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empereur byzantin de 685 à 695 et de 705 à 711 De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Justinien II (latin : Flavius Justinianus Augustus, grec : Ιουστινιανός Βʹ), (né vers 668 et mort le ), dit Rhinotmète – latin Rhinotmetus (ὁ Ῥινότμητος « Nez coupé ») –, est un empereur byzantin ayant régné entre 685 et 695, puis entre 705 et 711. Il est le fils de Constantin IV et de sa femme Anastasie, et le dernier représentant ayant régné de la dynastie des Héraclides.
Justinien II | |
Empereur byzantin | |
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Solidus à l'effigie de Justinien II. | |
Règne | |
-695 (10 ans) - 6 ans, 3 mois et 20 jours |
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Période | Héraclides |
Précédé par | Constantin IV Tibère III Apsimar |
Suivi de | Léonce Philippicos |
Biographie | |
Naissance | vers 668 |
Décès | (43 ans) Damatrys, Opsikion |
Père | Constantin IV |
Mère | Anastasia |
Fratrie | Héraclius |
Épouse | Eudoxie Théodora |
Descendance | Anastasia Tibère |
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Monté sur le trône à l'âge de dix-sept ans et déjà associé à son père dans sa dernière année, il se révèle rapidement très énergique et ambitieux, rêvant de rivaliser avec son homonyme Justinien Ier (et, selon Christian Settipani, aussi son arrière-grand-oncle). Les premières années de son règne sont marquées par des succès militaires, du fait à la fois de son activité débordante et des difficultés internes du califat musulman, plongé dans la guerre civile : en 685, le calife Abd Al-Malik ne détient plus que la Syrie et la Palestine, et de manière très précaire, puisque ces territoires sont en proie à la guérilla des Mardaïtes. En 686 Justinien II prend le titre de consul.
Dès 686, Justinien II envoie en Arménie byzantine et en Ibérie, disputées jusqu'alors entre les Arabes et les Khazars, une armée chargée d'y rétablir la suzeraineté byzantine. Cette armée, commandée par Léonce, stratège des Anatoliques, non seulement installe dans ces deux pays des princes vassaux de l'Empire byzantin, mais pousse jusqu'en Azerbaïdjan et en Albanie du Caucase. Ces succès persuadent le calife Abd Al-Malik de réviser à l'avantage des Byzantins le traité qu'il avait signé avec Constantin IV juste avant sa mort : il accepte de partager à égalité les revenus de l'Arménie byzantine, de l'Ibérie et de Chypre, et en échange l'empereur accepte le transfert des Mardaïtes chrétiens dans l'Empire. Certains d'entre eux arrivent des monts Amanus dès 686, d'autres du mont Liban au printemps 687 : en tout au moins douze mille hommes, apparemment avec leur famille, même s'il reste des Mardaïtes en territoire musulman ; Justinien II les installe dans le thème maritime des Karabisianoi et fait d'eux des rameurs de sa flotte.
L'empereur procède dans le même temps à une réforme administrative : il sépare en deux le thème des Karabisianoi, qui conserve la côte méridionale de l'Asie mineure, avec un drongaire des Cibyrrhéotes subordonné au stratège du thème, et les îles de la mer Égée, et crée en Grèce un thème de l'Hellas, les deux entités comptant chacune deux mille soldats combattants. Les rameurs mardaïtes ont leur propre commandant.
Au printemps 687, Justinien est parti pour l'Arménie y établir en personne sa suzeraineté. Sans doute pendant ce voyage à travers l'Asie mineure, il ordonne aux cavaleries des thèmes anatoliens de s'assembler l'année suivante en Thrace pour une grande campagne : les Bulgares, dont le khan Asparoukh est installé à Pliska depuis 681, étendent dangereusement leur influence sur les Slaves de Macédoine et de Thrace, menaçant les abords de Constantinople.
