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L'ordre du Bene Gesserit est, dans la série de romans du Cycle de Dune de l’écrivain Frank Herbert, un groupement de femmes qui exerce une influence politique et religieuse au travers des siècles dans la société de l'Imperium, puis dans les siècles suivants, pour mener l'humanité vers des buts qui lui sont propres.
Ce groupe, aux origines et motivations mystérieuses, est décrit comme une sororité dont les membres entraînent leur corps et leur esprit à travers des années de conditionnement physique et mental afin d'obtenir des pouvoirs et des capacités surhumaines. Les acolytes qui achèvent l'enseignement dispensé par le Bene Gesserit sont appelées Révérendes Mères dans les rangs de l'organisation.
Organisation semi-mystique et école réputée, le Bene Gesserit et ses Sœurs sont connues pour leurs capacités spécifiques qu'elles ont jalousement développées et codifiées au fil des siècles, qui peuvent sembler magiques aux yeux des étrangers, au point d'être surnommée les Sorcières du Bene Gesserit par leurs ennemis.
Du fait des compétences uniques dont dispose le Bene Gesserit, celui-ci est l'objet d'alliances avec les autres forces et maintient son influence en éduquant et proposant son enseignement aux femmes des Grandes Maisons, et en installant certaines de ses initiées en tant qu'épouses et concubines dans les familles importantes (notamment celles des Grandes Maisons) à son avantage. Les Sœurs du Bene Gesserit ne sont cependant fidèles qu'à elles-mêmes. En effet, le Bene Gesserit, pour atteindre ses objectifs et éviter les ingérences extérieures, fait souvent passer l’illusion d’être fidèle à d’autres groupes ou individus, pour mieux les manœuvrer. Chacun des mouvements du Bene Gesserit est calculé en fonction d'un résultat précis et déterminé à l'avance.
L'un des secrets les mieux gardés de l'Ordre est de faire aboutir son programme génétique millénaire, dont le but est de créer le Kwisatz Haderach, l'être suprême, qui leur donnerait les clés du passé et du futur de l'humanité par son accès sans limite à la mémoire génétique de ses ancêtres mâles et femelles. Néanmoins, à la suite de l'avènement inattendu du Kwisatz Haderach en la personne de Paul Atréides qui échappe à tout contrôle de la part de l'Ordre et, ultérieurement, du règne du « Tyran » Leto II Atréides qui met le Bene Gesserit à genoux pendant plus de trois millénaires sans pour autant l'éradiquer, la communauté des Sœurs continue son programme génétique avec prudence, en s’assurant avant tout de ne pas perdre le contrôle de son projet pour ne pas renouveler son erreur.
En latin : bene qui signifie « bien » et gesserit, forme de la troisième personne du singulier du verbe gero (« agir, se comporter ») conjuguée au futur antérieur. On pourrait donc traduire Bene gesserit par « [celle qui] se sera bien comportée »[1].
En arabe, « Bene Gesserit » signifie « Fils de l'île/de la péninsule ». La péninsule arabique est souvent appelée « Al Jazirah » (la péninsule). Le terme « Beni » peut également signifier une descendance ou un village/une ville habité/e à l'origine par une tribu/un clan[2].
L'ordre du Bene Gesserit a été fondé par Raquella Berto-Anirul, petite-fille de Vorian Atréides. Après avoir été infectée par le Fléau de Rossak, elle est transportée dans un cénote contenant une eau spécifique par les Mal-Nés, où elle apprend à maîtriser chacune de ses cellules afin de combattre le poison qui est en elle. C'est la première utilisation connue des modifications de la biochimie interne couramment employées par les Sœurs (notamment au cours du rite de l’Agonie de l'épice). C'est également à ce moment qu'elle accède pour la première fois à la « Mémoire Seconde » et à l'utilisation de la « Voix » face à Ticia Cenva, la chef déchue des Sorcières de Rossak[3]. Les Sorcières de Rossak' sont des femmes de la planète Rossak aux pouvoirs psychiques. Les sorcières fondatrices sont notamment Zufa Cenva, Heoma, Camio, Rucia, Silin, Tirbès.
Par la suite, après avoir recouvré ses forces, Raquella Berto-Anirul convainc les sorcières de Rossak ayant survécu à l'épidémie d'unir leurs forces. Celles-ci apportent à l'Ordre du Bene Gesserit leurs très nombreuses archives génétiques[3].
