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Bactéries anaérobies pouvant détruire les tumeurs cancéreuses De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Les bactéries tumoricides, ou bactéries carcinolytiques[1], ou bactéries oncolytiques (ou en anglais : Tumor-homing bacteria ou encore Tumor-targeting bacteria) sont un groupe de bactéries anaérobies facultatives ou obligatoires (capables de produire de l'adénosine triphosphate lorsque l'oxygène est absent et mourant à des niveaux d'oxygène normaux) pouvant cibler les cellules cancéreuses dans le corps, supprimer la croissance tumorale et survivre dans le corps pendant un certain temps, longtemps même après l'infection. Lorsque des bactéries de ce type sont administrées dans le corps, elles migrent vers les tissus cancéreux et commencent à se développer, puis déploient leurs mécanismes respectifs pour détruire les tumeurs solides. Chaque espèce de bactérie utilise un processus différent pour éliminer la tumeur. Les bactéries tumoricides courantes comprennent notamment Salmonella, Clostridium, Bifidobacterium, Escherichia coli, Listeria et Streptococcus[2].
Les premières recherches sur ce type de bactéries ont été mises en évidence en 1813 lorsque les scientifiques ont observé que les patients atteints de gangrène gazeuse, une infection causée par la bactérie Clostridium, pouvaient engendrer des régressions tumorales[3]. Au tournant des années 1890, le Dr William Coley, chirurgien assistant et instructeur en chirurgie à l’école de médecine de New York, fait état de succès dans le traitement du sarcome en injectant localement la bactérie Streptoccocus pyogenes. Il justifie son geste médical par l'observation de la guérison d'un patient cancéreux à la suite d'un érysipèle, une infection cutanée[4],[5],[6]. Cette expérience met en lumière une corrélation entre l'apparition d'une infection aiguë et la régression spontanée d'une tumeur cancéreuse. L'intérêt pour la recherche pour cette thérapie diminue avec l'avènement de la chimiothérapie et de la radiothérapie au XXe siècle, reléguant les travaux de Coley à l'oubli jusqu'au début des années 1950.
À cette époque, des études de Lloyd J. Old, également originaire de New York, reprennent l'idée de l'utilisation de bactéries, en particulier le bacille Calmette-Guérin (BCG)[7], pour induire des réponses anti-tumorales. En 1969, Georges Mathé et ses collaborateurs publient des résultats encourageants sur l'utilisation du BCG dans le traitement des leucémies lymphoblastiques, bien que ceux-ci ne soient pas corroborés par d'autres chercheurs[8]. Ce n'est qu'en 1976 que Alvaro Moralès et son équipe démontrent l'efficacité du BCG chez des patients atteints de tumeurs superficielles de la vessie[9]. Cette utilisation est aujourd'hui encore recommandée pour les tumeurs de la vessie présentant un risque élevé de récidive et de progression.
Différentes souches de bactéries tumoricides dans des environnements distincts utilisent des processus uniques ou similaires pour inhiber ou détruire la croissance tumorale.
La thérapie bactérienne anti-cancer est un domaine émergent pour le traitement du cancer. Bien que de nombreux essais cliniques soient en cours, à l'heure actuelle, seuls quelques traitements confirmés sont administrés aux patients[13].
L'utilisation de la souche vivante atténuée de Mycobacterium bovis, également connue sous le nom de Bacillus Calmette-Guérin (BCG), est un traitement confirmé du cancer de la vessie. La BCG-thérapie se fait par instillation intravésicale (administration de médicament dans la vessie via un cathéter) et est utilisée depuis 1970 chez les patients atteints de ce type de cancer[14].
En raison des régions nécrotiques et hypoxiques des cellules carcinolytiques (zone de résistance au traitement), l'administration de médicaments de chimiothérapie peut être altérée. Par conséquent, Salmonella peut être associée à une chimiothérapie pour assurer le traitement et le transport, car Salmonella n'est pas affectée par ces régions. De plus, la souche mutante de Salmonella VNP20009 a augmenté en nombre à partir de cette combinaison, ce qui provoque une inhibition supplémentaire des cellules cancéreuses en stimulant les protéines anti-tumorales[15].
