Remove ads
programme américain de vols spatiaux lunaires humains De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le programme Artemis est un programme spatial habité de la NASA, l'agence spatiale américaine, dont l'objectif est d'amener un équipage sur le sol lunaire d'ici 2026. À l'instigation du président américain Donald Trump, la date du retour de l'humain sur la Lune, que la NASA avait fixée à 2028 sans programmation clairement définie, a été avancée de quatre ans en avec des objectifs qui ont été précisés, donnant naissance au programme Artemis. Celui-ci doit déboucher sur une exploration durable du satellite, c'est-à-dire l'organisation de missions régulières dont l’aboutissement serait l'installation d'un poste permanent sur la Lune. Le programme doit également permettre de tester et de mettre au point les équipements et procédures qui seront mis en œuvre au cours des futures missions avec équipage à la surface de la planète Mars. La réalisation des missions du programme Artemis nécessite le développement de plusieurs engins spatiaux : le lanceur lourd Space Launch System (SLS), le vaisseau spatial Orion, dont la réalisation a débuté dans les années 2010 mais est marquée par des dérapages budgétaires et calendaires réguliers. L'architecture des missions repose sur la future station spatiale Lunar Orbital Platform-Gateway (LOP-G) qui, placée en orbite autour de la Lune, servira de relais entre la Terre et la surface de la Lune.
Pays |
États-Unis d'Amérique Europe Canada Japon |
---|---|
Agence | NASA, ESA, JAXA, ASC |
Objectifs | Présence humaine à la surface du pôle Sud de la Lune à compter de 2025 |
Statut | En développement |
Coût | 92 mds US$ (phase I) |
Capsules | Orion, Starship HLS, Lunar Orbital Platform-Gateway |
---|---|
Lanceurs | Space Launch System, Starship |
Bases de lancement | Complexe de lancement 39, Centre spatial Kennedy |
Début | |
---|---|
1er lancement | (Artemis I) |
1er lancement habité | vers septembre 2025 (Artemis II) |
Pour remplir les objectifs ambitieux du programme Artemis dans le délai très court qui lui est imposé, la NASA sous-traite de manière particulièrement marquée la conception de composants importants (vaisseau lunaire HLS, modules de la station spatiale LOP-G, atterrisseurs des missions robotiques) ainsi que les prestations de lancement de ces engins et de ravitaillement de la station spatiale. En , le développement du HLS est confié à la société SpaceX, qui proposait une version de son Starship baptisé Starship HLS. Selon le programme établi en , puis modifié en janvier 2024, Artemis III, lancée en 2026, sera la première mission qui amènera un équipage mixte de deux astronautes sur la Lune pour un séjour d'une durée de six jours et demi. Après cette date doivent être menées des missions caractérisées par des séjours plus longs, un équipage au sol de quatre personnes au lieu de deux, davantage d'équipements permettant d'étoffer le retour scientifique. Le vaisseau lunaire sera alors partiellement réutilisable. Les sites d'atterrissage retenus pour toutes ces missions se situent au pôle Sud de la Lune car les réserves de glace d'eau présentes dans les cratères perpétuellement à l'ombre présentent un intérêt stratégique dans la perspective de missions de longue durée.
Outre son délai très serré, le projet rencontre un problème budgétaire similaire à celui qui avait été fatal en 2009 au programme Constellation qui poursuivait les mêmes objectifs. En 2022, les trois premières missions du programme sont financées, mais la suite du programme, qui nécessite de lancer des développements immédiatement, ne dispose pas d'un budget suffisant. Le premier vol du lanceur lourd SLS (mission Artemis I), qui constitue un jalon important du programme Artemis, a lieu le 16 novembre 2022. Début 2024 le débarquement d'un équipage sur la Lune est repoussé à septembre 2026 en raison des retards dans le développement et la mise au point des vaisseaux et équipements nécessaires.
Le programme Artemis tire son nom de la déesse grecque Artémis, sœur jumelle d'Apollon, en écho au programme Apollo de la NASA[1]. Depuis la mission habitée Apollo 17 de 1972, dernière mission du programme Apollo, plus aucun astronaute ne s'est éloigné de plus de quelques centaines de kilomètres de la Terre. L'agence spatiale américaine réalise depuis cette époque des études sur le scénario d'une mission habitée vers Mars, mais aucun planning précis n'a pu jusque-là être défini pour ce projet dont les coûts sont supérieurs d'un ordre de grandeur à celui du programme lunaire. Les dirigeants américains de leur côté ont initié, au cours des décennies qui ont suivi le programme Apollo, plusieurs programmes habités ambitieux à destination de l'espace lointain (c'est-à-dire au-delà de l'orbite terrestre basse), mais ceux-ci ont toujours échoué faute de moyens et d'une véritable volonté politique. Ces projets avortés sont dans l'ordre chronologique la Space Exploration Initiative de George H. W. Bush (1989), le programme Constellation de George W. Bush (2004) et le Flexible Path (2010) dont la première mission, l'Asteroid Retrieval and Utilization, a été annulée en 2017.
Le , pour le 20e anniversaire de l'alunissage d’Apollo 11, le président des États-Unis George H. W. Bush lance un programme spatial ambitieux sur 30 ans, le Space Exploration Initiative (SEI)[2], qui doit permettre l'installation d'une base permanente sur la Lune. Mais son coût, l'absence de soutien dans l'opinion publique et les fortes réticences du Congrès font échouer le projet. En 2004, son fils, le président George W. Bush, rend publics les objectifs à long terme qu'il souhaite assigner au programme spatial américain alors que l'accident de la navette spatiale Columbia vient de clouer au sol une flotte de navettes spatiales vieillissantes et que le sort de la Station spatiale internationale, dont l'achèvement approche, est en suspens. Le projet présidentiel Vision for Space Exploration veut replacer l'être humain au cœur de l'exploration spatiale : le retour d'astronautes sur la Lune est programmé avant 2020 pour une série de missions destinées à préparer une éventuelle présence permanente de l'humain sur le sol lunaire et mettre au point le matériel nécessaire à de futures missions habitées sur Mars fixées à une échéance beaucoup plus lointaine[3],[4]. Cette fois-ci, l'opinion comme le Congrès sont favorables au projet : le programme Constellation est alors mis sur pied par la NASA pour répondre aux attentes présidentielles. Il prévoit la construction de deux types de lanceur, Ares I et Ares V, ainsi que, de manière similaire au programme Apollo, deux vaisseaux habités, Altair et Orion[5]. La NASA utilise, en les adaptant, des moteurs-fusées développés pour la fusée Saturn V, les propulseurs à poudre de la navette spatiale ainsi que de nombreuses installations au sol remontant à l'époque du programme Apollo. Mais le programme prend du retard et se heurte à un problème de financement qui, selon les plans initiaux, doit s'effectuer sans augmentation substantielle du budget global de la NASA[6]. À la suite de son investiture, le président américain Barack Obama fait expertiser le programme Constellation par la commission Augustine, créée à cet effet le . Celle-ci conclut qu'il manque trois milliards de dollars par an pour atteindre les objectifs fixés[7], mais confirme l'intérêt d'une seconde exploration humaine de la Lune comme étape intermédiaire avant une mission habitée vers Mars[8]. Début , le président Obama annonce l'annulation du programme Constellation, qui est confirmée par la suite[9],[10].
Malgré l'arrêt du programme Constellation, la NASA décide de poursuivre le développement du lanceur lourd Space Launch System (SLS) et du vaisseau spatial interplanétaire Orion. Ces engins spatiaux doivent être utilisés pour réaliser des missions interplanétaires d'une complexité croissante dans le but ultime de déposer des humains sur Mars. La stratégie ainsi définie, baptisée « Flexible Path », est beaucoup plus progressive que ce qui a été envisagé dans les projets martiens antérieurs. Avant de poser l'humain sur Mars, il est prévu de mener des missions autour de la Lune, sur des astéroïdes proches puis sur la lune martienne Phobos pour mettre au point les matériels et gagner en expérience. Les premières missions de SLS et Orion à destination de l'espace cis-lunaire sont progressivement définies au cours des années suivantes. Toutefois la stratégie d'exploration du système martien proprement dit reste vague[11].
La première mission du programme Flexible Path est l'envoi d'un équipage à la surface d'un astéroïde géocroiseur : l'Asteroid Retrieval and Utilization (ARU) doit combiner l'étude in situ de cet objet et tester les nouveaux équipements, notamment en déplaçant une roche de quatre mètres de diamètre située à la surface de l'astéroïde pour la placer sur une orbite lunaire[11]. Toutefois, en interne à la NASA comme au Congrès des États-Unis, peu de personnes soutiennent cette mission et celle-ci est finalement annulée en [12]. Cette annulation replace la Lune au cœur du programme spatial habité.
