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Une interface neuronale directe - abrégée IND ou BCI[1] ou encore ICM (interface cerveau-machine, ou encore interface cerveau-ordinateur) est une interface de communication directe entre un cerveau et un dispositif externe (un ordinateur, un système électronique…). Ces systèmes peuvent être conçus dans le but d'étudier le cerveau, d'assister, améliorer ou réparer des fonctions humaines de cognition ou d'action défaillantes.
L'IND peut être unidirectionnelle ou bidirectionnelle.
Ce type de périphérique est fondamentalement différent de toute autre interface homme-machine : une telle liaison ne requiert en effet aucune transformation préalable du signal électrique émis par l’activité cérébrale en activité musculaire (psychomotrice), cette dernière étant usuellement traduite en signal d’entrée pour la machine.
En s’affranchissant de la chaîne de réaction « cerveau, nerfs, muscles, interface conventionnelle homme-machine », les temps de réponse peuvent être écourtés de plusieurs dixièmes de seconde dans le cas d’interaction urgente. De plus, ils laissent les organes moteurs et sensoriels (mains, pieds, yeux, etc.) libres et disponibles pour d’autres types de commandes simultanées.
peut envoyer (tenant) vers une entrée machine ou recevoir (aboutissant) à partir d'une sortie machine des informations mais jamais les deux en même temps, car chaque interface est destinée à un usage spécifique, comme tout matériel d'entrées-sorties en informatique. Exemple d'IND unidirectionnelle : implant cochléaire (entrée), EEG contrôlant une prothèse (sortie)[2].
Une interface neuronale directe est soit implantée dans un cerveau ; on parlera alors d'IND invasive, soit uniquement externe par le biais de technique d'imagerie cérébrale, comme l'EEG dans la plupart des cas. Elle désigne à la fois le cortex humain/animal ou une culture de neurones. Le cerveau ne doit pas être compris comme « une entité (système) capable de raisonnement uniquement logique », puisque seules les propriétés électriques des neurones sont exploitées.
La recherche sur les IND a commencé dans les années 1970 à l'université de Californie à Los Angeles (UCLA) grâce à une dotation de la National Science Foundation et suivie d'un contrat avec la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA)[3],[4]. Les publications scientifiques concernant ces recherches mentionnent pour la première fois l'expression brain-computer interface.
D'autres travaux, réalisés en groupe sous la direction de Schmidt, Fetz et Baker dans la même période établirent que, par une méthode d'entraînement par punition et récompense, des singes pouvaient rapidement apprendre à contrôler par la volonté la fréquence de neurones individuels du cortex moteur primaire[5].
L'étude de conditionnement réalisée par Fetz et ses collègues a tout d'abord démontré que le singe peut apprendre à contrôler la réponse d'un équipement de biofeedback par sa simple pensée[6]. Ce travail a permis, dès les années 1970, de démontrer que le singe est capable de contrôler l'activité individuelle des neurones ou de groupes de neurones dans le cortex moteur primaire, lorsque l'expérimentateur le récompense s'il utilise un chemin neuronal déterminé[7]. De cette époque datent aussi les premières études visant à comprendre les algorithmes qui régissent le cheminement neuronal menant à une action.
Dans les années 1980, Apostolos Georgopoulos, de l'université Johns-Hopkins, trouva, chez le macaque rhésus, une loi mathématique expliquant la direction de déplacement de son bras en fonction de l'activité électrique d'un simple neurone de son cortex moteur. Cette fonction était essentiellement une cosinus. Il découvrit aussi que ce sont des groupes de neurones dispersés dans plusieurs régions du cerveau qui contrôlent le mouvement. Malheureusement son équipement ne lui permit pas d'enregistrer l'activité dans toutes ces zones en même temps[8].
À partir des années 1990, la recherche sur les IND a progressé rapidement[9]. Plusieurs équipes de recherche, dont celles de Richard Andersen, John Donoghue, Phillip Kennedy, Miguel Nicolelis et Andrew Schwartz ont réussi à capturer les ondes provenant de centre moteurs du cerveau et à les utiliser pour contrôler des équipements.
C'est Phillip Kennedy et ses collègues qui fabriquèrent la première interface cerveau-ordinateur intracorticale. Elle fut connectée par implantation d'électrodes dans le cerveau d'un singe.
