Loading AI tools
activité qui consiste à étudier un objet pour en révéler son fonctionnement ou sa méthode de fabrication De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La rétro-ingénierie (aussi connue sous le nom d'ingénierie inversée ou de rétro-conception) est une méthode qui tente d'expliquer, par déduction et analyse systémique, comment un mécanisme, un dispositif, un système ou un programme existant, accomplit une tâche sans connaissance précise de la manière dont il fonctionne. La rétro-ingénierie s'applique notamment dans les domaines de l'ingénierie mécanique, informatique, électronique, chimique, biologique et dans celui du design. Le terme équivalent en anglais est reverse engineering (ou retro-engineering).
Bien qu'il soit généralement question d'expliquer le fonctionnement d'un produit ou d'un système lorsqu'il n'existe pas ou peu de documentation, les objectifs de la rétro-ingénierie sont variés : ils peuvent concerner la vérification du bon fonctionnement d'un objet[1], la création ou l'amélioration d'un objet, l'identification des vulnérabilités et failles de sécurité dans un logiciel ou un système ou encore de la modification d'un produit ou un logiciel pour l'adapter à des besoins spécifiques (cf. Interopérabilité en informatique).
La rétro-ingénierie est également utile dans un cadre purement éducatif, où à l'inverse de l'usage qui commencerait par la théorie pour ensuite aborder la pratique, l'éducation via des cas de rétro-ingénierie aborde la théorie par la pratique, où les étudiants tentent de déterminer les mécanismes qui expliquent le comportement et le fonctionnement d'un objet qu'ils étudient en pratique, pour ensuite expliquer la théorie par l'exemple qu'ils viennent d'aborder[2].
En biologie, la rétro-ingénierie peut s'avérer utile dans la compréhension des comportements et des mécanismes d'une ou plusieurs espèces données dans le but de s'inspirer de ses fonctionnements pour innover dans d'autres domaines plus technique (voir biomimétique).
Dans le cadre d'une activité de veille concurrentielle, l'analyse d'objet produit par un concurrent grâce à la rétro-ingénierie peut s'avérer utile pour déceler et comprendre ses innovations dans le but de les reproduire, ou au contraire de détecter d'éventuelles violations de brevets.
En archéologie[3] (et en archéologie industrielle[4]), la rétro-ingénierie est utilisé pour comprendre le fonctionnement et l'utilité d'un objet technique ancien, ou d'une œuvre d'art présentant des aspects techniques, et dans le cadre de la restauration d’œuvres, comprendre les techniques anciennes pour mieux les reproduire[5].
Suivant la nature de l'objet et l'objectif poursuivi, il existe plusieurs méthodes et techniques :
La rétro-ingénierie est aussi une activité de veille technologique.
Le principe de la rétro-conception repose sur la collecte d’un nuage de points issu de la surface de l’objet à scanner numériquement (au moyen d'un scanner tridimensionnel) ou à palper mécaniquement. Ce nuage de points est traité par des fonctions CAO (conception assistée par ordinateur) permettant la reconstruction de surfaces à partir desquelles un modèle paramétrique est défini par l'utilisateur et le système générateur (choix des cotes et des relations inter-cotes, tolérance). L'arbre de construction est ainsi redéfini dans sa majeure partie.[réf. nécessaire]
Cette méthode n'est applicable que pour des objets CAO « manufacturables », car seules des opérations de conception (extrusion, trou débouchant) et de fabrication (retrait, tolérances) non virtuelles sont potentiellement acceptables pour la reproduction physique de l'objet.[réf. nécessaire]
Elle consiste à reconstituer un schéma électronique fonctionnel en analysant les connexions d'un circuit imprimé ou le dessin des masques d'un circuit intégré. On peut aussi, sur certains dispositifs informatisés récupérer le code assembleur de leur firmware. Le code source est alors élaboré à partir de l'image mémoire de ces composants. On parle alors de désassemblage. Il est parfois possible de dialoguer avec un objet via des liaisons laissées à la discrétion du boîtier (interfaces sérielles, JTAG, ICSP…).
La rétro-ingénierie s'applique aussi au logiciel. Ceci peut être réalisé en utilisant des outils d'analyse comme le désassembleur ou le décompilateur. Les méthodes employées sont similaires à celle du débogage.
