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œuvre d'Aristote De Wikipédia, l'encyclopédie libre
De l'âme (en grec ancien : Περὶ Ψυχῆς / Peri psychès ; en latin : De Anima) est une œuvre majeure d’Aristote. Elle traite des principes du vivant et de son mouvement, ainsi que des passions et des moyens de connaissance.
Titre original |
(grc) Περὶ Ψυχῆς |
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Œuvre dérivée |
Commentaire sur le De l'âme d'Aristote (d) |
Ce traité est considéré comme la première œuvre systématique de psychologie et de théorie de la connaissance. D'une grande postérité, il a été abondamment commenté de l'Antiquité au Moyen Âge, par des penseurs grecs (Alexandre d'Aphrodise), romains (Thémistius), ou encore médiévaux, en langue arabe (Avicenne, Averroès) ou latine (Thomas d'Aquin).
Dans le De Anima, Aristote expose sa théorie sur la nature des êtres vivants. Sa discussion porte sur les divers types d'âme que possèdent des êtres vivants de différentes sortes qui se distinguent par leurs processus vitaux[1].
La question de l'âme est directement liée à celle des facultés. Le philosophe passe en revue celles qui sont rattachées aux quatre types d'âme, de la faculté végétative (âme végétative) à la faculté intellective, qui est le propre de l'homme, animal raisonnable[1].
On trouve aussi dans cet ouvrage une théorie du processus de l'intellection des intelligibles qui est l’un des piliers de la noétique : l'intellect « agent » est le principe actif de notre intellect qui fait en sorte que notre intellect « patient » saisisse ou devienne les intelligibles.
Le De Anima est le livre où Aristote développe le plus son concept d'âme. Ce concept est difficile à comprendre, car polysémique, et parce qu'allant à l'encontre de notre conception moderne habituelle d'une âme, qui serait une sorte de substance spirituelle « habitant » un corps. Pour contourner cette difficulté, quelques commentateurs ont proposé que le terme âme d'Aristote soit traduit par souffle de vie.
Le concept aristotélicien d'âme doit être replacé dans le contexte des propos tenus dans la Physique et la Métaphysique d'Aristote. Le philosophe y soutient que toute substance est ou bien un matériau (hylé), ou bien une forme (eidos), ou bien un composé (sunolon) d'une forme et d'une matière. Cela lui permet de fonder la théorie de l'hylémorphisme, l'alliance entre la matière et la forme. C'est dans ce cadre conceptuel qu'Aristote soutient dans De l'âme que l'âme est la forme de l'être vivant, dont le corps est la matière. Cela signifie que l'âme n'est pas une substance distincte du corps vivant, mais elle en est le principe de vie. C'est bien, donc, la possession d'une âme qui fait qu’un corps naturel organisé est doué de vie.
Cette conception permet à Aristote de rompre radicalement avec le dualisme platonicien du corps et de l'âme. L'union de l'âme et du corps est un fait primitif, et la notion d'un corps sans âme, ou d'une âme dans une sorte inappropriée de corps, est simplement inintelligible. Aristote peut donc proposer comme définition de l'âme qu'elle est « l'acte premier d'un corps organisé »[2]. Cela vaut pour tous les types d'âme parmi les quatre que l'auteur distingue[3].
De l'âme fait partie des traités complets qui nous sont parvenus d'Aristote. Les traductions successives de l’œuvre ont parfois subi des ajouts qui en ont transformé le sens : ainsi, la traduction arabe du De Anima, durant l'Antiquité tardive, a orienté le texte dans le sens du néoplatonisme[4].
Au chapitre 1, Aristote définit le domaine d'enquête et la méthode de la recherche qu'il va effectuer ; autrement dit, il pose le problème épistémologique de la science de l'âme[5].
Il se demande à quelle discipline appartient le discours sur l'âme, en déterminant que le but de son enquête est de dire ce qu'est l'âme (c'est-à-dire son essence)[6]. Il cherche à savoir si elle comporte plusieurs parties ou si elle est unique, et afin de savoir s'il faut s'enquérir uniquement de l'âme humaine ou s'il existe une définition commune de l'âme[7].
Aristote aborde, dans la première section, les thèses qui ont été soutenues par les philosophes antérieurs[8]. Dans cette optique, Aristote discute avec ses prédécesseurs comme Platon, Anaxagore, Héraclite, etc.
Aristote aboutit à la définition suivante, au début du livre II : « l'âme est la réalisation (entéléchie) première d’un corps naturel organisé »[9]. L'entéléchie (entelecheia) est la réalisation complète de l'être, c'est-à-dire un passage à un niveau supérieur de l'être[1].
Aristote développe dans la deuxième section une théorie des quatre modes de l'âme. L'âme peut être nutritive (végétative), sensitive, appétitive, ou intellective (« L'âme (...) se définit par les fonctions nutritive, sensitive, cogitative et par le mouvement[10] »).
