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Courant du protestantisme et système théologique De Wikipédia, l'encyclopédie libre
L'arminianisme est un courant théologique protestant fondé au début du XVIIe siècle sur la base des idées du théologien néerlandais Jacobus Arminius et de ses partisans historiques les « remontrants ». L'arminianisme fut originellement articulé dans une Remontrance (1610) adressée aux États de Hollande. Celle-ci exprimait une tentative de modération des doctrines du calvinisme, notamment sur l'interprétation de la prédestination.
L'arminianisme, en tant que doctrine, a été développé par plusieurs théologiens, notamment Arminius pour ce qui est de l'arminianisme classique et John Wesley pour ce qui est de l'arminianisme wesleyen. Les vues arminiennes les plus centrales sont que la grâce divine préparant la régénération est universelle et que la grâce justifiante autorisant la régénération est résistible. Plusieurs confessions protestantes ont été influencées par les vues arminiennes.
Selon Roger Olson, les croyances d’Arminius, c'est-dire l'arminianisme, n’ont pas commencé avec lui[1]. Des dénominations telles que les vaudois de la pré-réforme, et d’autres groupes antérieurs à la réforme avaient également affirmé que toute personne peut choisir de résister à la grâce de Dieu soit de lui céder[2]. Le théologien anabaptiste Balthazar Hubmaïer défendit à peu près la même vision qu'Arminius près d’un siècle avant lui[1]. En effet, les doctrines sotériologiques de l'arminianisme et de l'anabaptisme sont globalement équivalentes[3][4]. En particulier, les mennonites rejetaient la sotériologie calviniste, et « ont été historiquement arminiens, qu'ils aient épousé distinctement ou non le point de vue arminien »[5]. La théologie anabaptiste semble avoir influencé Jacobus Arminius[3]. Du moins, « il avait de la sympathie pour le point de vue anabaptiste, et les anabaptistes assistaient généralement à sa prédication »[4]. De manière similaire, Arminius mentionne le théologien luthérien danois Niels Hemmingsen (en) (1513-1600) comme partageant sa vision sotériologique de base et a pu être influencé par Hemmingsen[6].
Jacobus Arminius (1560-1609) est un pasteur et théologien néerlandais[7]. Il reçoit l'enseignement de Théodore de Bèze[8]. Il rejette la théorie de l'élection divine inconditionnelle calviniste[9]. Il propose pour sa part une théorie de l'élection conditionnelle[10]. Plusieurs théologiens réformés néerlandais, notamment Franciscus Gomarus, ont contesté ce point de vue, mais Arminius est mort avant la tenue du synode de l'Église réformée néerlandaise destiné à discuter ses affirmations théologiques[11].
Arminius mourut avant de pouvoir satisfaire à la demande des États de Hollande concernant un document de 14 pages exposant son point de vue[12]. Les partisans d'Arminius répondirent alors à sa place en rédigeant une Remontrance (1610), comportant cinq articles, dans laquelle ils expriment leurs points de divergence avec le calvinisme plus strict de la Confessio Belgica[13]. À cette époque on appela les partisans d'Arminius les remontrants et ceux de Gomarus les contre-remontrants[14] à la suite d'une Contre-remontrance qu'ils publièrent en 1611[15][16]. Après quelques manœuvres politiques, les calvinistes néerlandais réussirent à convaincre le prince Maurice de Nassau de s'occuper de la situation[10]. Maurice démit systématiquement de leurs fonctions les magistrats arminiens et initia un synode national[17]. Ainsi, se tint en 1618 à Dordrecht un synode de l’Église réformée néerlandaise[18]. Ce synode fut ouvert principalement aux calvinistes hollandais (102), tandis que les arminiens en étaient exclus (13 interdits de vote), avec des représentants d'Églises réformées d'autres pays (28)[19]. En 1618, il publia une condamnation d'Arminius et de ses partisans comme hérétiques[10]. Une partie de cette publication, les Canons de Dordrecht, était composée de cinq points du calvinisme, en réponse aux Cinq articles des remontrants[20].
Les arminiens de Hollande furent démis de leurs fonctions, emprisonnés, bannis et contraints de se taire[10]. Douze ans plus tard, les Pays-Bas accordent officiellement à l'arminianisme la protection en tant que confession, mais l'animosité entre arminiens et calvinistes se poursuivit[21]. La plupart des premiers remontrants suivirent une version classique de l'arminianisme. Cependant, certains d'entre eux comme Philipp van Limborch, se sont dirigés vers le semi-pélagianisme et le rationalisme[22].
