoréférencée par le GPS du smartphone et envoyé par le logiciel une fois confirmation faite par l'écocitoyen participant à cet inventaire général et permanent qui vise à limiter les impacts négatifs des espèces dites « invasives ».
À partir d'une telle base de données, on peut ensuite extraire (éventuellement de manière automatisée) des informations phénologiques d'intérêts climatique ou écologique sur les dates de germination, floraisons, fructification, reproduction, migration, etc. Il est aussi possible d'avoir des informations sur la taille de l'animal photographié (si l'on met par exemple une pièce de 1 euro à côté du poisson photographié), ce qui apporte chez certaines espèces des indications sur l'âge, le nombre d'œufs potentiellement pondus, ou parfois sur le sex-ratio; qui lui-même peut apporter des informations sur une possible pollution par des perturbateurs endocriniens). Il serait aussi possible de détecter d'éventuels effets de co-invasivité ou des facteurs favorisant ces espèces qui n'auraient pas encore été compris.
La colonisation de nouveau secteur géographique pourra être détectée plus vite, voire anticipée, ce qui permettra aux gestionnaires de milieux et d'espèces de mieux limiter certains des effets négatifs de ces phénomènes de pullulation.
Ce type d'approche a été rendue possible par un travail préalable (depuis les années 1990) sur l'aide à l'identification interactive par clé d'identification visuelle de plantes non indigènes pouvant (potentiellement) représenter une menace pour la biodiversité, notamment dans l’écozone qui inclut l'Allemagne, les Pays-Bas, la Belgique et le grand Nord-Ouest de la France[42]. Ce travail d'identification peut aussi être utile pour les autres régions et pays, notamment où ces espèces seraient réglementées ou là où elles peuvent être recherchées par les douanes comme "contaminants d'exportations commerciales" (exemple : « contamination par des graines dans de la nourriture pour oiseaux, mauvaises herbes dans des bonsaïs »[42]... Hormis pour les algues et mousses, ces clés interactives sont liées aux informations sur les espèces de la « Q-bank Invasive Plants database » (fiches descriptives et informatives, cartes d'aire de répartition mondiale, barcode moléculaire lorsque disponible, etc.). Ces informations sont disponibles en ligne[42].
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