Le projet Samba est un exemple typique de rétro-ingénierie. L'équipe a dû déterminer le fonctionnement du partage de ressources en réseau du système d'exploitation Microsoft Windows sans avoir accès aux spécifications techniques officielles. Ils ont donc dû les déterminer puis les traduire sous forme d'un programme informatique. Il en va de même pour le système de fichier NTFS.
La rétro-ingénierie logicielle est fréquemment appliquée aux structures de données : il s'agit, dans ce cas de figure, d'effectuer une documentation des structures de données physiques peu ou mal documentées (applications vieillissantes). On essaie de reconstituer un modèle de données à partir des structures physiques des fichiers ou des tables.
La rétro-ingénierie logicielle fut popularisée avec le détournement des protections anticopie des jeux vidéo. Cette activité est appelée cracking.
Pour écrire des pilotes pour certains périphériques (webcam, scanner, etc.), les développeurs de logiciels libres se retrouvent souvent contraints à faire de la rétro-ingénierie sur un pilote propriétaire fourni par le constructeur en interceptant les échanges entre la puce et le pilote, découvrant ainsi comment dialoguer avec la puce. L'objectif est d'améliorer la sécurité (par la connaissance de ce que fait précisément le logiciel, et en s'assurant de l'absence de vulnérabilités) et la portabilité du pilote (sur des environnements pour lesquels le pilote fourni par le constructeur n'est pas prévu). Il s'agit alors de simuler le pilote, puis de reproduire son fonctionnement (cf. pilote Linux de webcam spca, pwc, etc.[7]). Un exemple est le projet Nouveau visant à produire des pilotes 3D libres pour les cartes graphiques NVIDIA ou radeonHD, projet similaire pour les cartes graphiques ATI Radeon HD.
En cryptographie, la rétro-ingénierie prend plusieurs formes avec des attaques cryptanalytiques. Le but est d'extraire des informations secrètes depuis la « boîte noire » symbolisant la procédure de chiffrement. Ces types d'attaques sont nommées attaques par canaux auxiliaires. On pense que la rétro-ingénierie est aussi à l'origine de la fuite des algorithmes RC2 et RC4 qui furent diffusés sur Internet via le groupe de discussion sci.crypt. L'algorithme Arcfour est d'ailleurs un clone de RC4.
De nombreux éditeurs de logiciels propriétaires incluent dans leurs CLUF des clauses interdisant la rétro-ingénierie. Cependant dans de nombreux pays la rétro-ingénierie est autorisée par la loi, notamment à des fins d'interopérabilité. Dans ces pays, les clauses de ces CLUF ne sont pas valables, ou tout au plus dans les limites déterminées par la loi.
En France, la loi pose un cadre légal restrictif à la rétro-ingénierie, pour laquelle des exceptions spécifiques sont définies dans l'article L122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle[8], ce cadre étant partiellement issu du droit européen (voir infra).
Les langages de programmation semi-compilés (compilé en un code binaire interprété par une machine virtuelle) tels que Java et .NET rendent la rétro-ingénierie plus aisée.
Ainsi, la rétro-ingénierie de fichiers binaires exécutables destinés à la plate-forme Java peut se réaliser avec le programme ArgoUML.
Pour les programmes .NET, Microsoft fournit en standard ILDASM[9], et il existe également des décompilateurs .NET[10].
Les activités de rétro-ingénieries sont généralement légales lorsque la possession de l'objet ou du produit est licite. Concernant la rétro-ingénierie des programmes informatiques, elle est souvent légale pour permettre l'interopérabilité, c'est-à-dire la capacité de logiciels ou de protocoles différents à fonctionner ensemble.
La Directive 91/250/CEE du Conseil, du , concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur porte un Article 6, Décompilation qui sera plus tard transposé en majeure partie dans les articles L122-6 et L122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle, par la Loi n° 94-361 du portant mise en œuvre de la directive (C. E. E.) n° 91-250 du Conseil des communautés européennes en date du concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur et modifiant le code de la propriété intellectuelle[11],[12].
