Surnommé le «Linné des champignons», il est considéré comme le père de la mycologie scientifique et est le fondateur de la systématique des champignons. Dans une série d'ouvrages fondamentaux, publiés de 1821 à 1877, il a jeté les bases de la classification et du dénombrement des espèces fongiques.
Enfant unique de Thore Fries, pasteur passionné par la botanique, Elias Fries naît et grandit au presbytère de Femsjö, petite paroisse isolée dans la partie occidentale de Småland aux confins de la province de Halland. Jusqu'à l'âge de neuf ans, c'est son père qui se charge de son éducation. Bercé à la fois par le latin quotidien et l'observation de la nature (il est capable de reconnaître plus de 400 plantes à l'âge de quatorze ans), c'est tout naturellement qu'il consacre sa vie à cette double vocation, rédigeant son journal intime en latin scientifique, tout en maîtrisant le suédois avec assez d'élégance pour être admis plus tard au nombre des dix-huit membres de l'Académie suédoise.
Ce n'est qu'en 1803, qu'il fréquente sa première école à Växjö (Comté de Kronoberg). Au lycée, il publie déjà des articles de botanique et des inventaires de plantes, dont la Flora Femsionensis. Toutefois, ce sont les champignons, très abondants dans la région, qui vont exercer sur lui une véritable fascination.
Entre 1821 et 1832, il publie les trois volumes de son Systema Mycologicum…, ouvrage fondamental dans l'histoire de la mycologie, qui est le point de départ[1] de la nomenclature mycologique.
En botanique, le genreFriesia (famille des Tiliaceae) lui a été dédié par de Candolle (1778-1841) en 1824. Une centaine d'espèces lui ont été dédiées en mycologie (voir liste plus bas).
Les botanistes s'intéressaient peu aux champignons, à l'exception notable du hollandais Persoon, qui fut le premier à amorcer une classification cohérente, fondée notamment, chez les champignons à lames, sur la présence de voiles.
Jusqu'à la fin du XVIIIesiècle, la mycologie était encore une sorte de passe-temps pour «aristocrates naturalistes». Les pionniers de la mycologie, comme Bulliard, Sowerby, Batsch, Schaeffer, etc., étaient pour la plupart de remarquables observateurs et d'excellents illustrateurs, mais qui ne cherchaient pas à classer les champignons en fonction de caractères hiérarchisés reflétant les affinités entre les espèces.
Fries n'a que 27 ans lorsqu'il publie son premier ouvrage majeur, Systema mycologicum, dans lequel il a le génie de reprendre la quasi-totalité des publications antérieures pour élaborer un imposant index, à partir de ses propres observations.
Il fallait beaucoup d'expérience et d'intuition pour pouvoir interpréter des descriptions et des planches souvent incomplètes. Fries mettait ainsi en synonymie des espèces décrites plusieurs fois par divers mycologues, en retenant l'un de ces noms, que l'on dit aujourd'hui «sanctionné». Mais surtout, il classait les espèces par tribus selon des caractères nouveaux ou négligés par ses prédécesseurs, en particulier la couleur de la sporée, le mode d'insertion des lames, la silhouette générale, la consistance du pied, et, en suivant Persoon, la présence et la nature des voiles: voile partiel (anneau) et voile général (verrues, volve, etc.).
Il n'accordait qu'une importance secondaire à la couleur du chapeau et autres caractères «évidents[2]» (tels que la croissance en touffes, l'aspect de la surface du chapeau…), ce qui lui a permis d'élaborer un systèmenaturel très influencé par les botanistes modernes qui cherchaient eux-mêmes une classification fondée sur des caractères hiérarchisés — la «phylogénie» avant le mot, et 30 ans avant Darwin.
Ainsi, avec son Systema, Fries a «nettoyé» et débrouillé la mycologie en faisant des choix, à la fois taxinomiques (établissant les synonymies) et systématiques (le regroupement des espèces en genres et en tribus), si robustes et si pertinents que son ouvrage majeur, le Systema Mycologicum, sera choisi plus tard comme le point de départ de la nomenclature mycologique.
Enfin, il consacra la suite de sa très longue carrière à accumuler de nouvelles observations personnelles et à corriger, amender et compléter les «erreurs de jeunesse» de son Systema, tout en découvrant de nouvelles espèces (notamment lorsque, après avoir vécu à Femsjö au milieu des conifères acides, il s'installa à Uppsala, où il découvrit les forêts mixtes calcaires de la côte baltique).