Plusieurs raisons expliquent les échecs répétés des projets de missions lunaires et martiens[13].
La Russie annonce au milieu de la décennie 2010 qu'elle projette de développer une station orbitale lunaire, la Lunar Orbital Station et d'envoyer des astronautes à la surface de la Lune à l'horizon 2030 en utilisant le vaisseau Federatsia en cours de développement. De son côté l'Agence spatiale européenne lance en 2015 l'idée d'un village lunaire, c'est-à-dire d'une base permanente sur la Lune développée par l'ensemble des nations spatiales. La Chine, dont les réalisations spatiales progressent à grands pas, envisage depuis 2017 de débarquer des humains à la surface de la Lune au cours de la décennie 2030[15].
En avril 2017, la NASA précise la stratégie de son programme spatial habité dans la perspective de l'abandon de la Station spatiale internationale qui est frappée d'obsolescence à moyen terme. Elle annonce le développement d'une station spatiale placée en orbite lunaire baptisée Deep Space Gateway (DSG). Celle-ci pourra accueillir des équipages pour une durée de 42 jours. Elle comprendra un module d'habitation, un module de propulsion et peut-être un module servant de sas. La DSG sera assemblée à partir de composants transportés par le futur lanceur lourd SLS et elle sera desservie par le vaisseau Orion. Dans une première phase du programme, les équipages qui devraient occuper la station à partir de 2028 l'utiliseront pour apprendre à vivre et à travailler en orbite lunaire. Cette phase permettra également de pratiquer les rendez-vous entre vaisseaux loin de l'orbite terrestre basse. La NASA souhaite à ce stade faire appel aux entreprises privées et aux partenaires internationaux pour les missions de ravitaillement. Ces missions sont un préambule à l'envoi de missions vers Mars constituant la phase ultime du programme. Pour convoyer les équipages, il est prévu de développer un vaisseau spatial de grande taille, le Deep Space Transport. Celui-ci sera convoyé jusqu'à la station lunaire après un lancement par le SLS puis sera ravitaillé avant d'être lancé vers Mars avec un équipage de 4 personnes[16],[17],[18].
En avril 2019, à quelques mois du cinquantième anniversaire de la mission Apollo 11 qui a vu le premier homme fouler le sol lunaire, le vice-président américain Mike Pence, après avoir adressé des reproches à la NASA et à ses sous-traitants pour le retard pris dans le développement du lanceur lourd SLS (la date du premier vol a glissé de 2017 à 2022), annonce que le Président américain Donald Trump souhaite qu'un premier équipage soit déposé à la surface de la Lune dès 2024 soit quatre ans avant l'échéance prévue jusque là par la NASA[19]. Le président assigne deux objectifs à l'agence spatiale : tenir la date de 2024 et réaliser à terme des missions dites durables permettant l'exploration de la Lune puis de Mars. Pour remplir le premier objectif, la NASA décide de concevoir deux types de missions. Les premières sont simplifiées (séjour court de six jours et demi sur la Lune, masse emportée limitée, équipage de deux personnes, pas de pré-positionnement de matériel à la surface, vaisseau lunaire non réutilisable). Les missions dites durables, qui devaient intervenir à compter de 2026, utilisent un vaisseau lunaire plus gros qui permet d'emporter plus d'équipements et un équipage de quatre personnes pour un séjour à la surface plus long[20]. Le site d'atterrissage des missions serait situé près du pôle Sud lunaire, qui est un objectif scientifique important et recèle des stocks d'eau qui peuvent être exploités pour faciliter les séjours prolongés en augmentant l'autonomie des équipages (eau, oxygène)[21].
Mi-, une enveloppe supplémentaire de 1,6 milliard de dollars est débloquée au titre de l'année budgétaire 2020 pour ce programme lunaire, qui est baptisé à cette occasion « programme Artemis », du nom de la déesse grecque personnifiant la Lune dans la mythologie grecque. Il s'agit d'une référence explicite au programme Apollo, qui est nommé d'après Apollon, le dieu grec et frère jumeau d'Artémis. Les fonds doivent être utilisés de la manière suivante[22] :
En septembre 2020, la NASA produit un document recensant les coûts de la phase 1 du programme Artemis, qui comprend les missions Artemis I à Artemis III sur la période 2021-2025. Le budget nécessaire est évalué à 28 milliards US$ mais n'inclut pas la station spatiale Gateway, les habitats de surface et le développement d'un astromobile, qui ne deviennent nécessaires que pour la phase 2 du programme. Les principaux postes budgétaires sont le développement du module lunaire HLS (16 milliards US$) ainsi que celui du vaisseau Orion et du lanceur SLS (7,6 milliards US$ en tout)[23]. À titre de comparaison, le coût du programme Apollo est évalué à 250 milliards US$ (en dollars 2020) mais les 28 milliards ne comprennent pas les sommes déjà dépensées au cours des deux dernières décennies pour développer le lanceur lourd SLS et le vaisseau Orion[24]. Pour tenir le planning très serré imposé par une première mission à la surface de la Lune en 2024, l'administrateur de la NASA demande en septembre 2020 à disposer de 3,2 milliards US$ dès 2021 pour le financement du développement du module lunaire HLS[25].
En février 2021, l'Administration du nouveau Président Biden confirme son soutien au programme Artemis[26].
Le problème de financement persiste fin 2021. À cette date, le budget prévu sur la période 2022/2025 permet théoriquement de financer uniquement les développements des équipements de la phase I ainsi que les vols associés (Artemis I, II et III), mais rien n'est prévu pour la phase II, qui nécessite de mettre au point des équipements et des composants nouveaux. Le montant total associé au programme en incluant les dépenses antérieures à la création du programme s'élève à 92 milliards US$[27].
Poste de dépense | 2012-2020 | 2021 | 2022 | 2023 | 2024 | 2025 | Total |
---|---|---|---|---|---|---|---|
Vaisseau Orion | 11 399 | 1 404 | 1 407 | 1 340 | 1 239 | 1 084 | 17 872 |
Lanceur lourd SLS | 17 234 | 2 561 | 2 487 | 2 486 | 2 466 | 2 290 | 29 526 |
Installations au sol | 4 246 | 580 | 890 | 558 | 514 | 514 | 7 002 |
Starship/Starship HLS | 578 | 928 | 1 195 | 1 267 | 1 580 | 1 989 | 7 563 |
Station spatiale lunaire Gateway | 703 | 699 | 785 | 811 | 765 | 670 | 4 432 |
Combinaison spatiale extravéhiculaire¹ | 174 | N/A | N/A | N/A | N/A | N/A | 174,2 |
Programme exploration et développement² | 3 328 | 346 | 417 | 553 | 700 | 968 | 6 311 |
Programme Lunar Discovery and Exploration³ | 605 | 444 | 497 | 501 | 458 | 458 | 2 964 |
Autres technologies spatiales⁴ | 1 238 | 1 211 | 1 442 | 1 658 | 1 756 | 1 854 | 9 159 |
Support de mission | 498 | 1 551 | 1 506 | 1 501 | 1 492 | 1 440 | 7 988 |
Total | 40 002 | 9 723 | 10 326 | 10 674 | 10 970 | 11 267 | 92 962 |
¹ À compter de 2021, les développements de la combinaison spatiale sont inclus dans le projet de la station spatiale Gateway. ² Inclut les programmes Other Advanced Exploration Systems (développement de nouvelles technologies : système de support de vie, avionique, protection contre les radiations...), Advanced Cislunar and Surface Capabilities (développement des équipements utilisés à la surface de la Lune) et Human Research Program (recherches biologiques). ³ Comprend les missions d'exploration robotique de la Lune : astromobile VIPER et missions du Commercial Lunar Payload Services. |
En 2019 et 2020 la NASA prend de nombreuses décisions pour tenter de tenir l'échéance de 2024 fixée pour la réalisation du premier objectif du programme, c'est-à-dire le retour d'astronautes sur la Lune. L'agence spatiale décide de déléguer aux entreprises du secteur spatial non seulement la réalisation, mais également la conception de plusieurs équipements :
Pour respecter ces échéances serrées, la NASA se tourne vers le secteur privé pour développer le vaisseau lunaire qui doit déposer l'équipage à la surface de la Lune, les héberger durant leur séjour puis les ramener en orbite lunaire. Il s'agit du composant le plus complexe du programme Artemis. Elaborées pour répondre à un cahier des charges défini par la NASA les propositions de onze industriels sont pré-sélectionnées mi-mai 2019 pour le développement du vaisseau lunaire ou d'une partie de celui-ci : Aerojet Rocketdyne, Blue Origin, Boeing, Dynetics, Lockheed Martin, Masten, Maxar (qui fournit le module de propulsion de la Gateway), Northrop Grumman, OrbitBeyond (en), Sierra Nevada et SpaceX. Blue Origin, avec son Blue Moon, et Lockheed Martin, avec un atterrisseur dérivé du vaisseau Orion font figure de favoris[36].