En 1999 une équipe de chercheurs, menée par Yang Dan à l'université de Californie à Berkeley, réussit à décoder l'activité neuronale afin de reproduire les images vues par des chats. L'équipe utilisa pour cela un réseau d'électrodes implantées dans le thalamus (qui est le point d'entrée de tous les influx nerveux de perception). Plus précisément, ils visèrent 177 cellules cérébrales de la zone du noyau géniculaire latéral du thalamus, qui décodent les signaux en provenance de la rétine. Huit courts films furent projetés aux chats alors que l'activité de leurs neurones était enregistrée. Par l'utilisation de traitements mathématiques des signaux, les chercheurs purent décoder les signaux enregistrés et reconstruire ce que les chats avaient vu[10]. Des recherches similaires ont depuis été menées par des chercheurs japonais[réf. souhaitée].
Miguel Nicolelis a promu l'utilisation massive d'électrodes sur de larges zones du cerveau dans le but d'obtenir un signal très complet permettant de piloter une IND. On considère que ce type de dispositif permet de réduire la variabilité des résultats qui sont obtenus avec un plus petit nombre d'électrode. Ayant conduit plusieurs études sur le rat dans les années 1990, Nicolelis et ses collègues développèrent un IND capable de décoder l'activité neuronale chez le singe nocturne. Ils utilisèrent ce dispositif pour reproduire les mouvements du singe avec un bras robotisé. Les singes furent choisis pour leur très grande dextérité, ce qui rendait le champ d'investigation très étendu.
Dès les années 2000, cette équipe fabriqua un IND reproduisant les mouvements du singe hibou lorsqu'il manipule une manette pour attraper de la nourriture[11]. Cette IND fonctionnait en temps réel et permettait aussi de piloter un robot distant, à travers Internet. Le singe ne pouvant pas voir ce robot distant, cette expérience permit de tester un système IND à boucle ouverte (sans retour d'information).
Nicolelis réalisa ensuite ses expériences sur des singes rhésus, dont le cerveau est plus proche de celui des hommes. Les singes furent entrainés à atteindre et saisir des objets présentés sur un écran d'ordinateur. Leur pensée était décodée et transmise à un bras robotisé dont ils ne pouvaient voir les mouvements[12],[13]. Par la suite, les singes apprirent à contrôler les mouvements du bras robotisé en le regardant. L'IND captait l'intention de vitesse de déplacement ainsi que l'intention de force mise par le singe pour attraper les objets.
Plusieurs autres équipes ont développé des IND et les algorithmes nécessaires pour décoder les signaux neuronaux. Ce sont entre autres celle de John Donoghue de l'université Brown, celle de Andrew Schwartz de l'université de Pittsburgh et celle de Richard Andersen de Caltech. Ils ont mis au point des IND basées sur le décodage de l'activité d'un plus petit nombre de neurones (15 à 30 neurones contre 50 à 200 neurones pour l'équipe de Nicolelis).
L'équipe de Donoghue's a entraîné des macaques rhésus à utiliser une IND pour suivre des cibles visuelles sur l'écran d'un ordinateur avec ou sans utilisation d'une manette (boucle fermée ou boucle ouverte)[14]. L'équipe Schwartz a créé une IND permettant de simuler des mouvements dans un monde virtuel[15]. Ces recherches défrayèrent la chronique lorsqu'elles présentèrent un singe s'alimentant de pâtes grâce à un bras robotisé piloté uniquement par la pensée[16],[17].
L'équipe Andersen a enregistré, grâce à l'IND qu'elle a mise au point, l'activité des neurones de pré-mouvement du cortex pariétal postérieur. Ces neurones produisent un signal lorsque le singe anticipe de recevoir une récompense[18].
Actuellement des IND sont développés pour capter les signaux à l'origine de l'intention de mouvement d'un membre. Il existe aussi des IND pour prédire l'activité électrique des muscles (électromyographie)[19]. Ce type d'IND permet de restaurer la mobilité d'un membre paralysé en stimulant artificiellement les muscles.
Miguel Nicolelis et ses collègues ont démontré que la mesure de l'activité de certains grands groupes de neurones permet de prédire la position d'un membre. Ce travail est à l'origine de la création d'interface cerveau-machine, c'est-à-dire d'un système électronique qui lit l'intention de déplacement d'un membre et la convertit pour actionner un membre artificiel. Carmena et ses collègues[12] soutiennent que le cerveau du singe se réorganise afin d'inclure la représentation de bras robotisé comme une extension de son propre membre.
Le point de faiblesse de la technologie des IND est le manque de capteur permettant une perception fiable, sûre et robuste des ondes cérébrales. Il est probable que ce type de capteur sera disponible dans les années à venir. Ceci augmenterait grandement le nombre d'applications fournies par les IND.
