Loading AI tools
roman de Marcel Proust De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Du côté de chez Swann est le premier volume du roman de Marcel Proust, À la recherche du temps perdu. Il est composé de trois parties, dont les titres sont :
Du côté de chez Swann | ||||||||
Premières pages de Du côté de chez Swann avec les notes de révision faites à la main par l'auteur. Manuscrit vendu aux enchères par Christie's en pour 663 750 £ | ||||||||
Auteur | Marcel Proust | |||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Pays | France | |||||||
Genre | Roman | |||||||
Éditeur | Bernard Grasset | |||||||
Date de parution | 1913 | |||||||
Chronologie | ||||||||
| ||||||||
modifier |
Proust commence à rédiger Combray de façon suivie fin mai, début . Quatre extraits de Combray parurent dans Le Figaro entre et [1]. Le premier tome de La Recherche fut refusé par plusieurs éditeurs, dont les Éditions de la Nouvelle Revue française[2], avant d'être publié par Bernard Grasset, dans sa maison, à compte d'auteur[3] le .
Dans Combray, le narrateur raconte son enfance à Combray, sa relation avec sa mère dont il réclame la présence le soir avant de se coucher. Selon Antoine Compagnon, "Combray, c’est en quelque sorte l’enfance perverse, celle-là même dont parle Freud, contemporain de l’auteur"[4]. Il évoque ses premières lectures, notamment François le Champi de George Sand. On voit se dessiner l'univers culturel et affectif d'un personnage dont on va suivre la vie et l'évolution pendant le reste de la Recherche. C'est aussi dans « Combray » qu'apparaît le personnage de Swann et c'est dans cette partie de l'ouvrage, que naît la fascination du narrateur pour les Guermantes qui ne le quittera qu'une fois qu'il aura pénétré ce milieu qui lui semble si inaccessible et merveilleux.
Longtemps, je me suis couché de bonne heure, le célèbre incipit de la Recherche est énoncé par un narrateur (premier « je ») insomniaque qui se remémore les différentes chambres à coucher de son existence. Il évoque ainsi les souvenirs de Combray (vécus par un deuxième « je », celui du héros), lieu de villégiature de son enfance. Souvenirs tous issus de la mémoire volontaire, c'est-à-dire la mémoire de l'intelligence, celle qui donne sur le passé des renseignements qui ne conservent rien de lui.
Le « je » du narrateur fait l'ouverture et la fermeture de « Combray » (mais de la Recherche aussi bien), il convoque le « je » du héros aux différentes époques de sa vie. Époques qui rentreront brusquement en correspondance lors des expériences répétées de mémoire involontaire vécues dans Le Temps retrouvé, desquelles émergera le « je » intemporel de l'auteur-narrateur.
C'est à l'occasion de la célèbre scène de la madeleine que le héros, à une époque bien plus tardive que celle du récit principal de Combray, va vivre sa première expérience de mémoire involontaire. Dès qu'il eut reconnu le goût du morceau de madeleine trempé dans le tilleul que lui donnait jadis sa tante à Combray, des pans entiers de sa mémoire ressuscitent, « comme dans ce jeu où les Japonais s’amusent à tremper dans un bol de porcelaine rempli d’eau, de petits morceaux de papier jusque-là indistincts qui, à peine y sont-ils plongés s’étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages consistants et reconnaissables ».
Le passage en question va comme suit : « Et tout d'un coup le souvenir m'est apparu. Ce goût c'était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin, à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l'heure de la messe), quand j'allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m'offrait après l'avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m'avait rien rappelé avant que je n'y eusse goûté ; peut-être parce que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d'autres plus récents ; peut-être parce que de ces souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s'était désagrégé ; les formes - et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel, sous son plissage sévère et dévot - s'étaient abolies, ou, ensommeillées, avaient perdu la force d'expansion qui leur eût permis de rejoindre la conscience. Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir. »[5]
L'auteur se consacre alors au récit de la vie de la famille du narrateur, de ses domestiques et des habitants de Combray, donnant lieu à des peintures de personnages pleins d'humour (le snobisme de l'ingénieur Legrandin, la cruauté de Françoise envers la fille de cuisine...).