Le processus de sélection est effectué en deux temps. Le , l'administrateur de la NASA Jim Bridenstine annonce que trois finalistes ont été retenus pour la deuxième phase de la sélection : Blue Origin qui reçoit 579 millions US$ pour détailler son offre, Dynetics qui reçoit 253 millions US$ et SpaceX qui reçoit 135 millions US$. Le finaliste doit être annoncé en février 2021. Les caractéristiques des propositions sélectionnées sont les suivantes[37],[38],[39] :
Le la NASA sélectionne la proposition de SpaceX (Starship HLS) pour le développement et le lancement des deux premières missions. L'évaluation de la NASA a porté sur trois critères : dans l'ordre d'importance décroissante les aspects techniques (conception, développement, risques, tests, opérations de lancement et déroulement de la mission...), le cout et la gestion du projet (organisation, gestion du planning, risques...). Sur le plan technique la solution de SpaceX et Blue Origin sont considérées comme acceptable (niveau moyen 3/5 dans l'échelle de la NASA qui comporte cinq niveaux) tandis que celle de Dynetics est considérée comme peu pertinente (2/5). Le cout de la proposition de SpaceX (2,89 milliards US$) est beaucoup moins élevée que celui de ses concurrents (deux fois moins que celle de Blue Origin et quatre fois moins que celle de Dynetics. En matière de gestion de projet la proposition de SpaceX est évaluée comme remarquable (5/5) alors que celle de ses deux concurrents est considérée comme très bonne (4/5). Il était initialement envisagé de sélectionner une deuxième proposition à ce stade du développement mais la proposition de Blue Origin, évaluée comme recevable sur le plan technique et de la gestion de projet, n'a pas été retenue compte tenu de son cout et du budget inférieur à la demande que le Sénat américain a accordé à la NASA (25% du montant demandé) pour ce volet du programme Artemis[41],[40],[42].
À la suite de la sélection de la proposition de SpaceX, Blue Origin émet une protestation officielle contre la décision de la NASA. Les arguments avancés par Jeff Bezos, le patron de Blue Origin, sont que contrairement à ce qui était indiqué dans l'appel d'offres, la NASA n'a retenu qu'un seul constructeur au lieu de deux. Par ailleurs, il conteste la pertinence du choix technique de la proposition de SpaceX. Il souligne que le lancement du HLS de SpaceX vers la Lune nécessite le lancement à une cadence très élevée (tous les 12 jours) de 16 cargos transportant des ergols cryogéniques, puis le transfert de ces ergols dans le vaisseau HLS, une opération jamais réalisée et qui ne sera testée pour la première fois qu'en 2023. Il souligne la complexité de la mise au point du lanceur géant de SpaceX comprenant 32 moteurs-fusées, propulsant le premier étage et d'une masse de 1 000 à 2 000 tonnes supérieures à celle de la fusée Saturn V. Il met également en avant le fait que le vaisseau qui atterrira sur la Lune n'est qu'un deuxième étage de lanceur adapté qui imposera aux astronautes de descendre d'une hauteur de 38 mètres sur le sol lunaire. Jeff Bezos propose en juillet de réduire de deux milliards US$, soit d'un tiers, le coût de sa proposition. Blue Origin est déboutée successivement par la Cour des comptes américaine (GAO) le , puis par le tribunal fédéral () devant lequel il a porté l'affaire après ce premier échec. Son action bloque les travaux de SpaceX jusqu'à la décision du GAO[43],[44],[45].
La NASA décide en mars 2022 de revenir sur sa décision de ne sélectionner qu'un seul fournisseur pour le vaisseau lunaire. L'agence spatiale américaine prévoit de lancer un appel d'offres au cours de l'année qui doit permettre de choisir un deuxième constructeur. Ce vaisseau lunaire sera utilisé pour la mission Artemis V dont la date de lancement est programmée en aout 2028[46],[47].
En novembre 2022 la NASA annonce qu'elle a sélectionné le Starship HLS de SpaceX pour la deuxième mission qui doit se poser à la surface de la Lune (Artemis IV). Cette version du vaisseau HLS devra satisfaire aux exigences de l''option B du cahier des charges contrairement au vaisseau HLS utilisé par Artemis III qui ne doit satisfaire qu'à l'option A. Les caractéristiques supplémentaires attendues sont la capacité à s'amarrer à la station Lunar Gateway, emport de quatre astronautes au lieu de trois, charge utile déposée à la surface de la Lune accrue. Pour ce nouveau développement la NASA versera 1,15 milliard US qui viendront s'ajouter aux 2,9 milliards US$ du contrat initial du HLS[48].
En mai 2023, la NASA sélectionne l'atterrisseur lunaire Blue Moon de la société Blue Origin dont le premier exemplaire opérationnel est assigné à la mission Artemis V programmée alors pour 2029, puis reportée à 2030. Blue Origin développe l'atterrisseur en coopération avec Lockheed Martin, Draper, Honeybee Robotics, Astrobotic et Boeing. La valeur du contrat d'un montant fixe s'élève à 3,4 milliards US$ (tout dépassement est à la charge du constructeur) mais le PDG de Blue Origin a prévu d'injecter un montant encore supérieur de ses propres fonds dans le développement de l'atterrisseur[49],[50].
En septembre 2020, la NASA détaille dans un document la phase 1 du programme Artemis, qui regroupe les trois premières missions Artemis dont Artemis III, qui sera la première à déposer un équipage sur la Lune. Le calendrier de ces missions est fourni mais depuis certaines d'entre elles ont du être repoussées pour des raisons techniques.
Date | Mission / engin spatial | Type engin | Description / objectif | Destination | Lanceur | Commentaire |
---|---|---|---|---|---|---|
Missions lancées | ||||||
28 juin 2022 | CAPSTONE | Nano-satellite 12U expérimental | Test de la stabilité de l'orbite choisie pour la station lunaire Gateway | NRHO autour de la Lune | Electron | [53] |
16 novembre 2022 | Artemis I | Vaisseau Orion | Premier vol du lanceur lourd SLS | Orbite circumlunaire | Space Launch System Bloc 1 | Premier vol du lanceur SLS. Mission sans équipage[54]. |
8 janvier 2024[55] | Peregrine 1 | Atterrisseur lunaire | Dépose de 28 charges utiles dont 11 instruments de la NASA à la surface de la Lune | Lacus Mortis | Vulcan/Centaur | Premier vol de l'atterrisseur Peregrine. Échec de la mission durant le transit vers la Lune. |
15 février 2024[56] | IM-1 | Atterrisseur lunaire | Dépose de six instruments à la surface de la Lune | Malapert-A | Falcon 9 | Premier vol de l'atterrisseur[57] |
Missions planifiées | ||||||
2024 | XL-1 ?[58] | Atterrisseur lunaire | Dépose de 8 instruments à la surface de la Lune | Surface de la Lune | Falcon 9 | A la suite de la banqueroute du constructeur de XL-1, Masten Space, cette société a été reprise en septembre 2022 par Astrobotic qui pourrait utiliser son propre atterrisseur à la place du XL-1. |
2024[59] | Nova-C IM-2 | Atterrisseur lunaire | Foreuse PRIME-1 associée à un spectromètre de masse dans le but de tenter de collecter de la glace du pôle sud lunaire, astromobile destinée à tester un réseau de communications 4G. | Shackleton | Falcon 9 | |
Novembre 2024 | Griffin et VIPER[60] | Atterrisseur (Griffin) et Astromobile lunaire | Étude de la glace d'eau | Surface de la Lune | Falcon Heavy | |
2024 | Lunar Trailblazer | Orbiteur lunaire | Mesure de la température et de la présence de volatiles à la surface de la Lune. | Falcon 9 | ||
2024 | Blue Ghost | Atterrisseur lunaire | Plusieurs instruments scientifiques destinés à étudier l'environnement lunaire | Mare Crisium | Falcon 9 | |
2024 | Nova-C IM-3 | Atterrisseur lunaire | Plusieurs instruments scientifiques. Objectif principal étude du champ magnétique rémanent. | Reiner Gamma | Falcon 9 | |
2025 | PPE et HALO | Modules de la station lunaire Gateway | Modules de propulsion et habitat | NRHO autour de la Lune | Falcon Heavy[61] | |
2025 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Test du vaisseau Starship sans équipage (aller retour de la surface lunaire) | Surface de la Lune | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2025 | SERIES-2 | Atterrisseur lunaire | Trois instruments scientifiques. | Cratère de Schrödinger (face cachée de la Lune) | Falcon 9 | Des satellites seront mis en place pour relayer les données entre l'atterrisseur et la Terre. |
2025 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. | |
2025 | Lunar Pathfinder | Orbiteur lunaire | Doit assurer le relais entre la surface de la Lune et la Terre | Fourni par l'Agence spatiale européenne. | ||
Avril 2026 | Artemis II | Vaisseau Orion | Premier vol avec équipage du vaisseau Orion | Orbite circumlunaire | Space Launch System Bloc 1 | |
mi-2027 | Artemis III | Vaisseau Orion | Mission avec équipage à destination de la surface de la Lune | NRHO autour de la Lune | Space Launch System Bloc 1 |
Fin novembre 2023, la Cour des Comptes américaine (GAO) produit un rapport sur l'avancement du programme Artemis qui souligne le retard pris par deux des composants majeurs : le vaisseau lunaire Starship HLS de SpaceX et la combinaison spatiale développée par la société Axiom. Sur la base des métriques fournies par des projets spatiaux antérieurs, le rapport estime que le lancement d'Artemis III - première mission du programme devant déposer des hommes sur la Lune - qui est alors programmé en 2025, ne pourra pas avoir lieu avant début 2027. Le rapport, qui ne prend pas en compte le relatif succès du deuxième vol du Starship de novembre, base son estimation sur les faits suivants[62] :
En janvier 2024, la NASA, prenant en considération le retard pris dans le développement de ces différents composants, repousse à septembre 2026 le premier débarquement sur la Lune (mission Artemis III)[63].