Le Bene Gesserit est une organisation féminine et matriarcale de pouvoir politique, spirituel et religieux sans équivalent. Son emprise sur le pouvoir en place est insidieuse, mais incontestable. L'ordre des Sœurs préfère influencer et agir dans l'ombre plutôt que d'avoir une place active et en pleine lumière au sein de la société de l'Imperium. Malgré son envergure, un ensemble de pouvoirs (plutôt masculins) peut lui être comparé :
Bien qu'étant un ordre matriarcal quasi-exclusivement composé de femmes, le Bene Gesserit emploie aussi des hommes pour certaines fonctions précises (par exemple une partie du personnel militaire, certains ouvriers, personnels techniques ou encore les reproducteurs et entraineurs sexuels de l'ordre sont des hommes).
Les Sœurs du Bene Gesserit sont organisées selon différents rangs au sein de l'ordre.
Les Sœurs servent le Bene Gesserit selon leur « utilité » pour l'ordre. Ainsi, les Imprégnatrices sont destinées à procréer avec des membres précis des lignées des Grandes Maisons du Landsraad, en fonction des intentions du Bene Gesserit concernant son programme génétique. D'autres sont utilisées plutôt pour leurs qualités génétiques : force physique, endurance, mémoire, réflexes, capacités d'enseignantes, gestionnaires, etc. D'autres encore sont spécialisées vers des emplois précis : Maitresses généticiennes, mentats, Diseuses de Vérité, docteurs Suk, Rectrices (enseignantes et surveillantes), personnels de sécurité, messagères, espionnes, etc.
Les Diseuses de Vérité peuvent détecter la vérité dans les propos entendus[4]. Ces sœurs entraînées sont capables de déterminer si quelqu'un ment en analysant sa façon de parler, son langage corporel ou d’autres signes physiques comme le pouls. Les Diseuses de Vérité sont largement utilisées en politique et dans les échanges commerciaux. Les empereurs Padishah en ont toujours une à leur service. Combiné à la Voix, leur don les rend indispensables pour les interrogatoires. Elles ne sont cependant pas infaillibles : Vladimir Harkonnen refuse que ses subordonnés lui disent précisément ce que sont devenus Jessica et Paul Atréides, afin de pouvoir affirmer devant l'Empereur qu'il n'est pas directement responsable de leur mort. En principe tous les humains détiennent ces perceptions, mais un entraînement rigoureux est nécessaire afin d’en faire un usage efficace. L'habileté à percevoir la vérité peut également être un don à la naissance. Gaius Helen Mohiam, elle-même Diseuse de Vérité, a reconnu ce don inné en Paul Atréides, lors de leur première rencontre sur Caladan en l'an 10191 AG.
Liste des adeptes (acolytes, Sœurs ou Révérendes Mères) et des autres personnes affiliées au Bene Gesserit, évoqués pour la première fois dans les romans du Cycle de Dune de Frank Herbert.
Les personnages de Paul Atréides (élevé dans la « Manière » B.G.), ainsi que Alia et les enfants de Paul, Leto et Ghanima Atréides (ayant tous trois les capacités d'une Révérende Mère à la naissance en tant que « pré-nés », du fait de leurs ancêtres) ne sont pas considérés comme faisant partie de l'Ordre au sens strict, une organisation à laquelle ils se sont confrontés, ou qu'ils ont reniée à un moment donné.
Dans Dune
Dans Le Messie de Dune
Dans Les Enfants de Dune
Dans La Maison des mères
Le Bene Gesserit dispose de plusieurs techniques ou méthodes spéciales, développées secrètement au fil des siècles par l'Ordre et gardées jalousement. Celles-ci lui servent notamment pour acquérir ou maintenir son influence politique, religieuse et économique envers les autres forces de l’Imperium, mais aussi pour le bien de l'humanité en général. En effet, la communauté des Sœurs, qui se considère comme les « bergers de l'humanité », voit dans son œuvre un dessein à très long terme visant à guider l'humanité vers de nouveaux états de conscience et de progrès.
La sélection génétique — ou eugénisme — à grande échelle est une pratique centrale de la politique du Bene Gesserit. L'eugénisme est l'innovation principale dans la recherche d'un « humain supérieur » (le Kwisatz Haderach), le B.G. n'ayant pas hésité à lancer un programme génétique couvrant plusieurs centaines de générations pour arriver à cette fin. Dans ce but, les Sœurs utilisent des ordinateurs — pourtant prohibés depuis le Jihad Butlérien — afin de sélectionner et modéliser les caractères génétiques issus de ces croisements.
Les gènes considérés comme intéressants sont croisés à travers l'accouplement de personnes méticuleusement choisies et ce, sur de très nombreuses générations. Les couples impliquant un membre du Bene Gesserit sont toujours planifiés à l'avance et sont décidés pour le bénéfice du programme génétique. Même lorsqu'une personne croit avoir échappé au programme génétique des Sœurs en s'accouplant avec un(e) inconnue, le Bene Gesserit est toujours à l'origine de cette rencontre « fortuite », comme le découvrira un jour avec amertume Miles Teg...
