En France, les enquêtes statistiques sous l'Ancien Régime annoncent les enquêtes sophistiquées et exploitées par l'informatique à partir de la seconde moitié du XXesiècle. Il s'agit plus exactement d'enquêtes générales dans le sens où elles sollicitent la fourniture de renseignements d'ordre général destinés à informer la conduite du royaume.
Très généralement d'origine gouvernementale et confiées aux intendants, elles portent habituellement sur l'ensemble du territoire; leur objectif étant d'en avoir une meilleure connaissance dans des perspectives plus ou moins étroites et plus ou moins explicites.
C'est dans la mesure où l'enquête vise une connaissance globale, en quelque sorte quantitative, qu'elle peut être qualifiée de "statistique" alors que les valeurs chiffrées peuvent être minoritaires voire absentes.
En réalité, divers aléas, la complexité administrative et le caractère relativement improvisé de ces initiatives n'ont pratiquement jamais permis un éclairage exhaustif du royaume, telle ou telle généralité n'ayant fourni selon toutes apparences aucune réponse ou plus souvent les réponses étant d'une valeur fort inégales en dépit de la précision des questions posées.
Dans tous les cas, les conditions d'obtention de ces données qu'elles soient numériques ou qualitatives ne permettent pas de leur accorder a priori une bonne fiabilité: confiée aux intendants, c'est finalement du seul zèle de leurs subdélégués que dépendait la valeur des réponses; ces subdélégués ne disposant eux-mêmes que de sources administratives limitées, essentiellement les rôles fiscaux et les registres paroissiaux.
Une exploitation critique d'une enquête suppose de vérifier autant que possible qu'il s'agit bien d'une information de première main et non d'une actualisation au jugé d'un état plus ancien ou une compilation sans précaution de documents très partiels.
Parmi les motifs d'enquête, les préoccupations financières et donc fiscales occupent la première place: la fiabilité des données fournies était donc réduite par les craintes ataviques de population traditionnellement encline à omettre des ressources ou à en diminuer l'importance.
Parmi les enquêtes inventoriées ci-dessous, celles dont l'objet n'est pas précisé sont les plus générales. Elles sont motivées par un besoin indifférencié d'information sur l'état du royaume; elles sont donc les plus longues et délicates à satisfaire, mais aussi les plus intéressantes pour les historiens si l'élaboration en a été bien conduite et soignée.
Deux types d'enquêtes ou de rapports administratifs n'ont pas été intégrés à ce sommaire:
les enquêtes que les intendants pouvaient mener de leur propre autorité par exemple lors de leur entrée en fonction dans la généralité et qui n'avaient par conséquent pas de portée nationale.
les rapports que les intendants fournissaient avec une certaine régularité tels que des états de récoltes et les statistiques des défrichements. Ces rapports ont été, avec les dénombrements de la population, en raison de leur nécessaire périodicité, l'objet d'une amélioration continue des pratiques statistiques qui se sont précisées et formalisées encore au siècle suivant.
Agenda pour faire l'instruction du dénombrement des peuples et la description des provinces - Vauban, vers 1685, effort notable de méthodologie des recensements qui aura divers descendants
Enquête de 1697: Mémoire envoyé à tous les intendants par M. le duc de Beauvillier, pour y répondre article par article et servir à l'instruction de Monseigneur le duc de Bourgogne.
Enquête Orry de 1745, besoin d'hommes et de ressources pour la guerre de succession d'Autriche (considérée comme perdue, elle a été retrouvée dans les archives du ministère des Affaires étrangères et publiée en 1950[2])
Les résultats des enquêtes sont loin d'avoir été tous conservés: on ne peut d'ailleurs en donner la proportion puisqu'on ignore généralement le nombre des réponses fournies.
Certaines ont fait l'objet de publications et d'études.
Bertrand Gille, «Les sources statistiques de l'histoire de France - Des enquêtes du XVIIesiècle à 1870», Centre de recherches d'histoire et de philologie de la IVe section de l'École pratique des hautes études, 1964; Librairie Droz, Travaux de droit, d'économie, de sociologie et de sciences politiques no122, Genève, Paris, 1964, 288 pp.; 2eédition, 1980, 290 pp.