Le changement de calendrier concerne également la mission Artemis II qui doit emmener pour la première fois un équipage et qui effectuera le tour de la Lune. Le lancement de cette mission est repoussé d'un an à septembre 2025. En effet l'analyse des données produites durant la mission Artemis I a révélé un comportement non prévu du bouclier thermique qui protège le vaisseau Orion durant la rentrée atmosphérique. Une quantité anormalement élevée de morceaux de ce revêtement ablatif se sont détachés à la fin du premier plongeon du vaisseau dans l'atmosphère dense (Durant la rentrée atmosphérique, pour limiter son échauffement, le vaisseau réduit sa vitesse en effectuant plusieurs plongeons dans l'atmosphère dense avant d'en ressortir). Si un équipage avait été présent dans la cabine il n'aurait couru aucun risque (la température n'a pas augmenté à l'intérieur du vaisseau) mais l'agence spatiale souhaite comprendre ce phénomène avant le lancement d'une nouvelle mission. Par ailleurs la NASA a découvert une erreur de conception dans le circuit d'un épurateur jouant un rôle critique dans le système de support de vie du vaisseau Orion de la mission Artemis III (le même composant du vaisseau Artemis II avait passé les tests sans rencontrer de problème). La NASA, ne voulant prendre aucun risque, décide de remplacer ce composant sur le vaisseau Orion utilisé par Artemis II. Mais cette opération nécessite le démontage de nombreux éléments ce qui implique d’exécuter de nombreux tests une fois ces composants remis en place. La complexité de ces opérations sont les principales raisons du report du lancement[63].
Le calendrier d’Artemis IV reste inchangé, avec un lancement prévu en 2028. NASA envisage également des modifications du calendrier de la station lunaire Gateway pour mieux s’aligner sur le calendrier d’Artemis IV[64].
Les pays principaux partenaires traditionnels de la NASA dans le domaine du programme spatial habité ont rapidement annoncé leur intention de participer au programme Artemis, la seule exception étant la Russie qui dans le contexte de tensions créés par les événements en Ukraine, décide de ne pas participer au projet et de se rapprocher de la Chine. L'Agence spatiale canadienne prévoit de fournir le bras télécommandé Canadarm 3 de la station spatiale Lunar Gateway[65]. Le Canada dispose d'un budget de 1,5 milliard US$ sur 24 ans pour développer et maintenir cet équipement. L'Italie conclut un accord de coopération en septembre 2020 avec la NASA pour ce programme. Le budget de 1 milliard € porte sur la construction des modules ESPRIT et iHab de la station spatiale lunaire Lunar Gateway[66]. Le même mois, le Japon conclut également un accord pour fournir un vaisseau cargo HTV-X dérivé du HTV, qui sera chargé de ravitailler la station spatiale lunaire ainsi qu'un module d'habitation[67]. Enfin, l'Agence spatiale européenne finance la réalisation du module de service du vaisseau Orion[68].
Les équipages des missions Artemis seront composés d'astronautes des différents pays participant au programme Artemis : américains, japonais, européens, canadiens, etc.
Les membres américains des équipages des premières missions du programme Artemis sont sélectionnés dans le corps des astronautes de la NASA, qui comprend 48 membres (dont 17 femmes) depuis l'intégration au début de 2020 de la promotion 22 (les Turtles, ou « tortues »). Les astronautes de cette promotion comprennent 7 femmes et 6 hommes, 6 civils et 7 militaires[69]. Fin 2020, les 18 astronautes américains (neuf hommes et neuf femmes) qui doivent participer au programme Artemis sont désignés. Huit d'entre eux font partie de la dernière promotion[70],[71],[72],[73].
L'administrateur de la NASA, Jim Bridenstine, indique en juillet 2019 que le premier équipage à débarquer sur la Lune comprendrait une femme ayant déjà l'expérience d'une mission spatiale, c'est-à-dire ayant fait partie de l'équipage de la Station spatiale internationale[24]. La sélection des équipages des missions Artemis devrait être effectuées au moins deux ans avant leur lancement. L'équipage Artemis II a été annoncé le 3 avril 2023. Il comprend trois Américains et un Canadien[74] :
Les astronautes des pays ayant contribué au programme Artemis - principalement le Japon, le Canada et l'Europe - participeront aux missions du programme Artemis. Comme pour la Station spatiale internationale le nombre d'astronautes invités découlera du montant de la contribution de leur pays. L'Europe, qui fournit les modules de service des six premiers vaisseaux Orion ainsi que les modules I-Hab et ESPRIT de la station lunaire Gateway a théroriquement droit à un nombre de sièges "important". Mais les quatre premiers modules de service Orion ont servi à financer la participation à des missions à bord de la Station spatiale internationale. Les autres fournitures permettent à l'Europe de disposer de trois sièges à bord de missions Artemis. Le premier astronaute européen devrait faire partie de la mission Artemis IV prévue en 2028 mais il devrait rester en orbite contrairement à ses collègues[75].
Les objectifs du programme Artemis définis par la NASA sont à la fois scientifiques et techniques.
Le programme Artemis doit contribuer à remplir les objectifs scientifiques assignés par le rapport décennal sur les sciences planétaires produit par le Conseil national de la recherche des États-Unis. Les principaux thèmes du rapport traités par le programme Artemis sont la compréhension des processus planétaires et du cycle des matériaux volatils, la reconstitution de l'histoire de l'impact à l'origine de la formation du système Terre-Lune, la recherche d'éléments fournissant des informations sur le Soleil à ses origines, l'observation de l'univers depuis la Lune, la réalisation d'expériences dans l'environnement lunaire et la recherche de méthodes et d'équipements permettant de réduire les risques courus par les équipages des missions d'exploration planétaire[76].
Pour remplir ces objectifs la stratégie développée par la NASA dans le cadre du programme Artemis comprend[76] :
Les astronautes à la surface de la Lune seront chargés de mener des expériences scientifiques :
Le site d'atterrissage des missions sera situé près du pôle Sud lunaire, car cette région présente un intérêt scientifique important. Mais l'intérêt principal de cette région est qu'elle recèle des stocks d'eau qui peuvent être exploités pour faciliter les séjours prolongés en augmentant l'autonomie des équipages (eau, oxygène)[21] et que par ailleurs le Soleil restant en permanence proche de l'horizon, certains sites situés sur des reliefs sont éclairés en permanence permettent durant la longue nuit lunaire (14 jours) de continuer à produire de l'énergie et d'éviter les chutes de température extrêmes. Toutefois cette position présente également certains inconvénients : la Terre comme le Soleil étant très bas sur l'horizon au niveau du pôle Sud, les communications avec la Terre devront être relayées par la station spatiale lunaire.