Les membres du Bene Gesserit et leurs agents extérieurs sont sélectionnés, souvent avant leur naissance, par les Maîtresses généticiennes de l'Ordre.
Le but de cette manipulation génétique est la création du Kwisatz Haderach, l'homme qui parviendra à surmonter le rituel de l'Agonie de l'épice pour accéder à la connaissance des vies antérieures de ses ancêtres mâles et femelles, comme le font les Sœurs (mais ces dernières du côté féminin uniquement), mais aussi à avoir la capacité d'explorer l'avenir (la prescience), dépassant de fait les capacités des Sœurs ou des Navigateurs de la Guilde. Cet homme aura alors accès à la Mémoire Seconde des hommes et des femmes et, grâce à cette connaissance du passé, pourra mieux appréhender et maîtriser la vision du futur.
C'est là la base du récit de Dune. Le Kwisatz Haderach est en effet Paul Atréides (bien qu'il s'en défende), le fils de Dame Jessica, une Sœur du Bene Gesserit. Jessica, pour faire plaisir à son mari, le duc Leto Atréides dont elle était amoureuse (ce qui est normalement proscrit dans l'ordre), lui donna un fils au lieu d'une fille, comme cela lui avait été demandé par ses supérieures. Ce changement dans les plans du programme génétique des Sœurs provoqua l'arrivée du Kwisatz Haderach avant le terme prévu, le projet originel du Bene Gesserit devant arriver à son apogée avec le petit-fils de Jessica, qui devait être le fruit de l'union des Maisons Atréides et Harkonnen.
À la suite de l'apparition inopinée du Kwisatz Haderach, les Sœurs ont tout fait pour reprendre en main leur programme génétique, ce en quoi elles ont échoué, puisque le fils de Paul, Leto II, devenu un tyran immortel en tant qu’Empereur-Dieu, disposera de pouvoirs encore bien supérieurs à ceux de son père, et s'emparera du programme génétique du Bene Gesserit, qu'il modifiera pour le mener dans une direction différente de celle prévue par les Sœurs, avec son « Sentier d'Or ».Les sœurs du Bene Gesserit ont parfaitement compris ce que l'exploitation du besoin humain de religion pouvait leur apporter. Dans ce but, des légendes diverses, impliquant des êtres dotés de grands pouvoirs, sont créées de toutes pièces (la Panoplia Propheticus)[7] par la Missionaria Protectiva, une branche du Bene Gesserit, et sont disséminées dans toute la galaxie, à destination de certaines populations précises sur les planètes de l'Imperium que le Bene Gesserit souhaite influencer.
Ainsi, les membres du Bene Gesserit pourront, si besoin est, obtenir rapidement un pouvoir politique et religieux sur une planète où la Missionaria Protectiva aura auparavant « préparé le terrain », en profitant des légendes locales implantés par elles-mêmes. Dans ce but, des sœurs exploratrices-missionnaires de la Missionaria Protectiva sont envoyées sur les mondes habités de l'Imperium afin d'y semer les germes de légendes fabriquées selon les préceptes de la Panoplia Propheticus. Ainsi, quand Jessica et Paul, en fuite dans le désert d’Arrakis après l’attaque d’Arakeen par les Harkonnens, rencontrèrent le groupe de Stilgar le Fremen, la Missionaria leur sauva la vie : Des siècles auparavant, des sœurs du Bene Gesserit avaient propagé dans la société Fremen une prophétie augurant l’arrivée d’un Messie, fils d’une Révérende Mère. Jessica, interprétant certaines paroles étranges de Stilgar, comprit que la société Fremen avait subi la marque de la Missionaria et que Stilgar attendait, avant de les tuer, des signes tangibles de l’accomplissement de la prophétie. Jessica en tant que Bene Gesserit sut donner les réponses adéquates au Fremen qui épargna leurs vies. Jessica travailla ensuite à renforcer ce mythe pour que son fils Paul devienne le messie attendu par les Fremen.
Cette capacité à créer et organiser les religions servira aussi au Bene Gesserit pour manœuvrer subtilement le clergé d'Arrakis (nommé Rakis à cette époque) post-Tyran, ainsi qu'à subvertir le Bene Tleilax (au moyen du « Manifeste des Atréides », un texte pseudo-religieux écrit en réalité par la Révérende Mère Darwi Odrade) afin de s'allier à lui pour contrer l'attaque des Honorées Matriarches revenues de la Dispersion, mais aussi pour mettre à jour les secrets les plus intimes du Tleilax, notamment les cuves Axolotl.
