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La notion de trahison de l'Ouest se définit, dans une partie de l’historiographie des pays d'Europe centrale et orientale, de la Grèce, de Chypre et des pays de la Méditerranée orientale, en réaction à l’évolution de la politique étrangère de l'Occident.
Cette perception d’une « trahison », dont les pays d’Europe centrale et orientale et de Méditerranée orientale se ressentent comme « victimes », puise à plusieurs sources :
Cette notion de « trahison de l’Ouest » pourrait se définir par la formule « quand ils n’ont plus eu besoin de nous, ils nous ont abandonnés à la tyrannie »[7]. Il n’en demeure pas moins que cette « trahison » est moins l’effet d’une politique planifiée des Occidentaux que d’une perception a posteriori de décisions souvent prises dans l’improvisation qui conduisirent à l’abandon des pays amis d’Europe centrale et orientale, considérés comme quantité négligeable[8].
Lors des conférences interalliées de Téhéran (-), de Moscou (le ), de Malte (du au ) et de Yalta (du 4 au ), fut décidé le déplacement vers l’ouest des frontières de la Pologne afin que l’URSS puisse garder les territoires polonais obtenus par le pacte germano-soviétique. Le gouvernement polonais en exil à Londres n’en fut ni informé ni consulté. On ne précisa pas les nouvelles frontières de la Pologne, les Britanniques pour éviter les protestations du gouvernement polonais et les Américains pour ne pas choquer les Américains d’origine polonaise. Après la conférence, des fuites révélèrent que Britanniques et Américains avaient consenti à valider les frontières obtenues par Staline au pacte germano-soviétique. Anthony Eden (devant la Chambre des Communes le ) et Roosevelt (devant le Congrès le ) se livrèrent à des dénégations mensongères[9]. De plus, la frontière orientale de la Pologne fut, comme annoncé, calée non sur la véritable ligne Curzon de 1919, qui laissait Lwow à la Pologne (ligne surnommée par les Soviétiques « ligne Curzon B »), mais sur un tracé nommé « ligne Curzon A » proche du tracé germano-soviétique de 1939 et donnant Lwow à l’URSS.
Plus symboliquement mais non moins douloureusement pour les Polonais, les membres de l’Armée polonaise de l'ouest ne furent pas invités à participer au défilé de la Victoire à Londres le . Du point de vue polonais, la Pologne a été traitée comme si elle avait été un ennemi des Alliés[10], ce qui pèsera sur l’évolution ultérieure du pays, d’autant que durant la dictature communiste et notamment pendant le long combat du syndicat Solidarność contre cette dictature, le seul soutien extérieur clairement affirmé est venu de la papauté, alors assumée par un Polonais, Karol Wojtyla.
En Yougoslavie, concernant les opérations dans les Balkans occupés, Winston Churchill annonça à Staline son intention de soutenir les partisans communistes, dirigés par Tito, plutôt que le groupe légitimiste des Tchetniks, dirigés par Draža Mihailović et obéissant au Gouvernement yougoslave en exil à Londres. Churchill avait pris cette décision sur la base de rapports qui concluaient que les partisans infligeraient aux Allemands bien plus de dommages que les Tchetniks[11],[12] (dont des groupes dissidents, en Bosnie-Herzégovine, en Croatie et en Dalmatie, distincts de ceux de Mihailović, collaboraient parfois avec les occupants pour combattre les communistes) et sans se douter que ces rapports exagéraient largement le nombre des groupes dissidents et minimisaient les forces de Mihailović.
En effet, ces rapports étaient falsifiés par les « Cinq de Cambridge » (un groupe d’agents de renseignement britanniques du SIS travaillant en fait pour le NKVD stalinien)[13]. Mihailović et ses hommes, qui avaient déjà payé un lourd tribut à la répression allemande, furent tués ou mis au travail forcé dans les camps du régime yougoslave titiste. Le gouvernement légitime, réfugié à Londres, se trouva abandonné et de nombreux membres n’eurent plus qu’à demander l’asile politique, qui ne leur fut accordé qu’à la condition de leur silence[14].
Enfin, les orthodoxes ex-yougoslaves eurent le sentiment qu’après 1991, au lieu d'exiger une transition démocratique pacifique, l'Occident encouragea, sous peine de sanctions économiques, la dislocation violente de la Yougoslavie, déclara les Serbes « seuls agresseurs » et livra des armes aux indépendantistes catholiques (en Slovénie, Croatie et Bosnie-Herzégovine) et musulmans (en Bosnie-Herzégovine et au Kosovo)[15].
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