Au cours de l'année 688, Justinien II parcourt avec sa cavalerie la distance entre Constantinople et Thessalonique, délogeant de la région les Bulgares qui s'y trouvent, et subjuguant les populations slaves majoritaires. N'essayant pas de sécuriser et d'annexer la région, il transfère plutôt un grand nombre de Slaves d'Asie mineure (plus de cent mille) sur le territoire du thème de l'Opsikion (Thrace et surtout nord-ouest de l'Asie mineure). Il engage trente mille d'entre eux dans son armée, leur attribuant des lotissements militaires, sans doute dans la région de Cyzique, qui avait été dévastée par les Arabes dans les années 670 ; l'armée byzantine s'en trouve accrue d'environ un tiers. Il installe aussi des Slaves sur le territoire entre Thessalonique et le Strymon, comptant étendre un peu l'enclave sous contrôle impérial. Mais après un bref séjour à Thessalonique, utilisant pour le retour un itinéraire plus septentrional, son armée tombe dans une embuscade tendue par une bande de Bulgares et subit de très lourdes pertes.
En 689, l'empereur attaque de nouveau les Arabes, bien que le traité soit apparemment toujours en vigueur, mais la poursuite de la guérilla mardaïte en territoire musulman pourrait avoir amené le calife à suspendre le versement de son tribut. L'armée envoyée par l'empereur traverse les monts Amanus et s'approche du mont Liban. Abd Al-Malik, qui se prépare à reconquérir la Mésopotamie sur ses opposants musulmans, préfère négocier un nouveau traité avec les Byzantins : le tribut qu'il paie est réduit de mille nomismata par jour à mille par semaine, mais il laisse le champ libre à l'empereur en Arménie, en Ibérie et à Chypre ; Justinien II accueille six mille cinq cents Mardaïtes supplémentaires, avec leurs familles, et les recrute comme rameurs pour le thème de l'Hellas, mais il en reste encore sur le mont Liban.
Toute cette activité militaire coûte cher, et Justinien II est résolu à faire rentrer les impôts et les autres revenus de l'État par les moyens les plus rudes. Il s'est entouré de deux responsables financiers qui ne reculent devant aucune méthode pour collecter l'argent : son sacellaire (administrateur du domaine impérial) est l'eunuque Étienne le Perse, et son logothète général (directeur du fisc) l'abbé défroqué Théodote. Tous deux n'hésitent pas à recourir à la violence, à la torture et aux emprisonnements, et sont bientôt détestés. L'impopularité de Justinien II s'étend d'ailleurs à l'aristocratie du sénat, pour laquelle il ne témoigne aucun égard. Les deux ministres poussent eux-mêmes très loin le mépris de toute hiérarchie sociale, puisque lors d'un incident rapporté par le chroniqueur Théophane le Confesseur (pour l'année 693-694), Étienne le Perse, en l'absence de l'empereur, fait donner le fouet à l'impératrice-mère Anastasie, « comme les maîtres d'école à leurs élèves ».
En 691, Justinien II organise le transfert d'une bonne partie de la population de Chypre, soumise à une insécurité permanente, en Bithynie, près de Cyzique. Se souvenant certainement de la fondation de la métropole de Justiniana Prima par son homonyme Justinien, il crée lui-même « Justinianopolis », avec un métropolite jouissant des privilèges combinés de ceux de Cyzique et de Chypre.
Les premières monnaies frappées par Justinien II reprennent le type byzantin du VIIe siècle, soit la figure de l'empereur associée, sur les solidus (ou nomismata), à la Croix surplombant trois marches. Il est représenté sous des traits juvéniles et portant les attributs classiques du pouvoir byzantine, dont l'orbe crucigère[1]. Au début des années 690, l'empereur ordonne la frappe de nouveaux nomismata avec sur une face son portrait, comme c'est l'usage, mais tenant une grosse croix, et sur l'autre un buste du Christ devant également une croix. C'est une innovation importante qui confirme la christianisation de fond de l'Empire, qui abandonne ou substitue les anciennes formes romaines au profit de références chrétiennes. En effet, c'est la première fois que la figure du Christ est représentée, sous la forme du Christ dit Pantocrator.
