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L'intelligence artificielle frugale est un concept émergent du domaine de l'intelligence artificielle qui vise à développer des modèles d'intelligence artificielle capables de « faire plus avec moins », plus respectueux de l'environnement (à moindre empreinte écologique, moindre empreinte carbone, et donc moins consommateur d'énergie, de matière ; et moins émetteur de gaz à effet de serre).
Contrairement aux modèles d'intelligence artificielle traditionnels, souvent gourmands en données et en ressources de calcul et donc en électricité, en serveurs et contribuant à réchauffer leur environnement et le climat, l'intelligence artificielle frugale privilégie des approches plus légères et plus efficaces. Pour des raisons de crédibilité, et pour mieux optimiser l'intelligence artificielle et ses usages, les stratégies d'intelligence artificielle sobre devraient toujours intégrer une politique de preuve, de recherche des coûts environnementaux cachés[1] et donc de monitoring des flux environnementaux, similaire aux métriques de performance industrielle.
L'intelligence artificielle frugale s'inscrit dans une démarche plus globale et se voulant vertueuse, et beaucoup plus respectueuse de l'environnement[2] et du social[3], visant à rendre les innovations plus frugales[4],[5], et en particulier à relever de défi[6] d'une intelligence artificielle (et de l'Internet des objets)[7] plus soutenables[8] et donc plus sobre, plus responsable et plus explicable[9].
Dans les années 2020, le numérique a déjà une empreinte écologique importante et qui se développe de plus en plus exponentiellement, alors que les émissions de gaz à effet de serre continuent à augmenter, en dépit de l'accord de Paris sur le climat et des engagements des États, collectivités et certaines entreprises.
Les grands modèles de langage et l'intelligence artificielle générative doivent être entraînés sur des centaines, voire des milliers de processeurs graphiques. Ces derniers permettent de réaliser des calculs matriciels rapides, mais avec une consommation d'énergie et une production de dioxyde de carbone proportionnellement élevée.
À titre d'exemple, l'entraînement de GPT-3 sur des processeurs graphiques a nécessité environ 190 000 kWh, soit 85 000 kg d'équivalent CO2, ce qui équivaut à parcourir environ 700 000 kilomètres en voiture, ou encore un aller-retour Terre-Lune. Un rapport publié dans la MIT Technology Review, estime que l'empreinte carbone du cloud dépasse déjà celle de la totalité du trafic aérien ; et former un seul modèle d'intelligence artificielle peut émettre plus de 626 000 livres d'équivalent CO2 (près de cinq fois ce qu'émet une voiture américaine moyenne durant sa vie. Ces problèmes questionnent la soutenabilité de l'intelligence artificielle[10].
Le concept d'intelligence artificielle frugale a émergé dans un contexte de crise climatique, environnementale ou pandémique et de prise de conscience croissante des enjeux environnementaux liés au développement de l'intelligence artificielle (qui a un potentiel de contribution à l'amélioration de la soutenabilité du développement de l'humanité, mais qui trop, ou mal utilisée, en consommant trop de ressources pas, peu, difficilement ou coûteusement renouvelables, peut aussi amplifier le mal-développement et les crises climatiques et socio-écologiques. L'intelligence artificielle a été identifiée comme susceptible de contribuer à l'innovation frugale (forme d'innovation pouvant « maximiser l'efficacité avec moins de ressources »[11]). Selon Kannan Govindan (2022), vu sous diverses perspectives théoriques (triple résultat net, diffusion de l'innovation et théories des facteurs critiques de succès), l'intelligence artificielle, combinée avec l'innovation frugale durable comme force motrice de sa mise en œuvre peut offrir de nouveaux atouts pour la soutenabilité du développement, à condition de correctement identifier, et respecter, les facteurs critiques de succès d'une intelligence artificielle frugale et soutenable[11]. Selon lui, il y aurait 24 facteurs critiques de succès communs, parmi lesquels « "comprendre le concept d'IA" et "le niveau d'investissement en IA" dans l'innovation frugale soutenable sont identifiés comme les facteurs de succès les plus influents »[11]... étant entendu, que la frugalité de l'intelligence artificielle ne doit pas non plus diminuer sa sécurité (cybersécurité), qui est l'une des conditions de sa soutenabilité[12],[13].
Les centres de données utilisés pour entraîner les grands modèles de langage (LLM) consomment d'énormes quantités de données et d'énergie et produisent des calories et/ou des émissions de gaz à effet de serre importantes.
L'intelligence artificielle frugale peut être définie comme une approche de l'intelligence artificielle qui cherche à minimiser l'empreinte environnementale des modèles d'intelligence artificielle tout en maintenant des performances élevées[14]. Ceci passe par une réduction de la consommation énergétique de l'intelligence artificielle, par l'optimisation de l'utilisation des ressources naturelles et la limitation des émissions de gaz à effet de serre liées à la conception, la production, l'entraînement et le déploiement des modèles.