En Angleterre, les soi-disant doctrines arminiennes[23] eurent cours, en substance, antérieurement puis parallèlement à Arminius[24]. En fait, les Trente-neuf articles (finalisés en 1571) étaient suffisamment ambigus pour pouvoir être interprétés selon un angle arminien ou calviniste[24]. L'arminianisme dans l'Église d'Angleterre, était fondamentalement une expression de négation du calvinisme, et seuls quelques théologiens adhéraient à l'arminianisme classique, mais pour le reste, ils étaient semi-pélagiens voire pélagiens[21][24],[25]. Dans ce contexte spécifique, les historiens contemporains préfèrent utiliser le terme « proto-arminiens » plutôt qu' « arminiens » pour désigner les positions des théologiens qui ne suivaient pas l'arminianisme classique[26]. L'arminianisme anglais était représenté par des puritains arminiens tels que John Goodwin ou des anglicans arminiens de la haute église tels que Jeremy Taylor et Henry Hammond[24]. Les arminiens anglicans du XVIIe siècle tels que William Laud (1573-1645) combattirent les puritains calvinistes[24]. Ils voyaient l'arminianisme en termes de religion d'État, idée complètement étrangère à celles d'Arminius[21]. Cette position est devenue particulièrement évidente sous le règne (1625-1649) de Charles Ier d'Angleterre[24]. Après la première révolution anglaise (1642–1651) Charles II d'Angleterre, tolérant les presbytériens, réinstitua la pensée arminienne dans l'Église d'Angleterre[27]. Cette dernière y fut dominante à partir de la Restauration (1660)[28] pendant une cinquantaine d'années[24].
Le mouvement baptiste est né en Angleterre au XVIIe siècle. Les premiers baptistes (appelés « baptistes généraux » en raison de leur confession d'une expiation « générale » ou illimitée) étaient des arminiens[29]. Le mouvement baptiste vit le jour avec Thomas Helwys, qui quitta son mentor, John Smyth et retourna à Londres pour fonder la première église baptiste anglaise en 1611. John Smyth, quant à lui, avait adopté les croyances communes et autres particularités des églises mennonites hollandaises Waterlander. Plus tard les baptistes généraux tels que John Griffith, Samuel Loveday et Thomas Grantham défendirent une théologie arminienne réformée, qui reflétait l'arminianisme d'Arminius. Les baptistes généraux résumèrent leurs vues arminiennes dans de nombreuses confessions, la plus influente étant la Standard Confession de 1660. Dans les années 1640, le groupe des baptistes particuliers se forma, divergeant fortement de la doctrine arminienne et embrassant le presbytérianisme. La Standard Confession de 1660 fut utilisée par les héritiers américains des baptistes anglais, bientôt connus sous le nom des baptistes libres[30].
Dans la controverse méthodiste-calviniste des années 1770 impliquant les ministres anglicans John Wesley et George Whitefield, Wesley répondit aux accusations de semi-pélagianisme en adoptant une identité arminienne[31]. Wesley avait une familiarité limitée avec les croyances d'Arminius et a largement formulé ses opinions sans s'appuyer directement sur les enseignements de ce dernier[32]. Wesley a été notamment influencé par l'Arminianisme anglais du XVIIe siècle et par certains porte-parole des remontrants[33]. Il est néanmoins considéré comme un fidèle représentant des croyances d'Arminius[34]. Wesley défendit sa sotériologie au travers de la publication d'un périodique intitulé The Arminian (1778) et d'articles tels que La prédestination considérée calmement[35]. Pour soutenir sa position, il affirma fermement ses croyances en la dépravation totale tout en clarifiant d'autres doctrines notamment celle de la grâce prévenante[36][37]. De plus, Wesley attaquait le déterminisme qui, selon lui, caractérisait la doctrine calviniste de la prédestination[38]. Il prêchait typiquement la notion de perfection chrétienne (en maturité et non « sans péché »)[21]. Son système de pensée est devenu connu sous le nom d'arminianisme wesleyen, dont il a posé les fondements avec son collègue prédicateur John William Fletcher[39][40]. Le méthodisme a également navigué dans ses propres subtilités théologiques relatives à la contribution humaine dans le processus du salut[41][42]. Dans les années 1830, pendant le second grand réveil, des traces d'influence de pélagianisme firent surface dans le mouvement de sanctification américain. Par conséquent, les critiques de la théologie wesleyenne ont parfois injustement perçu ou étiqueté sa pensée générale[43]. Cependant, son centre est reconnu comme étant l'arminianisme[37][42].