De nombreuses interprétations ont émergé pour expliquer cette innovation. Pour des historiens, elle serait une réaction au fait que le califat musulman, qui reproduit jusqu'alors fidèlement le type des monnaies byzantines, décide de créer des pièces contenant la Shahada, la profession de foi musulmane ou bien une représentation du calife, à la place de celle de l'empereur. Justinien aurait alors réagi en affirmant l'aspect chrétien des pièces byzantines. C'est par exemple la thèse défendue par Mike Markowitz[2]. Toutefois, dans un article dédié à la question, Cécile Morrisson et Vivien Prigent font remonter la première émission des pièces comprenant le Christ à 691, juste avant le concile in Trullo qui, en condamnant le monothélisme, réaffirme la place du Christ dans certains pans de la théologie chrétienne, notamment l'importance des fêtes pascales. Il serait d'ailleurs significatif que les mêmes pièces comprenant le Christ font figurer l'empereur avec le loros, une sorte d'écharpe disparue depuis des décennies des monnaies byzantines mais devenue justement un attribut de l'habillement de l'empereur lors de Pâques. Il est alors possible que les Musulmans aient réagi à cette innovation en faisant évoluer eux-mêmes leurs pièces de monnaie, refusant d'y représenter le Christ. Ainsi, dès 691, elles font figurer le « calife debout » et non l'empereur, même s'il est difficile de lier les deux innovations. En effet, les pièces de Justinien font aussi apparaître l'empereur au revers et non plus au droit, laissant cette place au Christ alors que le calife debout reste au droit. Dans l'ensemble, Cécile Morrisson et Vivien Prigent contestent l'idée d'une influence réciproque des monnayages byzantins et musulmans.
Justinien II refuse alors le tribut du calife, payé avec ces pièces, et insiste pour recevoir des pièces avec un buste du Christ. Le traité est rompu, mais Justinien ne s'est pas encore rendu compte que la situation dans le califat est devenue bien différente, et que la position d'Abd Al-Malik est désormais bien plus forte.
Lors de son deuxième règne, Justinien II fait évoluer la représentation de la figure du Christ, dépeint avec des cheveux bouclés et plus courts, proches de l'image du Christ figurant dans les Évangiles de Rabula? L'orbe portée par Justinien comprend désormais la mention Pax (paix)[3]. Rapidement, il associe la figure de son fils Tibère à ses côtés, pour préparer sa succession[4].
Les monnaies en argent (les hexagrammes) devenues rares dans le monde byzantin subsistent sous Justinien II. Elles ne semblent frappées qu'à des occasions spéciales et représentent également le Christ au droit, associé à l'empereur au revers[5].
Pendant l'été 692, l'empereur se met en campagne personnellement, à la tête d'une armée dans laquelle sont intégrés pour la première fois ses trente mille mercenaires slaves, sous leur propre commandant Néboulos. Mais il n'est pas encore arrivé à la frontière qu'une armée arabe, envoyée par le calife, a déjà pénétré en territoire byzantin. La rencontre a lieu près d'une ville qui n'est pas identifiée avec certitude, appelée Sébastopolis. Les Byzantins semblent sur le point d'avoir le dessus, lorsque les Slaves, avec Néboulos lui-même à leur tête, passent à l'ennemi, ayant, dit-on, reçu de l'argent et des promesses. À cette vue, les Byzantins se débandent à leur tour. En fait, les Arabes se retirent ensuite sans pousser leur avantage, mais Justinien II, frustré d'une victoire à portée de main, enrage : il se venge cruellement des Slaves partis avec les Arabes en faisant massacrer ou vendre en esclavage leurs familles ; il fait aussi arrêter Léonce, stratège des Anatoliques, qu'il tient apparemment pour responsable de son revers, et le fait enfermer dans un cachot à Constantinople.