Le narrateur évoque ensuite les promenades quotidiennes effectuées du côté de Méséglise (ou de chez Swann) lorsque le temps était incertain, et du côté de Guermantes lorsque le beau temps le permettait. Ces deux côtés sont les gisements profonds de mon sol mental.
Le côté de Méséglise est associé au mauvais temps. C'est le côté des odeurs, surtout celle des aubépines que le narrateur apprécie énormément jusqu'à verser des larmes en leur disant adieu ; du désir charnel, et de l'échec de l'intelligence. Cherchant à exprimer son ravissement devant la mare de Monjouvain, le héros ne parvient qu'à une éjaculation verbale « zut ! zut ! zut ! ». C'est de ce côté qu'il observe la scène de saphisme et de sadisme entre la fille de Vinteuil et son amie ; c'est de ce côté que Gilberte Swann lui adresse un geste obscène.
Le côté de Guermantes[6] est associé au beau temps, au désir de vie mondaine (il rêve de pouvoir fréquenter un jour la duchesse de Guermantes) et à l'intelligence des sensations. C'est du côté de Guermantes que le héros réussira pour la première fois à écrire un court passage sur les clochers de Martinville, le plaisir d'écrire décuplant le plaisir de l'observation. Ce succès restera isolé jusqu'au Temps retrouvé.
Un amour de Swann est un roman dans l'œuvre. Il s'agit d'un retour en arrière dans la vie de Charles Swann. Sa fréquentation chez les Verdurin de celle qui sera sa femme, Odette, et surtout sa jalousie maladive sont les thèmes de cette partie. Comme le reste de l'œuvre, la narration se fait à la première personne, mais puisque les évènements décrits se déroulent avant la naissance du narrateur, celui-ci raconte forcément le récit à la troisième personne. Et bien qu'à deux reprises[7],p.291 et 292, le narrateur utilise « je » en se rappelant les faits de ses relations avec Odette et Swann, cette partie du roman tient tout de même une place à part dans la Recherche. Il n'en reste pas moins que les thèmes (l'amour, la jalousie, l'art, la critique des milieux bourgeois et de la noblesse) et les personnages (les Verdurin, Swann, Odette) se retrouvent plus tard et qu'Un amour de Swann est bien une des pierres de l'édifice et non pas seulement une pause dans la narration.
« Noms de pays : le nom » évoque les rêveries du narrateur, ses envies de voyage, lui à qui la maladie interdit jusqu'à une sortie au théâtre. C'est donc à travers les horaires des trains qu'il voit Balbec et surtout Venise. À cette partie fait écho la partie « Noms de pays : le pays » de À l'ombre des jeunes filles en fleurs. Ce parallélisme souligne la déception naissant de la confrontation du rêve à la réalité brute. Seul l'art est capable de réenchanter les paysages et de les rendre à la hauteur des espérances du narrateur (par exemple, les peintures de Balbec par Elstir dans À l'ombre des jeunes filles en fleurs).
De nombreuses références artistiques, et en particulier picturales, sont faites dans la Recherche et en particulier dans Du côté de chez Swann[8]. Ainsi, et on l'observe dès Du côté de chez Swann, selon une thèse souvent soutenue par Antoine Compagnon, « il y a toute la culture dans Proust », « La Recherche est d'une certaine façon une œuvre finale »[9].
On retrouve plusieurs références à la musique avec entre autres la musique de Wagner (il est question dans Un amour de Swann de Tristan ou encore d'une saison à Bayreuth), la sonate de Vinteuil, la sonate au Clair de lune, de nombreux opéras-comiques, par exemple Une nuit de Cléopâtre de Victor Massé pour décrire les goûts des Verdurin ainsi que Saint François parlant aux oiseaux de Liszt joué aux soirées données par la marquise de Saint-Euverte.
On y trouve une description de l'église de Combray[10] qui donne à l'écrivain l'occasion d'évoquer la cathédrale de Chartres ou encore celle de Reims[11] ou encore des allusions critiques à Viollet-le-Duc[10].
Plusieurs personnages renvoient à des figures ou des œuvres littéraires avec entre autres le personnage de Bergotte, des références à Saint-Simon[11], à l'enfer de Dante à propos d'un nénuphar[10] ou encore à Labiche[11].
