Les grottes se trouvent au nord-ouest de Carsac-Aillac, près de la D704 menant à Gourdon[3]. Le site inclut cinq grottes, Pech I à Pech V, situées dans la vallée de l'Énéa[4], petit tributaire de la Dordogne en rive droite.
Elles sont à une dizaine de kilomètres de la grotte du Roc de Combe sur Payrignac, dans le Lot; les deux sites sont souvent considérés similairement.
Du point de vue géologique, elles occupent la même position que la grotte du Roc de Combe: en bordure Est du bassin aquitain, entre les formations du Crétacé supérieur du Périgord et les plateaux jurassiques du Quercy[5],[6].
Pech-de-l'Azé I est fouillée de nouveau par Raymond Vaufrey (1929-1930)[10], puis par Maurice Bourgon[n 1] et François Bordes (1949-1953)[11],[12],[13]. Bourgon et F. Bordes découvrent Pech-de-l'Azé II en 1949[Tex 1]. Bordes (1954) définit 10 niveaux archéologiques, la couche 1 étant la plus récente[Tex 2]
François Bordes fouille de nouveau le site en 1970-1971[10]. En 1973 H. Laville détermine vingt niveaux chrono-stratigraphique des dépôts - essentiellement en subdivisant les 10 niveaux définis par F. Bordes[Tex 3]. F. Bordes (1975) y définit une nouvelle variante peu commune du Moustérien: l'Asinipodien[14], allant de ~82 000 ans à ~70 000 ans (SIO 5a à 4)[15].
Des analyses micromorphologiques (Goldberg 1979[16]) puis chronologiques[Tex 2] (Grün & Stringer 1991, Grün et al. 1991, quatre-vingts dates ESR publiées sur les couches 2 à 9) pour Pech II[Tex 4] amènent des contradictions avec les interprétations de F. Bordes (1954-1955) et de H. Laville (1973)[Tex 2].
Entre-temps, en 1983 une datation Th / U par Schwarcz et Blackwell d'un plancher stalagmitique inclus dans la couche 2 de Pech II a donné 103 000 +30/-25[Tex 5].
En 1999 Soressi et al. entreprennent l'étude des matériaux issus des fouilles de 1970-71, dont les résultats étaient restés inédits[2],[17], et reprend les fouilles en 2004-2005 sur une petite surface pour compléter le matériel archéologique; les quelque 10 m2 fouillés livrent presque 7 000 vestiges coordonnés[2],[18].
Entre-temps, en 2000 J.-J. Cleyte-Merle, directeur du Musée national de Préhistoire, fait poser une grille autour du gisement afin de le protéger des intrusions; et en 2005 un abri en bois de près de 100 m2 recouvert de bardage est installé pour protéger les témoins archéologiques des intempéries et de la végétation[19].
Pech-de-l'Azé II
Texier, réexaminant en 2006 les événements géologiques survenus dans Pech II, détermine sept phases principales à l'évolution du site:
Fin du Tertiaire ou du début du Quaternaire, âge incertain.
Dépôts de sables fluviatiles endokarstiques âge incertain.
Importante bioturbation, phénomènes de carbonatation - SIO 1[Tex 6].
La datation des couches 9 à 5 selon F. Bordes est comprise entre la fin du SIO 7 et le début du SIO 5; celle des couches 4 à 2 vont de la fin du SIO 5 au début du SIO 3[Tex 4].
Les grottes forment un gisement archéologique remontant au Moustérien de tradition acheuléenne (MTA) de type B[20].
Cette période se retrouve dans Pech-de-l'Azé I[21], qui a livré un fossile de crâne de jeune enfant néandertalien de cette période[22] en bas de la couche 6. C'est le premier vestige humain du MTA de type B (exception faite d'une dent isolée). La couche 6 a été datée entre 37 000 et 51 000 ans; le crâne est daté entre 41 000 et 51 000 ans[23].
Les dépôts rissiens et du Würm I ont été détruits au Pech de l'Azé I lors de l'interstade Würm I-II, et ne subsistent qu'au Pech de l'Azé II qui, moins bien exposé, avait été moins utilisé et est assez pauvre en vestiges archéologiques[8]. La partie avant de la voûte de Pech II s'est effondrée après le Riss.
De nombreux foyers ont été découverts à des niveaux divers et à des emplacements variés, dont certains nettement à l'intérieur de la grotte; ces derniers étaient donc placés encore plus vers l'intérieur à l'époque de leur usage[24]. Au Pech II, les couches du MTA présentent des foyers «à queue», c'est-à-dire des dépressions contenant de la cendre et prolongées sur un bord par une mini-tranchée. Cette forme de foyer se retrouve ailleurs dans plusieurs lieux et périodes (Aurignacien I du Roc de Combe, couche IA de Corbiac, Solutréen de la grotte ornée d'Ambrosio(es)[25].
Bordes signale pour Pech-de-l'Azé II un os gravé remontant au MTA et un os percé du Moustérien[26]. Les «gravures» de l'os en question (un fragment de côte) sont en fait les empreintes naturelles de sillons vasculaires, mises en évidence par une analyse par microscopie optique et par MEB, et par sa comparaison avec des ossements actuels[27].