À l'automne 692, il se fait l'émule à la fois de son père et de son homonyme Justinien sur un autre terrain : la convocation d'un concile œcuménique. Comme il n'y a alors aucune question théologique à trancher, on décide de se concentrer sur la discipline, avec un concile complétant le cinquième (convoqué par Justinien) et le sixième (convoqué par Constantin IV), réputés déficients de ce point de vue : il est donc appelé le « concile in Trullo » (Πενθέκτη σύνοδος). Composé de 215 évêques (dont 183 du ressort du patriarche de Constantinople, Thrace et Asie mineure), il statue sur un grand nombre de pratiques et coutumes tant du clergé que des laïcs. Mais la conséquence de sa composition, et du caractère très concret de son ordre du jour, est qu'il décide l'imposition des usages de l'Église grecque à toutes les autres Églises, notamment la latine, qui en ont souvent de très différents. Dans ce concile « œcuménique », le pape est supposé être représenté par Basile, métropolite de Gortyne (la Crète étant à l'époque du ressort de Rome), mais ses titres de représentation ne sont apparemment pas très clairs. Basile signe les actes, prétendant engager la papauté, mais quand le pape Serge Ier les reçoit après coup, en 693, il les rejette complètement, déniant toute valeur à ce concile. Furieux, Justinien II, dans une opération d'intimidation, envoie le magistrianos Serge à Rome, et celui-ci arrête deux collaborateurs du pape (Jean de Porto, légat pontifical au concile de 680, et le conseiller Boniface), qui sont emmenés à Constantinople. Serge Ier ne cédant pas, le protospathaire Zacharie est envoyé pour l'arrêter lui-même, mais les troupes italiennes de l'exarque de Ravenne se mutinent et sont sur le point de lyncher Zacharie, qui ne doit son salut qu'à l'intervention du pape lui-même.
En 694, le changement de l'équilibre des pouvoirs au Proche-Orient, avec le rétablissement du pouvoir califal, se manifeste par le fait que le prince d'Arménie byzantine mis en place par le stratège Léonce quelques années auparavant transfère sans coup férir son allégeance de l'empereur au calife. Pendant l'été, Abd Al-Malik envoie en Cilicie une armée comprenant les mercenaires slaves ayant changé de camp à Sébastopolis, et les troupes locales byzantines sont défaites. La même année, l'empereur expédie au calife des colonnes destinées à la reconstruction de la mosquée de La Mecque, détruite pendant des combats entre les factions musulmanes, en 692 : sinon, Abd Al-Malik a menacé de dépouiller les églises de Jérusalem.
Justinien II se lance pendant cette période dans des grands travaux à Constantinople, se faisant l'émule en ce domaine aussi de Justinien : il fait construire une grande salle de réception dans le Palais, pour des cérémonies de cour auxquelles doivent prendre part les dèmes ; il fait aussi entourer le Palais d'un mur ; et il fait aménager à proximité une cour d'honneur en faisant raser une église remplacée par une autre ailleurs, mais cette démolition provoque un conflit avec le patriarche Callinique Ier de Constantinople. Ces travaux paraissent avoir été dispendieux, s'ajoutant aux campagnes militaires, et avoir conduit les deux ministres des finances à un surcroît de zèle dans l'extorsion et les exactions, y compris vis-à-vis de l'aristocratie.
