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Les processus d'oxydation avancés (abréviation POA), au sens large, sont un ensemble de procédures de traitement physico-chimiques et physico-biochimiques conçues pour détruire des matières organiques (et parfois inorganiques) en suspension ou en solution dans l'eau d'effluents domestiques, urbains ou industriels, par oxydation via des réactions avec des radicaux hydroxyles (HO-)[1].
Dans le domaine de la chimie du traitement des eaux usées[2],[3], cette expression désigne plus spécifiquement un sous-ensemble de ces processus chimiques fondés sur l'ozone (O3), le peroxyde d'hydrogène (H2O2) et le dioxyde de carbone (CO2) ou bien la lumière UV[4] et plus rarement sur les ultrasons (sonochimie) ; dans tous ces cas, on parle aussi d’ « oxydation chimique in situ ».
Les contaminants organiques ou semi-organiques sont convertis — dans une large mesure — en composés inorganiques stables (eau et dioxyde de carbone principalement, et sels de métaux ou de métalloïdes). Il s’agit donc d’un processus accéléré de minéralisation[5]. Le POA cherche à réduire la pollution organique et la toxicité de l’effluent au point qu’il puisse être potable ou réintroduit sans risque dans le milieu récepteur ou, au pire, dans un traitement conventionnel des eaux usées. Le POA, seul, ne peut éliminer les toxiques minéraux et métalliques qui nécessitent un traitement complémentaire. Il détruit des polluants qui résistent sans cela aux stations d’épuration comme les résidus de pesticides, d'antibiotiques et d'autres résidus de médicaments et de nombreux perturbateurs endocriniens.
Le linge était, autrefois, blanchi (draps, nappes…) en l’étendant au soleil (en l’exposant à ses UV) sur des prairies (où les végétaux produisent par photosynthèse de l’oxygène natif), mais la raison pour laquelle l'oxydation pouvait chimiquement blanchir et désinfecter le linge encore humide n'était pas comprise.
Des processus d'oxydation impliquant HO- sont connus et utilisés depuis la fin du XIXe siècle (comme dans le réactif de Fenton qui était toutefois alors utilisé comme réactif analytique).
Dans les années 1960, on comprend l'effet microbicide de systèmes chimiques générateurs du radical libre hydroxyle[6]. Certains aquariophiles, élevages de poissons et aquariums publics utilisent des lampes à rayons ultraviolets pour désinfecter leur eau (non sans produire quelques molécules secondaires parfois indésirables).
Le peroxyde d’hydrogène est testé dans la réaction de Fenton contre des polluants de type pesticides, mais il nécessite des intrants et n’est pas toujours efficace contre certains polluants[7],[8]. La « réaction de Fenton assistée de manière électrochimique » permet de dégrader et de minéraliser[5] des polluants organiques variés dont les chlorophénols, les produits phytosanitaires (insecticides, herbicides, fongicides)et les polluants industriels (nitrophénols ou benzène par exemple[9]).
En 1987, Glaze et al. suggèrent que l’on puisse générer in situ dans l’eau HO- « en quantité suffisante pour affecter la purification de l'eau », tout en définissant le terme « processus d'oxydation avancés » pour la première fois en 1987[1].
Les POA se développent ensuite progressivement, surtout dans les pays riches en raison de coûts d’investissement et d’exploitation relativement élevés et d’une complexité plus importante que l’épuration par oxygénation.
Dans les années 1990, dans le cadre de recherche de solutions alternatives aux systèmes alors disponibles d'épuration de l'eau[10], on cherche à utiliser le radical libre hydroxyde, car il est très hautement réactif, et caractérisé par une demi-vie d'environ 10−9 seconde[11],[12] et un potentiel d’oxydoréduction extrêmement élevé (2,81 V par rapport à l’électrode normale à hydrogène) ce qui en fait, l’un des oxydants les plus puissants utilisables en traitement des eaux.