Les bactéries tumoricides peuvent être génétiquement modifiées pour améliorer leurs activités anti-tumorales et être utilisées pour transporter du matériel thérapeutique en fonction des besoins médicaux[16]. Elles sont généralement transformées en un plasmide qui contient l'expression génique spécifique de ces protéines thérapeutiques de la bactérie. Une fois que le plasmide a atteint le site cible, la séquence génétique de la protéine est exprimée et la bactérie peut avoir son plein effet biologique. Actuellement, il n'existe aucun traitement approuvé avec des bactéries génétiquement modifiées. Cependant, des recherches sont menées sur Listeria et Clostridium en tant que vecteurs pour transporter l'ARNi (qui supprime des gènes) pour le cancer colorectal[17].
Certaines bactéries oncolytiques actives peuvent être nocives pour le corps humain car elles produisent des toxines qui perturbent le cycle cellulaire, ce qui entraîne une altération de la croissance cellulaire et des infections chroniques[13]. Cependant, de nombreuses façons d'améliorer la sécurité des bactéries carcinolytiques dans le corps ont été trouvées. Par exemple, lorsque les gènes virulents des bactéries sont éliminés par ciblage génique, un processus où les gènes sont supprimés ou modifiés, sa pathogénicité (propriété de provoquer une maladie) peut être réduite.
Les bactéries les plus étudiées pour le traitement du cancer sont Salmonella, Listeria et Clostridium. Une souche génétiquement modifiée de Salmonella (TAPET-CD) a terminé les essais cliniques de phase 1 pour les patients atteints d'un cancer métastatique de stade 4[20] ; il en ressort une colonisation de la tumeur par TAPET-CD, accompagnée d'une production significativement élevée de 5-FU à l'intérieur de celle-ci par rapport aux tissus sains. Toutefois, cette colonisation tumorale était moindre que celle observée dans les modèles murins testés[21].
Pour traiter le cancer colorectal (CRC), une souche d’Escherichia coli (Eda-I1-HlpA) a été développée afin de présenter à sa surface une protéine issue de Streptococcus gallolyticus : l’histone-like protein A (HlpA). Celle-ci interagit spécifiquement avec les sulfates d'héparane propres aux cellules du CRC, conférant ainsi à la bactérie recombinante la capacité de cibler exclusivement ces cellules après son administration par voie orale. De surcroît, cette souche bactérienne exprime la myrosinase, une enzyme capable de dégrader les glucosinolates, des composés présents dans les légumes de la famille des brassicacées, (anciennement appelés « crucifères ») pour produire du sulforaphane, un agent cytotoxique pour les cellules cancéreuses. Par conséquent, les bactéries de la souche Eda-I1-HlpA, administrées par voie orale conjointement à un régime alimentaire riche en brassicacées tels que le chou-fleur, le brocoli ou le radis, entraînent une réduction du nombre et de la taille des tumeurs dans un modèle murin de CRC. Par la suite, ces bactéries sont naturellement éliminées de l'organisme[22].
Le traitement du mésothéliome pleural malin par CRS-207, une souche atténuée de Listeria monocytogenes caractérisée par la délétion de deux gènes et exprimant la mésothéline comme antigène tumoral, en association avec une chimiothérapie, a démontré une activité antitumorale prometteuse, se traduisant par un taux de réponse de 59 %, ainsi que par le recrutement de lymphocytes infiltrant les tumeurs (TIL)[23]. Plusieurs essais cliniques sont actuellement en cours avec la souche CRS-207 : en combinaison avec le pembrolizumab, un anticorps monoclonal humanisé anti-PD-1 breveté, pour le traitement des cancers gastriques ou du mésothéliome pleural, et en association avec l'ipilimumab, un anticorps humain anti-CTLA-4, pour le traitement du cancer du pancréas métastatique[23].
Des vaccins anticancéreux à base de Listeria sont actuellement produits et font l'objet de nombreux essais cliniques[24]. Des essais de phase I de la souche Clostridium appelée Clostridium novyi (C. novyi -NT) pour les patients atteints de tumeurs réfractaires au traitement ou de tumeurs qui ne répondent pas au traitement sont en cours (2016)[25].
Il est à noter que ce champ de recherche inclut aussi l'utilisation exclusive ou en association de virus[26] ou de parasites protozoaires tel queTrypanosoma cruzi[27]. Les thérapies à base de micro-organismes surclassent, ou améliorent l'efficacité des onéreuses et toxiques thérapies à base d'anticorps monoclonaux inhibiteurs des points de contrôle immunitaire[22].
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