Top Qs
Chronologie
Chat
Contexte

Sylviane Agacinski

philosophe française De Wikipédia, l'encyclopédie libre

Sylviane Agacinski
Remove ads

Sylviane Agacinski [aɡazɛ̃ski] est une philosophe française, née le à Nades, dans l'Allier[1]. Enseignante à l'École des hautes études en sciences sociales (de 1991 à 2010), elle est élue à l'Académie française le . Marquée par Heidegger, Gilles Deleuze, dont elle a suivi les cours à Lyon ; très proche de Jacques Derrida ; elle a beaucoup travaillé sur les rapports entre le masculin et le féminin, et sur les controverses sur le genre, la marchandisation des corps et le religieux.

Faits en bref Fauteuil 19 de l'Académie française, depuis le 1er juin 2023 ...
Thumb
Sylviane Agacinski en 2002.
Remove ads

Biographie

Résumé
Contexte

Famille

Sylviane Agacinski est la fille d'Henri Agacinski, ingénieur des travaux publics de l'État attaché au service des mines[2], lui-même fils d'un immigré polonais, mineur de fond, ayant quitté Potsdam en 1918[3], et de Raymonde Lejeune. Elle est la sœur de la comédienne et documentariste Sophie Agacinski.

Formation

Après une licence de philosophie obtenue à l'université de Lyon, où elle suit notamment les cours de Gilles Deleuze et d'Henri Maldiney, elle poursuit ses études à la Sorbonne, est reçue successivement au concours du CAPES et à l'agrégation de philosophie[4].

Vie personnelle et parcours professionnel

Elle est la compagne de l'écrivain Jean-Noël Vuarnet (1945-1996) et devient journaliste à Paris Match qu'elle quitte après le limogeage de Roger Thérond à la tête du magazine. Elle participe à Mai 68[5].

Elle enseigne en 1972 au lycée de Soissons et au lycée Carnot de Paris[4], entre 1978 et 1990, en classes préparatoires aux écoles de commerce[2].

En 1984, elle a un fils, Daniel[6], né de sa relation avec Jacques Derrida. Cette naissance lui fait réviser sa lecture de Simone de Beauvoir et bouleverse ses conceptions théoriques[7].

En 1991, elle est affectée comme professeur agrégée à l'EHESS[4], qu'elle quitte en 2010 lors de sa retraite.

Parallèlement, elle participe à la création, en 1975, du Groupe de recherches sur l'enseignement philosophique (Greph), au côté, notamment, de Jacques Derrida, Jean-Luc Nancy et Sarah Kofman. De 1984 à 1990, elle est directrice de programme au Collège international de philosophie (CIPH), et membre du comité directeur[4].

Le , elle épouse Lionel Jospin avec lequel elle vit depuis 1990[8].

Autres activités

Elle est membre du comité de lecture de la Comédie-française (2011-2015) et du conseil scientifique pour le projet de rénovation du musée de l'Homme (2013-2014).

Depuis 2009, sur des questions de bioéthique, elle a été auditionnée par l'Assemblée nationale, le Sénat, le Conseil d'État, la Commission nationale consultative des droits de l'Homme, le Conseil économique, social et environnemental (CESE).

Académie française

En 2023, elle se porte candidate à l'Académie française[9]. Le , elle succède à Jean-Loup Dabadie au fauteuil 19, élue au premier tour avec 13 voix sur 23 votants[10]. Le , elle fait paraître Porter l'épée ?, dans lequel sont inclus notamment son discours de réception ainsi qu'un discours de Mona Ozouf[11].

Daniel Garcia, expliquant le fonctionnement des commissions visant à décerner des prix littéraires, raconte : « Les académiciens découvrent, le jour du vote, des lauréats qui n'ont pas forcément leur sympathie, mais qu'ils se voient obligés de plébisciter. Ainsi, dans le cru des récompenses, Dominique Fernandez s'aperçut avec colère que la « philosophe » réactionnaire Sylviane Agacinski s'était vue décerner le Grand Prix Moron (5 000 euros) pour Femmes entre sexe et genre (Seuil). « Danièle Sallenave et Angelo Rinaldi étaient tout aussi furieux que moi, souligne l'écrivain. Mais nous étions coincés »[12]. »