L'article L122-6 spécifie que traduire la forme du code d'un logiciel fait partie du droit d'exploitation appartenant à l'auteur d'un logiciel[13] (dont, comme l'indique l'article L335-3 du même code, la violation par autrui est assimilable à un délit de contrefaçon[14]), et n'est pas possible, sans autorisation et d'une façon qui ne soit pas opposable par contrat, par autrui, sauf dans le cas explicité par l'article L122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle, spécifiant un certain nombre de conditions, y compris que « ces actes [soient] limités aux parties du logiciel d'origine nécessaires à » « l'interopérabilité d'un logiciel créé de façon indépendante avec d'autres logiciels », sans que « Les informations ainsi obtenues [ne soient] » « utilisées à des fins autres que la réalisation de l'interopérabilité du logiciel créé de façon indépendante », « Ni communiquées à des tiers sauf si cela est nécessaire à l'interopérabilité du logiciel créé de façon indépendante », « Ni utilisées pour la mise au point, la production ou la commercialisation d'un logiciel dont l'expression est substantiellement similaire ou pour tout autre acte portant atteinte au droit d'auteur », tout en rappelant que « Le présent article ne saurait être interprété comme permettant de porter atteinte à l'exploitation normale du logiciel ou de causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur »[8].
Outre la traduction de la forme du code, cet article stipule également que « La personne ayant le droit d'utiliser le logiciel peut sans l'autorisation de l'auteur observer, étudier ou tester le fonctionnement ou la sécurité de ce logiciel afin de déterminer les idées et principes qui sont à la base de n'importe quel élément du logiciel lorsqu'elle effectue toute opération de chargement, d'affichage, d'exécution, de transmission ou de stockage du logiciel qu'elle est en droit d'effectuer »[8].
Il stipule également la possibilité pour autrui d'effectuer des actes relevant du droit d'exploitation de l'auteur « lorsqu'ils sont nécessaires pour permettre l'utilisation du logiciel, conformément à sa destination, par la personne ayant le droit de l'utiliser, y compris pour corriger des erreurs », mais que cette possibilité est limitable contractuellement[8].
La directive européenne 2009/24/CE remplace plus tard la directive 91/250/CEE, sans entraîner de modification substantielle de l'article L122-6-1 du Code de la propriété intellectuelle.
La loi ne précise pas si les dispositions relatives au fait d'« étudier ou tester le fonctionnement ou la sécurité [d'un] logiciel » et de « La reproduction du code [d'un] logiciel ou la traduction de la forme de ce code » se superposent ou s'excluent, et n'a été modifiée qu'à une occasion, celle de la Loi de programmation militaire de 2013 pour préciser que « la sécurité » du logiciel pouvait être étudiée, au même titre que « le fonctionnement ». La directive ayant servi à sa rédaction datant de 1991, les thématiques telles que l'open source étaient alors peu présentes dans le débat public et des projets comme le World Wide Web ou Linux en étaient encore à leurs balbutiements.
Les « intérêts légitimes de l'auteur », tels que mentionnés par l'article L122-6-1, ne sont pas définis non plus.
Si l'article 6 de la directive 91/250/CEE est bien titré « Décompilation »[12], il est à noter que les outils de décompilation vers un langage comme le C actuels, tels que Ghidra ou le plug-in Hex-Rays d'IDA Pro n'ont émergé qu'une vingtaine d'années plus tard, de même que les langages à représentation intermédiaire, comme Java, pour lesquels des décompilateurs furent rapidement disponibles, n'existaient pas encore, et qu'il était à l'époque davantage question de désassemblage. L'article de loi transposé parle uniquement de « traduction de la forme du code », effaçant une éventuelle nuance sémantique qui n'avait pas nécessairement d'objet à l'époque.
En 2013, la justice française acquitte le cryptographe d'origine australienne Sean O'Neil, créateur de l'algorithme VEST (en) pour avoir publié l'algorithme de génération de clefs à la base de l'obfuscation du protocole d'alors de Skype[15]. Il est néanmoins condamné en appel en 2015, la justice estimant cette fois qu'il n'aurait pas dû publier son code[16]. Il est néanmoins à cette époque déjà incarcéré pour la création d'une secte, impliquant des faits de corruption de mineures et de viol[17].
La décision de la Cour d'appel est faite nonobstant l'avis du Conseil d'État du qui, répondant à une requête de l'April attaquant le décret d'application de la loi DADVSI, déclare à propos de l'article L122-6-1 que « ces dispositions instituent, sous certaines conditions, une exception de décompilation destinée à permettre le développement de logiciels libres », cela en précitant et tenant compte de la disposition de l'article concerné qui indique que « Les informations ainsi obtenues ne peuvent être […] communiquées à des tiers sauf si cela est nécessaire à l’interopérabilité du logiciel créé de façon indépendante »[18].
