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groupe ethnique du nord de la Côte d'Ivoire De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les Sénoufo[4] (ou Siéna, nom qu'ils se donnent, ou encore Sénéfo, Séné, Syénambélé ou Bamana) constituent une population d'Afrique de l'Ouest qui comprend une trentaine de sous-groupes, partagés entre le sud du Mali (principalement dans la région de Sikasso), le Burkina Faso et le nord de la Côte d’Ivoire, où se trouve Korhogo, leur centre principal. Le peuple sénoufo est l'un des plus importants peuples de Côte d’Ivoire dont il représente 9,7 % de la population[5]. Les Sénoufo représentent environ 1 500 000 personnes réparties en plus d’une trentaine de sous-groupes[6]. Chaque sous-groupe à ses propres caractéristiques mais ils partagent plusieurs traits culturels qui en font l’unité : la langue, les patronymes, l’organisation sociale et religieuse.
Burkina Faso | 305 800 (2005)[1] |
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Mali | 2,2 millions (2013)[2] |
Côte d'Ivoire | 2,4 millions (2017)[3] |
Langues | Langues sénoufo |
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Religions | Islam, Christianisme, Animisme |
Ethnies liées | Minianka, Niarafolos, Tchébalas, Tagbanas/Tagouanas, Nanfarans, Fodonons, Palakas, Kafibélés, Kadilé (Tengrela), Tèninwérê (Boundiali), Tagba/Tagban (Côte d'Ivoire/Burkina Faso/Mali),Karaboro,Gouin (Côte d'Ivoire/Burkina Faso) |
La société sénoufo reste dominée par les agriculteurs, qui pratiquent à la fois les cultures vivrières (mil, maïs, riz, igname) et commerciales (arachide, coton)[7].
Le mot Sénoufo, qui dérive du mot sénanbèle lui-même composé des mots ségi (champ) et nanbéle (hommes) signifie « ceux qui travaillent au champ »[8].
En Côte d'Ivoire, les Sénoufo se trouvent autour des villes de Boundiali, Madinani et Séguélon, Tengréla, Korhogo, Ferkessédougou, Katiola, Dabakala.
Les Sénoufo sont subdivisés en une trentaine de groupes parmi lesquels :
La première étape de la pénétration du peuple sénoufo en Côte d’Ivoire se déroule du Xe au XVe siècle[9], et la deuxième au XVIe siècle[9]. Les Sénoufos sont, après le groupe des Mandés du nord, les premiers habitants de l'actuelle Côte d'Ivoire. Les Sénoufos sont avec le groupe des Mandés et les Krous, habitants les plus anciens de leur région respective, de l’actuelle Côte d’Ivoire.
Ces peuples fonctionnent en chefferies et cela s'explique par :
On désigne par Siénéfo les premiers occupants du Siéné, région située entre San, à l’est du Mali, et Nouna à la frontière du Burkina avec le Mali. Les Siénéfos seraient installés depuis une époque très ancienne au nord-est de la Côte d’Ivoire, dans le Pays du Sel. Ils arrivèrent probablement au début du deuxième millénaire, en même temps que les Koulango et les Lobi au nord-est de la Côte d’Ivoire.
En fait, les langues de ces trois peuples appartiennent au groupe « Gur »[10], aussi appelées Voltaïque[11]. Ils partagent aussi les mêmes fonds d’institution et de culture, notamment le système matrilinéaire[12]. En effet, le rôle principal est joué par la famille de la mère. Donc, on pourrait penser qu’au début ils avaient quelques types de relations entre eux.
Les Siénéfo furent les premiers à s’installer dans l’espace compris entre le Baoulé (dans l’actuel Mali) et la Volta Noire (dans l’actuel Burkina Faso)[13].
Les ancêtres connus des Sénoufo sont les Pallaka (ou Falafala) et les Myoro qui vivaient de la chasse et la cueillette. Ils étaient installés dans les régions septentrionales du pays Sénoufo actuel. Il y eut aussi des éléments voltaïques descendus à une date reculée de la région comprise entre Banfora, Bougouni et Sikasso.
Les Pallakas avaient pour habitat originel le village de Ténigréra, dans les environs de la ville historique de Kong. Ils étaient considérés comme les maîtres de la terre. Mais sous la pression des immigrants ultérieurs, notamment les Mandé du nord, ils se disperseront dans la région de Ferkessédougou.
Les Myoros étaient initialement installés sur la rive droite du Comoé. Ils étaient des excellents chasseurs et de grands guérisseurs.