Pour la mission Artemis 3, la NASA a sélectionné en août 2022 13 sites d'atterrissage potentiels, tous situés à moins de six degrés de latitude du pôle sud. Les sites ont été choisis par une équipe de scientifiques de l'agence spatiale en utilisant notamment les données collectées par la sonde spatiale Lunar Reconnaissance Orbiter. Les sites retenus prennent en compte les contraintes d'atterrissage du module lunaire Starship HLS[77].
La présence continue d'astronautes à la surface de la Lune doit permettre de développer et tester de nouvelles approches, technologies et systèmes qui pourront être utilisés dans des environnements plus difficiles. Les investissements effectués doivent permettre d'abaisser le coût de l'exploration de l'espace profond et permettre de lancer des missions avec équipage vers Mars. Les domaines de recherche présentés comme prioritaires sont[78] :
L'architecture de la mission lunaire, telle que définie en , repose sur la disponibilité de plusieurs vaisseaux spatiaux : le lanceur lourd Space Launch System, la station spatiale lunaire Lunar Orbital Platform-Gateway, qui joue le rôle de relais entre l'orbite lunaire et la surface de la Lune, le vaisseau Orion, qui est utilisé pour transférer l'équipage entre la Terre et la station spatiale lunaire, et le vaisseau lunaire HLS (Human Landing System), chargé de déposer l'équipage sur le sol lunaire puis de le ramener à la station spatiale. Plusieurs vols de lanceurs commerciaux sont également prévus pour positionner des missions robotiques à la surface du satellite afin de préparer l'arrivée des équipages et de ravitailler la station spatiale lunaire.
Le lanceur lourd Space Launch System bloc 1, développé principalement par Boeing, permet de placer 26 tonnes en orbite lunaire. Il est chargé de lancer le vaisseau Orion avec l'équipage à bord. Huit des 37 lancements prévus d'ici 2028 pour le programme Artemis sont pris en charge par ce lanceur. Son premier vol a eu lieu avec succès le 16 novembre 2022. La version bloc 1 comprend un premier étage dérivé du réservoir externe de la navette spatiale américaine et propulsé par quatre moteurs-fusées RS-25E version dérivée de moteurs de la navette spatiale. Au décollage la poussée est principalement fournie par deux propulseurs d'appoint à propergol solide à cinq segments, directement dérivés des Solid Rocket Boosters (SRB) de la navette spatiale, qui n'avaient eux que quatre segments. Le deuxième étage ICPS (Interim Cryogenic Propulsion Stage) est dérivé du second étage du lanceur Delta IV, est propulsé par un unique moteur-fusée à ergols liquides RL-10B2, brûlant un mélange d'hydrogène liquide et d'oxygène liquide.
Le vaisseau spatial Orion est chargé de transporter l'équipage entre la Terre et la station spatiale lunaire à l'aller comme au retour. Contrairement aux vaisseaux américains développés récemment, il dispose de la capacité à aller au-delà de l'orbite terrestre basse : bouclier thermique permettant de résister à une vitesse de rentrée atmosphérique de 11 km/s, capacité de manœuvre importante, protection thermique adaptée au trajet interplanétaire, habitacle permettant un séjour long de l'équipage, etc. Il reprend l'architecture du vaisseau Apollo avec un module de commande en forme de cône contenant l'habitacle dans lequel séjourne l'équipage et un module de service dans lequel est rassemblé tout ce qui n'est pas nécessaire au retour sur Terre. Ce dernier module est largué avant la rentrée atmosphérique. L'ensemble a une masse de 26 tonnes dont 15,5 tonnes pour le module de service. Contrairement au vaisseau Apollo, il utilise des panneaux solaires pour la fourniture d'énergie. Il dispose d'un système d'amarrage similaire à celui de la navette spatiale américaine. Il dispose d'une quantité d'ergols nettement inférieure à celle d'Apollo ce qui ne lui permet pas de se placer sur une orbite lunaire basse comme le vaisseau Apollo (delta-V de 1 340 m/s contre 2 800 m/s) (il s'amarre à la station spatiale lunaire qui est placée sur une orbite haute qui permet d'économiser un delta-V d'environ 1 500 m/s). Le vaisseau Orion est conçu pour se poser sur l'eau à son retour sur Terre. Il peut emporter quatre personnes pour une mission d'une durée de trois semaines[79].
Caractéristiques | Orion (Artemis II)[79] | Apollo | Soyouz |
---|---|---|---|
Longueur | ~8,14 m | 11,03 m | 7,48 m |
Diamètre max | 5,03 m | 3,9 m | 2,72 m |
Envergure | 18,8 m | 3,9 m | 10,06 m |
Masse totale (ergols) | 25,85 t (?) | 30,33 t (18,5 t) | 7,25 t (0,9 t) |
Volume pressurisé / habitable | 19,56 m3 / 8,95 m3 | / 6,17 m3 | / 9 m3 |
Delta-V | 1 340 m/s | 2 800 m/s | 390 m/s |
Source énergie | Panneaux solaires | Piles à combustible | Panneaux solaires |
Production énergie | 11 kW | 0 kW | 0,6 kW |
Durée mission | 21 j | 14 j | 14 j |
Taille équipage | 4 | 3 | 3 |
Zone d'atterrissage | Mer | Mer | Terre |
La station spatiale lunaire Lunar Gateway sert de relais entre la Terre et la surface de la Lune. Elle ne constitue pas un élément obligatoire pour les premières missions vers le sol lunaire : dans le cahier des charges du vaisseau lunaire HLS, un rendez-vous en orbite lunaire entre le vaisseau Orion et le HLS est une possibilité pour laquelle le candidat peut opter. En revanche, pour les missions dites durables à compter de 2026, la station lunaire devient obligatoire, notamment pour permettre la réutilisation de tout ou partie du vaisseau lunaire[20]. Pour les premières missions du programme Artemis, la priorité est donnée aux deux modules nécessaires pour les missions qui doivent se dérouler sur le sol lunaire :
La station spatiale est placée sur une orbite autour de la Lune dite NRHO (Near Rectilinear Halo Orbit). C'est une orbite de halo dont la période orbitale est de 6,5 jours, le périlune (le point le plus proche de la Lune) est de 3 366 km et l'apolune de 70 000 km. Cette orbite est sélectionnée parce qu'elle présente plusieurs avantages[80],[81] :
Le vaisseau lunaire HLS (Human Landing System) a pour rôle de déposer deux astronautes sur le sol lunaire dans la première phase du projet Artemis. À la surface il sert d'habitat durant la mission d'une durée initiale d'environ une semaine puis il ramène l'équipage en orbite lunaire où celui-ci est transféré dans le vaisseau Orion qui le ramène sur la Terre.
Pour remplir ces objectifs la NASA préconise une architecture comprenant trois modules qui permet de limiter la masse de chaque module à moins de 15 tonnes, ce qui la rend compatible avec le positionnement autour de la Lune par des véhicules commerciaux (la version à deux modules similaire au module Apollo aurait une masse de 9 à 12 t (module de remontée) + 32-38 t (module de descente)[21],[82] :
Le cahier des charges de la NASA précise les principales caractéristiques du vaisseau HLS. Deux versions successives du vaisseau doivent être construites la version non réutilisable 2024 capable de transporter deux astronautes et devant séjourner durant la journée lunaire et la version définitive utilisée à partir de 2026 pouvant transporter trois à quatre astronautes et permettant de survivre à une nuit lunaire[83].