Le développement d'une IND est compliqué et prend beaucoup de temps. Afin de répondre à cette problématique, le Dr Gerwin Schalk a développé un système polyvalent nommé IND2000, permettant de mener des recherches variées. IND2000 est développé depuis 2000 grâce à un projet mené par la « Brain–Computer Interface R&D Program » du Wadsworth Center (en) au New York State Department of Health, Albany, New York, États-Unis
Il existe aussi une technique de détection à distance (sans connexion physique) utilisant la mesure de l'activité des canaux ioniques comme celui de la rhodopsine pour contrôler l'activité d'ensembles de neurones qui sont génétiquement apparentés. Cette technique a permis de capter le processus de décision de déplacement de souris[20].
Depuis les années 1970, le champ de recherche sur les IND s'est spectaculairement étendu, principalement en ce qui concerne les neuroprothèses (neuroprosthetics), qui ont pour fonction de restaurer l'ouïe, la vue ou une incapacité motrice.
Grâce à la fantastique plasticité du cerveau, il a été constaté que l'influx nerveux produit par les prothèses peut, après un temps d'adaptation, être traité comme un influx naturel[21].
Grâce aux récentes avancées effectuées ces derniers temps, une IND permet non seulement de restaurer des facultés perdues (comme l'ouïe, la vue ou même les mouvements), mais est capable de plus d'étendre ces facultés, bien au-delà des capacités naturelles (comme le contrôle du curseur d'un PC à une vitesse et une précision impossibles à atteindre avec une simple souris, des jeux en ligne et même des membres robotisés).
Depuis 2010, une compagnie d’ingénierie médicale finance les « BCI Award »[22] qui permettent aux équipes de chercheurs en IND du monde entier de faire passer leurs publications devant un jury et peut-être remporter un prix de 3 000 $. On peut ainsi chaque année suivre les dernières avancées dans le domaine. Dans les meilleures publications de ces dernières années, on retrouve par exemple la création de prothèses de main, pour les tétraplégique ou pour aider à soigner les douleurs fantômes dans un membre perdu. La majorité des avancées dans le domaine reste néanmoins à l’heure actuelle de l’ordre technique plus que pratique, le traitement des signaux produits par les influx nerveux étant très complexe à coder/décoder.
Prospectivement, certains ont imaginé la création d'un exocortex.
Les patients dont les capacités de communication ont été altérées, peuvent bénéficier de la technologie d'une interface neuronale directe (entre autres par le biais du BrainGate) pour communiquer.
Par cette méthode, ils imaginent une souris d'ordinateur sous leur main et par la pensée, ils arrivent à déplacer un curseur sur un clavier virtuel modélisé sur un écran.
En plus de lettres, le clavier inclut des mots prédéfinis facilitant la composition de phrases ou d'idées.
Avec de la pratique, un utilisateur de clavier virtuel comme Matthew Nagle arrive à manipuler un clavier virtuel (via une interface neuronale) avec la même aisance que celui qui manipule une souris informatique conventionnelle.
La conception de neuroprothèses est une spécialité des neurosciences concernant les prothèses qui incorporent un système capable d'émuler les fonctions du système nerveux humain. La neuroprothèse la plus couramment utilisée est l'implant cochléaire, qui en 2006, était implantée sur environ 100 000 patients dans le monde[23].
Il existe un grand nombre d'autres prothèses, comme l'implant rétinien.
La différence entre IND et neuroprothèse réside essentiellement dans l'utilisation qui est faite de l'équipement : les neuroprothèses relient en général le système nerveux à une prothèse alors que les IND relient le système nerveux à un ordinateur. Le plus souvent les neuroprothèses sont connectées à n'importe quelle partie du système nerveux, par exemple les nerfs des membres, alors que les IND sont branchés sur le système nerveux central.
Pour des raisons justifiées évidentes, les deux termes sont parfois considérés comme interchangeables. En effet, toutes deux poursuivent le même but, à savoir restaurer l'ouïe, la vue, le mouvement ou une fonction cognitive, et exploitent des méthodes expérimentales et chirurgicales identiques.
Plusieurs laboratoires ont étudié les signaux corticaux des singes et des rats afin de mettre au point des IND capables de reproduire des actions.
Des singes ont pu ainsi télécommander le déplacement d'un curseur sur un écran d'ordinateur ou commander un bras robotisé afin de réaliser des tâches simples grâce à leur pensée[24].