Ce sont sans doute, ces deux groupes qui sont supposés avoir eu les premiers contacts avec les fameux « mandébélé »[14] ou petits hommes aux pieds retournés, dont ils héritent les cérémonies initiatiques tels que le « poro ». Ainsi comme des techniques de chasse dont les « dozo » gardent encore jalousement le secret.
Ces ancêtres des actuels Sénoufos menaient une vie quasi-nomade de ramasseurs et de chasseurs. Ils cherchaient un gibier plus abondant et partirent de Koutiala au Mali vers le XIe ou XIIe siècle[15]. Ils émigrèrent peu à peu vers le Pays de la Kola, vers le sud[16] jusqu’à ce qu’ils se trouvent bloqués par les forêts de la zone tropicale.
Cependant, les versions d’origine « maliennes » dont se réclament les grandes familles sénoufo restent à prouver. En fait, ces versions sont pour la plupart dues à des influences culturelles du monde des Mandé, les Malinké. Les familles maraboutiques mandé, installées autour des grands chefs sénoufos, ne pouvaient admettre que leurs maîtres disent venir d’un autre pays que le leur.
Les Sénoufo, pour leur part, grands admirateurs de la culture du monde mandé prétendaient, jusqu’à une date récente, rehausser la grandeur de leurs chefferies en les rattachant aux origines historiques des Mandé du Sahel et des savanes soudano-guinéennes.
Le processus de formation des Sénoufo, processus historique de fusion de groupes divers comprenant des autochtones et des émigrés remonte à la protohistoire et s’achève au cours du premier millénaire de notre ère. C’est du mélange de ces populations que sont issus les Sénoufos actuels.
Cette formation a connu deux grandes phases :
Des Sénoufo fondèrent Katiola, puis occupèrent petit à petit tout l’espace compris entre les localités actuelles de Bouna, Prikro, Mankono, Séguéla, Touba et Odienné en Côte d’Ivoire, espace probablement inhabité à l’époque.
Les Sénoufos ont fondé aussi Kong[17], Dabakala, Kanangoro et Boundiali.
Du XIIIe au XIVe siècle naît à son tour Korhogo, qui signifie « héritage » en langue locale. Cette ville est la « capitale » actuelle du pays sénoufo.
Par vagues successives, le peuple occupe un espace géographique immense dont les limites sont grossièrement marquées par les localités actuelles d’Odienné, Touba, Séguéla, Mankono, la zone nord du pays Baoulé, Bondoukou et Bouna.
Le peuplement sénoufo, couvrant un espace géographique relativement étendu, sera peu perturbé par l’implantation mandé, qui sera au contraire coupée en deux par le territoire sénoufo.
Les Mandé se sont implantés autour du XIIIe siècle dans les régions de Kong, Korhogo, Boundiali, Odienné, Dabakala, Bondoukou et Bouna.
À l'origine, les immigrants mandés n’ayant d’autres préoccupations que le commerce sont favorablement accueillis. Ils introduisent dans le pays le tissage et les métiers du cuir.
Par ailleurs, ils s’intègrent à leur nouveau milieu, parlent le sénanri et deviennent même à l’origine de quelques-uns des rituels les plus célèbres du pays sénoufo : le « korobla »[18].
Les emprunts sont réciproques. Outre l’initiation au « korobla », les Sénoufos s’enrichissent également des techniques de quelques autres métiers venus du Mali et acquièrent des nouvelles habitudes alimentaires.
Ainsi, se crée un équilibre culturel favorisant des rapports de bon voisinage qui seront rompus avec l’avènement des derniers arrivants mandingues (Ligbi, Soninké et Dioula) de la première moitié du XVIe siècle pour leurs raisons suivantes :
Tantôt, ils entretiennent leurs hôtes des principes de la foi musulmane, ou ils se contentaient de mettre à leur disposition leurs connaissances et puissances « spirituelles », leur fabricant des « safy » ou « sèbè » (sorte de talisman pour protéger du mauvais sort).
Quelquefois, ils s’adressent au « narigbafolo »[20] pour se donner les garanties d’obtenir plus aisément l’adhésion des autres membres de la communauté s’il parvenait au préalable à la conversion du chef du village.
Ainsi, les Sénoufo vont émigrer dans trois directions principales :
Les Baoulé arrivèrent vers le milieu du XVIIIe siècle. Ils étaient constitués par des groupes Akan différents :
Les Sénoufo qui s’étaient installés à Bouaké ont été repoussés pendant le XVIIIe siècle par les Baoulés, qui se taillent un royaume dans le centre de la Côte d’Ivoire. Donc, ils se sont installés finalement dans le territoire compris entre les fleuves Bandama et le Comoé.