Remove ads

Décorations

Prises de position et controverses

Résumé
Contexte

Egalité entre les hommes et les femmes

Sylviane Agacinski s'investit dans le débat pour la parité à partir de 1996 (« Citoyennes, encore un effort... », Le Monde du 18 juin). Dans son ouvrage Politique des sexes (Seuil, 1998), elle théorise la nécessité de faire advenir une mixité des sexes dans la représentation nationale et l'espace public pour mettre fin au monopole masculin du pouvoir. La loi tendant à favoriser l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives est votée en 2000[15]. Elle soutient le projet de Pacte civil de solidarité (PACS)[16] (promulgué en 1999).

Sylviane Agacinski considère que « les femmes ne sont ni une minorité ni un groupe particulier »[4] et que la différence sexuelle divise universellement l'espèce humaine en tant qu'elle est vivante. Dans Femmes entre sexe et genre, elle critique l'idée de Judith Butler selon laquelle la distinction homme/femme est une « binarité artificielle » qui devrait laisser place à une multiplicité de genres.

Homoparentalité

En 2013, elle s'exprime contre le projet de loi sur l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe. Elle est en faveur de la pleine reconnaissance sociale de l'homosexualité, mais elle est en désaccord avec l'établissement systématique d'un lien entre mariage et filiation[17]. Sa critique cible le question de l'homoparentalité[18]. Dans un essai, publié en juin 2019 et intitulé L'Homme désincarné, à propos de la procréation médicalement assistée ouverte aux couples de femmes et aux femmes seules, elle s'inquiète de l'institutionnalisation d'une filiation fondée uniquement sur la volonté et effaçant l'asymétrie des deux sexes dans la procréation, comme s'ils étaient interchangeables. Elle se demande si l'on doit tout justifier au nom « des intérêts individuels et des demandes sociétales »[19].

Gestion pour autrui (GPA)

Après quatre ans consacrés à son travail de recherche principal (Métaphysique des sexes, Masculin/Féminin aux sources du christianisme), elle entame en 2005 une réflexion sur la pratique des « mères porteuses » et s'engage dans une lutte contre diverses formes de marchandisation du corps humain, dont les femmes lui semblent les premières victimes. En 2009, elle pointe dans Corps en miettes l'usage des biotechnologies dans le développement d'un « baby business » américain, peu à peu mondialisé. En 2012, dans la réédition de ce livre, elle dénonce cette partie de la gauche qui se montre prête à accepter la « société de marché » dès qu'il s'agit de la gestation pour autrui , mais elle est en accord avec une autre partie de la gauche et plus généralement avec un féminisme social[20]. Elle milite au sein du Collectif pour le respect de la personne (CoRp)[4], pour l'abolition universelle de la maternité de substitution[21]. Elle voit dans la GPA « une forme inédite d'esclavage » qui « s'approprie l'usage des organes d'une femme et le fruit de cet usage »[22].

Dans le contexte de ces débats, en octobre 2019, une conférence sur « l'être humain à l'époque de sa reproductibilité technique » prévue à l'université Bordeaux-Montaigne est annulée à la dernière minute à la suite d'une tribune déposée par plusieurs organisations politiques (dont Solidaires étudiant-e-s), qui dénoncent en Sylviane Agacinski une militante « réactionnaire, transphobe et homophobe »[23],[24], accusation qu'elle conteste[25].

Religion

Dans Face à une guerre sainte (2022), la réflexion sur les relations entre le politique et le religieux conduit Sylviane Agacinski à s'insurger contre « l'intolérable promotion du voilement des femmes » par le prosélytisme islamiste, pratique discriminatoire toujours associée à la « mise sous tutelle des femmes » et incompatible, selon elle, avec le principe d'égalité devant la loi.

Ethique et société

En 2025, dans le journal Le Monde, elle considère que la crise contemporaine relève d'un autre registre socio-historique que celui des crises précédentes : elle est à la fois écologique, anthropologique et économique, et résulte d'une exploitation illimitée de la Nature, d'un oubli de la condition vivante de l'homme, et d'une dérive du capitalisme vers une société de marché sans bornes. Dans ce contexte, la marchandisation de tout  y compris du corps humain  efface la frontière juridique entre personnes et biens, ouvrant la voie à des formes de commerce extrêmes (sang, organes, maternité tarifée, prostitution), qui affectent en premier lieu les plus vulnérables. Elle dénonce la déshumanisation qu'induisent la puissance technologique et les intérêts économiques mondialisés, et appelle à une réaffirmation des limites éthiques et juridiques face à cette dérive[26].