Certaines Révérende Mères du Bene Gesserit, officiant en tant que reproductrices pour l'Ordre, sont entraînées spécifiquement afin de devenir des séductrices expertes, nommées Imprégnatrices. Celles-ci sont spécialisées dans le domaine sexuel et maîtrisent toutes les techniques et postures liées à la séduction et à l'acte sexuel en lui-même.
Le rôle d'une Imprégnatrice, en plus de générer des accouplements choisis pour le programme génétique de l'ordre, est d'« imprégner » des mâles reproducteurs, afin que ceux-ci servent les intérêts de l'Ordre avec leur progéniture, comme ce fut le cas par exemple du Bashar mentat Miles Teg, ou des missions plus spécifiques, comme celle de préparer un homme pour un rôle particulier, comme l'un des gholas de Duncan Idaho qui devait être imprégné par la Révérende Mère Lucille pour une mission de la plus haute importance sur la planète Rakis.
Les techniques sexuelles des Imprégnatrices du Bene Gesserit trouvent leur pendant chez leurs ennemies jurées, les Honorées Matriarches, qui utilisent une forme plus poussée de domination sexuelle afin d’asservir totalement les hommes à leur emprise.
Les membres du Bene Gesserit ont, après leur initiation, accès à un enseignement spécifique très poussé, ainsi qu'à plusieurs disciplines et capacités spéciales, qui font d'elles des adversaires autant craintes que respectées, leurs capacités semblant surnaturelles ou magiques pour un observateur non initié.
Ces diverses connaissances ont été développées, modifiées et codifiées jalousement au fil des millénaires par les Sœurs, et demeurent un des secrets les mieux gardés de l'Ordre. L'importance et la valeur du Bene Gesserit par rapport aux autres factions qui s'agitent dans l'Imperium vient en grande partie de cet enseignement. Preuve de leur valeur, leurs ennemis leur ont attribué le surnom de Sorcières du Bene Gesserit.
Parmi les enseignements Bene Gesserit de base, figure l'entrainement physique et mental prana-bindu (« musculature-nerfs »).
Ce terme recoupe diverses techniques visant à développer les capacités physiques et nerveuses (rendement musculaire optimum et réflexes nerveux ultra-rapides). Cet entrainement de longue haleine[8] a pour conséquence de donner aux Révérendes Mères un art de combat mortel, qui fait appel à l'hypersensibilité et à la maitrise totale de tous les muscles du corps et des réactions nerveuses. Les Sœurs poursuivent cet entrainement de manière méthodique tout au long de leur vie active, ce qui fait d'elles des combattantes au corps à corps redoutables, égales aux guerriers Fremen ou aux Sardaukar de l'Empereur Padishah.
Lors de son arrivée chez les Fremen d'Arrakis, Dame Jessica et son fils Paul se serviront de cet enseignement pour former les Fremen dans l'« Art étrange du combat » des Sœurs, leur permettant ainsi de décupler leurs capacités face aux Sardaukar de l'Empereur, et ainsi en triompher. Jessica s'en servira aussi sur le Prince Farad'n de la Maison Corrino, transformant l'étudiant en histoire en redoutable guerrier et en un adepte du Bene Gesserit, à la surprise de sa famille.
Dès leur plus jeune âge, les acolytes du Bene Gesserit sont éduquées dans la « Manière » Bene Gesserit ; il s'agit d'un apprentissage qui développe et aiguise leurs cinq sens de façon extrême. Cela leur permet d'acquérir une perception de leur environnement, un « sens » de l'observation inédit. Une Bene Gesserit parfaitement entraînée sait reconnaître à d'infimes détails, corporels ou gestuels (un tic gestuel, un mouvement du corps qui passerait inaperçu en temps normal, une odeur particulière, une goutte de transpiration, une altération du ton ou de l'intonation de la voix, etc.), les motivations et les intentions d'un individu donné ou d'un groupe d'individus.
Une Sœur est en mesure de déterminer dans quelle direction va le cours des pensées de son interlocuteur, de connaître son état d'esprit réel (ce qu'il « pense » réellement), s'il cherche à lui dissimuler quelque chose ou à l'orienter sur une fausse piste, s'il est nerveux (et tente de le cacher), ou encore s'il va user de violence contre elle.
En clair, les Sœurs sont formées à lire le « langage du corps » et des émotions chez une personne et, grâce à cet examen subtil, sont capables d'anticiper et de s'adapter en une fraction de seconde à une situation ou une personne dangereuse. De plus, cela leur permet de deviner la vérité dans des propos trompeurs, voire de soutirer une information chez une personne sans qu'elle n'en ait rien dit par elle-même...