Les sources sont convergentes pour indiquer que l’émigration sénoufo s'est effectuée en plusieurs étapes, probablement clan par clan.
Ces clans étaient remarquablement structurés sur le plain social mais ils ne s’organisaient pas en royaume. Voilà pourquoi on connaît très peu de noms propres de l’histoire sénoufo. Il y a environ une trentaine de sous-groupes sénoufo qui conservent fortement leur identité culturelle.
Les Sénoufo possédaient des armées semblables à ceux du peuple mandingue, principalement composées de fantassins et de cavaliers. Les batailles menées par les royaumes, tara ou les chefferies sénoufos sont de bons exemples.
Tous ces différents sous-groupes sénoufo s’installeront en territoires différents et clairement délimités.
Chez les Sénoufos, il y a des récits selon lesquels le premier Sénoufo a été créé par Dieu lui-même dans leur habitat actuel pour montrer qu'ils sont des groupes anciens venu de nulle part, autochtones, ils n'ont donc pas de récits de conquête territoriale. Les Sénoufos ont plutôt subi au cours de leur histoire des invasions et déplacements forcés.
Les sous-groupes sénoufos à partir desquels ils se sont constitués demeurent encore inconnus. On peut, néanmoins, les considérer comme les « pré-fohobélé » ou les « proto-fohobélé »[21].
Les locuteurs sénoufos occupent un territoire qui, selon la légende, était peuplé par les Mandébélés. Les Mandébélés étaient un peuple de chasseurs (en particulier à l’éléphant) et pratiquaient une culture itinérante de mil. Ils pratiquaient une langue secrète, le « tiga », qu’ils enseignaient aux enfants. En revanche, ils n’avaient pas accès aux cérémonies initiatiques avant l'âge adulte. Ce sont eux qui auraient initié les Sénoufos à la culture du mil et les auraient amené à se sédentariser.
Mais les Mandébélés ne se sentirent plus alors en sécurité, d’autant que les Sénoufos disposaient d’un équipement de chasse supérieur, car ils avaient des armes en fer, et accaparaient tout le gibier. Ainsi, les Mandébélés cherchèrent refuge dans la brousse et disparurent. Depuis, on dit qu’ils vivent dans les arbres et ont la capacité de se rendre invisibles. Ils sont devenus les « génies de la forêt ». Les Sénoufos profitèrent du vide créé pour s’emparer des terres. Leurs migrations s’étalèrent sur trois siècles. Compte tenu des distances, les groupes se séparèrent rapidement et des différences ne tardèrent pas à apparaître entre eux.
Dans cette démarche, les Sénoufos jugèrent le principe des rites initiatiques utiles à la société et instituèrent le tchologo, puis le poro qui deviendra obligatoire pour tous les Sénoufos au XIVe siècle. Le tchologo est un ensemble d’initiations à la vie en société.
Aujourd’hui, les Mandébélés sont des êtres mythiques représentés par des statuettes de nains aux pieds retournés[22]. Les devins se servent de ces statuettes pour les cérémonies, ainsi mythologie et histoire se rejoignent.
Aux temps très anciens, on raconte qu'il y avait un homme, Safazani, qui était un chasseur de serpents. Il tua presque tous les serpents du pays, sauf un énorme boa qui vivait dans la montagne, à côté d'une grosse pierre. Ce serpent possédait une guitare qu'on appelait un kolonko. Un jour, Safazani vint jusque chez le serpent pour le tuer. Ce dernier se mit à jouer du kolonko et chanta :
« Safazani, il ne faut pas me tuer ici, dans la brousse.
Mais Safazani dit :
Je vais quand même te tuer. »
Et il coupa la tête du boa. Malgré cela, le serpent continua quand même à chanter. Safazani alla chercher du bois, coupa le serpent en morceaux et le mit à griller. En train de cuire, le serpent chanta de plus belle. Safazani alla chercher un canari pour y cuisiner les morceaux de serpent grillés. Pendant que les morceaux étaient en train de bouillir dans le canari, ils continuaient leur chant. Une fois complètement cuite, la viande chanta dans l'assiette de Safazani, qui pourtant la mangea. Quand il eut fini de manger, Safazani sentit que son ventre commençait à gonfler. Il fut pris d'une soif énorme et se mit à avaler des litres d'eau. Son ventre continua à grossir, et bientôt il devint gros comme une montagne. Safazani se mit alors à uriner, sans s'arrêter. Cette urine forma des marigots, quand il se soulageait, ses crottes formait des montagnes.