Le pentecôtisme trouve son origine dans l'activité de Charles Parham (1873–1929). Son origine en tant que mouvement remonte au réveil d'Azusa Street à Los Angeles en 1906. Ce renouveau a été dirigé par William J. Seymour (1870–1922)[44]. En raison de l'origine méthodiste et de l'arrière plan du mouvement de la sainteté de nombreux premiers prédicateurs pentecôtistes, les églises pentecôtistes s’alignaient généralement sur les pratiques issues de l'arminianisme wesleyen[45][46]. Au cours du XXe siècle, alors que les églises pentecôtistes commençaient à s'installer et à adopter des formes plus standardisées, elles formulèrent une théologie entièrement arminienne[47]. Actuellement, les deux plus grandes dénominations pentecôtistes du monde, les Assemblées de Dieu et les dénominations de l'Église pentecôtiste de Dieu, adhèrent officiellement aux vues arminiennes telles que la grâce résistible[48], l'élection conditionnelle[46], ou celle de la sécurité conditionnelle du croyant pour la première[49].
Les partisans de l'arminianisme trouvent leur place dans plusieurs dénominations protestantes[50]. Parfois plusieurs autres théologies comme le calvinisme coexistent au sein d'une même dénomination[51]. Quoique l'arminianisme ne fasse pas historiquement partie de la tradition théologique luthérienne, il existe certaines similarités[52]. Ainsi, des églises luthériennes peuvent y être ouvertes[53]. On trouve au moins partiellement une théologie arminienne dans la haute église anglicane[54]. La théologie anabaptiste et l'arminienne sont similaires à certains égards[55]. On trouve ainsi l'arminianisme chez les dénominations anabaptistes telles que les mennonites, les huttérites, les Brethren de Schwarzenau et les Amish[56][53]. On trouve la théologie arminienne chez les baptistes généraux[56] et les baptistes libres[57]. La majorité des baptistes du Sud accepte l'arminianisme avec option pour la doctrine de la sécurité éternelle[58],[59],[60], bien que la part du calvinisme y soit en hausse[61]. On trouve la théologie arminienne dans le mouvement restaurationniste, en particulier dans les Églises chrétiennes et Églises du Christ[57]. On la trouve chez les adventistes du septième jour[53]. On la trouve sous la forme de wesleyanisme[62] dans les principales églises méthodistes, et en particulier dans les dénominations issues du mouvement de sanctification telles que l’église du Nazaréen, l'église méthodiste libre, l’église wesleyenne[57], et l'Armée du salut[62]. On la trouve aussi chez une partie des charismatiques dont notamment les pentecôtistes[57][63][56][64].
La théologie arminienne a reçu l'appui de théologiens, experts bibliques et apologistes provenant de diverses périodes et traditions théologiques. Parmi les personnalités historiques qui ont soutenu cette perspective, on compte Jacobus Arminius[65], Simon Episcopius[22], Hugo Grotius[22], John Goodwin[66], Thomas Grantham[67], John Wesley[68], Richard Watson[69], Thomas Osmond Summers[69], John Miley[70], William Burt Pope[69] et Henry Orton Wiley[71].
Dans les traditions baptistes contemporaines, les partisans de la théologie arminienne incluent Roger E. Olson[72], F. Leroy Forlines[73], Robert Picirilli[74] et J. Matthew Pinson[75]. Au sein de la tradition méthodiste, d'éminents partisans comprennent Thomas C. Oden[73], Ben Witherington III[76], David Pawson[77], B. J. Oropeza[78], Thomas H. McCall[72] et Fred Sanders.[79] Le mouvement de sanctification compte des théologiens comme Carl O. Bangs[80] et J. Kenneth Grider.[75] En outre, des érudit tels que Keith D. Stanglin,[72] Craig S. Keener[81] et Grant R. Osborne[82] soutiennent également les perspectives arminiennes.