La Monographia (1836-1838), et surtout les Hymenomycetes Europaei (1874, son dernier ouvrage majeur avec ses 2 770 espèces de champignons), préfigurent la mycologie moderne et inspirèrent directement Quélet, Karsten (qui remodelèrent et accommodèrent la classification friesienne «à leur sauce», notamment en ajoutant des éléments de microscopie, complètement absents de l'œuvre de Fries, mais en en conservant l'essentiel) puis, plus proche de nous, René Maire, que l'on peut considérer comme l'un des fondateurs de la tradition française.
Fries, Elias (18??a): Flora Femsionesis. Ed. 2. – Uppsala universitetsbibliotek D 110e.
Fries, Elias (18??b): Flora Smolandica. – Landsbiblioteket i Växjö 4:o 350.
Fries, Elias (1809): Flora Wexionensis. Ed. 2. – Uppsala universitetsbibliotek D 110 a.
Fries, Elias (1810a): Försök till en tidning uti naturalhistorien. Första årgången 1 quartal 1810. Femsjö den 1er janvier 1810. – Uppsala universitetsbibliotek D 110 c.
Fries, Elias (1810b): Dagbok 1810. Hållen för eget nöje af Elias Magnus Fries. – Uppsala universitetsbibliotek D 111 a.
Fries, Elias (1810c): Flora Femsioensis. Ed 6. – Uppsala universitetsbibliotek D 110e.
Fries, Elias (1811a): Försök till en tidning uti naturalhistorien. Andra bandets 1 quartal 1811. Femsjö den 14 mars 1811. – Uppsala universitetsbibliotek D 110 c.
Fries, Elias (1811b): Dagbok hållen för eget nöje af Elias Magnus Fries. – Uppsala universitetsbibliotek D 111 a.
Novitiæ floræ Suecicæ. Lundæ (Lund), 1814-1824,
Observationes mycologicæpræcipue ad illustrandam floram Suecicam. Deux volumes, Havniæ (Copenhague), Vol. I (1815), Vol. II. (1818),
Flora hallandica (Lundæ, 1817-1819),
Seleromyceti Sueciæ (Lundæ, 1819),
Fries, Elias 1821a: Läsning för allmogen i Kronobergs län i ämnen, som röra landthushållningen. 1. Om odlingen af Foderwäxter. – Lund.
Fries, Elias 1821b: Läsning för allmogen i Kronobergs län i ämnen, som röra landthushållningen. 2. Om skadliga wäxter, samt deras utrotande i Kronobergs län. Lundæ.
Fries, Elias 1821c: Läsning för allmogen i Kronobergs län i ämnen, som röra landthushållningen. 3. Om Brand och Rost på wäxter, jemte fullständig underrättelse om deras kännetecken, orsaker, skada samt medel till deras förekommande. Lundæ.
Systema mycologicumsistens fungorum ordines, genera et species, huc usque cognitas, quas ad normam methodi naturalis déterminavit, disposuit atque descripsit. Trois volumes, Lundæ, 1821-1823; Greifswald, 1829-1832:
Vol. I, p.1–520 (Lundæ, 1821)
Vol. II, p.1–274 (Lundæ, 1822), p.275–620 (Lundæ, 1823)
Vol. III, Pars (sectio) 1, p.1–260 (Greifswald, 1829); Pars 2 et index (sectio posterior) , p.261–524 [Hyphomycetes et coniomycetes continens] (Greifswald, 1832).
Underrättelser om de nyaste bearbetningar af Engelska Floran. – Bot. Notiser 1843: 161-169.
Reservation emot en del antagna åsigter öfver åtskilliga Svenska vexter. – Bot. Notiser 1844: 1-26.
Botaniska utflygterEn samling af strödda tillfällighetsskrifter, utgifna (trois volumes, 1843-1864, 2eédit, 1853-1864), [Excursions botaniques, recueil de ses petits mémoires, en suédois].
