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{{Ébauche|judaïsme|Islam|christianisme|Proche-Orient ancien}} La date de naissance de Jésus est une question sur laquelle existent peu de données, la difficulté principale venant de ce que les sources dont nous disposons semblent inconciliables.
Pour commencer, les récits de l'enfance issus des évangiles canoniques contiennent des indications chronologiques bien difficiles à harmoniser. Les historiens les abordent donc avec beaucoup de prudence, car selon eux ils ne contiennent que très peu de données historiques. Une autre indication à mettre au dossier est l'information que Jésus serait encore vivant alors qu'il approchait de la cinquantaine. Cette information est donnée à deux reprises par Irénée de Lyon, mais on la trouve aussi dans l'évangile selon Jean. Par calcul, cela donne une date de naissance elle aussi inconciliable avec les autres.
La plupart des historiens admettent que la date de naissance de Jésus « n'est pas connue avec précision ».
Cependant, elle détermine en principe le début de l'ère commune, sur la base des calculs de Denys le Petit au VIe siècle pour déterminer l'Anno Domini; c'est une des raisons pour laquelle la question est demeurée largement débattue.
Une majorité d'auteurs, souvent théologiens, essayent néanmoins d'harmoniser les éléments contradictoires, et situent généralement la naissance de Jésus dans les dernières années du règne d'Hérode Ier le Grand, mort en 4 av. J.-C.. Ils rejoignent ainsi la Tradition chrétienne.
Il ne reste de la première de ces sources que le résultat du calcul de Denys le Petit. En l'an 525, il fonda l'usage de compter les années à partir de l'incarnation (25 mars) et de la naissance (25 décembre) de Jésus-Christ, qu'il plaça à l’année 753 de Rome[1] (c'est-à-dire l'année -1 du calendrier actuel). C'est sur ce calcul que se fondent aujourd'hui les calendriers de l'ère chrétienne, devenue ère commune. Les auteurs qui veulent harmoniser les indications en notre possession estiment souvent que Denys le Petit s'est contenté de soustraire les 30 ans supposés de Jésus un an après le début de la prédication de Jean le Baptiste et en resta là. Toutefois, on ne connaît rien de la méthode qu'il a effectivement utilisée et Denys étant un érudit qui avait été choisi par le pape pour résoudre des problèmes complexes, il serait étonnant qu'il n'ait pas tenté de se référer aux sources, notamment en arménien, mais bien sûr aussi en grec et en latin qui étaient encore disponibles à l'époque.
Viennent ensuite les récits de l'enfance de Jésus, qui ont été ajoutés au début des évangiles de Matthieu et Luc, qui « posent de nombreux problèmes littéraires et historiques, tant leur écriture apparaît tardive, relevant plutôt du merveilleux à la manière des récits d'enfance du monde judéo-hellénistique[2] », et qui donnent des indications chronologiques imprécises et contradictoires.
Ces évangiles de l'enfance sont écrits environ une génération après l'écriture des évangiles dont la rédaction s'étale d'environ 65-70 jusqu'à 115. Avec l'évangile appelé Nativité de Marie, mais rebaptisé protévangile de Jacques il y a trois évangiles de l'enfance, tous trois ont été écrits de façon indépendante[3], probablement par des judéo-chrétiens dans le même but principal, essayer de réfuter les arguments de leurs détracteurs juifs, pour qui des éléments de la naissance de Jésus rendaient impossible qu'il soit le Messie annoncé. Si l'on excepte les apparitions de Jésus après sa résurection, notamment pour l'évangile selon Marc, les récits de l'enfance constituent la part la plus tardive des évangiles canoniques[3]. Ils sont construits sur le modèle d'autres traditions (celle de la naissance de Moïse pour Matthieu, celles de la naissance de Jean le Baptiste et de l'enfance de Samuel dans l'ancien Testament pour Luc). Néanmoins pour le théologien J. A. Fitzmeyer, ils semblent utiliser certains détails remontant à des traditions chrétiennes antérieures, et certains de ces détails sont communs aux deux évangiles[3]. Ce sont dans ces détails communs que certains auteurs recherchent des éléments historiques, sur la base du critère d'historicité d'attestation multiple dans des sources littérairement indépendantes[3]. En revanche, des historiens spécialistes de l'histoire des religions comme François Blanchetière émettent les plus sérieux doutes sur la possibilité de parvenir à trouver des éléments historiques dans ces récits[4].
Depuis longtemps les critiques ont noté les contradictions et les invraisemblances des deux récits de la naissance de Jésus des évangiles canoniques. Ceux-ci sont non seulement différents mais inconciliables. Tous deux situent cette naissance à Bethléem (pour que la prophétie du prophète Michée soit accomplie)[5].