En , les photographies montrant un singe pilotant un bras automatisé par sa pensée à l'université de médecine de Pittsburgh furent publiées dans plusieurs publications scientifiques de première importance[25].
Des techniques invasives d’IND ont été mises au point dans le but de restaurer la vue ou la mobilité chez l'être humain.
Ces systèmes sont connectés directement dans la matière grise du cerveau grâce à la neurochirurgie.
Étant connectés directement à la matière grise, ils offrent en théorie une meilleure qualité de signal mais dans la pratique, ils deviennent parfois enkystés, ce qui réduit la qualité du signal, voir l'annule complètement, et peut engendrer des complications médicales[26].
Dans le domaine public, William H. Dobelle est un des premiers scientifiques qui fut capable d'implanter une interface destinée à restaurer la vue.
Son premier prototype fut implanté sur "Jerry", un homme devenu aveugle adulte en 1978. Un unique réseau de 68 électrodes fut implanté dans son cortex visuel et permit de lui transmette la perception de la lumière.
Le système comportait une caméra montée sur des lunettes, envoyant un signal à l'implant. À l'origine cet implant permit à Jerry de percevoir les nuances du gris dans un champ de vision limité avec une vitesse de rafraîchissement lente.
Cela nécessitait aussi qu'il soit relié à un très gros système informatique, mais la miniaturisation de l'électronique et l'augmentation des performances permirent finalement de rendre le système portable. Il put alors réaliser des tâches simples sans assistance[27].
En 2002, Jens Naumann, qui a aussi perdu la vue à l'âge adulte, est devenue la première d'un groupe de 16 patients qui furent dotés de la seconde génération d'implants Dobelle.
Ce fut une des premières offres commerciales d’IND. Cette deuxième génération utilise un implant plus sophistiqué qui transmet plus précisément les contours et offre une vision cohérente.
Les taches lumineuses sont réparties dans le champ de vision à la façon « d'étoiles dans la nuit ». Dès la mise en place de son implant Jens put conduire une voiture à petite allure sur le parking de l'institut de recherche.
Des chercheurs de l'université Emory à Atlanta, dirigés par Philip Kennedy et Roy Bakay furent les premiers à implanter sur un homme une IND permettant d'émuler le mouvement. Leur patient, Johnny Ray (1944–2002), souffrait d'un ‘syndrome d'enfermement’ après une attaque cérébrale en 1997. L'implant fut branché en 1998 et il vécut suffisamment longtemps pour maîtriser son utilisation et put même piloter un curseur sur un écran d'ordinateur. Il est mort en 2002 d'une rupture d'anévrisme cérébral[28].
En 2005, le tétraplégique Matt Nagle fut la première personne capable de contrôler une main artificielle grâce à un IND. Il participa pendant neuf mois à un test de technologie cybernétique BrainGate. L'implant fut réalisé dans la région du gyrus précentral droit (zone qui contrôle le déplacement du bras). La technologie à 96 électrodes BrainGate permit à Nagle de contrôler un bras robotisé, ainsi qu'un curseur d'ordinateur, l'éclairage et la télévision[29]. L'année suivante le professeur Jonathan Wolpaw reçut le prix de la Fondation Altran pour l'innovation afin qu'il développe une interface utilisant des électrodes de surface plutôt qu'implantées dans le cerveau.
Récemment, dans le cadre d’une collaboration franco-suisse, une équipe Inserm a participé au développement d’une neuroprothèse destinée à corriger les troubles de la marche associés à la maladie de Parkinson. Testé chez un premier patient, le dispositif a permis la restauration d’une marche fluide, confiante et sans chute.[30]
Les IND partiellement invasifs utilisent un composant implanté dans la boîte crânienne qui ne pénètre pas dans la masse cérébrale. Cette technique permet une meilleure résolution que les systèmes non invasifs (car le passage à travers la dure-mère distord le signal) et présente moins de risques que la technologie invasive.
L'électrocorticographie (ECoG) mesure l'activité électrique à la manière de l'électroencéphalographie mais grâce à des électrodes placées à l'intérieur de la boîte crânienne, entre la dure-mère et le cortex[31]. La technologie ECoG a été testée sur les humains par Eric Leuthardt et Daniel Moran de l'université de Washington à St Louis à partir de 2004. Une expérience a été menée afin de permettre à un adolescent de jouer au jeu Space Invaders en utilisant un implant EcoG[32]. Cette expérience a prouvé que cette technique offre un contrôle rapide, nécessitant peu d'adaptation et qu'elle constitue un compromis idéal entre qualité de signal et risque pour l'homme.