Alors que la démographie mondiale continue à fortement progresser, que les besoins en eau augmentent et que le dérèglement climatique perturbe la gestion de la ressource en eau, la réutilisation de l'eau intéresse de plus en plus de monde. Par ailleurs, les réglementations se font plus strictes concernant les contaminants. Ce contexte fait que les POA sont de plus en plus appréciés pour le traitement tertiaire de l’eau, face à un grand-public qui exige de plus en plus une eau indemne des contaminants dits récalcitrants (tels que pesticides et perturbateurs endocriniens que l'on peine à éliminer de l'eau potable).
Les années 1980/1990 voient apparaitre de nouvelles expressions comme « procédés avancés d’oxydation », « électrodépollution »[13] ou « désinfection électrochimique »[14], « aération électrolytique »[15], « oxydation anodique »[16].
Des groupes commerciaux ont installé environ cinq cents grandes installations POA dans le monde, principalement en Europe et aux États-Unis, mais d'autres pays (Chine…) montrent un intérêt croissant pour les POA.
Les processus d'oxydation avancés (POA) reposent sur la production "in situ'' (dans l’eau) de radicaux hydroxyle (radical libre noté HO-).
Dans la nature, HO- se forme spontanément dans la vapeur d'eau atmosphérique sous l’effet des UV solaires ou de l'ozone ou d'oxyde nitreux, mais il est si réactif qu’il disparaît presque aussitôt après son apparition.
Les « dérivés réactifs de l’oxygène » (DRO) que l’on nomme aussi « espèces réactives de l’oxygène » (ERO) sont les oxydants les plus puissants connus pouvant être générés et utilisés directement dans l'eau : ils peuvent pratiquement dégrader par oxydation tout composé présent dans la matrice de l'eau, souvent à une vitesse de réaction contrôlée par diffusion.
Correctement appliqué dans le domaine de l’épuration de l'eau, les POA peuvent réduire la teneur en contaminants de plusieurs centaines de ppm à moins de 5 ppb et donc réduire considérablement la DCO et le COT, ce qui leur a valu le titre de « processus de traitement de l'eau du XXIe siècle »[17] et a suscité beaucoup d'espoir[18].
Les radicaux libres hydroxyle oxydent un grand nombre de composés organiques presque instantanément (vitesse d’oxydation 109 fois plus élevée que l’ozone pourtant considéré comme l’un des oxydants les plus puissants dans la nature[19],[20]). Ils réagissent y compris avec les doubles liaisons carbone-carbone et attaquent les noyaux aromatiques, composants majeurs de nombreux composés réfractaires toxiques, cancérigènes et/ou mutagènes[21].
Ils sont fabriqués au moyen d'un ou de plusieurs oxydants primaires qui sont par exemple :
Ces super-oxydants peuvent être produits par :
Le procédé présente les lacunes et les inconvénients[32] suivants :
Les AOP présentent plusieurs avantages inégalés dans le domaine du traitement de l'eau.
En raison de la réactivité du radical HO• qui est immédiate et sans discrimination avec presque tous les polluants aqueux, les AOP sont utilisables dans de nombreux scénarios (quand de nombreux contaminants organiques doivent être éliminés simultanément). Ils sont particulièrement utiles pour détruire en phase aqueuse des molécules ou des matières organiques écotoxiques difficilement dégradables par d’autres moyens, et en particulier les nombreux polluants émergents dits réfractaires ou biorécalcitrants à la biodégradation et qui tendent à être bioaccumulés dans le réseau trophique et notre chaîne alimentaire et dont certains sont perturbateurs endocriniens à très faible dose[34] (dont certains surfactants[35], paracétamol[36], hormones contraceptives ou issues d'élevage[37], bisphénol[38],[39],[40],[41]) sans nécessité de les collecter, ni de transférer ces polluants dans une autre phase (solide ou gazeuse). Il est ainsi possible de détruire directement dans les eaux usées (éventuellement à potabiliser), des polluants aromatiques, la plupart des pesticides ou de leurs résidus (hors métaux et métalloïdes dans le cas des pesticides à base de cuivre, plomb, arsenic, etc.)[42] ; de même pour de nombreux composants pétroliers et les composés organiques volatils[43].
Le traitement permet d’oxyder les anions nitrite, sulfite, cyanure et bromate pour les convertir en d’autres composés inoffensifs tels que NO3−, SO2–
4, CO2 et Br−, respectivement[44].