Pendant l'été 695, une armée arabe met au pillage l'Arménie byzantine, s'avançant loin vers l'ouest et emmenant de nombreux captifs. Cette fois, la faiblesse de l'Empire en face du califat apparaît crûment, et la réputation d'empereur victorieux qu'avait pu se faire brièvement Justinien II sombre complètement. En septembre, probablement dans le but de désamorcer l'hostilité des nombreux amis du stratège Léonce, qui n'ont jamais admis son arrestation et son incarcération pendant trois ans, Justinien II le fait libérer et le nomme stratège du nouveau thème d'Hellade. Léonce doit quitter la capitale le jour même de sa sortie de prison, mais aussitôt, avant même qu'il ne parte, une conspiration prend forme autour de lui, avec le soutien de membres de l'aristocratie sénatoriale et du haut clergé, y compris le patriarche Callinique Ier. Visiblement, les haines se sont accumulées autour de l'empereur.
La nuit suivante, une opération est lancée contre le prétoire, siège de l'éparque, qui est capturé et ligoté. Les prisons dans lesquelles croupissent des opposants sont ouvertes et des armes distribuées. Accompagné de deux moines qui l'assistent dans le complot (dont l'higoumène Georges de Cappadoce, du monastère de Florus près du Bosphore), Léonce se rend chez le patriarche, qui prête son concours. Des émissaires sont envoyés dans les quartiers de la ville pour ameuter la foule pour le lendemain matin à Sainte-Sophie. La faction des Bleus aurait soutenu le coup d'État. À Sainte-Sophie, le patriarche Callinique Ier prend la parole et soutient sans ambiguïté l'entreprise. La foule se déplace alors à l'hippodrome de Constantinople. Justinien II est arrêté dans le Palais, sans qu'apparemment personne ne tire l'épée pour le défendre, et traîné dans l'hippodrome où Léonce trône déjà revêtu de la pourpre impériale. La foule réclame à grands cris l'exécution immédiate du souverain déchu. Léonce lui fait grâce, mais lui fait couper le nez et peut-être la langue pour l'empêcher à jamais de revendiquer à nouveau le trône. Quant aux ministres détestés, Étienne le Perse et Théodote, ils sont extraits du Palais, attachés par les pieds et traînés dans les rues, et enfin brûlés vifs sur le Forum du Bœuf.
Justinien II est embarqué avec quelques-uns de ses proches et partisans et exilé dans la cité de Chersonèse, sur la côte nord de la mer Noire. À cette date, à vingt-sept ans, il a été marié une fois, fiancé en 680, avec une femme nommée Eudoxie, dont on ne sait rien sinon qu'elle a dû mourir avant 695, puisqu'elle a été enterrée à Constantinople, dans l'église des Saints-Apôtres[6]. Ils ont eu une fille, dont le nom n'est pas donné dans les chroniques, mais qui s'appelait peut-être Anastasie, comme sa grand-mère. On nous dit seulement qu'elle est fiancée en 705 à Tervel, le khan des Bulgares, auquel il est donné le titre de césar. On ignore le sort d'Anastasie après 705.
En 704, Justinien II, exilé à Chersonèse, n'a pas renoncé à recouvrer son trône, malgré sa mutilation. Les notables de la cité, apprenant qu'il a échafaudé un plan pour réaliser cette ambition, décident de l'arrêter et de l'envoyer sous bonne escorte à Constantinople pour que son successeur Tibère III dispose de lui. Mais Justinien II parvient à s'enfuir avec ses proches et se réfugie auprès du khagan des Khazars, le peuple qui domine l'arrière-pays. Il est bien accueilli par le khagan qui lui donne sa fille en mariage. Celle-ci est baptisée sous le nom de Théodora de Khazarie, nouvelle marque de la fascination de Justinien II pour son homonyme Justinien. Elle était la sœur du khagan Busir Glavan. Mais Tibère III, ayant été informé des événements, envoie une ambassade auprès du khagan, disposé à livrer son gendre[7]. Justinien II parvient de nouveau à s'enfuir, laissant son épouse khazare enceinte, et se rend par mer auprès de Tervel, khan des Bulgares, où il arrive à la fin de 704.