(Note : Ces électrodes furent implantées dans le cerveau du patient, souffrant d’épilepsie sévère, en même temps que des électrodes temporaires pour localiser le foyer de la maladie.)
Les IND utilisant une technologie d'« imagerie fonctionnelle portable » sont théoriquement réalisables, nécessitant l'implantation d'un laser dans la boîte crânienne : le laser serait focalisé sur un seul neurone et la réflexion serait mesurée par un senseur distinct. Quand le neurone s'active, la réflexion est modifiée. Ce qui permet de visualiser l'activité neurone par neurone.
Ce signal peut être subdural ou épidural, et ne nécessite pas de pénétrer le parenchyme lui-même. Il existe peu d'études à ce sujet, par manque de cobayes. Actuellement, la seule occasion de tester cette technique se présente sur des patients qui nécessitent un monitoring invasif pour localiser une zone de résection d'un centre épileptique.
ECoG est un très bon compromis car elle offre une bonne résolution spatiale, un rapport signal/bruit faible, une large réponse en fréquence et nécessite moins d'entraînement que l'EEG extracrânien. Cette technique est aussi moins complexe, présentant moins de risques cliniques et probablement une plus grande stabilité que le monitoring mono-neurone, ce qui permet d'envisager une mise en œuvre grand public.
Des technologies non invasives ont été testées sur l'homme. Les IND non invasives utilisent l'imagerie médicale. Ce type de signal (ondes cérébrales) a été utilisé pour induire des mouvements sur des cobayes (sujets) volontaires. Actuellement, les IND non invasives offrent une faible résolution car le signal (l'onde cérébrale) est altéré(e) par la traversée de la boîte crânienne, mais les IND non invasives sont bien plus simples à porter. Les ondes cérébrales peuvent effectivement être surveillées, contrôlées, même si la précision ne descend pas au niveau d'un neurone unique mais d'un groupe de neurones (théories et modèles computationnels).
L'électro-encéphalographie (EEG) est la technologie non invasive qui a été la plus étudiée, car elle offre une très bonne résolution temporelle, est facile à mettre en œuvre, portable et économique. Néanmoins, elle est pénalisée par la présence de bruits et l'utilisation de l'EEG en tant qu'IND nécessite un entraînement intensif.
Par exemple, lors d'expériences menées dans les années 1990, Niels Birbaumer de l'université Eberhard Karl de Tübingen en Allemagne, entraîna des patients gravement paralysés à réguler leur « potentiel cortical faible » mesuré par l'EEG afin de pouvoir contrôler un curseur d'ordinateur[33] (Birbaumer avait précédemment entraîné des patients épileptiques à éviter les crises par le contrôle de cette onde de faible potentiel). Cette expérience permit à dix patients de contrôler un curseur d'ordinateur par la maîtrise de leurs ondes cérébrales.
Le procédé était lent : après un entraînement de plusieurs mois, il fallait toujours plus d'une heure pour écrire 100 caractères.
Birbaumer's a ensuite travaillé avec Jonathan Wolpaw, de l'université de l'État de New York, à développer une technologie qui permette au patient de choisir le type d'onde cérébrale la plus facile à utiliser parmi les ondes mu et les ondes bêta.
Ces méthodes nécessitent d'éduquer le patient à moduler ses ondes cérébrales en se basant sur la mesure de ses ondes (feedback).
Elles sont contrôlées volontairement par le patient et ont donc une forte influence sur l'expérimentation.
Afin de déterminer l'influence du patient sur l'expérience, des études portant sur les signaux P300 ont été menées. À la différence des signaux mesurés précédemment, ces ondes sont générées de manière involontaire, (voir Potentiel évoqué) en fonction des perceptions (V.A.K.O.G) des patients.
Leur étude permet donc de reconnaître les pensées du patient sans avoir à l'entraîner au préalable. C'est la réponse naturelle de son cerveau lorsqu'il reconnaît quelque chose.
Lawrence Farwell[34] et Emanuel Donchin ont développé une IND utilisant la technologie de l'EEG à la fin des années 1980[35]. Cette « prothèse mentale » mesure les ondes P300 générées par des patients dont certains sont atteints de paralysie dues à un syndrome d'enfermement et leur permet de communiquer des commandes, lettres et mots à un ordinateur. Ceci leur a même permis de parler grâce à un synthétiseur vocal. Beaucoup d'autres équipements de ce type ont été développés depuis cette époque. Par exemple, en 2000, la chercheuse Jessica Bayliss de l'université de Rochester a montré que des volontaires équipés d'un casque de réalité virtuelle, lisant les ondes P300, peuvent contrôler les éléments d'un monde virtuel[36].