Fries, Elias & Ångström, J., (1846-1849). Summa vegetabilium Scandinaviæseu enumeratio systematica et critica plantarum qnum cotyledonearum, tum nemearum inter mare Occidentale et Album, inter Eidoram et Nordkap, hactenus lectarum, indicata simul distributione geographica. Holmiæ & Liepsiæ:
Sectio prior, pp. [1]-258, (1846): Accedunt expositio systematis plantarum morphologici, comparatio vegetationis adjacentium regionum, definitiones specierum in Kochii synopsi floræ germanicæ et nemearum monographiis haud obviarum L aliter expositarum. Upsaliæ, Akad. tr. 45,
Novæ symbolæ mycologicæ, in peregrinis terris a botanicis Danicis collectæ (1851), in Nova Acta Regiæ Societatis Scientia Upsaliensis, ser.3:1 p.17–136.
Cortinarii et hygrophori Sueciæ. C. A. Leffler, Upsaliæ (1851).
Hymenomycetes in Suecia nuper detecti, quorum icones in Musæo Academiæ Scientiarum servantur. Öfvers. Kongl. Vetensk.-Ak. Förh.8(2):42-54. (1851).
Anmärkningar öfver Cotula matricarioides Bung. jemte några nya Svenska växter. Öfvers. af Kongl. Vetensk.-Akad. Förhandl.9: 189-191 (1852).
Monographia Cortinariorum Sueciæ, Upsaliæ (1851).
Nya och mindre kända arter af slägtet Hieracium. Öfvers. af Kongl. Vetensk.-Akad. Förhandl.13: 141-149 (1856).
Bidrag till några Svenska växters synonymik. Bot. Notiser1857: 32-33, 46-50, 108-115, 161-164.
Bidrag till några Svenska växters synonymik. Bot. Notiser1858: 31-35, 126-132.
Monographia hymonomycetum Sueciæ. Deux volumes (1857-1863):
Vol. I, p.484, Upsaliæ (1857),
Vol. II (Supplementum voluminis), C. A. Leffler, Upsaliæ (1863).
Hymenomycetes novi vel minus cogniti, in Suecia 1852-1860 observati. Öfvers. Kongl. Vetensk.-Ak. Förh.18(1):19-34. (1861).
Hymenomycetes Europaeisive Epicriseos systematis mycologici editio altera. Upsaliæ, E. Berling, (1874), pp.(4), 755.
Edition commémorative du bi-centenaire:
Fries, Elias † (1994): Flora Femsjonensis eller förteckning på de i Femsiö Pastorat wildt wäxande Vegitabilier. Ed. 6. – Utgiven till Elias Fries 200-årsdag den 15 augusti 1994 av Sigurd Fries, Umeå universitet.
Plus d'une centaine de taxons lui ont été dédiés en mycologie.
Dans les listes alphabétiques ci-dessous, le binôme cité entre parenthèses (précédé du signe «=») est celui considéré aujourd'hui comme valide. À l'inverse, les noms de genres donnés entre crochets (précédé de «ex») sont des combinaisons historiques aujourd'hui abandonnées.
À titre d'hommage, de même que Linné est le seul auteur dont la citation, en botanique, s'abrège sur une seule lettre (L.), Fries est le seul auteur à être abrégé sur seulement deux lettres (Fr.)
Selon l'article 13.1 du Code de Saint-Louis, la publication valide des noms de champignons est censée débuter au 1er mai 1753 (Linnaeus, Species plantarum ed. 1). Pour les noms d'Uredinales, d'Ustilaginales et de Gasteromycetes adoptés par Persoon (Synopsis methodica fungorum, au 31 décembre 1801) et les noms des autres champignons (à l'exclusion des Myxomycetes) adoptés par Fries (Systema mycologicum, vol. 1 (1er janvier 1821) à 3, avec Index complémentaire (1832) et l'Elenchus fungorum, vol. 1-2) sont sanctionnés (voir l'Art. 15).
Parmi les caractères organoleptiques, Fries négligeait notamment les odeurs, pourtant caractéristiques de nombreuses espèces. Cette lacune a été expliquée par le fait que ses facultés olfactives étaient amoindries par le tabac à priser
Références
Pierre-Arthur Moreau, Re: Fries Observationes mycologicae 1815, Forum «Mycologia Europaea» du 5 février 2007
S. R. Pennycook, An index to Batsch's Elenchus Fungorum, 1783-89, Mycotaxon 79, p.417-432, 2001
index complet des taxons décrit et illustrés dans les 3 tomes de l'Elenchus Fungorum de Batsch, avec les références de leur sanctionnement dans les travaux de Persoon et de Fries, ainsi que dans les Hymenomycetes Europaei de Fries