Les croyances initiales de Jacobus Arminius lui-même sont couramment désignées comme de l'arminianisme, mais plus généralement, le terme peut englober les enseignements de Simon Episcopius[83], d'Hugo Grotius[84], de John Wesley et d'autres également[85]. La théologie arminienne se décline généralement en deux variantes : l'arminianisme classique, tiré de l'enseignement de Jacobus Arminius et l'arminianisme Wesleyen, principalement de Wesley. Ces deux variantes sont très proches.
En 529, au second Concile d'Orange, la question qui se posait était de savoir si les doctrines d'Augustin sur la providence de Dieu devaient être affirmées, ou si le semi-pélagianisme pouvait l'être. Le semi-pélagianisme était une forme modérée de pélagianisme enseignant que la première étape du salut se produit par la volonté humaine et non par la grâce de Dieu[86]. La position du Concile peut être appelée « semi-augustinienne »[87][88][89]. Le concile définit que la foi, bien qu'un acte libre de l'homme, résultait, même à ses débuts, de la grâce de Dieu, éclairant ainsi l'esprit humain et permettant la foi[90][91][92]. Ceci décrit l'opération de la grâce prévenante permettant aux non-régénérés de se repentir dans la foi[93][94]. D'autre part, le Concile d'Orange condamna l'enseignement de la prédestination à la damnation[95] tout au moins impliqué par la sotériologie augustinienne[96]. Étant donné son alignement sur ces positions caractéristiques du semi-augustinisme[89], l'arminianisme est considéré par certains comme une retour au consensus théologique de l'église primitive[97]. L'arminianisme est considéré par d'autres comme une thèse sotériologique alternative au protestantisme calviniste[98], ou plus précisément comme une position intermédiaire entre calvinisme et semi-pélagianisme[99].
L'arminianisme classique est le système théologique présenté par Jacobus Arminius et maintenu par certains des remontrants[100]. Certains théologiens comme Forlines et Olson se référent à ce système comme de « l'arminianisme classique »[101][102]. D'autres, comme Picirilli et Pinson préfèrent l'appeler « arminianisme de la réforme »[103] ou « arminianisme réformé »[104]. Les enseignements d'Arminius étaient en accord avec les sola fide et sola gracia de la réforme, mais étaient néanmoins distincts des enseignements particuliers de Martin Luther, de Ulrich Zwingli, de Jean Calvin et d'autres réformateurs protestants[105].
L'arminianisme classique a été exprimé notamment dans les Cinq articles des remontrants. « Ces points », notent Keith D. Stanglin et Thomas H. McCall, « sont en accord avec les vues d'Arminius ; en effet, certains sont tirés textuellement de sa « Declaration of the Sentiments on Predestination[106]. » Une liste de croyances relatives à l'arminianisme classique est donnée ci-dessous :
Le point de vue arminien majoritaire accepte le théisme classique qui affirme que Dieu est omniprésent, omnipotent et omniscient[107]. Dans cette mesure, la puissance, la connaissance et la présence de Dieu n'ont pas de limitations externes, en dehors de celles imposées par sa nature ou son caractère.
D'un autre coté la vue arminienne sur la souveraineté de Dieu repose sur des postulats fondamentaux découlant de la nature de Dieu et de son caractère, spécialement tel que révélé pleinement en Jésus-Christ[108]. D'une part, l'élection divine doit être définie de telle sorte que Dieu ne soit en aucun cas, et ce même de façon seconde, l'auteur du mal. Cela ne correspondrait pas au caractère de Dieu[109]. D'autre part, la responsabilité de l'homme dans le mal doit être absolument préservée[110]. Ainsi ces deux postulats requièrent une manière spécifique avec laquelle Dieu choisit de manifester sa souveraineté en interaction avec ses créatures :
Cela demande d'une part que Dieu agisse selon un mode de providence divine « limité », c'est-à-dire en exerçant délibérément sa souveraineté sans déterminer chaque événement. D'autre part, cela impose que l'élection divine soit de type « prédestination par prescience »[111].
De ce fait, la plupart des arminiens réconcilient le libre arbitre humain avec la prescience de Dieu de la manière suivante : Le libre arbitre humain est limité par le péché originel, bien que la grâce prévenante de Dieu rende à l'humanité la capacité d'accepter l'appel du salut de Dieu[112][113]. La prescience de Dieu concernant l'avenir est exhaustive et complète, et donc l'avenir est certain et non subordonné à l'action incertaine ou contingence humaine. Dieu ne détermine pas l'avenir, mais il le connaît. La certitude émanant de Dieu et la contingence humaine sont compatibles[114].