Le processus de réduction complet du radical HO• aboutit à H2O. Si le processus s’est déroulé dans son intégralité, les AOP n'introduisent donc théoriquement pas de « nouvelle » substance dangereuse dans l’eau (à l'inverse des traitements basés sur l’ajout de désinfectants chlorés, par exemple, où du chlore résiduel persiste, ce qui est un effet recherché dans le cas de l’eau à transporter dans le réseau d’eau potable).
Les POA peuvent aussi assurer un traitement tertiaire, c’est-à-dire conclure un premier traitement d’eaux usées (effluents secondaires)[45].
Dans certains modèles d'AOP, les éléments traces métalliques (ETM) ne peuvent pas être également détruits, mais le processus peut aider à en éliminer certains sous forme de M(OH)x précipité.
La désinfection peut également être obtenue en détruisant au passage les virus, bactéries, cyanophycées, et tous les organismes vivants (excepté s’ils sont protégés dans des biofilms suffisamment résistants pour que le traitement n’ait pas le temps de les détruire intégralement).
Ceci fait de ces AOP une solution intégrée possible à certains problèmes de qualité de l'eau.
De manière simplifiée, la chimie des POA peut être divisée en trois parties[46] :
À ce jour, les POA peuvent être subdivisés en quatre groupes[34] sur la base du mécanisme de production d'HO• :
Ces procédés diffèrent considérablement ; par exemple, la production d’ozone pour l'ozonation, la production d’UV/H2O2 et l'oxydation photocatalytique reposent sur des processus physicochimiques très différents de génération de HO• :
Les étapes de réaction ici présentées ne sont en fait qu'une partie de la séquence de réaction (voir la référence pour plus de détails) ;
Actuellement, il n'y a pas de consensus sur les mécanismes détaillés du troisième stade du processus, mais des chercheurs ont mis en lumière les processus des attaques initiales (au second stade).
HO• est une espèce radicale, devant se comporter comme un électrophile hautement réactif. Ainsi, deux types d'attaques initiales sont supposées être une abstraction d'hydrogène et une réaction d'addition (réaction organique où au moins deux molécules se combinent pour en former une autre, plus grande).
Le schéma ci-dessous décrit un mécanisme possible de l'oxydation du benzène (polluant cancérigène) par les radicaux hydroxyle HO• (proposé en 1994)[50].
Les première et deuxième étapes sont une addition électrophile qui brise le cycle aromatique du benzène (A) et forme deux groupes hydroxyle (–OH) dans l'intermédiaire C.
Ensuite un HO• saisit un atome d'hydrogène dans l'un des groupes hydroxyle, produisant une espèce radicalaire (D) qui est sujette à subir un réarrangement pour former un radical plus stable (E). E, d'autre part, est facilement attaqué par HO• et forme éventuellement du 2,4-hexadiène-1,6-dione (F).
Tant qu'il y a assez de radicaux HO•, les attaques subséquentes contre le composé F se poursuivront jusqu'à ce que les fragments soient tous convertis en petites molécules stables comme H2O et CO2 in fine ; en réalité, ces processus peuvent encore être soumis à une myriade de mécanismes possibles et partiellement inconnus.
Remarques :
Depuis 1987 (définition du principe des AOP), cette technique s’est rapidement développée (en théorie et via des applications concrètes). Elle pourrait peu à peu remplacer les technologies conventionnelles là où ces dernières sont peu efficaces en termes d’épuration de contaminants organiques « réfractaires » (inorganiques et microbiens).
Les systèmes basés sur le catalyseur TiO2, ou utilisant les UV (H2O2/UV) ou encore les systèmes de type Fenton, photo-Fenton et électro-Fenton, ont été les plus étudiés, mais de nombreux besoins de recherche persistent sur ces AOP, dont pour les optimiser et en réduire les couts.
On cherche à développer de nouveaux AOP modifiés, fiables, efficaces et plus économiques avec par exemple :
Les sources de radicaux libres et les radicaux libres eux-mêmes sont hautement toxiques (cytotoxiques notamment) et écotoxiques et donc à utiliser avec précautions. Les effluents rejetés dans le milieu naturel ne doivent plus contenir de radicaux libres.
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