Caractéristique | Exigences pour la mission de 2024 | Exigences pour les missions postérieures à 2026 |
---|---|---|
Équipage | 2 personnes | 3 à 4 personnes |
Capacité de manœuvre | Permet d'effectuer un aller-retour entre l'orbite lunaire et un site situé entre les latitudes 84 et 90° sud Capacité à interrompre la mission Atterrissage automatique à la surface de la Lune Rendez-vous et amarrage automatique à la station spatiale et au vaisseau Orion | |
Fiabilité | 97,5 % avec au minimum deux sorties extravéhiculaires (non réutilisable) | 98 % par mission, 87 % sur une période de 10 ans (>= 5 missions) |
Précision à l'atterrissage | 100 m. | |
Site d'atterrissage | Éclairé en permanence | > 50 heures de nuit continue (objectif 191 heures) |
Durée du séjour | dans le module huit jours terrestres A la surface de la Lune 6,5 jours | |
Sorties extravéhiculaires | durée > 4 h. Nombre > 2 | durée > 8 h. Nombre = 5 |
Charge utile déposée à la surface de la Lune | > 865 kg dont combinaison xEMU 373 kg Nourriture 59 kg Équipage 175 kg | > 1 595 kg |
Autre charge utile à l'atterrissage | au minimum 80 kg d'instrumentation dont 10-20 kg pour les caméras et instruments dans l'habitacle | voir supra |
Charge utile au décollage | > 525 kg dont combinaison xEMU 167 kg Nourriture 18 kg Equipage 175 kg | > 1 070 kg |
Autre charge utile au décollage | au minimum 15 kg (cible 100 kg) | voir supra |
Le vaisseau lunaire Starship HLS développé par SpaceX retenu pour les premiers vols est un engin mono-module (pas d'étage de descente et de remontée séparés) dérivé de son vaisseau Starship. Il doit être placé sur une orbite terrestre par un étage Starship sur une orbite basse puis ravitaillé sur cette orbite par plusieurs vaisseaux Starship avant de gagner sans équipage la Lunar Gateway en orbite lunaire. Une fois le vaisseau amarré à la station il récupère l'équipage qui y a été amené par le vaisseau Orion. Le vaisseau Starship lunaire se pose sur la Lune puis redécolle également par ses propres moyens. Le vaisseau se distingue des deux autres par le fait qu'il remplit immédiatement les exigences de réutilisabilité prévue par la NASA dans le cadre de la deuxième phase du programme Artemis. Mais cela s'accompagne d'une grande complexité[40].
Courant 2022, les caractéristiques précises du Starship HLS ne sont pas connues. Le vaisseau spatial a une masse totale d'environ 1320 tonnes et sera capable d'amener sur le sol lunaire une charge utile de 100 tonnes et de ramener une masse identique en orbite. Contrairement au module lunaire Apollo, c'est l'ensemble du vaisseau qui remonte en orbite. Le vaisseau HLS est haut de 50 mètres pour un diamètre de 9 mètres. Sa propulsion primaire est constituée par 6 moteurs Raptor 2 montés à son extrémité qui sont utilisés pour le transit entre la Terre et la Lune, l'injection en orbite lunaire, la descente vers le sol lunaire et la remontée en orbite. Des moteurs de poussée moindre placés sur le corps du lanceur sont utilisés à proximité du sol lunaire pour limiter les jets de poussière. Le vaisseau permet le séjour sur la Lune d'un équipage durant au moins 100 jours. Étant donné que le Starship HLS ne reviendra pas sur Terre comme les autres versions du vaisseau spatial Starship, il n'est pas équipé d'un bouclier thermique ni des ailerons utilisés sur les autres versions du Starship pour la rentrée dans l'atmosphère terrestre.
Le développement de l'atterrisseur Blue Moon débute officiellement en mai 2019 mais ses caractéristiques ont été révisées à plusieurs reprises. sélectionné en mai 2023 par la NASA pour déposer l'équipage de la mission Artemis V à la surface de la Lune. Ce premier vol opérationnel est programmé en 2029. Le vaisseau a été retenu par la NASA pour constituer une alternative au vaisseau Starship HLS de SpaceX qui sera utilisé pour déposer les équipages des deux premières missions du programme Artemis à la surface de la Lune. Le développement de l'atterrisseur Blue Moon débute officiellement en mai 2019 sur mais ses caractéristiques ont été révisées à plusieurs reprises. Blue Moon dans sa dernière version a une masse de 45 tonnes (16 tonnes sans les ergols et la charge utile transportée). Le vaisseau spatial a une hauteur de 16 mètres et un diamètre en position repliée inférieure à 7 mètres (diamètre de la coiffe du lanceur New Glenn). Il présente deux caractéristiques qui le démarquent des modèles concurrents : d'une part la propulsion assurée par un moteur-fusée BE-7 utilisant de l'hydrogène liquide, un ergol très efficace mais difficile à conserver durablement et d'autre part le module contenant l'équipage est placé sous les réservoirs d'ergols. Cette disposition doit faciliter l'accès au sol de l'équipage. Comme son concurrent Starship HLS la mise en oeuvre de Blue Moon nécessite plusieurs lancements. Il est placé en orbite par la fusée lourde New Glenn et vient s'amarrer à la station spatiale lunaire Deep Space Gateway. Là il est ravitaillé en ergols par un remorqueur spatial qui nécessite lui-même un certain nombre de tirs du même lanceur lourd. L'équipage amené par le vaisseau Orion jusqu'à la station spatiale lunaire embarque alors. Blue Moon descend à la surface de la Lune et y reste durant une semaine avant de décoller pour venir s'amarrer à la station spatiale pour y débarquer son équipage[84],[50].
Le Lunar Terrain Vehicle (LTV) est un astromobile non pressurisé qui sera utilisé pour explorer la surface lunaire et pourra embarquer deux astronautes équipé avec leur combinaison spatiale ainsi que 250 kilogrammes d'instruments et d'équipements pour des déplacements de courte durée. Il pourra fonctionner sans équipage à bord (télécommandé depuis la Terre ou la Lune). Il présente des fonctionnalités mixant celles du rover lunaire Apollo (emport de l'équipage) et celles des engins de type robot comme Curiosity (emport d'instruments scientifiques actifs et d'un bras manipulateur télécommandé). Il sera capable de fonctionner de manière continue durant 8 heures, de réaliser des expéditions de 20 kilomètres et de survivre aux nuits lunaires. La NASA a décidé de sous-traiter complètement la conception et la réalisation de ce véhicule et son transport jusqu'à la surface de la Lune. Le constructeur doit être sélectionné durant l'été 2023. L'engin devra être livré sur le sol lunaire en aout 2028 pour pouvoir être utilisé par l'équipage de la mission Artemis V[85].
Le Lunar Surface Habitat (LSH) est un habitat partiellement gonflable de 12 tonnes qui permettra d'accueillir de deux à quatre astronautes dans un volume habitable de 175 m³ durant 30 à 60 jours. L'habitat de surface LSH doit permettre aux astronautes de séjourner durant de longues périodes (un à deux mois) à la surface de la Lune. Il doit être conçu, contrairement au module lunaire Apollo, pour survivre à la longue nuit lunaire (éclipse de plus de 100 heures), durant laquelle la température chute de manière importante et la source d'énergie fournie par le Soleil n'est plus disponible. Positionné au pôle sud il doit être également prendre en compte un éclairage systématiquement rasant. Il remplit les fonctions suivantes : Lieu de séjour, centre de télécommunications, atelier de réparations des équipements utilisés durant les sorties extravéhiculaires, recyclage des déchets et consommables, lieu de stockage [86]. Selon le planning en vigueur en novembre 2022, l'agence spatiale prévoit son lancement par la mission Artemis VIII en 2031[46].
L'énergie nécessaire à la base lunaire installée à la surface de la Lune sera fournie en premier lieu par des panneaux solaires. Mais pour pouvoir produire suffisamment d'énergie durant les longues nuits lunaires (sa durée dépendra de la localisation de la base lunaire mais pourrait aller jusqu'à 14 jours terriens), la NASA envisage le recours à une centrale nucléaire à fission capable de fournir environ 40 kilowatts. La NASA a mis au point et testé sur Terre un réacteur de ce type dans le cadre du projet Kilopower qui s'est achevé en 2018. Le réacteur KRUSTY (Kilopower Reactor Using Stirling Technology), de un kilowatt de puissance, comprenait un coeur constitué d'uranium 235 de la taille d'un rouleau de papier essuie-tout. La chaleur produite était transféré par un caloduc utilisant du sodium fondu circulant de manière passive (sans pompe) à des moteurs Stirling chargés de la convertir en électricité[87],[88]. Pour développer un système opérationnel, la NASA et le département de l'Énergie des États-Unis ont sélectionné en juin 2022 trois sociétés. Chacune a reçu 5 millions US$ pour détailler en 12 mois son projet de centrale nucléaire. Ces sociétés sont l'établissement de Lockheed Martin situé à Bethesda (Maryland), la coentreprise IX réunissant Intuitive Machine et X-Energy implantée à Houston (Texas), l'établissement de Westinghouse situé à Cranberry Township (Pennsylvanie)[89].