Les Sœurs sont aussi capables de détecter, par des signes secrets quasi imperceptibles, la présence de Danseurs-Visage du Bene Tleilax à proximité qui auraient pris possession d'un individu en copiant son apparence. C'est une des raisons de la crainte (et de la haine) du Bene Tleilax envers les Sœurs, ces derniers les nommant à cause de ceci les « Sorcières » du Bene Gesserit.
Cette hypersensibilité sensorielle est l'un des points forts de l'Ordre : certaines Bene Gesserit parmi les plus douées sont spécialement formées en tant que « Diseuses de Vérité ». Celles-ci savent à coup sûr détecter le mensonge ou la vérité chez un individu, et sont de ce fait fort prisées pour leurs capacités. C'est la raison pour laquelle, durant l'âge de l'Imperium, une Diseuse de Vérité se trouvait toujours au sein de la suite de l'Empereur, telle la Révérende Mère Gaius Helen Mohiam qui officiait au côté de l'Empereur Padishah Shaddam IV. Cette proximité avec le pouvoir renforçait par ailleurs la prédominance du Bene Gesserit dans la société de l'Imperium.
Une Bene Gesserit est également capable, par une observation fine de son environnement (comme l'examen de la structure d'une pièce ou de sa forme particulière, de la propagation des flux d'airs ou des sons dans celle-ci), de déterminer s'il existe des passages secrets ou dissimulés dans une pièce, ou encore si des personnes y sont cachées (dans un faux plafond, un faux mur, etc.), en train de l'épier ou se préparant à agir contre elle.
Le Bene Gesserit a également développé des techniques de mémorisation individuelle pour le stockage d'informations dans la mémoire d'un individu, la captation et la retranscription verbale de propos entendus (appelée la « transe mémorielle »), ce qui assure à ses messagères une sécurité accrue et une parfaite efficacité au cours des missions dont elles sont chargées.
Tous ces talents prodigieux font des adeptes du Bene Gesserit des êtres particulièrement compétents à la pratique de l'espionnage, la collecte d'informations, mais également au contre-espionnage. À cet effet, des acolytes sont souvent entraînées puis envoyées « noyauter » des organisations concurrentes ou tout groupe qui les intéresse, afin de soutirer les informations utiles à l'Ordre.
Les Révérendes Mères du Bene Gesserit, à la suite de l'Agonie de l'épice (voir plus bas), contrôlent parfaitement leur biochimie corporelle, et peuvent ajuster leur métabolisme à volonté. Cela leur permet, entre autres, de contrer les maladies ou les infections diverses, de résister à un état de fatigue important en cas d'effort soutenu, voire à une douleur intense comme dans le cas d'une blessure grave au combat. Elles sont aussi capables, après un rapport sexuel non protégé, de décider d'avoir l'enfant ou non, et peuvent même choisir son sexe en procédant à de légères modifications biochimiques. Par exemple, la Révérende Mère Bellonda était obèse par choix car elle aurait pu, facilement, augmenter son métabolisme pour éliminer son surpoids.
La capacité d'altérer leur métabolisme ouvre aux Sœurs la porte de l'immortalité, mais celles-ci n'osent pas aller dans cette voie car cela, ironiquement, signerait leur arrêt de mort. En effet, le reste de l'Imperium prendrait peur s'il s'apercevait que ces femmes sont sans âge et immortelles, et les persécuteraient pour connaitre leur secret.
Autre capacité étonnante liée à ce contrôle absolu de leur chimie, les Révérendes Mères sont capables de déterminer avec précision les divers éléments composant un plat ou une boisson qu'elles consomment, et peuvent en neutraliser ou annuler les effets, indépendamment du reste (par exemple, si un poison est ajouté dans leur nourriture, elles peuvent en annuler les effets toxiques sans subir de dommages et sans altérer le reste du plat).
Ce contrôle de la chimie interne est primordial à une Sœur du Bene Gesserit pour passer au statut de Révérende Mère. Cette étape, cruciale dans la vie d'une adepte de l'Ordre, est ritualisée par une cérémonie appelée « Agonie de l'épice »[9] : les candidates ingèrent de l'« essence d'épice » (un dérivé de l’Épice), un liquide contenant un poison violent[10] qu'elles doivent neutraliser. La maîtrise de sa biochimie permet à la postulante de transformer la substance toxique en une drogue, qui lui donne accès à la « Mémoire Seconde » (voir section suivante). Cependant, nombreuses sont les Sœurs qui échouent à l'épreuve périlleuse de l'Agonie et qui meurent dans des souffrances atroces.
De plus, si la Sœur qui se soumet à l'Agonie est enceinte, le fœtus court un risque (voir la section Abomination pour plus de détails).