Les pigments étaient utilisés sur les cuirs travaillés (vêtements, tentes), prouvant que bien avant l'apparition en Europe des peintures rupestres les néandertaliens savaient manier les matériaux colorants et qu'ils n'ont pas attendu l'Homo sapiens pour donner à leurs objets du quotidien une dimension symbolique[28].
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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[Bourgon & Bordes 1951] Maurice Bourgon et François Bordes, «Le gisement du Pech de l'Azé Nord. Campagnes 1950-1951. Les couches inférieures à Rhinoceros Mercki», Bulletin de la Société préhistorique française, t.48, nos11-12, , p.520-538 (lire en ligne[sur persee], consulté en ).
[Bordes 1954] François Bordes, «Les gisements du Pech de l'Azé (Dordogne). 1. Le Moustérien de tradition acheuléene», L'Anthropologie, vol.58, nos5-6, , p.401-432.
[Bordes 1971] François Bordes, «Observations sur L'Acheuléen des grottes en Dordogne», Munibe, Sociedad de Ciencias Naturales Aranzadi, no1, , p.5-23 (lire en ligne[PDF] sur aranzadi.eus, consulté en ).
[Bordes 1975] François Bordes, «Le gisement du Pech de l'Azé IV. Note préliminaire», Bulletin de la Société préhistorique française, vol.72, no1, , p.293-308 (lire en ligne[sur persee]).
[Maureille & Soressi 2000] Bruno Maureille et Marie Soressi, «À propos de la position chronostratigraphique de l'enfant du Pech-de-l'Azé I (commune de Carsac, Dordogne): la résurrection du fantôme», Paléo, no12, , p.339-352 (lire en ligne[sur persee]).
[McPherron & Dibble 2000] (en) Shannon P. McPherron et Harold L. Dibble(en), «The Lithic Assemblages of Pech de l'Azé IV (Dordogne, France)», Préhistoire Européenne, no15, , p.9-43 (lire en ligne[sur academia.edu], consulté en ).
[Richter et al. 2017] (en) Daniel Richter, Harold L. Dibble(en), Shannon P. McPherron, Dennis Sandgathe et Paul Goldberg, «Additional chronometric data for the small flake assemblages (‘Asinipodian') from Pech de l'Azé IV (France) and a comparison with similar assemblages at the nearby site of Roc de Marsal», dans D. Wojtczak, M. Al Najiar, R. Jagher, H. Elsuede, F. Wegmüller et M. Otte, Vocation préhistoire. Hommage à Jean-Marie Le Tensorer, coll.«ERAUL (Études et Recherches archéologiques de l'Université de Liège)» (no148), , sur researchgate.net (résumé), p.323-335.
[Soressi 2002] Marie Soressi, Le Moustérien de tradition acheuléenne du Sud-Ouest de la France: Discussion sur la signification du faciès à partir de l'étude comparée de quatre sites: Pech-de-l'Azé I, Le Moustier, La Rochette et la Grotte XVI, thèse de doctorat, Université de Bordeaux I, , 345p. (lire en ligne[PDF] sur grenet.drimm.u-bordeaux1.fr).
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Ne pas confondre Maurice Bourgon avec Maurice Bourlon (1875-1914), également archéologue.
Références
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[Martinez et al. 2014] Maria Lorenzo Martinez, Jean-Guillaume Bordes et Jacques Jaubert, «L'industrie lithique du Paléolithique moyen récent de Roc de Combe (Payrignac, Lot, France), un nouvel exemple de Moustérien Discoïde à denticulés», Paléo, no25, , p.101-124 (lire en ligne, consulté le ), p.5.
«Location de la grotte, carte interactive» sur Géoportail., carte «Géologie» activée. Vous pouvez bouger la carte (cliquer et maintenir puis bouger la souris), zoomer (molette de souris ou échelle de l'écran), moduler la transparence, désactiver ou supprimer les couches (= cartes) avec leurs échelles d'intensité dans l'onglet de "sélection de couches" en haut à droite, et en ajouter depuis l'onglet "Cartes" en haut à gauche. Les distances et surfaces se mesurent avec les outils dans l'onglet "Accéder aux outils cartographiques" (petite clé à molette) sous l'onglet "sélection de couches".
[McPherron 2007] Shannon P. McPherron, Tools versus cores: alternative approaches to stone tool analysis, Newcastle, Cambridge Scholars Publishing, , 279p. (ISBN978-1-84718-117-6 et 1-84718-117-1, lire en ligne), p.77.
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[Soressi & D’Errico 2007] Marie Soressi et Francesco D’Errico, «Pigments, gravures, parures: les comportements symboliques controversés des Néandertaliens», dans Les Néandertaliens. Biologie et cultures, Paris, Éditions du CTHS, coll.«Documents préhistoriques» (no23), , sur researchgate.net (lire en ligne), p.297-309, p.297, 299. Photo et dessin de l'os «gravé» p.298.
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