Deux types de combinaison spatiale sont mis au point pour le programme Artemis.
La combinaison spatiale OCSS (Orion Crew Survival System) est portée par les astronautes dans le vaisseau Orion durant le décollage et la phase de rentrée atmosphérique. Étanche (elle comporte un casque), elle permet de survivre en cas de décompression accidentelle et est traditionnellement de couleur orange pour faciliter le repérage des astronautes après leur amerrissage à la suite de leur retour sur Terre. Ses caractéristiques sont proches de celles des combinaisons spatiales utilisées pour les missions vers la station spatiale internationale. Mais contrairement à celles-ci chaque combinaison spatiale est taillée aux dimensions exactes de son porteur. Les zones de frottement ont été retravaillées, les gants permettent un meilleur toucher et les bottes fournissent une meilleure protection contre le feu tout en étant plus confortable[90].
La combinaison spatiale AxEMU (Exploration Extravehicular Mobility Unit) est portée par les astronautes durant leurs sorties extravéhiculaires à la surface de la Lune. De nombreuses améliorations ont été apportées par rapport aux combinaisons spatiales portées par les équipages de la Station spatiale internationale lors de leurs sorties dans l'espace et aux combinaisons des astronautes du programme Apollo. La combinaison est mieux protégée contre la contamination corrosive de la poussière lunaire. La miniaturisation de l'électronique a permis de dupliquer la plupart des systèmes vitaux ce qui permet de réduire les risques et d'envisager des sorties de plus longue durée. Elle est capable de résister à des températures extrêmes comprises entre −250 °C et +250 °C. L'xEMU permet une meilleure agilité grâce à des articulations repensées qui limitent également les efforts fournis par l'astronaute. Le nouveau système micro/écouteurs, amélioré pour une meilleure qualité audio, permet de supprimer l'inconfortable casquette snoopy. Les astronautes enfilent la combinaison spatiale en rentrant par une porte située à l'arrière de celle-ci reprenant le dispositif des combinaisons russes Orlan[91].
L'EGS (Exploration Ground Systems) regroupe l'ensemble des installations nécessaires pour effectuer l'assemblage final et le lancement des fusées (SLS et lanceurs commerciaux) qui emporteront les différents vaisseaux et équipements vers la Lune. À cet effet les installations du complexe de lancement 39 au centre spatial Kennedy en Floride sont adaptées et remises en état. Cela concerne le pas de tir 39B d'où doit décoller le lanceur SLS[92], le bâtiment d'assemblage VAB[93], la plateforme de lancement mobile et le crawler chargé de la transporter.
Le réseau d'antennes paraboliques de 36 mètres de diamètre du Deep Space Network chargé de communiquer avec les vaisseaux dans l'espace lointain et avec les équipages à la surface de la Lune est mis à niveau. Les équipements des antennes de Goldstone, Canberra et Madrid (deux antennes sur chaque site) sont mis à jour de manière à permettre un débit de 100 mégabits par seconde en liaison descendante et 20 Mb/s en liaison montante. Un nouveau réseau d'antennes paraboliques de 18 mètres de diamètre, le LGS (Lunar Ground Stations) est créé pour les communications avec les missions lunaires. Un ensemble de protocoles, interfaces et standards de communications, le LunaNet, est défini pour faciliter les échanges entre les robots, les équipages et les équipements dans l'environnement lunaire[94].
Pour optimiser les coûts et les délais, la NASA fait appel aux lanceurs commerciaux d'une part pour positionner les différents composants - modules de la station spatiale lunaire et du vaisseau lunaire HLS - d'autre part pour assurer le ravitaillement de la station spatiale lunaire Lunar Orbital Platform-Gateway en consommables (ergols, eau, oxygène). Sur les 37 lancements programmés entre 1999 et 2028, 29 doivent être pris en charge par des lanceurs commerciaux, les huit autres l'étant par le lanceur géant SLS. Les modalités des contrats qui seront passés avec les fournisseurs de cette prestation, sont similaires à celles du programme COTS de ravitaillement de la Station spatiale internationale. Selon l'architecture de mission la plus probable les trois modules du vaisseau lunaire (il pourrait n'y en avoir que deux mais cela mettrait hors jeu les vaisseaux commerciaux pour l'un des deux modules) dont la masse totale atteint une quarantaine de tonnes seront expédiés séparément pour tenir compte des capacités limitées des lanceurs. Pour les missions de ravitaillement, selon le cahier des charges établi par la NASA au cours de l'été 2019, le fournisseur devra mettre à disposition un cargo spatial pouvant s'amarrer à la station spatiale lunaire, générer sa propre énergie et rester amarré durant un an[95].
Lanceur | Constructeur | 1er vol | Capacité en orbite lunaire | Coût | Commentaire |
---|---|---|---|---|---|
Space Launch System bloc 1 | Boeing | 2022 | 26 t | ||
Falcon Heavy version non réutilisable | SpaceX | opérationnel | 15 t | 90 millions US$ | |
Vulcan avec étage Centaur | United Launch Alliance | 2023 | 13 t | env 200 millions US$ ? | Version plus puissante disponible en 2024 |
New Glenn | Blue Origin | fin 2022 | 13,6 t | entre 100 et 200 millions US$ ? |
Avant de faire atterrir des astronautes dans la région du pôle Sud lunaire, la NASA veut lancer plusieurs missions robotiques ayant pour objectif d'effectuer une première reconnaissance. Le premier objectif de ces missions est d'étudier les caractéristiques de la glace d'eau présente, raison d'être de la sélection du pôle sud. Les autres objectifs sont l'étude de la géologie lunaire et de l'environnement pour préparer les premières missions avec équipage. Ces missions robotiques se poursuivront après le premier atterrissage d'un équipage sur le sol lunaire.
L'agence spatiale a décidé de confier le développement des atterrisseurs chargés de déposer ces équipements scientifiques sur la Lune, à l'industrie privée. Le programme Commercial Lunar Payload Services (CLPS) fonctionne de manière analogue au programme COTS consacré au ravitaillement de la Station spatiale internationale. Elles devront effectuer un premier vol d'ici 2020 et 2021. Les engins développés doivent pouvoir disposer au minimum 40 à 100 kg à la surface de la Lune[29],[96].
Trois atterrisseurs lunaires ont été sélectionnés en 2019 et en 2020 pour placer 23 charges utiles technologiques ou scientifiques sur le sol lunaire : Peregrine de la société Astrobotic Technology, Nova-C de Intuitive Machines et XL-1 de Masten Space Systems devraient effectuer un premier vol entre 2021 et 2022[29],[97].
En octobre 2019 la NASA décide de développer l'astromobile (rover) VIPER. dans le but d'étudier la glace d'eau présente dans le régolithe du fond des cratères situés au pôle Sud de la Lune. L'eau pourrait jouer un rôle important pour les séjours à la surface de la Lune d'équipage d'astronautes en fournissant les consommables nécessaires - oxygène, eau consommable et ergols - grâce aux technologies d'utilisation des ressources in situ. L'engin spatial, qui doit être lancé vers décembre 2022, fait partie des missions développées dans le cadre du Programme Artemis. Il emporte une foreuse et trois instruments destinées à analyser les carottes de sol. La dépose du rover de 250 kg sur le sol lunaire doit être confiée au programme Commercial Lunar Payload Services[98],[99],[32].
Trois types de mission sont prévues par la NASA :
Les premières missions atterriront près du pôle sud de la Lune. Deux astronautes installés à bord du vaisseau lunaire séjourneront durant environ 6 jours.
Le déroulement de ce type de mission comprend les étapes suivantes[100] :
Des missions plus longues (séjour sur la Lune de 33 jours) se déroulent également dans la région du pôle sud et comprenant l'utilisation d'un module d'habitation sont prévus dans un deuxième temps. Le déroulement de ce type de mission (codifiée DRM-H-002 par la NASA) diffère de la manière suivante du type de mission précédent[100] :
Les missions à destination des latitudes moyennes sont une variante des missions polaires courtes. Le site d'atterrissage peut se situer dans une large plage de latitudes moyennes éventuellement sur la face cachée de la Lune. Aussi le vaisseau lunaire doit pouvoir supporter un large spectre de contraintes thermiques et d'incidence du rayonnement solaire. Le séjour à la surface de la lune peut durer de 2,3 à 6 jours dont un maximum de 40 heures d'obscurité. L'équipage qui est limité à deux astronautes peut effectuer jusqu'à quatre sorties extra-véhiculaires. Une sortie supplémentaire peut être effectuée pour répondre à un besoin non planifié[100]
Selon le planning diffusé en mai 2019 la NASA prévoit d'effectuer 37 lancements entre 2019 et 2028 dans le cadre du programme Artemis. Ces vols comprennent l'envoi de missions robotiques de reconnaissance, le positionnement en orbite lunaire des composants de la station spatiale et des exemplaires du vaisseau lunaire HLS, le ravitaillement de la station spatiale et enfin l'envoi des équipages destinés à tester le lanceur SLS (Artemis I) le vaisseau Orion (Artemis II), puis à se poser sur la Lune (Artemis III, IV, V, VI). La majorité des lancements est effectuée par des lanceurs commerciaux[101].
