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L'expression « équilibre sylvocynégétique » désigne, dans le vocabulaire francophone commun aux forestiers et chasseurs, le stade où les populations d'herbivores ou omnivores (sauvages et susceptibles d'endommager les arbres, les plantes ou d'en consommer excessivement les graines ou propagules) permettent la régénération naturelle et durable de la forêt.
Les orientations régionales forestières de lorraines (ORF) le définissent comme :
Pour intégrer les notions de dégât du gibier et les relations entre forêt et milieux ruraux périphériques, on parle aussi parfois d'équilibre agrosylvocynégétique, que les acteurs des milieux où agriculture, sylviculture et chasse coexistent peuvent rechercher[2],[3].
Dans de nombreuses régions européennes, la quantité d'ongulés a significativement ou beaucoup augmenté au cours du XXe et début du XXIe siècle, suscitant localement l'inquiétude des forestiers et des agriculteurs (cf dégâts du gibier) ou une augmentation du risque de collision avec des véhicules. Uniquement porter l'accent sur le contrôle de la population (par la chasse par exemple) ne fait cependant "que négliger d'autres facteurs sous-jacents susceptibles de renforcer le conflit entre la faune sauvage et la foresterie" insiste le chercheur en foresterie D. Kuijper (2011)[4].
En France, la loi (via le Code forestier) demande aux forestiers de décliner ce concept d'équilibre à trouver entre population d'herbivores et d'arbres dans la directive régionale d'aménagement, qui - en tenant compte des orientations régionales forestières (ORF) et des textes nationaux et internationaux en vigueur, et de « l'objectif de compétitivité de la filière de production » doit identifier « les grandes unités de gestion cynégétique pertinentes pour chacune des espèces de gibier faisant l'objet d'un plan de chasse en application de l'article L. 425-2 du code de l'environnement ; pour chacune de ces unités, elle évalue l'état d'équilibre entre les populations d'animaux et les habitats forestiers et son évolution prévisible au regard de chaque grande option sylvicole régionale, en examinant notamment l'évolution prévisible des surfaces sensibles aux dégâts. Elle définit, le cas échéant, les modalités de mise en place d'un observatoire du renouvellement des peuplements ».
En France : La loi précise « Le développement durable des forêts implique un équilibre sylvocynégétique harmonieux permettant la régénération des peuplements forestiers dans des conditions économiques satisfaisantes pour le propriétaire. Cet équilibre est atteint notamment par l'application du plan de chasse défini aux articles L. 425-1 à L. 425-4 du code de l'environnement, complété le cas échéant par le recours aux dispositions des articles L. 427-4 à L. 427-7 dudit code » Art. L. 1er de la Loi d'orientation sur la forêt 2001)[5].
Il s'agit d'un équilibre dynamique, souvent précaire, surtout dans les cas où les animaux sont alimentés (agrainage).
Une des difficultés est d'anticiper l'évolution des populations de cervidés, et le taux de prélèvement qui sera assuré par les chasseurs, en l'absence de grands prédateurs naturels.
La chasse est une source de revenus financiers (usufruit) parfois importants pour le forestier, mais en l'absence de grands carnivores ou lorsque ceux-ci sont devenus très rares, et lorsque certaines conditions favorisent des pullulations d'individus (agrainage excessif (« nourrissage »), nourriture abondante dans les champs jouxtant les forêts, plans de chasse favorisant les femelles et la reproduction, etc.) des espèces herbivores peuvent devenir assez abondantes pour mettre en péril la "bonne" régénération (régénération naturelle ou artificielle) de la forêt.
La notion d'« équilibre sylvocynégétique » est relative au massif et à sa vulnérabilité, et au « taux de perte acceptable » par le forestier. Habituellement, en cas de forte pullulation, des mécanismes de régulation de type épidémie apparaissent, mais éventuellement alors que des dégâts significatifs sont déjà mesurés sur les arbres.
Les référentiels d'écocertification forestières intègrent notamment cette préoccupation (recommandation, dans le cas de PEFC, obligation pour le FSC)
Les espèces les plus concernées sont en Europe de l'Ouest :
et moindrement :
Pour des raisons parfois diverses, dans plusieurs massifs ou régions d'Europe les populations d'ongulés et de cervidés en particulier (cerf/chevreuil) ont nettement augmenté[6]. C'est un phénomène aussi constaté en zone tempérée nord-américaine[7],[8] et en Nouvelle-Zélande[9]. Les hivers plus doux et des changements dans les pratiques de gestion sylvicole et cynégétique sont souvent cités comme causes de ce changement[10], ainsi que des modifications des règles de gestion[11], des modifications des pratiques sylvicoles[12]) de même que certains changements dans les pratiques et paysages cultivés[13].
Une autre cause est que ces grands herbivores sont revenus dans les forêts, mais généralement sans les grands prédateurs qui les controlaient autrefois ; or ces derniers ont deux effets régulateurs : la prédation directe, mais aussi un effet indirect qui est d'entretenir un contexte de peur et d'alerte permanente chez les proies, qui passent donc moins de temps à se nourrir et plus à fuir ou à se cacher.
La conséquence de la dynamique de population des cervidés (cerfs notamment) et sangliers est que la régénération forestière ou le succès des plantations sont freinés voire localement stoppés[14],[15],[16] , [17]) avec un déclin des espèces les plus appétentes pour ces herbivores, parfois au détriment de la diversité spécifique des arbres[14],[16] et de la flore herbacée[18], ce qui peut secondairement aussi affecter d'autres espèces, d'oiseaux par exemple[19] ou encore de certains micromammifères[20].
Ce phénomène augmente les coûts de régénération forestière (obligation de pose de grillage ou protections individuelles pour chaque plant). Selon Milner et al. 2006 diminuer le nombre de ces herbivores ne suffit pas. Il faut aussi mieux comprendre ce qui les favorise dans la gestion forestière contemporaine[11].
Face à la situation insoutenable d'un déséquilibre patent en France, le Premier ministre Édouard Philippe confie, en , au député Alain Péréa associé au sénateur Jean-Noël Cardoux, président du groupe d'études « chasse et pêche » du Sénat, une mission destinée à réguler des populations de grand gibier et à réduire de leurs dégâts[21]. En , les parlementaires remettent leur rapport[22] Après avoir dressé un état des lieux, ils ont fait les propositions suivantes :
La loi du portant création de l’Office français de la biodiversité, modifiant les missions des fédérations départementales des chasseurs et renforçant la police de l’environnement, a pris en compte certains résultats de la mission Péréa-Cardoux. Un projet de décret d’application de cette loi a été étudié en par un groupe de travail associant les différentes structures agricoles, cynégétiques et forestières. Il présente des mesures règlementaires sur[23] :
Le projet de décret a fait l'objet d'une consultation publique durant 3 semaines à partir de mi- qui a suscitée une très abondante participation de près de 28 000 commentaires[23].
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