Il s'entend parfaitement avec Tervel, qui accepte de mettre à sa disposition une armée de quinze mille hommes pour récupérer son trône. Tibère III, averti, rappelle précipitamment son frère le monostratêgos Héraclius de la frontière orientale. Héraclius s'avance avec son armée vers la Bulgarie, mais Justinien II et Tervel le contournent et se hâtent vers Constantinople (juillet 705). Après avoir attendu trois jours sous les murailles de la capitale, Justinien II lui-même, accompagné de quelques hommes, se glisse dans la canalisation de l'aqueduc de Valens, désaffectée depuis le siège de la ville par les Avars en 626, et parvient à faire ouvrir une porte. Pendant que son armée prend le contrôle de la capitale, Tibère III s'enfuit à Sozopolis. Lui et son frère Héraclius, abandonnés peu à peu par leurs troupes, seront capturés quelques mois plus tard. Justinien II fait procéder à des exécutions d'officiers et de fonctionnaires qui ont servi les usurpateurs. Il dépose le patriarche Callinique Ier, le fait aveugler et l'exile à Rome ; contrairement à l'usage qui voulait que le patriarche soit choisi dans le clergé séculier de la capitale, il le remplace par un moine d'Amastris de sa connaissance, Cyrus de Constantinople. Son triomphe a lieu en février 706, quand il organise une fête pour les exécutions conjointes de Léonce, tiré du monastère où il était reclus, et Tibère III, qui a été capturé : ils sont tous deux promenés dans les rues sous les horions de la foule, figurent dans un spectacle à l'hippodrome la tête sous les deux pieds de l'empereur, et finalement décapités dans le Cynêgion.
Justinien II récompense d'autre part l'aide que lui a apportée Tervel en le couvrant de cadeaux (or, argent, soie...) et d'honneurs, en lui donnant sa fille et en le nommant césar, mais aussi en lui abandonnant des territoires. Il envoie également une ambassade auprès du khagan des Khazars pour faire venir son épouse Théodora de Khazarie et leur fils né en 704 qu'il appelle Tibère et qu'il associe au trône en 705. Par ailleurs, il se fait, paraît-il, fabriquer un nez en or pour couvrir sa mutilation.[réf. nécessaire]
Le calife Abd Al-Malik meurt peu après la restauration de Justinien II ; son fils Al-Walīd Ier lui succède. Pendant ce temps, Muhammad, frère d'Abd Al-Malik, finit de soumettre l'Arménie byzantine révoltée en massacrant la noblesse du pays. En 706, Maslama ben Abd al-Malik, demi-frère du nouveau calife, envahit la Cappadoce et fait le siège de la ville de Tyane pendant l'hiver 706-707. Justinien II envoie deux stratèges à la tête d'une armée grossie de paysans irréguliers, mais ils sont battus à plates coutures. Tyane est mise à sac et ses habitants déportés. En 708, Justinien II mène une campagne contre les Bulgares pour tenter de récupérer les territoires qu'il leur a abandonnés en 705 ; son armée est attaquée et mise en pièces par Tervel près de la forteresse côtière d'Anchialos ; l'empereur, parmi les rares survivants, regagne Constantinople par la mer. Pendant ce temps, Maslama mène une nouvelle campagne jusqu'au cœur de l'Asie mineure et défait une armée byzantine près d'Amorium. L'année suivante, il dévaste encore l'Isaurie.
En 709, Justinien II envoie pour punir Ravenne, une ville qu'il considère comme rebelle (peut-être depuis la mésaventure du protospathaire Zacharie en 694), une flotte commandée par le patrice Théodore. À son arrivée, celui-ci invite tous les notables de la cité à un banquet, et quand ils sont tous réunis, il les fait arrêter, embarquer, et les conduit à Constantinople. Là, Justinien les condamne à mort, sauf l'archevêque Félix, qui est seulement aveuglé. Cette opération affaiblit encore plus la position des Byzantins en Italie, où ils sont de plus en plus détestés. Mais l'empereur invite le pape Constantin à venir dans la capitale pour régler sereinement la querelle ouverte par le concile in Trullo de 692.