On trouve beaucoup de descriptions de fleurs dans le roman, notamment des descriptions des fuchsia, aubépines, et évidemment des catleyas (où la référence à la sexualité est explicite) ou encore des blés ou des pommiers[11].
Lors de la première rencontre du narrateur avec Gilberte, le texte dit : « La haie laissait voir à l'intérieur du parc une allée bordée de jasmins, de pensées et de verveines entre lesquelles des giroflées ouvraient leur bourse fraîche, du rose odorant et passé d'un cuir ancien de Cordoue, tandis que sur le gravier un long tuyau d'arrosage peint en vert, déroulant ses circuits, dressait, aux points où il était percé, au-dessus des fleurs dont il imbibait les parfums, l'éventail vertical et prismatique de ses gouttelettes multicolores. »[1]
L'utilisation de la symbolique des fleurs n'échappe parfois pas aux poncifs, peut-être à dessein, comme pour l'ancolie, symbole de souffrance et de tristesse voire de folie, que Swann jaloux fixe à sa boutonnière[11],p.117.
On trouve des références aux mondanités ainsi qu'une description de la bourgeoisie, notamment dans les passages où la fictive duchesse de Guermantes côtoie la princesse de Sagan et où Swann est présenté comme « héritier d'une famille de riche et bonne bourgeoisie où s'étaient conservés héréditairement, tout prêts à être mis à son service dès qu'il le souhaitait, la connaissance des "bonnes adresses" et l'art de savoir bien faire une commande»[1].
On trouve également des références à la philosophie, en particulier à la phénoménologie, par exemple avec une réflexion sur la mort ( « Nous périrons, mais nous avons pour otages ces captives divines [ des impressions artistiques ] qui suivront notre chance. Et la mort avec elles, a quelque chose de moins amer, de moins inglorieux, peut-être de moins probable.»[1], p.345-) ainsi qu'évidemment, une réflexion sur le temps qui passe avec par exemple le passage final de la troisième partie Nom de pays: le nom, qui va comme suit : «Les lieux que nous avons connus n'appartiennent pas qu'au monde de l'espace où nous les situons pour plus de facilité. Ils n'étaient qu'une mince tranche au milieu d'impressions contiguës qui formaient notre vie d'alors ; le souvenir d'une certaine image n'est que le regret d'un certain instant ; et les maisons, les routes, les avenues, sont fugitives, hélas, comme les années. »[12]
On trouve également des références moins fréquentes, mais tout de même importantes à des sujets tels que l'art théâtral - où Proust mêle aux noms d'acteurs réels tels que Sarah Bernhardt ou Edmont Got celui d'une actrice fictive, la Berma ; la gastronomie - avec la cuisinière Françoise[11] ; la psychologie - en particulier dans les réflexions sur l'amour et la jalousie maladive de Swann-; on trouve aussi des références bibliques - par exemple au Noli me tangere de l'Evangile selon Jean, XX, 17[7] ainsi que des références à l'antisémitisme en France autour de 1900 - par exemple à travers les propos de l' «ennuyeuse» et «méchante» marquise de Gallardon sur Swann.
Combray explore le monde de l'enfance : le lien de la pensée de Proust avec celle de Freud se pose alors. Jean-Yves Tadié a consacré un livre à ce sujet, Le lac inconnu : entre Proust et Freud.[13]
Il est question de sexualité dans Du côté de chez Swann. L'une des premières scènes de Combray[14],p.14 est une scène de masturbation. On retrouve une autre scène de masturbation dans Nom de pays: le nom[15], qui fait écho aux aveux de Gilberte à la fin d' Albertine disparue[14],p.2126.
Comme Proust l'écrit lui-même à propos de la dédicace à Gaston Calmette en début d'ouvrage, « Il est possible qu'à cause de l'extrême indécence de cet ouvrage, je ne maintienne pas cette dédicace »[16].
Le roman est évoqué notamment :
Seamless Wikipedia browsing. On steroids.
Every time you click a link to Wikipedia, Wiktionary or Wikiquote in your browser's search results, it will show the modern Wikiwand interface.
Wikiwand extension is a five stars, simple, with minimum permission required to keep your browsing private, safe and transparent.