En 1952, Nono rejoint le Parti communiste italien (PCI)[1]. Son engagement communiste, en réalité marqué par le communisme révolutionnaire, ne sera ébranlé que par les événements de mai 1968 qui conduiront à la radicalisation de certains groupes d'extrême gauche, passant à l'action terroriste.
En mars 1954, Nono rencontre Nuria Schönberg, la fille d'Arnold Schönberg, à Hambourg où il assiste à la première mondiale, en version concertante, de l'opéra Moïse et Aaron du compositeur autrichien disparu trois ans auparavant. Nono épouse Nuria en 1955. Le couple aura deux filles:
Silvia, née en 1959, traductrice, ex-compagne du metteur en scène Nanni Moretti et mère de son fils Pietro
Serena Bastiana, née en 1964, sculptrice et peintre.
Nono et sa famille s'installent sur l'île de Giudecca (Venise) en 1956.
De 1950 à 1960, Nono participe à l’Internationale Ferienkurse für Neue Musik (Université d'été internationale pour la nouvelle musique) à Darmstadt, qui lui permet de rencontrer notamment Edgar Varèse et Karlheinz Stockhausen. D'abord étudiant, il enseignera avec Maderna à partir de 1956. Les œuvres de cette première période comprennent: Polifonica-Monodica-Ritmica (1950), Epitaffio per Federico García Lorca (1952-1953), La victoire de Guernica (1954) et Liebeslied («Chant d'amour», 1954). En 1954, Nono participe à un colloque sur les nouvelles techniques de composition au Elektroakustische Experimentalstudio fondé par Hermann Scherchen à Gravesano. Il rejette progressivement l'approche analytique du sérialisme pour préserver l'intégrité du phénomène musical: Incontri («Rencontres», 1955), Il canto sospeso («Le Chant suspendu», 1956) et Cori di Didone («Chœurs de Didon», 1958). À Darmstadt en 1959, sa conférence Presenza storica nella musica d’oggi («Présence historique dans la musique d'aujourd'hui») est violemment controversée et provoque sa rupture avec Stockhausen.
Sa musique d'avant-garde est aussi l'expression d'une révolte contre la culture bourgeoise, concrétisée par son engagement communiste révolutionnaire. Il évite d'ailleurs la plupart des concerts traditionnels, auxquels il préfère l'opéra et la musique à l'usine. Il a fréquemment recours aux textes politiques dans ses œuvres, qui sont souvent ouvertement politiques. Ainsi, Il canto sospeso s'élabore sur les lettres de victimes de l'oppression durant la Seconde Guerre mondiale et lui vaut une renommée internationale. Cette connotation politique se retrouve également dans La fabbrica illuminata («L'Usine illuminée», 1964), Ricorda cosa ti hanno fatto ad Auschwitz («Rappelle-toi ce qu'ils t'ont fait à Auschwitz», 1966), Non consumiamo Marx («Ne consommons pas Marx», 1969), Ein Gespenst geht um in Europa («Un spectre hante l'Europe», 1971, allusion directe à Karl Marx et au début du Manifeste du parti communiste), Siamo la gioventù del Vietnam («Nous sommes la jeunesse du Vietnam», 1973), et le fameux Al gran sole carico d'amore («Au grand soleil chargé d'amour», 1975). Nono met également en musique des textes ou de la poésie, notamment de Cesare Pavese, Federico García Lorca, Pablo Neruda ou Paul Éluard.
Dès 1954, Nono s'intéresse à la musique électronique. Ses premières compositions incluant un travail sur bande magnétique datent du début des années 1960, avec Omaggio a Vedova, pour bande magnétique en 1960 et Intolleranza 1960 pour solistes, chœur, chœur sur bande magnétique et orchestre en 1961. Il écrira plus tard notamment Como una ola di fuerza y luz pour soprano, piano, orchestre et magnétophone (1972), ... sofferte onde serene... pour piano et magnétophone (1976), ou encore Al gran sole carico d'amore.
Après 1980, Nono travaille au Experimentalstudio der Heinrich Strobel-Stiftung des Südwestfunks à Fribourg-en-Brisgau où il se tourne alors résolument vers la musique électronique en direct ou aléatoire. Il s'intéresse particulièrement aux propriétés du son en tant que tel. Cette nouvelle approche se traduit par des œuvres telles que Quando Stanno Morendo. Diario polacco no2 (1982), Guai ai gelidi mostri (1983), Omaggio a György Kurtág (1983) et avec éclat dans son dernier opéra Prometeo. Tragedia dell'ascolto (1984).