En 710, la cité de Chersonèse, pour laquelle Justinien II n'a déjà aucune sympathie, se révolte en faisant appel aux Khazars de l'arrière-pays. L'empereur envoie une flotte commandée par le patrice Étienne Asmiktos qui reprend facilement la cité et procède à des exécutions de notables. L'aristocrate arménien Bardanès, banni par l'empereur, est laissé sur place. Mais en octobre, sur le chemin du retour, la flotte est prise dans une tempête et sombre corps et biens. Pendant ce temps, Chersonèse se révolte et fait à nouveau appel aux Khazars. Voulant jouer cette fois plus finement, Justinien II envoie une nouvelle flotte, commandée par le patrice Georges, logothète général, et l'éparque Jean, chargés de négocier. Mais les habitants de Chersonèse tuent eux-mêmes Georges et Jean, et livrent leurs hommes aux Khazars, qui les massacrent. Ensuite, début 711, ils proclament Bardanès empereur sous le nom de Philippicos.
Pendant ce temps, le pape Constantin, après avoir longuement hésité, s'est décidé à se rendre à l'invitation de l'empereur : partant de Rome en octobre 710, il arrive à Constantinople en février 711 et y est accueilli avec tous les honneurs. Il est reçu par Justinien II lui-même à Nicomédie. Les deux hommes mènent des négociations dont la teneur exacte n'est pas connue, mais il semblerait que le pape accepte de reconnaître une bonne partie des canons du concile (dont tous n'étaient pas contraires aux positions de la papauté), tandis que l'empereur accepte que l'Église latine n'en reconnaisse pas certains. Justinien se montre ici étonnamment flexible par rapport à certaines de ses attitudes passées.
L'attention de l'empereur est retenue par la défection du royaume de Lazique et de l'Abasgie, ayant transféré leur allégeance au calife. Justinien II met l'un des officiers de sa garde, Léon l'Isaurien, à la tête d'une petite expédition pour récupérer l'allégeance de ces principautés. Mais d'autre part, il faut qu'il s'occupe de la révolte de Chersonèse et de l'usurpation de Philippicos : il envoie une autre flotte, commandée par le patrice Mauros, vers la cité rebelle. Pendant ce temps, lui-même part en expédition vers l'est et rassemble ses troupes à Sinope (été 711). Mais arrivé à Chersonèse, après avoir pris quelques fortifications, Mauros s'aperçoit que sa mission est pratiquement impossible ; Philippicos, réfugié chez le khagan des Khazars, bénéficie de son soutien. Finalement, Mauros se rallie aux habitants de la ville, et tous rappellent Philippicos et l'acclament comme empereur. Ensuite, ils embarquent dans la flotte et se dirigent vers Constantinople.
Averti de ces événements, Justinien II, qui est à Sinope, revient précipitamment vers la capitale, mais il arrive trop tard : quand il atteint Chalcédoine, sur la rive asiatique du Bosphore, les rebelles sont déjà entrés dans la capitale, ont neutralisé ou tué les officiers qu'il y avait laissés, et ont aussi égorgé son jeune fils Tibère. Peu après, débarquant devant le camp de Justinien à Damatrys, Opsikion, près de Chalcédoine, des hommes de Philippicos et de Mauros parviennent à retourner une bonne partie de ses troupes en leur garantissant l'impunité si elles l'abandonnent. Justinien II, lâché par tous, est retrouvé et décapité par un de ses anciens gardes du corps, qui envoie sa tête à Philippicos. Celui-ci expédie, paraît-il, cette tête jusqu'à Rome. Il fut inhumé dans l'église des Saints-Apôtres en Constantinople. Son fils Tibère fut assassiné le même jour que son père en Blachernes et fut inhumé dans l'église de Sainte-Marie des Blachernes.
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