L'évangile selon Jean appartient donc à la génération précédant la rédaction des évangiles de l'enfance. Il est réputé respecter beaucoup plus fidélement la chronologie et les localisations géographiques que les trois autres évangiles canoniques dit synoptiques[6]. Bien que comme les autres évangiles canoniques, il ait l'apparence d'une biographie, il ne faut surtout pas le prendre pour une biographie[7]. Néanmoins, les exégètes estiment qu'il contient des références historiques à la vie de Jésus évoquées symboliquement. Dans l'échange où Jésus est donné pour approcher la cinquantaine, aucune interprétation symbolique n'a sérieusement été émise.[réf. nécessaire]
L'évangile selon Luc fournit une indication sur l'âge de Jésus au début de sa prédication et sur le moment où celle-ci commence.
Il existe deux grandes catégories d'auteurs, la plus importante est constituée par ceux qui se fondant essentiellement sur les évangiles de l'enfance choisissent une date pour la naissance de Jésus et qu'ils placent traditionnellemnt à la fin du régne d'Hérode le Grand, c'est-à-dire quelques années avant -4.
La seconde catégorie constate que l'ensemble que les éléments fournis sont incompatibles et qu'il n'y a aucun critère qui permettet d'en éliminer pour arriver à une solution. Ces auteurs en concluent qu'il n'est pas possible de donner une date de naissance pour Jésus, ni même une fourchette suffisamment étroite pour qu'elle soit intéressante.
Rapidement, voici les éléments en leur possession et ceux qui sont retenus par chacun des deux groupes.
La datation de Denys le Petit (-1) est rejetée par le premier groupe, en disant qu'il s'est trompé, elle est presque d'aucune utilité au second, car se trouvant dans la partie centrale de la fourchette de datation.
Les évangiles de l'enfance sont retenus par les deux groupes. Les évangiles de l'enfance contenus dans les évangiles canoniques sont en général les seuls éléments retenus par le groupe qui se prononce pour une datation précise (avant -4).
L'évangile de Matthieu présente Jésus comme étant né « au temps du roi Hérode », sans plus de précision, c'est-à-dire avant 4 av. J.-C..
L'évangile selon Luc, quant à lui, présente les parents de Jésus se faisant recenser par les autorités impériales au moment de sa naissance. Le texte précise « Ce recensement, le premier, eut lieu pendant que Quirinius était gouverneur de Syrie[8] » Ce recensement est parfaitement connu et a dû laisser une empreinte dans les mémoires, en effet c'est à l'occasion de ce recensement que s'est déclenchée une grande révolte dirigée par Juda le Galiléen. Ce mouvement Galiléen donnera d'ailleurs par la suite naissance au mouvement Zélote. C'est le premier recensement, car avant 6 ap. J.-C., la Judée n'était pas une province romaine.
Les données en partie contradictoires fournies par les récits de l'Enfance ne suffisent pas à valider une date précise, mais d'autres indications sont données dans les évangiles sur l'âge de Jésus lors du début de sa prédication. Une indication du début de celle-ci est mentionnée dans deux évangiles en Luc 3,1-23 et Jean 2,20.
Selon Luc, Jean-Baptiste commence à baptiser « la quinzième année du règne de Tibère César » et Jésus a environ trente ans quand il se fait baptiser par lui au début de sa prédication. L'indication de date n'est pas si précise qu'il y paraît : en effet on ne sait quel comput était utilisé par Luc, et le début de règne peut désigner l'année où Tibère a été associé au pouvoir, ou celle où il a succédé seul à Auguste. Compte tenu de ces nuances, le début de la prédication de Jésus se situerait selon Paul Mattei entre 26 et 30[9].
L'évangile selon Jean permet également de situer la première montée de Jésus à Jérusalem par rapport à la date de construction du Temple d'Hérode.
« Jésus leur répondit : Détruisez ce temple, et en trois jours je le relèverai. Les Juifs dirent : Il a fallu quarante-six ans pour bâtir ce temple, et toi, en trois jours tu le relèveras ! Mais il parlait du temple de son corps. »
Pour Marie-Françoise Baslez, il s'agit d'un des meilleurs repères chronologiques, la date de pose de la première pierre du temple d'Hérode étant située en 19 av. J.-C. par Flavius Josèphe[10]. La première montée de Jésus à Jérusalem daterait donc de 27 ou 28[11]. Comme la plupart des historiens, elle ne voit pas dans ce passage d'indication de l'âge de Jésus lors de cet incident.