Lorsqu'une Révérende Mère survit à l'Agonie de l'épice, elle reçoit la Mémoire Seconde, une formidable « mémoire collective » (mémoire génétique) propre à elle-même et à ses ancêtres. Cette mémoire ancestrale remonte jusqu'au début de l'humanité et rassemble toutes les personnalités et souvenirs des ancêtres de la Révérende Mère, mais uniquement du côté féminin. Ces ancêtres femelles, mortes depuis bien longtemps, continuent pourtant à « vivre » dans l'esprit de la Révérende Mère sous la forme d'une « présence » dans son esprit, désigné par les Sœurs comme le « flot intérieur » ou le « flot simultané ». La Sœur peut ainsi accéder à ces souvenirs, compilés de génération en génération.
Parcourant à volonté ce gigantesque réservoir mémoriel, la Révérende Mère peut sélectionner à loisir n'importe lequel des souvenirs de ces « vies » présentes en elle et voir un évènement passé bien particulier, oublié depuis longtemps (une naissance, une guerre, une cérémonie, un monument, etc.), une information précise qui peut ne plus exister (contenue dans un livre détruit il y a bien longtemps, ou bien dans l'histoire orale d'un peuple oublié) ou encore un lieu ou un objet que l'une de ses « vies » a vu ou possédé. Il est même possible de « voir » une personne décédée depuis des années, des siècles, voire des millénaires et contempler son aspect, ce qu'elle faisait ou entendre ce qu'elle disait, comment elle s'exprimait, etc.
Chaque Révérende Mère peut aussi « communiquer » par la pensée avec les « vies » qu'elle a en elle. Par ce dialogue mental, la Révérende Mère peut recevoir un avis sur une question ou un problème particulier, selon la personnalité que la Révérende Mère sélectionne. Parfois, ces présences s'imposent d'elles-mêmes à l'esprit de la Révérende Mère, notamment pour la prévenir en cas de danger imminent ou pour lui donner une information vitale, mais aussi lorsqu'un « débat » agite la communauté présente dans son esprit (une personne en particulier ou plusieurs) sur une action, pensée ou décision de la Révérende Mère...
Contrairement à un « pré-né » (et à plus forte raison, à un pré-né étant devenu une Abomination), une Révérende Mère garde toujours un contrôle total sur les « vies » qu'elle renferme et ne court pas le risque d'être dominée par cette multitude intérieure, voire un individu unique — seul mais puissant ou influent — au sein de celle-ci. La Révérende Mère peut avoir confiance en ces vies contenues dans son esprit, mais sait qu'il ne s'agit que de mémoires mortes, imparfaites du fait de leur état, et ne perd pas de temps (sauf à ses débuts en tant que Révérende Mère) à les parcourir de long en large[11].
Avant de mourir, une Révérende Mère a pour devoir de transmettre sa Mémoire Seconde à une autre Révérende Mère, par le biais du « Partage » : les deux Sœurs, se touchant le front, fusionnent alors leur psyché. La révérende Mère mourante « déverse » alors ses souvenirs dans l'esprit de l'autre Révérende Mère, ainsi que les vies qu'elle abritait. Le Partage accompli, la Sœur mourante sera elle aussi contenue en tant que présence psychique dans l'esprit de la Révérende Mère ayant reçut le Partage, et fera partie de ses vies intérieures.
Le seul homme à pouvoir supporter l’Agonie de l’épice et ainsi d’accéder à la mémoire seconde est le Kwisatz Haderach. Paul Atréides est supposé être ce Kwisatz Haderach. Parmi ses descendants, certains possèdent également cette capacité, dont ses enfants : son fils Léto II (l'Empereur Dieu ou le Tyran) et sa fille Ghanima, ou encore un autre descendant plus éloigné, le Bashar Miles Teg, mais qui se manifeste pour ce dernier sous une forme différente.
Dans l'histoire du Bene Gesserit, il est arrivé, de manière exceptionnelle et pour parer un danger extrême menaçant la survie même de l'Ordre, que les Sœurs soient obligées de pratiquer le rituel du « Partage » de masse. Le but était de contrecarrer la mort d'un trop grand nombre de Révérendes Mères en même temps, et ainsi d'éviter la perte irrémédiable de tous leurs souvenirs et leurs lignées ancestrales. Cette pratique, évoquée dans La Maison des Mères, que les Sœurs nomment « Extremis Progressiva », sera utilisée au cours de l'attaque des planètes du Bene Gesserit par les forces des Honorées Matriarches, revenues de la Dispersion. La Révérende Mère Lucille sera notamment chargée d'une mission sur Lampadas, la planète-école du B.G. menacée de destruction par les Honorées Matriarches, recueillant dans son esprit la mémoire de l'ensemble des adeptes de l'Ordre de cette planète.