Roger Olson exprime ces idées caractérisantes d'une manière pratique :
« « l'arminianisme », […] est simplement un terme que nous utilisons en théologie pour désigner l'opinion défendue par certaines personnes déjà avant Arminius et de nombreuses autres après lui, selon laquelle les pécheurs qui entendent l'évangile ont le libre arbitre pour accepter ou rejeter l’offre de la grâce de Dieu et que personne n'est exclu par Dieu de la possibilité du salut, à l’exception de ceux qui s’excluent librement. Mais le véritable arminianisme classique et historique inclut la conviction que ce libre arbitre [permettant de se repentir et de croire au salut] est lui-même un don de Dieu par la grâce prévenante »[115].
La dépravation est totale : Arminius déclare « [Suite à la chute], le libre-arbitre de l’homme envers le véritable bien n’est pas seulement blessé, estropié, infirme, tordu et affaibli ; mais il est aussi captif, détruit et perdu. Et ses forces ne sont pas seulement affaiblies et inutiles à moins qu’elles ne soient assistées par la grâce, mais il n’a aucune sorte de forces à l’exception de celles suscitées par la grâce divine[116]. »
L'expiation est destinée à tous : La mort de Jésus, fut pour le monde entier, Jésus attire tout le monde vers lui et tout le monde a la possibilité de recevoir le salut par la foi[117].
La mort de Jésus satisfait la justice de Dieu : La peine pour les péchés des élus est intégralement payée par l’œuvre de Jésus à la croix. Ainsi, l'expiation de Christ est destinée à tous, mais nécessite que la foi soit effective. Arminius déclare que : « la justification, lorsqu'elle caractérise l'acte de jugement, est soit une pure imputation de justice miséricordieuse […] soit l'homme est justifié devant Dieu […] selon la rigueur de la justice sans aucun pardon »[118]. Stephen Ashby explique : « Arminius ne voyait que deux façons possibles de justifier le pécheur : (1) par notre adhésion absolue et parfaite à la loi, ou (2) uniquement par l'imputation divine de la justice de Christ[119]. » W. Stephen Gunter convient qu'Arminius n'aurait pas pris une position rigide sur la doctrine de l'imputation de la justice du Christ (la justice du Christ est imputée pour la justice du croyant)[120]. Pour Keith D. Stanglin et Thomas H. McCall, Arminius aurait dit plutôt que « la justice du Christ est imputée à la justice du croyant »[120]. Forlines a exprimé ceci de la manière suivante : « Sur la condition de la foi, nous sommes placés en union avec Christ. Sur la base de cette union, nous recevons sa mort et sa justice »[121].
L'arminianisme affirme le paiement substitutif de Jésus pour les péchés dont les effets sont limités aux élus seuls. Arminius croyait en la nécessité et la suffisance de l'expiation du Christ par substitution pénale[122]. Hugo Grotius a enseigné qu'elle était satisfaite d'une manière gouvernementale[123]. Selon Roger Olson, les arminiens ont pu se positionner historiquement selon l'une ou l'autre vue[124].
Dieu prend l'initiative dans le processus de salut et sa grâce s'adresse à tous. Cette grâce souvent appelée grâce prévenante (ou pré-régénératrice) agit sur tous les peuples pour les convaincre de l’Évangile, les attirer fortement vers le salut et permettre la possibilité d'une foi sincère. Picirilli déclare qu' « en réalité, cette grâce est si proche de la régénération qu'elle conduit inévitablement à la régénération si on ne lui résiste finalement pas »[125]. L'offre de salut par la grâce n'agit pas de manière irrésistible selon une méthode déterministe purement causale, mais plutôt selon une méthode d'influence et de réponse qui peut être à la fois acceptée et refusée[126].
L'homme a un libre arbitre libéré pour répondre ou résister : Le libre arbitre est accordé et limité par la souveraineté de Dieu, mais la souveraineté de Dieu permet à tous les hommes d'accepter l'Évangile de Jésus par la foi, tout en permettant à tous les hommes d'y résister[127].