Au début des années 1990, Babak Taheri, de l'université de Californie à Davis présenta un nouveau type de capteur actif pour l'EEG. Cet équipement ne nécessite pas de préparation de la peau du patient, ne nécessite pas d'électrolyte conducteur et utilise des capteurs dont la taille est très réduite. Cette technologie, utilisée en mono-canal fut publiée en 1994[37]. Ce système actif utilise quatre zones de mesure et incorpore une électronique miniaturisée pour améliorer le rapport signal sur bruit, ainsi que la batterie. Des tests de fonctionnement furent réalisés sur des humains, selon quatre modes :
La performance de ce capteur « à sec » se révéla meilleure que celle présentée par les électrodes traditionnelles à l'argent/chlorure d'argent en termes de préparation de la peau et de rapport signal/bruit[38].
En 1999, des chercheurs de l'université Case Western Reserve, dirigés par Hunter Peckham, utilisa un système de casque EEG à 64 électrodes pour restaurer partiellement les mouvements de la main du patient quadriplégique Jim Jatich. Il lui suffisait de se concentrer sur des concepts simples et opposés comme « vers le haut / vers le bas » et ses ondes bêta étaient analysées par un logiciel pour identifier les formes de signaux associées. Une forme d'onde basique fut identifiée et permit de contrôler l'utilisation d'un interrupteur. Le concept « vers le haut » permettait de l'allumer, quand « vers le bas » permettait de l'éteindre. Le signal capté fut aussi redirigé vers les récepteurs nerveux de ses mains et permis de restaurer quelques mouvements[39].
La théorie des réseaux neuronaux permet de simuler sur ordinateur le fonctionnement du cerveau. En 2004, des expériences visant à simuler la phase d'apprentissage de réponse à des stimuli ont permis aux scientifiques de la Fraunhofer Society de réduire la phase d'apprentissage à 30 minutes[40].
Eduardo Miranda après avoir étudié, grâce à l'EEG, l'activité mentale de patients écoutant de la musique a créé une technologie pour leur permettre de s'exprimer musicalement en utilisant un « électroencéphalophone »[41].
La compagnie Emotiv Systems a produit[Quand ?] un contrôleur de jeux-vidéo grand public qui utilise des capteurs électromagnétiques[42].
En France, le laboratoire GIPSA-lab a présenté en 2017, Brain Invaders, un jeu vidéo fonctionnant à partir d'une interface neuronale directe et utilisant les propriétés des ondes électriques P300 du cerveau humain afin de s'affranchir de toute utilisation de souris ou de manette[43]. Un logiciel permettant dans ce cas de décoder l'intention du joueur équipé d'un casque à électrodes recueillant ses données encéphalographiques, transcrites alors en commande de tir sur une cible. Outre les applications évidentes dans les jeux vidéo d'un futur proche, des applications dans la vie courante ne sont pas encore connues mais l'utilisation de cette technique pour pallier l'absence de mobilité ou d'élocution semble très prometteuse[44],[45].
Les techniques non invasives de la magnétoencéphalographie (MEG) et de l'Imagerie par résonance magnétique fonctionnelle ont été utilisées avec succès en tant qu'interface cerveau ordinateur[46]. Plusieurs expériences rapportent que des patients ont été capables de jouer au jeu électronique Pong en temps réel par le contrôle volontaire de la réponse hémodynamique du flux sanguin dans leur cerveau (expérience de biofeedback)[47]. La mesure hémodynamique réalisée par IRMf, en temps réel, permet aussi de contrôler les mouvements d'un robot[48].
Plus récemment, au laboratoire Computational Neuroscience de la compagnie Advanced Telecommunications Research (ATR), à Kyōto, des scientifiques ont reconstruit sur ordinateur des images captées directement dans le cerveau. Le , cette expérience fit la une de la revue Neuron[49]. Alors que les premières images étaient en noir et blanc dans une résolution de 10*10 pixels, les chercheurs pensent pouvoir reconstruire des images en couleur et même enregistrer les rêves[50],[51]. En 2013, des chercheurs de l'université de Kyoto parviennent à identifier une partie du contenu des rêves de patients en état hypnagogique grâce à l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf), et en proposent une reproduction vidéo. Leurs travaux sont publiés dans la revue américaine Science[52].