La théorie des quatre modes de l'âme ne peut être soutenue que si l'on examine précisément chacun des cinq sens sur lesquels les facultés des quatre modes de l'âme s'appuient. Aristote s'attarde d'abord sur une théorie générale de la vision, à laquelle il apporte la plus grande importance. Il réfute une opinion d'Empédocle sur l'origine de la lumière, puis de Démocrite, selon laquelle on peut voir dans le vide (chap. 7). Il s'attache ensuite à définir l'audition et les trois conditions indispensables pour que le son se produise. Il traite du rôle de l'air dans l'audition, de la perception du son dans l'eau, et de la différence entre le grave et l'aigu (chap. 8)[14].
Aristote questionne ensuite l'odorat. Il remarque que l'homme est inférieur à la plupart des animaux dans ce domaine, quoiqu'il leur soit supérieur à tous pour le toucher et l'intelligence (chap. 9). Le chapitre 10 est consacré à une théorie du goût, qu'il met en rapport avec le toucher et la vue. Il considère que l'humidité est toujours nécessaire pour que la sensation du goût ait lieu. Il traite des différents types de saveur. Enfin, le onzième et dernier chapitre du livre se concentre sur la théorie du toucher et de sa relation avec les autres sens. Aristote défend l'idée selon laquelle la perception par le toucher se fait par un sens intermédiaire, qui est la chair[14].
Aristote nomme forme (εἶδος) les réalités intelligibles qui permettent de saisir abstraitement ce qu’est l'objet. Lorsque nous voyons une table, ou un arbre, nous reconnaissons qu'il s'agit d'une table ou d'un arbre du fait de sa forme, de sa configuration générale. Nous appréhendons le réel concrètement par l’expérience de nos sens, mais c'est par l’intellect (le noûs, νοῦς) que nous sommes capables de recevoir la forme.
La saisie de ces formes intelligibles est une et indivisible, directe, immédiate et permanente (sauf défaillance de la mémoire). Dans cet acte de connaître, l’intelligence coïncide réellement avec l’objet appréhendé et a en même temps conscience de soi : Aristote peut donc dire que « l’intelligence en activité s’identifie aux affaires qu’elle pense »[15].
Après avoir défini l'âme dans sa puissance de connaître, Aristote soutient que « l'âme est d'une certaine manière toutes choses (ἡ ψυχὴ τὰ ὄντα πώς ἐστι πάντα) »[13]. Aristote soutient que si la chose est la conscience, c'est parce que nous avons saisi sa forme grâce à notre intellect. Dès lors, « ce n’est pas la pierre qui est dans l’âme, mais sa forme (ὁ λίθος ἐν τῇ ψυχῇ, ἀλλὰ τὸ εἶδος) »[16].
C'est ici l’origine de l’élaboration conceptuelle de la notion d’inexistence intentionnelle des objets dans l’esprit. L’expression « ἀλλὰ τὸ εἶδος » désigne la pierre en tant qu’elle existe dans la ψυχῇ, dans l’âme : ce n'est pas la pierre (réalité physique) qui est « dans » l’âme, mais bien la forme de la pierre. Pour Aristote, en effet, il est nécessaire de distinguer la chose et l'essence de la chose (« autre est l’eau, autre est l’essence de l’eau »)[17].
Donc la forme de la pierre est autre que la pierre elle-même. La pierre existe bien d’une certaine façon dans l’âme, quelque chose de la pierre y subsiste. Ce n'est pas que la pierre existe approximativement dans l'âme ; la pierre existe bien dans l'âme, mais sous un certain mode. Ce mode est justement l’existence intentionnelle : l’existence dans l’âme de ce que l’âme reçoit. Aristote précise par une analogie ce qu'il entend par là : la pierre telle qu'elle est connue dans l'âme « est, par analogie, dans l’âme comme la main est un instrument, et l’intellect est à son tour forme des formes »[18].
L'intellect agent (en acte) est le principe actif de notre intellect qui fait en sorte que notre intellect possible (en puissance) saisisse ou devienne les intelligibles, tandis que l'intellect patient (passif) ne fait que recevoir la forme sensible des objets connus. Les développements sur l'intelligence de De Anima seront l'occasion de nombreuses querelles, notamment au Moyen Âge, autour de la question dite de l'intellect séparé du corps après la mort (χωρισθείς, χωριστός)[19].
Le traité De Anima connaît une grande postérité, en Occident comme au Moyen-Orient. Averroès, grand commentateur d'Aristote, en effectue une exégèse où il prétend qu'une partie de l'âme — l'intellect — peut être séparée du corps ou des autres facultés. Cela ferait l'objet d'une contradiction par Thomas d'Aquin[20]. Pierre Aubenque a considéré que le De Anima avait ouvert la voie à une doctrine spiritualiste dans l'Europe médiévale[21].
Pendant l'époque moderne plusieurs philosophes ont commenté le De anima d’Aristote : Francesco Silvestri, dit Ferrariensis, Domingo Báñez, Francisco de Toledo, Luis de Molina (inédit), Jacopo Zabarella, les professeurs d’Alcala (Complutenses), Silvestro Mauro.
Nicolas Grimaldi soutient que la définition aristotélicienne de l'âme a influencé celle de la substance par Gottfried Wilhelm Leibniz, et celle de l'esprit par Georg Wilhelm Friedrich Hegel[22].
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