Ce dernier avis est cité comme base jurisprudentielle par l'association VideoLAN pour le développement de certains composants du logiciel VLC media player, notamment libdvdcss ou libbluray[19],[20].
La définition de la notion d'« interopérabilité » est parfois considérée comme précaire[21] ; en 2011, la Cour de cassation retoque la décision d'une Cour d'appel, jugeant, dans le cadre des objectifs poursuivis par la reproduction non autorisée du code source d'un logiciel afin d'implémenter un système de migration de données, que « les opérations de migration visaient, non pas à permettre la communication entre les deux logiciels « Athena » et « H. Open », mais à remplacer l'un par l'autre ; que, dès lors, en affirmant que ces opérations de migration étaient justifiées par l'interopérabilité, la Cour d'appel a violé l'article L.122-6-1-IV du Code de la propriété intellectuelle, tel qu'il doit être interprété à la lumière de la Directive n° 91/250 du »[22].
La Loi n° 2006-961 du relative au droit d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information[23] transpose la Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information[24]. Elle cadre, entre d'autres choses, l'étude et le contournement des mesures techniques de protection (ou DRM) en modifiant le Code de la propriété intellectuelle.
L'article L. 331-5 du Code de la propriété intellectuelle définit les mesures techniques de protection comme il suit :
Et stipule également que :
Mais aussi que :
D'après l'article L. 331-7 du Code de la propriété intellectuelle :
D'après l'article L. 335-3-1 du Code de la propriété intellectuelle :
La Loi n° 2018-670 du relative à la protection du secret des affaires, transposant la Directive (UE) 2016/943 du Parlement européen et du Conseil du sur la protection des savoir-faire et des informations commerciales non divulgués (secrets d’affaires) contre l’obtention, l’utilisation et la divulgation illicite, permet, dans certains cas, la limitation contractuelle de la rétro-ingénierie : elle crée l'article L151-3 du Code du commerce qui définit que « l'observation, l'étude, le démontage ou le test d'un produit ou d'un objet qui a été mis à la disposition du public ou qui est de façon licite en possession de la personne qui obtient l'information » constitue un « [mode] d'obtention licite d'un secret des affaires », « sauf stipulation contractuelle interdisant ou limitant l'obtention du secret ». L'article L151-1, quant à lui, apporte une définition d'un secret des affaires[25],[26].
Le Code de commerce est à interpréter distinctement du Code de la propriété intellectuelle.
Le cadre juridique pour la rétro-ingénierie est principalement réglementé par la Directive 2009/24/CE[27] sur la protection juridique des programmes d'ordinateur. La directive reconnaît que la rétro-ingénierie peut être nécessaire à des fins d'interopérabilité. Par conséquent, elle prévoit des exceptions qui permettent la décompilation (c'est-à-dire la rétro-ingénierie) d'un logiciel sans le consentement du titulaire du droit d'auteur dans certaines circonstances, à condition que cela soit nécessaire pour permettre à différents logiciels de fonctionner ensemble.
Comme un brevet nécessite de publier l'invention, l'une des principales motivations de la rétro-ingénierie est de déterminer si un produit concurrent viole un brevet ou des droits d'auteur.
Depuis 1998, la Section 1201 du Digital Millennium Copyright Act interdit le contournement des mesures techniques de protection telles que les systèmes de chiffrement qui protègent le contenu numérique. La suppression ou le contournement de ces mesures techniques de protection, même pour des activités de rétro-ingénierie légitimes, peut être illégal aux États-Unis.
Cependant, le DMCA prévoit des exceptions à l'interdiction de contournement des mesures techniques de protection. Notamment la Section 1201(f) du DMCA qui autorise la rétro-ingénierie dans le but d'assurer l'interopérabilité des logiciels et des matériels informatiques.
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
Every time you click a link to Wikipedia, Wiktionary or Wikiquote in your browser's search results, it will show the modern Wikiwand interface.
Wikiwand extension is a five stars, simple, with minimum permission required to keep your browsing private, safe and transparent.