Selon elle, le wokisme est une réaction légitime à l'injustice raciale (notamment après la mort de George Floyd), mais elle déplore la polarisation croissante aux États-Unis entre deux formes de « cancel culture » : d'un côté, l'oligarchie trumpiste, autoritaire et suprémaciste, qui censure les voix intellectuelles contraires à l'idéologie trumpiste ; de l'autre, les mouvements identitaires, parfois communautaristes, qui revendiquent une liberté d'expression absolue ; chacun ces deux camps utilisant le premier amendement pour justifier leurs positions, tout en cherchant à exclure l'autre. Elle critique cette instrumentalisation de la liberté d'expression, et alerte sur les dérives idéologiques qui menacent le débat démocratique.

Remove ads

Œuvres

  • Aparté. Conceptions et morts de Søren Kierkegaard, Aubier, 1978[27].
  • Critique de l'égocentrisme. La question de l'Autre, Galilée, 1994.
  • Volume. Philosophie et politique de l'architecture, Galilée, 1996.
  • Politique des sexes. Mixité et parité, Seuil, coll. « La Librairie du XXe siècle », 1998 ; coll. « Points, Essais », 2002[28].
  • Le Passeur de temps. Modernité et nostalgie, Seuil, coll. « La Librairie du XXe siècle », 2000[29].
  • Journal interrompu, -, Seuil, 2002.
  • Métaphysique des sexes. Masculin/féminin aux sources du christianisme, Seuil, 2005 ; coll. « Points, Essais », Seuil, 2007 (ISBN 2-7578-0288-7).
  • Engagements, Seuil, 2007.
  • Drame des sexes. Ibsen, Strindberg, Bergman, Seuil, coll. « La Librairie du XXIe siècle », 2008.
  • Corps en miettes, Flammarion, 2009.
  • Femmes entre sexe et genre, Seuil, 2012.
  • Le Tiers-corps : réflexions sur le don d'organes, Seuil, , 240 p. (ISBN 978-2-02-139359-0).
  • L'Homme désincarné. Du corps charnel au corps fabriqué, Gallimard, coll. « Tracts », 2019[30].
  • Face à une guerre sainte, Seuil, coll. « La Librairie du XXIe siècle », 2022.

Participation à des ouvrages collectifs (sélection)

  • Nietzsche aujourd'hui ? tome 1, Intensités, actes du colloque de Cerisy-la-Salle, 10-18, 1973.
  • Mimesis, Desarticulations, Aubier-Flammarion, 1975 (avec J. Derrida, J-L Nancy, P. Lacoue-Labarthe, Bernard Pautrat, Sarah Kofman).
  • Qui a peur de la philosophie, Greph, coll. « Champs », Flammarion, 1977.
  • La Puissance maternelle en Méditerranée, Mythes et représentations, dir. Geneviève Dermenjian, Actes Sud/MMSH, 2008.
  • La Plus Belle Histoire des femmes, avec Françoise Héritier, Michelle Perrot, Nicole Bacharan, Seuil, 2011.
  • Devenir humains, par Yves Coppens et dix auteurs « invités », coll. « Manifeste », Musée de l'Homme/Autrement, 2015.
  • Les Marchés de la maternité, dir. Martine Segalen et Nicole Éthea, Odile Jacob, 2021.
  • Wittgenstein en France, dir. Pascale Gillot et Élise Marrou, éditions Kimé, 2022.

Prix littéraires

  • 2013 : Grand prix Moron de l'Académie française pour Femmes entre sexe et genre.
  • 2018 : Prix Pauwels pour Le Tiers-corps.
  • 2023 : Prix des députés (Journée du livre politique) pour Face à une guerre sainte.
Remove ads

Notes et références

Liens externes

Loading related searches...

Wikiwand - on

Seamless Wikipedia browsing. On steroids.

Remove ads