La conversion est synergique : comme l'a dit Roger Olson : « le synergisme évangélique d'Arminius réserve tout le pouvoir, la capacité et l'efficacité du salut à la grâce, mais permet aux humains d'exercer la capacité accordée par Dieu de résister ou de ne pas y résister. La seule « contribution » des humains est la non-résistance à la grâce[128]. »
L'élection est conditionnelle : Arminius a défini l'élection comme « le décret de Dieu par lequel, de lui-même, depuis l'éternité, il a décrété qu'il fallait justifier en Christ, les croyants, et les accepter pour la vie éternelle »[129]. Dieu seul détermine qui sera sauvé et sa détermination est que tous ceux qui croient en Jésus par la foi seront justifiés. Selon Arminius, « Dieu ne considère personne en Christ, seulement si établis en lui par la foi[129]. »
Dieu prédestine les élus à un avenir glorieux : La prédestination n'est pas la prédétermination de qui va croire, mais plutôt la prédétermination de l'héritage futur du croyant. Les élus sont donc prédestinés à la filiation par l'adoption, la glorification et la vie éternelle[130].
Selon des considérations eschatologiques, Jacobus Arminius[131] et les premiers remontrants, y compris Simon Episcopius[132] croyaient au feu éternel où les réprouvés sont jetés par Dieu au jour du jugement.
Vis-à-vis de ses considérations, la préservation est conditionnelle : Tous les croyants sont pleinement assurés du salut à la condition de rester en Christ. Le salut est conditionné par la foi, donc la persévérance est également conditionnée[133]. Arminius croyait que les Écritures enseignent que les croyants sont gracieusement investis du pouvoir du Christ et du Saint-Esprit « pour lutter contre Satan, le péché, le monde et leur propre chair, et pour remporter la victoire sur ces ennemis »[134]. En outre, Christ et l'Esprit sont toujours présents pour aider et assister les croyants à travers diverses tentations. Néanmoins, cette sécurité n'est pas inconditionnelle mais conditionnelle : « pourvu qu'ils [les croyants] soient préparés pour la bataille, implorent son aide et soient persévérants, Christ les préserve de la chute »[135][136].
Arminius croyait qu'un croyant peut apostasier (abandonner le Christ en s'attachant à nouveau à ce monde diabolique, en perdant une bonne conscience ou en ne gardant pas une saine doctrine). Pourtant sur la période de temps ou il s'exprima sur ce sujet[137], il le fit parfois avec circonspection par égards pour la foi de ses lecteurs[138]. Par exemple, en 1599 il déclara que cette question devait être approfondie dans les Écritures[139]. Arminius a aussi déclaré dans sa « Déclaration de sentiments » (1607) : « Je n'ai jamais enseigné qu'un vrai croyant peut, totalement ou finalement, se détourner de la foi et périr; cependant, je ne cacherai pas qu'il existe des passages de l'Écriture qui me paraissent revêtir cet aspect, et les réponses que j’ai pu considérer ne sont pas de nature à s’approuver sur tous les points, selon ma compréhension[140]».
Néanmoins dans ses autres écrits, il exprima sa certitude concernant la possibilité d'apostasie : Arminius écrivit en ca. 1602 « qu'une personne qui est « intégrée » à l'église du Christ peut résister à la suite du processus». S'agissant des croyants il dit : « Il peut suffire de les encourager dans cette connaissance qu'aucun pouvoir ni aucune intelligence ne peuvent les déloger du rocher, à moins qu'ils ne renoncent de leur plein gré à leur position[141][142]. » Il continua en disant que l'alliance de Dieu (Jérémie 23) « ne contient pas en soi une impossibilité de se soustraire à Dieu, mais une promesse du don de la crainte, qui les empêchera de s'éloigner de Dieu aussi longtemps que celle-ci sera dans leur cœur[143]. » Il a ensuite enseigné que si le roi David était mort dans ses péchés, il aurait été perdu[144][120]. En 1602, Arminius écrivit que « Un membre croyant du Christ peut devenir paresseux, céder au péché et mourir progressivement, cessant d'être un membre[145]. »
Pour Arminius, certaines classes de péchés sont capables de faire chuter un croyant, en particulier le péché motivé par la malice[120],[146]. En 1605, Arminius écrivit : « Mais il est possible pour un croyant de tomber dans un péché mortel, comme on le voit avec David. Par conséquent, il peut tomber et à ce moment s'il mourrait, il serait condamné »[147]. Stanglin et McCall, soulignent qu'Arminius énonça clairement deux voies vers l'apostasie : 1. le « rejet », ou 2. le « péché malicieux »[148][120]. Bangs observe que, pour Arminius, « à proprement parler, il est impossible pour un croyant de déchoir » mais « il peut être possible pour un croyant de cesser de croire »[149]. Oropeza conclut que, selon Arminius, l'apostasie est finalement possible[150].