Un service d’intelligence artificielle sera dit « frugal » s'il a réussi à fortement réduire ses besoins en ressources matérielles et énergétiques, et ses impacts environnementaux. Pour cela il a redéfini ses modalités de conception de fonctionnement et d'usages ainsi que son performanciel (exigences de performance) et fait preuve de mise en œuvre des bonnes pratiques par les producteurs, fournisseurs et clients de l'intelligence artificielle. Ce service doit démontrer que l'intelligence artificielle est nécessaire (par rapport à des solutions moins consommatrices de ressources et moins émettrices de gaz à effet de serre. Il doit aussi respecter le principe européen du DNSH (Do No Significant Harm) ou « Ne pas causer de préjudice important », c'est à dire pour l'Union européenne, ne pas affecter négativement substantiellement tout ou partie des six objectifs environnementaux reconnus par la taxonomie verte : 1) l'atténuation du changement climatique, 2) l'adaptation au changement climatique, 3) l'utilisation durable et la protection des ressources aquatiques et marines, 4) la transition vers une économie circulaire, 5) la prévention et le contrôle de la Pollution, et 6) la protection et la restauration de la biodiversité et des écosystèmes. En outre, concernant les impacts inévitables de son service d'intelligence artificielle. Le fournisseur de ce service doit mettre en œuvre la démarche « éviter, réduire, compenser ». Il doit aussi anticiper les usages imprévus de l'intelligence artificielle qui pourraient éventuellement affecter la frugalité de ce service.
L'intelligence artificielle frugale s'inscrit plus largement dans une démarche de soutenabilité du développement de l'intelligence artificielle et de ses usages, en prenant en compte les enjeux sociaux et environnementaux liés à ces nouveaux usages. Pour cela, elle s'appuie sur plusieurs piliers clés :
La frugalité de l'intelligence artificielle peut être approchée par l'utilisation de :
Les recherches sur l'intelligence artificielle frugale sont relativement récentes. Elles se concentrent sur plusieurs axes :
Face à la consommation croissante d'énergies et de ressources par l'informatique, et par l'IA en particulier. L'Union européenne souhaitent l'émergence d'une IA frugale.
Réglementation et incitations : L’UE travaille sur des réglementations encourageant l’IA frugale. Par exemple, des référentiels ont été publiés pour aider les entreprises à évaluer et réduire l’impact environnemental de leurs systèmes d’IA1.
Recherche et innovation : L’UE finance des projets rendant l’IA plus économes en énergie et en ressource tout en conservant des performances élevées xxxx2.
Sensibilisation et formation : Des initiatives visent à sensibiliser les entreprises et les développeurs aux avantages et enjeux de l’IA frugale. Cela inclut des formations et des ressources pour adopter des pratiques plus durables 2
Collaboration internationale : L’UE collabore avec d’autres régions et organisations internationales pour partager des bonnes pratiques et harmoniser les efforts en matière de durabilité de l’IA 3.
Un premier « référentiel Général sur l'IA frugale » a été publié le 28 juin 2024 en France, en tant que norme AFNOR SPEC 2314[16]. Initié par Ecolab, il a été rédigé avec la contribution de plus d'une centaine d'experts issus du monde de la recherche, des entreprises, des associations et des administrations réunis en janvier 2024 dans un groupe de travail.
Contenant une définition précise de l'IA frugale, il se veut être un premier cadre commun de référence, et un premier pas, pour la définition et la promotion d'une intelligence artificielle frugale, pour développer et déployer des algorithmes et modèles d'IA moins gourmands en ressources (plus respectueuse de l'environnement et des limites planétaires). Il pose des principes et de bonnes pratiques pour tout le cycle de vie d'un projet d'IA, de sa conception à son évaluation. Il rappelle que les centres de données doivent être optimisés, mais que l'utilisation des données doit l'être aussi.
Il offre aux acteurs de l'écosystème IA un outil précieux pour orienter leurs choix technologiques et contribuer à la transition écologique.
Certaines grandes entreprises du secteur technologique ont déjà mis en place des stratégies visant à compenser, au moins en partie, leurs émissions de CO2[17]. Par exemple, Google depuis 2017 et Meta depuis 2020, investissent chaque année dans l'achat d'une quantité d'énergie renouvelable, principalement par le biais de crédits d'énergie renouvelable (CER), équivalente à leur consommation énergétique totale.
En ce qui concerne la réduction de l'impact environnemental des modèles d'intelligence artificielle, Google a développé une approche nommée les "4M" (Model, Machine, Mechanization, Map optimization). Cette stratégie inclut l'utilisation de modèles plus efficaces et moins gourmands en ressources, le recours à des processeurs modernes et optimisés, la mutualisation des ressources à travers des clouds partagés, ainsi que la sélection de sites où l'énergie utilisée est majoritairement propre. Ces actions permettraient de réduire jusqu'à 100 fois la consommation énergétique requise pour l'entraînement des modèles d'IA, et jusqu'à 1 000 fois les émissions de CO2 liées à l'utilisation de Google Cloud. Depuis 2019, grâce à ces mesures, Google a réussi à maintenir la proportion d'énergie utilisée pour les opérations d'apprentissage automatique en dessous de 15 % de sa consommation totale.
Selon une étude, l'efficience énergétique ne suffit pas à elle seule à rendre un système d'IA soutenable[18].
L'IA, générative notamment, peut elle véritablement être ou devenir « frugale » ? s'interrogent en 2024 le philosophe Thierry Ménissier et l'informaticien Denis Trystram (dans The Conversation[19]). L'IA a un fort potentiel d'aide à l'amélioration de l'écoconception, de l'efficience énergétique, de l'économie circulaire, elle peut potentiellement aider à résoudre les crises environnementales, ainsi que l'innovation frugale et soutenable (qui vise particulièrement à maximiser l'efficacité avec moins de ressources)[20]. Cependant, à cause des cascades d'effets indirects, et à cause des effets rebonds déjà observés, cette possibilité est questionnée, paraissant plus ou moins atteignable selon qu'on se limite à une définition minimale de la frugalité ou que l'on intègre plus largement les enjeux éthiques environnementaux de la question.
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