Variazioni canoniche sulla serie dell’op. 41 di Arnold Schönberg, pour orchestre, 1949
Sarà dolce tacere («Ce sera un doux silence»), chant pour 8 solistes, d'après «La terra e la morte» de Cesare Pavese, 1960
«Ha venido». Canciones para Silvia, pour soprano et chœur de 6 sopranos, 1960
Omaggio a Vedova («Hommage à Vedova»), pour bande magnétique, 1960
Intolleranza 1960, action en deux tableaux d'après une idée d'Angelo Maria Ripellino, pour solistes, chœur, chœur sur bande magnétique et orchestre, 1961
Canti di vita e d’amore: Sul Ponte di Hiroshima, pour soprano, ténor et orchestre, 1962
Canti di vita e d’amore :Djamila Boupacha: monodie a cappella pour soprano solo
Canciones a Guiomar, pour soprano, chœur de femmes à 6 voix et instruments, 1963
Musique de scène pour Die Ermittlung de Peter Weiss, pour bande magnétique, 1965
Ricorda cosa ti hanno fatto in Auschwitz, pour bande magnétique, 1966
A floresta é jovem e cheja de vida, pour soprano, 3 voix récitantes, clarinette, feuille métallique et bande magnétique, sur un texte de Giovanni Pirelli, 1966
Per Bastiana - Tai-Yang Cheng, pour bande magnétique et orchestre en 3 groupes, 1967
Contrappunto dialettico alla mente, pour bande magnétique, 1968
Musica - Manifesto no1: Un volto, del mare pour soprano, voix récitante et bande magnétique, sur un texte de Cesare Pavese 1969
Musica-manifesto no2: Non consumiamo Marx, pour bande magnétique, 1969
Musiche per Manzù (musique de film), bande magnétique, 1969
Suite de concert de l’Intolleranza 1960, pour soprano, chœur et orchestre, 1969
Como una ola di fuerza y luz, pour soprano, piano, orchestre et bande magnétique, 1972
Siamo la gioventù del Vietnam, pour chœur à une voix, 1973
Per Paul Dessau, pour bande magnétique, 1974
Al gran sole carico d'amore («Au grand soleil d'amour chargé»), action en deux tableaux(entré au répertoire de l'opéra), pour solistes, grand chœur et petit chœur, orchestre et bande magnétique, 1975
...sofferte onde serene..., pour piano et bande magnétique, 1976
Fragments de Al gran sole carico d'amore pour solistes, chœur, orchestre et bande magnétique, 1976
Con Luigi Dallapiccola, pour 6 percussionnistes, quatre tourne-disques, trois modulateurs en anneau et amplification, 1979
¿Donde estàs, hermano?, pour 2 soprani, une mezzo-soprano et une contralto, 1982
Omaggio a György Kurtág, pour contralto, flûte, clarinette, tuba et électronique, 1983
Guai ai gelidi mostri, pour 2 contralti, flûto, clarinette, tuba, alto, violoncelle, contrebasse et électronique, sur un texte de Massimo Cacciari, 1983
Prometeo. Tragedia dell'ascolto, pour 2 soprani, 2 contralti, ténor, 2 voix récitantes, flûte basse, clarinette contrebasse, trombone, alto, violoncelle, contrebasse, 2 joueurs de verres, chœur de solistes, 4 groupes orchestraux et électronique, 1984
A Carlo Scarpa, architetto, ai suoi infiniti possibili, pour orchestre à microintervalles, 1984
A Pierre. Dell'azzurro silenzio, inquietum, flûte basse, clarinette contrebasse et électronique, 1985
Risonanze erranti. Liederzyklus a Massimo Cacciari, pour mezzosoprano, flûte basse, tuba, percussions, et électronique, 1986
No hay caminos, hay que caminar... Andrei Tarkovski, pour 7 groupes instrumentaux et vocaux, 1987
Caminantes... Ayacucho, pour contralto, flûte basse, orgue, 2 chœurs, orchestre (en trois groupes) et électronique, sur un texte de Giordano Bruno, 1987
Découvrir la subversion. Hommage à Edmond Jabès (composition incomplète), pour contralto, basse, voix récitante, flûte, cor, tuba et dispositif électro-acoustique, 1987
Post-prae-ludium no1 «per Donau», pour tuba en fa et électronique, 1987
La lontananza nostalgica utopica futura. Madrigale per più caminantes con Gidon Kremer, pour violon solo et huit bandes magnétiques, 1988
Post-prae- ludium no3 «BAAB-ARR» (composition incomplète), pour flûte piccolo et électronique, 1988
«Hay que caminar», soñando, pour 2 violons, 1989
Le Quatuor des Possibles (1992), film documentaire d'Edna Politi, qui évoque en particulier la composition du Quatuor Fragmente-Stille an Diotima de Luigi Nono.
Martine Cadieu, Présence de Luigi Nono, Paris, éditions Promusica, 1995, 187 p.