Après la mort d'Arminius en 1609, ses partisans écrivirent une Remontrance (1610) en se basant assez littéralement sur la « Déclaration de sentiments » de leur chef (1607) qui exprimait la prudence sur la possibilité d'apostasie[151]. En particulier le cinquième article indiquait la nécessité d'une étude plus approfondie sur cette question[152],[153]. Cependant, entre 1610 et la procédure officielle du Synode de Dordrecht (1618), les remontrants furent eux-mêmes pleinement convaincus que les Écritures enseignent que le vrai croyant est capable de se détacher de la foi et de périr éternellement en tant qu'incroyant. Ils formalisèrent leurs points de vue dans l'Opinion des remontrants (1618) qui fut leur position officielle durant le Synode de Dordrecht[154],[155]. Picirilli a déclaré: « Depuis cette époque, alors que la question fut de nouveau examinée, les arminiens enseignèrent que ceux qui sont vraiment sauvés doivent être mis en garde contre l'apostasie en tant que danger réel et possible[156]. » Plus tard, ils exprimèrent cette même position dans la Confession de foi des remontrants (1621)[157].
Stanglin souligne qu'Arminius soutenait que si l'apostasie provient d'un péché « malveillant », alors elle est pardonnable[120],[158]. Par contre si elle provient d'un « rejet » elle ne peut l'être[159]. Les remontrants, suivant Arminius, croyaient que l'apostasie n'est pas irrémédiable en général[160]. Toutefois, d'autres arminiens classiques tels les baptistes libres enseignent que l'apostasie est irrémédiable[161][162].
John Wesley était entièrement d'accord avec la grande majorité de ce qu'Arminius enseignait[34]. L'arminianisme wesleyen est de l'arminianisme classique additionné du perfectionnisme wesleyen[163][164]. On mentionne ci-après les positions de l'arminianisme wesleyen sur certains sujets spécifiques :
Steven Harper a proposé l'idée que l'expiation de Wesley serait un hybride de la théorie de la substitution pénale et de la théorie gouvernementale[165]. Toutefois, selon Olson, Forlines et Wood, Wesley croyait en la substitution pénale de l'expiation[166][167][168]. Historiquement, les arminiens wesleyens ont pu adopter soit la théorie gouvernementale, soit la théorie pénale de l'expiation[169].
Wesley a pleinement accepté le point de vue arminien selon lequel les véritables chrétiens pouvaient apostasier et perdre leur salut, comme le montre clairement son célèbre sermon A Call to Backsliders. Harper résume cela comme suit : « L'acte de pécher n'est pas en soi un motif de perte du salut […] La perte du salut est beaucoup plus liée à des expériences profondes et prolongées. Wesley voit deux voies principales qui pourraient entraîner une chute permanente de la grâce : péché non confessé et expression réelle de l'apostasie[170]. » Wesley croyait que cette apostasie n'est pas irrémédiable. En parlant de ceux qui « ont fait naufrage par rapport à la foi » (1 Ti 1:19), Wesley affirme que « pas un, ou cent seulement, mais je suis persuadé, que plusieurs milliers […] innombrables sont les exemples […] de ceux qui étaient tombés mais se tiennent maintenant debout[171]. »
Le position qui typifie l'arminianisme wesleyen est la perfection chrétienne : Selon l'enseignement de Wesley, les chrétiens pourraient atteindre dans cette vie, un état de perfection pratique, c'est-à-dire une absence de tout péché volontaire par l'aide du Saint-Esprit. La perfection chrétienne (ou la sanctification entière), selon Wesley, est « la pureté de l'intention, consacrant toute la vie à Dieu » et « la pensée qui était en Christ, nous permettant de marcher comme le Christ a marché ». « Elle consiste à aimer Dieu de tout notre cœur et notre prochain comme nous-mêmes[172]. » C'est « un retour non seulement à la faveur, mais également à l'image de Dieu », notre « être rempli de la plénitude de Dieu »[173]. Il était clair pour Wesley que la perfection chrétienne n'implique pas la perfection de la santé physique ou une infaillibilité de jugement. Cela ne signifie pas non plus que l'on ne viole plus la volonté de Dieu, car des transgressions involontaires subsistent. Les chrétiens perfectionnés restent soumis à la tentation et ont toujours besoin de prier pour obtenir le pardon et la sainteté. Ce n'est pas une perfection absolue mais une perfection en amour. En outre, Wesley n’enseigna pas le salut par la perfection, mais dit que « même la sainteté parfaite n’est acceptable pour Dieu que par Jésus-Christ »[174].