« Voix (la) : Permet aux adeptes de sélectionner certaines harmoniques de leur voix afin de contrôler les individus. »
— Frank Herbert, Frank Herbert, Dune, vol. tome II, Paris, France, Robert Lafont, , 348 p. [détail de l’édition] (ISBN 2-266-02665-8), page 410
Par l’utilisation d’harmoniques spéciales, la Voix permet d’influer directement sur les centres nerveux d’un être humain, d’obtenir son obéissance rapide à des ordres brefs. C’est ainsi que Gaius Helen Mohiam ordonne à Paul Atréides de venir auprès d’elle pour l’épreuve du Gom Jabbar[12].
La Voix permet également d’insuffler un état émotionnel propice, ou de paralyser brièvement[13].
En modulant subtilement la Voix, une Bene Gesserit peut ordonner, de façon subconsciente, à un individu d’obéir à son commandement, que la personne soit consciente ou non de l’utilisation de cette technique. Ce contrôle peut être utilisé soit de façon subtile sur les motivations et les pensées, soit de façon brutale pour forcer des actions physiques de la personne visée. L’entraînement à la Voix reste indépendant du rituel d’une Révérende Mère, ce qui fait qu’une personne extérieure au Bene Gesserit peut apprendre à utiliser La Voix.
Au cours de sa formation, chaque acolyte du Bene Gesserit est entraînée à soumettre une personne en utilisant certaines harmoniques de sa voix, qui paralysent ou subjuguent un individu. Au préalable, la Sœur doit étudier la cible pendant un moment, c'est-à-dire qu'elle doit collecter suffisamment d'informations sur la personnalité de cette dernière afin de pouvoir employer la Voix de manière optimale contre elle (dialogue et observation directe de la cible).
La victime de la Voix, si elle n'est pas préparée à subir cette attaque, est sous la domination totale de la Sœur pendant quelques secondes et obéit de manière forcée à ses commandements. Même chez des individus préparés à subir la Voix à pleine intensité, l'expérience est souvent difficile à endurer, notamment si la Sœur est une Révérende Mère, chez laquelle cette technique, affinée à l'extrême, devient une arme d'une grande puissance. Les Sœurs parlent alors de « Grand Contrôle ».
Avant que la famille de Leto Atréides ne s’établisse sur Dune, Jessica commence à instruire Paul. Après que la Révérende Mère Mohiam a testé Paul, elle dit à Jessica : « Tu l’as éduqué dans la Manière. J’en vois les signes sur lui… J’aurais fait de même à ta place. Au diable les règles. Mais à présent je t’avertis. Ne tiens plus compte de la progression régulière de son éducation. Pour sa propre sécurité, il lui faut La Voix. Déjà, il en a quelque idée, mais nous savons toutes les deux qu’il a besoin de beaucoup plus… Et de toute urgence[14] ».
La Voix peut également servir dans toute conversation pour aider à convaincre, persuader, influencer ou simplement augmenter l’effet du discours. La Voix est inutile contre les personnes qui ne peuvent pas entendre leur interlocuteur ; la Voix est limitée contre les personnes entraînées mentalement, qu’elles soient Révérendes Mères ou Mentats. Une personne déjà entraînée à se servir de la Voix peut facilement détecter l’utilisation de cette dernière par une autre personne.
Dans La Bataille de Corrin, il est indiqué que la première Bene Gesserit à utiliser la Voix serait Raquella Berto-Anirul, la fondatrice de l’ordre. La Révérende Mère Sheana est notamment connue pour avoir possédé des rudiments de la Voix avant sa formation par le Bene Gesserit, comme remarqué par Darwi Odrade lorsqu'elle prit en charge son éducation sur Rakis[15]. Dans le film Dune la Voix est utilisée par Gaius Helen Mohiam sur un animal des Harkonnen.
La Litanie contre la peur est une méthode d'autosuggestion utilisée par les sœurs du Bene Gesserit pour s'affranchir d'une peur ou d'une angoisse. La Litanie a été développée en des temps anciens par une sœur et fut transmise depuis, de génération en génération. Dame Jessica l'a apprise à son fils, Paul Atréides et ce dernier l'utilisa, entre autres, sur Caladan quand la Révérende Mère Gaius Helen Mohiam vint tester son humanité.