John Donoghue et ses collègues ont fondé la société « Cyberkinetic Neurotechnology Inc », qui est d'ores et déjà cotée sur le marché US. Cette entreprise commercialise une gamme de capteurs utilisant la technologie BrainGate, elle-même fondée sur le capteur Utah Array développé par Dick Normann. Cyberkinetic Neurotechnology Inc a pour objectif principal de proposer des interface cerveau ordinateur destinées à l'homme.
Philip Kennedy a créé Neural Signals en 1987 pour développer des IND permettant à des patients paralysés de communiquer et de contrôler des équipements. La compagnie commercialise des IND invasifs ainsi qu'un implant permettant de transmettre la parole. Les électrodes sont incluses dans du verre contenant des protéines afin d'améliorer la liaison aux neurones.
Bien que 16 patients payant aient reçu la prothèse de vision proposée par William H. Dobelle, la commercialisation a été arrêtée après sa mort en 2004. La compagnie Avery Biomedical Devices, qu'il contrôlait en association avec l'université de Stony Brook, développe un nouvel implant qui n'a pas encore reçu l'agrément de la Food and Drug Administration[53].
La compagnie Ambient, a fait la démonstration du produit « The Audeo » lors d'une conférence des développeurs IT au début de l'année 2008. Cet équipement permet de communiquer par la pensée. Le traitement du signal permet de reproduire le discours d'une personne an captant directement son intention de parler[54].
Mindball est un jeu développé et vendu par la compagnie Interactive Productline. Les joueurs sont en compétition pour contrôler le déplacement d'une balle sur une table de jeu par le seul moyen de leur concentration mentale[55]. Interactive Productline est une entreprise suédoise dont l'objectif est de développer et vendre des produits simples utilisant la technologie de l'EEG pour améliorer les capacités de relaxation et de concentration[56].
Une compagnie autrichienne, « Guger Technologies », ou « g.tec »[57], propose des interfaces cerveau ordinateur depuis 1999. Cette entreprise offre des produits basiques et polyvalents pour permettre à la communauté scientifique de développer des équipements spécifiques. Ceci inclut le P300 Speller, Motor Imagery et Mu-rythm. Ils commercialisent aussi une solution de capture des potentiels évoqués visuels.
La compagnie espagnole Starlab propose depuis 2009 un système 4 canaux nommé ENOBIO. Ce produit est conçu comme une plateforme de développements[58].
Des entreprises commercialisent des produits grand public, principalement pour jouer par IND, comme Neural Impulse Actuator, Emotiv Systems et NeuroSky.
La start-up française Mentalista, développe une technologie miniaturisée de collecte et de traitement des ondes cérébrales (EEG) à destination des industriels[59].
Les forces armées des États-Unis ont développé des interfaces cerveau ordinateur afin d'améliorer la performance de ses troupes et dans le but d'interférer avec les communications des troupes adverses[60].
Un rapport conclu :
« L'implémentation la plus réussie d'interface invasive a été réalisée lors d'essai médicaux utilisant l'influx des nerfs pour transférer l'information[61]. »
Le budget de la DARPA pour l'année 2009-2010 comporte le financement d'un programme nommé « Silent Talk » à hauteur de 4 millions de dollars. Ce projet doit permettre la communication d'homme à homme sur le champ de bataille, sans utiliser la parole, grâce à l'analyse du signal neuronal[62]. Une allocation complémentaire de 4 millions de dollars a été octroyée à l'université de Californie pour des recherches sur la télépathie synthétique par le biais d'un système informatique[62]. Ces recherches visent à détecter par EEG et à analyser les signaux neuronaux qui sont propagés avant que la parole soit exprimée et à déterminer si l'on peut définir des formes d'ondes standard correspondant aux mots[62]. Ces recherches sont incluses dans un programme de 70 millions de dollars, qui a débuté en 2000, avec l'objectif de développer un équipement capable de s'adapter au comportement de son utilisateur[63].
Des chercheurs ont construit des interfaces pour connecter des cellules nerveuses individuelles ou des réseaux de cellules in vitro. Ceci permet d'une part d'améliorer la recherche concernant les implants sur les animaux et d'autre part de réaliser des expérimentations visant à réaliser des réseaux neuronaux capables de résoudre des problèmes, de construire de petits ordinateurs ou des contrôleurs de robot.
