Le château de Bonne est un ancien château fort, probablement du XIIIesiècle, dont on peut encore apercevoir des ruines sur la commune de Bonne, aujourd'hui dans le département de la Haute-Savoie, en région Auvergne-Rhône-Alpes. Entre les XIIIeetXVIesiècles, il est le siège d'une châtellenie.
Le château se situait en position à l'est d'une colline, sur la rive droite de la Menoge, dans la partie basse de la vallée de l'Arve[1]. Cet emplacement, où est établi une villeneuve et construit l'église Saint-Nicolas, a pris depuis le nom de «Haute-Bonne», le distinguant de la partie basse de la paroisse[1], dont le bourg Basse Bonne était lui aussi fortifié.
Le château commande l'entrée nord du Faucigny par le comté de Genève et l'accès aux vallées Verte et du Giffre depuis Genève et également l'axe et surtout les ponts de Boringes et de Bonne, permettant de rejoindre le Bas-Chabelais depuis La Roche et Annecy[2].
La petite colline, qui domine la Menoge, semble avoir été fortifiée vers le XIIIesiècle.
Plusieurs actes de la Grande dauphine, Béatrice, mentionne le château (1284[3], 1293[4], 1296[5]). Celui de mai 1293 concerne la donation de ses châtellenies de Faucigny à son cousin, le comte Amédée V de Savoie, envers qui elle rend hommage le mois suivant[4]. Lors du traité de paix entre le comte de Savoie et la Grande Dauphine Béatrice d'août 1308, les châteaux de Faucigny, de Bonne, de Monthoux, de Bonneville, du Châtelet-de-Credo, d'Alinge-le-Vieux et de Lullin, avec leurs mandements et juridictions [6].
En 1355, le Faucigny devient définitivement l'une des possessions de la maison de Savoie.
Les Bernois, qui occupent le nord du duché de Savoie, prennent le château en août 1589.
Au XVIIesiècle, le château et les fortifications ayant perdu leur intérêt stratégique sont démantelés.
Le château est installé sur la partie «avant» de la colline qui forme une demi-lune où l'on a construit en haut de la pente des murailles élevées (entre 9 et 10 mètres).
Organisation
Le château de Bonne est le centre d'une châtellenie, dit aussi mandement, en Faucigny[7],[8] (peut-être à la fin du siècle précédent). Le Faucigny serait organisé autour de neuf châtellenies[Note 1] à la fin du XIIesiècle dont Toisinges (Bonneville) occupait le 3e rang dans l'ordre de préséance, selon l'ancien inventaire des titres du Faucigny (1431), cité notamment par le chanoine Jean-Louis Grillet[9],[7].
Durant la période delphinale, le Faucigny serait organisé (à partir de 1342-1343) autour de quinze châtellenies, dont Bonne[10].
Le châtelain est un «[officier], nommé pour une durée définie, révocable et amovible»[13],[14]. Il est chargé de la gestion de la châtellenie, il perçoit les revenus fiscaux du domaine, et il s'occupe également de l'entretien du château[15]. Le châtelain est parfois aidé par un receveur des comptes, qui rédige «au net [...] le rapport annuellement rendu par le châtelain ou son lieutenant»[16].
L'érudit local, Bernard Ducretet, dans une présentation lors du XXXIIecongrès des sociétés savantes de Savoie qui s'est déroulé à Moûtiers, en 1988, à propos de la châtellenie de Beaufort, précise les rôles de cette charge, à l'aune de la thèse de droit d'Étienne Dullin, Les châtelains dans les domaines de la Maison de Savoie en deçà des Alpes (1911), en indiquant que «tous, jusqu'à la seconde moitié du XVIe siècle, furent les intermédiaires obligés entre les Communiers[Note 2] de leur Châtellenie et la Curia du Prince, où ils étaient couramment présents soit pour rendre compte de leur gestion administrative, soit pour exposer les vœux et doléances de la population»[19].
Châtelains de Bonne du XIVe au XVIIesiècle sont[20],[21]
Administration savoyarde, faucignerande, puis dauphinoise
...