La Litanie, similaire dans son esprit à un mantra, est récitée mentalement par le bénéficiaire :
« Je ne connaîtrai pas la peur car la peur tue l'esprit. La peur est la petite mort qui conduit à l'oblitération totale. J'affronterai ma peur. Je lui permettrai de passer sur moi, au travers de moi. Et lorsqu'elle sera passée, je tournerai mon œil intérieur sur son chemin. Et là où elle sera passée, il n'y aura plus rien. Rien que moi. »
Les Révérendes Mères sont dépendantes du Mélange (l'Épice) qui leur donne leurs pouvoirs. Le Mélange devient une addiction chez quiconque le consomme ; cependant, chez les personnes qui ont subi l'Agonie de l'épice, les effets en sont beaucoup plus importants puisque leur survie n'est possible que si elles continuent à en consommer, leur métabolisme, saturé d’Épice (un peu comme chez les Navigateurs de la Guilde, mais n'entrainant pas de transformation physique), ne pouvant fonctionner sans.
Or, le Mélange est coûteux et ne cesse de drainer les richesses du Bene Gesserit. Ainsi, la plus grande menace qui pèse sur l'ordre des Sœurs serait de leur couper l'approvisionnement en Mélange (ce qui arriva presque à l'époque de L'Empereur-Dieu de Dune, les Sœurs à cette époque étant réduites à s'accrocher à leur allocation d’Épice distribuée par Leto II), raison pour laquelle elles chercheront, dans Les Hérétiques de Dune, à rallier à eux le Bene Tleilax (qui a réussi à créer l'Épice de synthèse) pour connaître leur secret.
Une sœur du Bene Gesserit qui survit au rituel de l'Agonie de l'épice devient une Révérende Mère et reçoit la Mémoire Seconde, accédant ainsi aux personnalités et souvenirs de ses ancêtres qui « habitent » en elle. Une Révérende Mère adulte est apte à gérer la présence de ces voix intérieures car elle a eu le temps de développer sa propre personnalité, fondée sur des souvenirs bien à elle.
Cependant, si une Sœur subit l'Agonie alors qu'elle porte un enfant, le fœtus qu'elle porte sera également inclus dans le processus, acquérant de fait lui aussi la Mémoire Seconde. L'enfant est alors nommé « pré-né ».
Étant donné que le pré-né n'a pas encore eu le temps de développer une psyché suffisamment forte quand il reçoit la mémoire de ses ancêtres, il est susceptible de tomber sous l'influence de l'une de ces personnalités contenues dans sa mémoire, et court le risque d'être ainsi « possédé » par l'un de ses ancêtres influents, qui pourra s'emparer de sa personnalité et agir à sa place. Ainsi, la Révérende Mère Anirul, femme de l’Empereur Shaddam IV, en sera atteinte, de même qu'Alia Atréides, la sœur de Paul Atréides, progressivement dominée par son ancêtre du côté maternel, le baron Vladimir Harkonnen, le père caché de dame Jessica. L'Abomination conduira Alia, « pré-née » (éveillée à la conscience par la cérémonie de l'Agonie de l'épice alors qu'elle n'était encore qu'un fœtus dans le ventre de sa mère, la Révérende Mère du Bene Gesserit Dame Jessica), à imposer une dictature religieuse, du fait des mauvais conseils prodigués par la présence dans son esprit de la mémoire du Baron Vladimir Harkonnen, son grand-père (contrairement aux Révérendes Mères, l'Abomination a aussi accès à la mémoire de ses ancêtres masculins).
Ce type de possession est appelé l'« Abomination » par le Bene Gesserit, et tout individu possédé de la sorte doit être tué sur le champ. Les Fremen ont aussi un rituel pour cette occasion, appelé le « Jugement en possession », qui sert à déterminer si un individu est possédé.
Quand les enfants de Paul Atréides, (Leto II et Ghanima), naquirent, ils obtinrent aussi la Mémoire Seconde, mais purent (en partie) développer une psyché apte à les protéger, aidés en cela par certaines de leurs présences intérieures (notamment leurs parents) qui les protégèrent de la possession.
Dans La Maison des mères en particulier, il est fait référence à de nombreuses reprises à la peur et/ou la défiance du Bene Gesserit face à l'amour, un sentiment que les membres de l'Ordre sont tenus de ne pas pratiquer.
L'exemple récurrent est le « Crime de Jessica » (c'est-à-dire l'amour de dame Jessica pour le duc Leto), ce qui causa en fin de compte l'arrivée inattendue du Kwisatz Haderach (Paul Atréides) et de son fils Leto II le Tyran, qui mit le Bene Gesserit et l'Imperium sous sa coupe pendant des millénaires grâce à son Sentier d'Or, les Sœurs ne voulant plus jamais réitérer cette expérience.
Dans ce même roman, on voit l’exemple de Dortujla, une sœur du Bene Gesserit exilée sur une planète disciplinaire après avoir commis un crime similaire.
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