En 2003, une équipe menée par Theodore Berger de l'université de Californie du Sud a commencé à travailler sur une neuropuce devant servir d'hippocampe artificiel. Cette puce est conçue pour fonctionner dans un cerveau de rat et devrait permettre de mettre au point des prothèses destinées à des cerveaux plus évolués. L'hippocampe a été choisi car on considère que c'est la structure cérébrale la plus organisée et la mieux connue. Elle a pour fonction de mémoriser les expériences sur le long terme dans d'autres parties du cerveau[65].
Thomas DeMarse à l'université de Floride a utilisé une culture de 25 000 neurones prélevés dans un cerveau de rat pour piloter un simulateur de vol de chasseur F-22[66]. À la suite du prélèvement, les neurones corticaux ont été cultivés dans une boîte de Petri et ont rapidement reformé un réseau synaptique afin de constituer un réseau neuronal actif. Les cellules furent ensuite installées sur une matrice de 60 électrodes et l'influx nerveux fut utilisé pour contrôler les commandes de profondeur et de lacet du simulateur. Cette étude fut menée afin de comprendre les mécanismes d'apprentissage du cerveau, à un niveau cellulaire.
Les enjeux éthiques, sociaux et légaux liés aux IND sont[67],[68],[69],[70],[71] :
Dans leurs forme actuelle, la plupart des IND sont loin des enjeux exposés ci-dessus. Elles sont similaires aux thérapies correctionnelles actuellement pratiquées. Clausen a dit en 2009 que les IND posait des problèmes éthiques, mais qu’ils restaient pour l’instant similaires aux problèmes traités par les bio-éthiciens sur les autres domaines de thérapies[67]. De plus, il suggère que la bio-éthique est assez bien préparée pour affronter les défis qui pourrait arriver avec les technologies liées aux IND. Haselager et ses collègues[68] ont pointé le fait que les attentes quant à l’efficacité et la valeur des IND joue un grand rôle dans l’analyse éthique et la manière dont les scientifiques devrait approcher les médias. Qui plus est, des protocoles standard peuvent être implémentés pour assurer une approche éthique des patients atteint du syndrome d’enfermement.
Le cas des IND aujourd’hui retrouve sont parallèle dans la médecine, et le retrouvera dans ses évolutions futures. Comme les sciences pharmaceutiques qui au départ cherchent à résoudre des problèmes et finissent par produire des stimulants, les IND auront d’abord une utilité thérapeutique avant de devenir des moyens d’amélioration[70]. Les chercheurs sont tout à fait conscient que l’étique, un enthousiasme modéré dans les médias, et un suivi de l’éducation sur les IND va être d’une importance capitale pour une acceptation sociétale de cette technologie. C’est pourquoi, récemment, plus d’efforts ont été fournis dans la communauté des IND pour créer un consensus éthique sur la recherche, le développement et le partage[71].
Les implants cochléaires sont une des technologies d’IND les plus anciennes et les plus utilisées. Avec leur apparition, la surdité a vécu une lente transition, de la simple perte d’un sens, à un problème neurologique solvable. C’est ce changement de paradigme qu’explique la chercheuse Laure Mauldin dans sa publication sur la redéfinition de la surdité. On y apprend que le fait de poser un implant sur un enfant engendre des changements importants au sein de la famille. Tout d’abord, on passe de la situation où un sens est perdu, à celle où une possibilité de le retrouver est envisageable. Ensuite, il ne s’agit pas d’une technologie qu’il suffit de brancher pour qu’elle fonctionne : le patient doit souvent passer des années à s’accorder avec son implant avant de recouvrer la fonction perdue à un niveau bon. Dans le cadre des implants cochléaires chez les enfants, il s’agit également d’un défi pour les parents, qui doivent s’adapter en même temps que leur enfant évolue et entraîne son cerveau à interagir avec ce nouvel outil. C'est un phénomène général aux IND qui est également décrit dans le cas de Matt Nagle, qui a également eu un apprentissage très long avant de pouvoir utiliser son IND de manière précise. Laure Mauldin décrit également des changements de personnalité chez les enfants : l’enfant découvre littéralement un nouveau sens et son cerveau subit une forte adaptation.
Récemment, un bon nombre de compagnies ont développé des technologies d'IND basée sur l'EEG à taille réduite et à moindre coût. Cette technologie a été implémentée dans des jouets et des interfaces vidéo-ludiques, et certaines de ces implémentations ont rencontré un grand succès, comme celles de NeuroSky.
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