Eugène Freyssinet l'a appelé le «Maître des constructions originales». Avec Eugène Freyssinet, Robert Maillart et Pier Luigi Nervi, il a contribué à populariser l'emploi du béton armé dans le monde dans les années 1920. Torraja se distingue par sa vision esthétique du principe de la contrainte. Pour Frank Lloyd Wright, c'est l'ingénieur qui a le mieux exprimé ses principes de l'organicité de la construction tels qu'il les a définis: «form follows function» (la forme découle de la fonction) et «form and function are one» (la forme et la fonction sont un), avec le souci de respecter la nature des matériaux[1].
Eduardo Torroja appartient à une famille de scientifiques. Son père, Eduardo Torroja Caballé (1847-1918), marié à Mercedes Miret Salesasa, professeur d'université à Valence et Madrid. Architecte et mathématicien, il a rénové l'école espagnole de mathématiques et travaillé sur la géométrie projective de Karl Georg Christian von Staudt. Il a été élu en 1891 à l'académie royale des sciences exactes, physiques et naturelles où il est reçu en 1893. Il est le cadet de quatre frères. Son frère, José María a été ingénieur des routes, astronome et ingénieur géographe et a écrit de nombreux articles. Un autre frère, Antonio (1888 1974), a été ingénieur des mines, docteur en mathématiques et professeur à l'université de Barcelone. Son dernier frère, Juan, a été docteur en sciences physiques et a travaillé avec Leonardo Torres Quevedo dans son laboratoire de recherches. José María et Antonio ont été membres de l'académie royale des sciences.
Il commence ses études d'ingénieur à l'École spéciale des routes, canaux et ports de Madrid (Escuela Técnica Superior de Ingenieros de Caminos, Canales y Puertos (fait partie aujourd'hui de l'Université polytechnique de Madrid) en 1917. Il y suit les cours de José Eugenio Ribera qui a écrit le livre Puentes de fábrica y hormigón armado, et de Juan Manuel de Zafra auteur de Puertos y Señales Marítimas y hormigón armado qui ont orienté sa carrière. Il obtient son diplôme d'ingénieur en 1923. Il commence à travailler la même année, jusqu'en 1927, dans la Société des constructions hydrauliques et civiles Hidrocivil, dirigée par Jose Eugenio Ribera, pionnier de l'utilisation du béton armé en Espagne.
En 1927, il fait partie des constructeurs de la cité universitaire de Madrid, où il rencontre les principaux architectes de l'époque, ce qui l'aide à orienter ses idées esthétiques. Il commence alors une riche carrière, jalonnée de projets et d'ouvrages originaux qui lui ont donné une renommée internationale, en particulier le marché central d'Algésiras, le fronton de Recoletos et la couverture de la tribune de l'hippodrome de la Zarzuela.
En 1934, il fonde l'Institut technique de la construction et du bâtiment.
À partir de 1939, il associe son travail avec l'enseignement à l'Escuela de Ingenieros de Caminos et de chercheur à l'Instituto Tecnico de la Construcción y Edificación, et il participe à des congrès et en donne des conférences dans le monde entier.
Il décède en 1961 et est nommé marquis à titre posthume par le dictateur Franco, perpétuant ainsi le marquisat à travers sa famille, dont sa petite-fille, la chanteuse Ana Torroja[2].
Marché central d'Algésiras (1935), exécuté par l'architecte Manuel Sánchez Arcas;
Couverture de la tribune de l'hippodrome de la Zarzuela (Madrid).
Viaduc de los Quince Ojos (dans la Cité universitaire de Madrid).
Viaduc de Aire (1932), aujourd'hui détruit (dans la Cité universitaire de Madrid).
Centrale thermique de la cité universitaire (Madrid).
Viaduc Martín Gil (1934-1942) au-dessus le l'Esla pour la ligne de chemin de fer Zamora-Orense (la construction a été dirigée par Francisco Martín Gil, mort en 1934).
Sous la direction d'Antoine Picon, L'art de l'ingénieur, p.506-507, Éditions du Centre Georges Pompidou, Paris, (ISBN2-85850-911-5), 1997
Asociación de Miembros del Instituto Eduardo Torroja, La estructuras de Eduardo Torroja, Ministerio de Fomento, CEDEX, CEHOPU (2e édition), Madrid, 1999 (ISBN978-84-498-0430-4)
Joaquín Antuña Bernardo, Las estructuras de edificación de Eduardo Torroja Miret, thèse de doctorat, Université polytechnique de Madrid, École technique supérieure d'architecture, Madrid 2002 (lire en ligne)