C'est ainsi que finit Safazani, celui qui n'avait pas écouté ce que lui disait le dernier serpent du pays. Cette légende marque le début du pays sénoufo.
Les villages sénoufos sont gouvernés par un conseil des anciens.
La théologie sénoufo est basée sur la croyance en Koulotiolo (ou « kolochôlô »), dieu puissant, et Katielo, déesse-mère. Chez le peuple sénoufo, Dieu appelé a créé l’homme mais ne l'a pas achevé. Le rite initiatique, appelé le Poro[23],[24], est destiné à parfaire l’adolescent et en faire un adulte en lui donnant la capacité d'affronter les difficultés sociales.
Cette initiation joue un rôle déterminant dans la vie des Sénoufos. Elle se fait dans les bois sacrés (sinzang) à l'extérieur du village. L’initiation est divisée en plusieurs étapes dont le ‘’Kafôh’’ qui clôture l'initiation.
La société sénoufo est restée très traditionaliste et n'a pas de frontière marquée entre les différentes institutions sociales, économiques et religieuses. Le sentiment religieux imprègne toutes les manifestations sociales. Le Poro, aux mains des vieillards initiés, est une organisation politico-socio-religieuse qui constitue la clé de voûte de toute la vie sociale des Sénoufos.
Les danses traditionnelles, exécutées à chaque cérémonie de la région, sont le N'Goron[25], danse sacrée, et le Boloye, également appelé « danse des hommes panthères » car l'habit du danseur imite fidèlement le pelage de ces félins, et qui est exécuté pour clore les rites initiatiques, particulièrement le Poro.
Il existe chez les Sénoufo, comme dans toutes les autres ethnies voisines, trois grandes classes sociales : les nobles ou hommes libres, les hommes de caste et les anciens esclaves.
Les hommes de castes sont les artisans : les forgerons (fonombélé) qui travaillent aussi bien le fer que le bois, et exceptionnellement le cuir (leurs femmes font de la poterie), les lorhos, bijoutiers sur cuivre, les musiciens joueurs professionnels, les koulés, spécialisés dans la fabrication des statues et des masques religieux, qui sont redoutés comme jeteurs de sorts. Les sonons, prêtres des cultes, fabriquent des fétiches et sont les animateurs des cérémonies et des danses auxquelles ils participent.
Dans la gestion coutumière de la terre, le système foncier sénoufo prévoit que la terre ne peut être ni vendue ni échangée. La forme d'appropriation de la terre en vigueur est de type communautaire. Chaque patrilignage et matrilignage propriétaire d'une portion de la terre, au sens traditionnel, exerce un droit d'usage inaliénable. Son accès est accordé par le chef de lignage à tout individu appartenant à la communauté[7].
Le paysan senoufo utilise des instruments aratoires qui sont au nombre de sept : le tiya (une houe à grosse lame de fer réservée aux hommes, le kakpéhé (une tiya de taille moyenne réservée aux femmes), le kamague (une petite houe à long manche), la hache, le coupe-coupe, la faucille et le couteau[26]. Le plus typique est le tiya, encore appelé daba[26].
Un arbre très répandu est l'arbre à karité, dont on extrait le beurre de karité. Un autre arbre valorisé dans la culture sénoufo est le néré, dont les grains des fruits sont utilisés dans les préparations culinaires[26].
Nombre de Sénoufo ont en effet troqué leur matronyme, félé, au profit d’un jamu (nom de clan mandé). Cette substitution débuta bien avant la colonisation et s’accéléra durant la période coloniale. L’exemple le plus connu est celui du « grand chef » des Sénoufo de la région de Korhogo, Péléforo Soro, qui devint Gbon Coulibaly. Ce troc obéissait à un système en apparence relativement strict d’équivalences entre noms sénoufo et mandés.
Le calao est l’oiseau primordial des Sénoufos. il est le protecteur par excellence. On l’appelle « Ségèn ». Son ventre bombé fait de lui un symbole de fécondité et de fertilité. Il représente et évoque la prospérité. Cet oiseau est dans les mythes sénoufos, l’un des cinq premiers animaux apparus sur terre avec le caméléon, la tortue, le serpent et le crocodile. Il transporte les âmes des morts dans l’autre monde et sert généralement dans les rites initiatiques du poro. Au-delà de la fécondité, le calao renferme trois grandes notions qui caractérisent le Sénoufo :
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