L'opinion arminienne majoritaire est que l'élection est individuelle et basée sur la connaissance anticipée de la foi par Dieu. Selon la perspective de l'élection collective, Dieu n'a jamais choisi d'individus en vue du salut, mais plutôt Il a choisi d'élire pour le salut l'église qui croit[175]. Jésus était le seul humain jamais élu et les individus doivent être « en Christ » (Eph 1:3-4) par la foi pour faire partie des élus[176][177]. L'élection collective s'appuie sur un concept similaire définis dans l'Ancien Testament et dans la loi juive. L'identité découlait plus de l'appartenance à un groupe que de l'individualité[178].
Le pélagianisme est une doctrine qui nie le péché originel et sa conséquence de la dépravation totale. Ceci n'est pas le cas de l'arminianisme, que cela soit celui d'Arminius ou de Wesley[179]. Arminius affirme que l'état fondamental de l'homme est tel qu'il ne peut pas être juste, comprendre Dieu ou chercher Dieu[180]. Arminius a notamment déclaré : « Dans son état pécheur, l’homme n’est pas capable, par lui-même, de penser, vouloir ou faire ce qui est vraiment bon[181]. », « Je tiens l’énoncé suivant comme étant faux : « Si un homme le veut, il peut croire ou ne pas croire. » Si mes détracteurs supposent que je possède des opinions dont on peut déduire cette affirmation, pourquoi ne citent-ils pas mes propres mots ? »[182]. En fait, Arminius a qualifié le pélagianisme de « grand mensonge » et a déclaré « que je déteste de tout mon cœur les conséquences [de cette théologie] »[183]. Le pasteur britannique David Pawson qualifie l'association de la doctrine d'Arminius au pélagianisme de « diffamatoire »[184], et la plupart des arminiens rejettent toutes accusations de pélagianisme[185][186].
Le semi-pélagianisme, qui enseigne que la première étape du salut est le fait de la volonté humaine[187], a pu être confondu avec de l’arminianisme. Néanmoins, l'arminianisme classique et wesleyen considèrent que la première étape du salut est uniquement le fait de la grâce prévenante de Dieu, bien que la grâce subséquente procède d'une relation de coopération[188][189].
Les deux systèmes du calvinisme et de l'arminianisme partagent à la fois de nombreuses doctrines, ainsi que l'histoire de la théologie chrétienne. L'arminianisme est historiquement lié au calvinisme. Cependant, en raison de leurs différences sur les doctrines de la prédestination et de l'élection divines, plusieurs voient ces écoles de pensée comme opposées. Beaucoup considèrent ces différences doctrinales comme cruciales, tandis que d'autres les trouvent relativement mineures[190].
La doctrine du théisme ouvert affirme que Dieu est omniprésent, omnipotent et omniscient, mais diffère de l'arminianisme quant à la nature de l'avenir. Les théistes ouverts affirment que l'avenir n'est pas complètement déterminé (ou « réglé ») parce que les gens n'ont pas encore pris leur libre décision. Dieu connaît donc l'avenir en partie en termes de possibilités (actions libres de l'homme) plutôt que seulement en certitudes (événements divinement déterminés)[191]. Certains arminiens, tels que le professeur et théologien Robert Picirilli, rejettent la doctrine du théisme ouvert en tant qu' « arminianisme déformé »[192]. Joseph Dongell a déclaré que « le théisme ouvert va effectivement au-delà de l'arminianisme classique, vers la théologie du processus »[193]. Il y a aussi des arminiens, comme Roger Olson, qui croient que le théisme ouvert est une vision alternative qu'un chrétien peut avoir[194].
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