Les missions de la phase I du programme Artemis (2021-2024) ont pour objectif de tenir l'échéance fixée par le président Trump. Il s'agit, après avoir validé en vol le fonctionnement du lanceur SLS et du vaisseau Orion de déposer à l'aide du module lunaire HLS un premier équipage sur le sol lunaire en 2024 (mission Artemis III). Le déroulement des trois missions Artemis de cette phase n'exploite pas la station spatiale Gateway mais il est néanmoins prévu de lancer durant cette période les modules de propulsion PPE et d'habitation HALO de la station.
Le programme Artemis doit commencer par deux missions destinées à mettre au point les véhicules et les procédures avant d'amener le premier équipage sur la Lune.
Artemis I a pour objectif de valider le fonctionnement en vol du lanceur lourd SLS dans sa version Bloc 1 et de l'ensemble des systèmes du vaisseau Orion dans des conditions proches des missions lunaires. Aucun équipage n'est embarqué. Le lancement programmé initialement fin est repoussé à plusieurs reprises pour régler des problèmes de fuites dans l'alimentation des réservoirs d'hydrogène et en raison de passages d'ouragans sur la Floride. Le lancement a finalement lieu le , la mise en orbite autour de la Lune le et le retour sur Terre (en mer) le . La mission est un succès total qui ouvre la voie à la mission suivante emportant un équipage. Le lanceur, dont c'est le premier vol, comme le vaisseau Orion se sont comportés comme prévu. Les seuls incidents notables ont été des interruptions temporaires des liaisons télécom entre le vaisseau et le centre de contrôle sur Terre[102].
Artemis II doit emporter vers septembre 2025 le même vaisseau, cette fois avec un équipage de quatre astronautes (Christina Koch, Gregory Reid Wiseman, Victor J. Glover et Jeremy Hansen), pour un vol autour de la Lune. Le vaisseau Orion sera placé en orbite par la même version du SLS (Bloc 1). La mission doit durer 10 jours. Le vaisseau doit passer derrière la Lune, sans se placer en orbite, avant de revenir sur Terre.
En 2024, une fusée commerciale doit placer le premier module de la station en orbite lunaire. Il s'agit du module disposant d'une propulsion et fournissant de l'énergie. En 2023 le deuxième module MiniHab, de type habitat, doit être lancé par une fusée commerciale. Ce module dispose d'au moins deux ports d'amarrage libre permettant d'y amarrer simultanément le module lunaire chargé d'amener les astronautes sur le sol lunaire (un homme et une femme) et le vaisseau Orion. Le module lunaire, qui comprend trois sous-ensembles, sera placé en orbite lunaire grâce à trois vols commerciaux[103].
La mission Artemis III est la première à amener un équipage sur le sol lunaire. Selon le scénario préconisé par la NASA, sa durée totale est 25 à 34 jours et le séjour sur la Lune est de six jours et demi. L'équipage est composé de quatre personnes dont deux (un équipage mixte) doivent descendre sur le sol lunaire. Le déroulement de cette première mission sur le sol lunaire est le suivant[20],[103] :
L'objectif final du programme Artemis est de créer une installation permanente dans la région du pôle sud permettant à des équipages d'effectuer des séjours de longue durée consacrés à la mise au point des technologies nécessaires pour l'exploration des planètes par des êtres humains (préparation de missions à la surface de Mars) et l'étude scientifique de la Lune. Les missions de la phase II du programme Artemis doivent permettre de roder les procédures à la surface d'une planète en s'appuyant sur une station spatiale lunaire Gateway aux capacités accrues et un camp de base établi à la surface de la Lune de manière permanente et occupé à intervalles réguliers. Ce dernier doit comprendre un module d'habitation, un système de production d'énergie, des équipements permettant d'exploiter les ressources in situ (eau, oxygène, matériaux de construction) et deux types d'astromobile (pressurisé et non pressurisé) et des véhicules permettant aux astronautes d'explorer la région[105].
Une nouvelle version du lanceur plus puissante sera utilisée (SLS block 1B) ce qui permettra d'utiliser le même lanceur pour lancer le vaisseau Orion et un autre équipement. Les astronautes disposeront d'un vaisseau lunaire HLS aux capacités accrues qui pourra déposer au sol jusqu'à quatre personnes. Un vaisseau lunaire fourni par un autre constructeur sera également testé. L'habitat pourra supporter une nuit lunaire partielle ou même complète (objectif). Les équipements mis à leur disposition sont pré-positionnés par des missions robotiques. La station spatiale sera progressivement étoffée avec de nouveaux modules (sas, habitat…). Le déroulement des missions, tel que défini fin 2022, est le suivant[46],[106] :
Date | Mission / engin spatial | Type engin | Description / objectif | Destination | Lanceur | Commentaire |
---|---|---|---|---|---|---|
2027 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Pôle sud lunaire | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2028 | Artemis IV | Vaisseau Orion + module I-HAB | Mise en service de la station Lunar Gateway, transport équipage | Lunar Gateway | Space Launch System Bloc 1B | Premier vol du lanceur SLS dans sa nouvelle version 1B. |
2028 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Pôle sud lunaire | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2030 | Artemis V | Vaisseau Orion + module ESPRIT + Canadarm3 | Transport équipage | Lunar Gateway | Space Launch System Bloc 1B | Mise en oeuvre de l'astromobile LTV permettant d'accroitre le rayon d'action de l'équipage à la surface de la Lune. |
2029 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Pôle sud lunaire | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2031 | Artemis VI | Vaisseau Orion + module sas | Transport équipage | Lunar Gateway | Space Launch System Bloc 1B | |
2030 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Pôle sud lunaire | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2032 | Artemis VII | Vaisseau Orion + ? | Transport équipage | Lunar Gateway | Space Launch System Bloc 1B | |
2031 | Starship HLS | Vaisseau lunaire | Dépose de l'équipage à la surface de la Lune | Pôle sud lunaire | Starship | Plusieurs vaisseaux sont lancés en orbite basse pour ravitailler en ergols le Starship HLS avant son départ pour la Lune. |
2033 | Artemis VIII | Vaisseau Orion + ? | Transport équipage | Lunar Gateway | Space Launch System Bloc 1B |
À son lancement, la viabilité du programme Artemis avec l'objectif calendaire qui lui a été fixé (2025) est souvent considéré comme irréaliste, compte tenu de la complexité des éléments (vaisseaux, lanceurs, installations) à développer, de la modestie des sommes allouées au programme au titre du budget 2020 et de l'absence d'une enveloppe budgétaire consacrée au programme pour les années suivantes[107],[101] :
Pour tenter de mener à bien le programme dans le délai imposé malgré la contrainte budgétaire, la NASA choisit de sous-traiter complètement la conception et le développement de plusieurs éléments du programme, en particulier ceux du vaisseau lunaire HLS. Pour ce dernier, l'agence spatiale retient la solution de SpaceX, la moins coûteuse mais également la plus risquée du fait de sa complexité technique : mise au point d'un lanceur lourd, ravitaillement en ergols cryogéniques en orbite, enchainement des lancements très serré pour réaliser ce ravitaillement, vaisseau lunaire mono-étage.
Le développement du lanceur SLS et du vaisseau Orion accumulent retards et dépassements budgétaires tout en représentant une grande partie du cout du programme, alors qu'une solution alternative est envisageable[Laquelle ?].
Courant 2021, les sommes allouées au projet pour la période 2021-2025 permettent en théorie de mener à bien la première phase du programme, mais aucune somme n'est allouée au développement des équipements nécessaires à sa phase 2, qui démarre théoriquement en 2026[108].
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
Every time you click a link to Wikipedia, Wiktionary or Wikiquote in your browser's search results, it will show the modern Wikiwand interface.
Wikiwand extension is a five stars, simple, with minimum permission required to keep your browsing private, safe and transparent.