1309: Châtelain indiqué, mais sans nom, dans un acte de 1309, de la dame de Faucigny, Béatrix, et Hugues Dauphin[22];
février-décembre 1313 (également receveur): Richard de Veyrier;
8 août 1314-février 1315: Soffrey d'Arce;
3 décembre 1319-6 décembre 1320: Pierre de Gravennel;
21 juillet 1355-8 avril 1358: Pierre de Mondragon;
8 avril 1358-8 mars 1372 (receveur pour les périodes du 29 mai 1360 au 24 février 1361, puis du 18 avril 1371 jusqu'au 8 mars 1372): Guigues de Seyssel, seigneur d'Aiguebelette;
8 mars 1372-29 septembre 1376: Guigues de Seyssel, fils du précédent;
29 septembre 1376-11 juin 1377: Nicolet (I) de la Croix;
11 juin 1377-11 janvier 1379 (receveurs pour la période du 20 octobre 1378 au 11 janvier 1379): Humbert et Rolet de la Croix, frères et co-châtelains, fils du précédent;
11 janvier 1379-25 septembre 1385 (receveurs pour la période du 15 mars 1382 jusqu'au 1er mars 1383): François de Candie;
25 septembre 1385-26 mars 1437 (receveur pour les périodes du 15 septembre 1403-1er mai 1405, 26 juin 1418-26 juin 1419, 26 juin 1427-26 juin 1428, 26 mars 1436-26 mars 1437): Henry de Menthon;
26 mars 1437-26 mars 1438: Henry de Menthon et son fils Philibert;
26 mars 1438-26 mars 1468 (receveur pour les périodes du 26 mars 1444-26 mars 1445, 26 mars 1453-26 mars 1454, 26 mars 1464-26 mars 1465): Philibert de Menthon, fils du précédent;
26 mars 1468-1494 (receveurs pour les périodes du 26 mars 1473-26 mars 1474, 26 mars 1481-26 mars 1482, 26 mars 1489-26 mars 1490): Jean (III) et Louis de Menthon, fils de Philibert, frères et co-châtelain;
26 mars 1498-1er avril 1521 (également receveur pour les périodes du 26 mars 1498 au 26 mars 1500, du 22 août 1502 au 26 mars 1503, du 1er avril 1511 au 29 septembre 1512, puis du 1er avril 1520 au 1er avril 1521): Louis de Menthon, fils de Philibert;
1er avril 1522-1er avril 1530: (également receveur pour la période du 1er avril 1523 au 1er avril 1524): Louis de Menthon, fils de Philibert;
1530-1533: Noble François Dumont;
1534-29 septembre 1540-29 septembre 1541: Noble Louis Chesney;
29 septembre 1541-29 septembre 1543: Noble Pierre Vuagnat, dit châtelain et fermier;
1544-1547: Noble Jacques Chesney;
1547-1550: Noble Claude de Lucinge, qui subroge la charge à noble Louis Chesney;
1550-1553: Noble Nicolas Chesney;
1553-1554: Maître Louis Jambaz;
1554-1556: Noble Nicolas Chesney et maître Claude Jambaz;
1559-1565: Noble Claude Goudard;
1565-1566: Maître Claude Dumont;
1566-1568: Maître Jean-Louis Dumont;
1570-1574: Maître ou noble Étienne Chesney;
1571-1577: Noble Jean Chesney;
1577-1580: Maître Jean-Louis Arpiaud;
1580-1586: Maître Étienne Chesney;
1586-1592: Maître Étienne Chesney;
1592-1598: Maître François Jambaz;
1598-1604: Maître Abraham Page;
1604-1610: Maître Abraham Page;
1610-1616: Maître Claude Milliet;
1616-1622: Noble François Duclos;
1622-1628: Maître Claude-Louis George;
1628-1634: Maître Michel Balliard;
1634-1640: Maître Pierre Lombard;
1640-1646: Maître Louis Jolivet;
1646-1652: Maître Antoine Rigaud;
1652-1654: Maître Jean Gay;
1654-1658: Maître Charles George;
1658-1659: Maître Jacques Grobel.
Bibliographie
[PDF] Nicolas Payraud, «Châteaux, espace et société en Dauphiné et en Savoie du milieu du XIIIesiècle à la fin du XVesiècle», HAL - Archives ouvertes, notel-00998263, (lire en ligne) extrait de sa Thèse de doctorat d'Histoire dirigée par Etienne Hubert, Université Lumière-Lyon-II (lire en ligne).
Georges Chapier, Châteaux Savoyards: Faucigny, Chablais, Tarentaise, Maurienne, Savoie propre, Genevois, La Découvrance, coll.«L'amateur Averti», , 410p. (ISBN978-2-8426-5326-2).
Les «communiers ou comparsoniers, consorts ou jomarons» sont un regroupement ou encore association de plusieurs familles paysannes[17], «soit dans le cadre d'une paroisse, soit dans la possession ou l'exploitation d'un bien indivis»[18].
Guy Gavard (préf.Paul Guichonnet), Histoire d'Annemasse et des communes voisines: les relations avec Genève de l'époque romaine à l'an 2000, Montmélian, La Fontaine de Siloé, coll.«Les Savoisiennes», , 439p. (ISBN978-2-84206-342-9, lire en ligne), p.65.
Jean-Louis Grillet, Dictionnaire historique, littéraire et statistique des départements du Mont-Blanc et du Léman, contenant l'histoire ancienne et moderne de la Savoie, vol.3, t.2, Chambéry, J.F. Puthod, , p.264. (Volume 2, lire en ligne)
Matthieu de la Corbière, L'invention et la défense des frontières dans le diocèse de Genève: Étude des principautés et de l'habitat fortifié (XIIe - XIVesiècle), Annecy, Académie salésienne, , 646p. (ISBN978-2-901102-18-2), p.195.
Nicolas Carrier, «Une justice pour rétablir la «concorde»: la justice de composition dans la Savoie de la fin du Moyen Âge (fin XIIIe -début XVIe siècle)», dans Dominique Barthélemy, Nicolas Offenstadt, Le règlement des conflits au Moyen Âge. Actes du XXXIe Congrès de la SHMESP (Angers, 2000), Paris, Publications de la Sorbonne, , 391p. (ISBN978-2-85944-438-9), p.237-257.
Alessandro Barbero, «Les châtelains des comtes, puis ducs de Savoie en vallée d'Aoste (XIIIe – XVIesiècle)», dans Guido Castelnuovo, Olivier Mattéoni, «De part et d'autre des Alpes»: les châtelains des princes à la fin du moyen âge: actes de la table ronde de Chambéry, 11 et 12 octobre 2001, , 266p. (lire en ligne).
Laurent Perrillat, L'apanage de Genevois aux XVIe et XVIIe siècles: pouvoirs, institutions, société, vol.113, t.2, Académie salésienne, , 1070p. (lire en ligne), «Annexe n°4 - Listes des châtelains et fermiers de châtellenies de l'apanage aux XVIeetXVIIesiècles», p.931-932, «Bonne».