Irénée de Lyon au IIe siècle, interprète ce passage dans le sens où Jésus avait ou approchait la cinquantaine[12],[13]. Il écrit ainsi que Jésus « avait plus de cinquante ans, lorsqu'il enseignait » et que « il est mort proche de la cinquantaine, touchant à la vieillesse ». Bien que la formulation de ces deux phrases puissent sembler légèrement contradictoire, on peut en tout cas en déduire que pour lui Jésus a, au minimum, approché de la cinquantaine.
Mordillat et Prieur soulignent la réflexion « tu n'as pas encore cinquante ans et tu as connu Abraham »[14],[15]. Si l'on retient l'année 30 comme date de sa mort, qui est la date la plus fréquemment mentionnée Jésus serait alors né vers 20 av. J.-C..
L'évangile selon Luc fournit une indication supplémentaire, Jésus entame sa prédication à peu près ou juste avant l'arrestation de Jean le Baptiste, alors que celui-ci avait commencé sa prédication en « l'an quinze de Tibère César », ce qui correspond à l'an 28-29 (Luc 2,3)[15]. À ce moment là, Jésus d'après l'évangile de Luc est âgé d'« environ trente ans » (Luc 3,1)[7]. Cette indication flou est compatible avec certaines dates, mais incompatible par exemple avec le fait qu'il aurait pu vivre jusqu'à 50 ans, s'il meurt sous Ponce Pilate, qui est renvoyé « pour s'expliquer auprès de l'empereur » après la grosse faute qu'il a commise à la fin 36 ou plutôt au début 37.
Cette indication n'est pas vraiment utilisée par le groupe qui parvient à dater la naissance de Jésus, mais ellle n'est pas explicitement rejetée non-plus. Elle est bien-sûr utilisée par l'autre groupe.
Vu l'ampleur de l'écartement de la fourchette qui ressort des éléments fournis par les sources (-20) - (6 - 7 ap. J.-C.), il n'est pas possible de couvrir la totalité de la période. Ce qui suit ne présente donc la situation que depuis la fin du règne d'Hérode le Grand, jusqu'au recensement de Quirinius et la révolte de Juda le Galiléen (env. 6) - 7 ap. J.-C.). C'est de toute façon dans cette période -7 - +7 que convergent la plupart des indications chronologiques concernant la date de naissance de Jésus. La dernière indication, découlant de l'âge de 50 ans qu'aurait atteint Jésus s'expliquant peut-être par une autre cause qu'une naissance vers -20.
À la mort d'Hérode le Grand, le territoire de son royaume a été partagé par Auguste entre trois des fils d'Hérode ainsi qu'une de ses parentes. Hérode Philippe a obtenu pour sa part « la Batanée, avec la Trachonitide et l’Auranitide, une partie de ce qu’on appela le domaine de Zénodore[16] ». Une partie de ces territoires sont frontaliers de la Nabathée, un royaume lui aussi d'une certaine puissance et disposant surtout d'alliés auprès de tout un ensemble de petits royaumes administrés eux aussi par des Nabathéens.
Un grand nombre d'auteurs qui accordent implicitement plus d'importance aux évangiles qu'aux autres sources, essayent de les harmoniser sur cette question. Matthieu et Luc différent radicalement dans leurs structures narratives et dans leurs récits, et il est généralement considéré qu'ils ont été rédigés de façon indépendante[3]. S'ils sont construits sur le modèle d'autres traditions (celle de la naissance de Moïse pour Matthieu, celles de la naissance de Jean le Baptiste et de l'enfance de Samuel dans l'ancien Testament pour Luc), ils semblent utiliser certains détails remontant à des traditions chrétiennes antérieures, et certains de ces détails sont communs aux deux évangiles[3]. Ce sont dans ces détails communs que ces auteurs peuvent rechercher des éléments historiques, sur la base du critère d'historicité d'attestation multiple dans des sources littérairement indépendantes[3].
Ces auteurs abandonnent les données fournies par l'évangile selon Jean, et reprennent la tradition selon laquelle Denys le Petit se serait trompé. Cette démarche relève d'une volonté d'harmonisation des évangiles canoniques qui n'est pas spécifique aux données des évangiles de l'enfance, et qui s'applique aussi aux autres différences ou contradictions contenues dans les quatre évangiles du Nouveau Testament.
Cette méthode conduit ceux qui la retiennent à proposer un intervalle plus ou moins resséré de dates allant de 9 av. J.-C. à la mort d'Hérode le Grand, voire jusqu'à 2 av. J.-C.. Une préférence se dégage vers -7 - -5. Ce point de vue est conforme à une ancienne Tradition chrétienne, qui place cette naissance vers la fin du règne d'Hérode.
Si Matthieu indique clairement que Jésus est « né au temps du roi Hérode[17] »[18], Luc indique que c'est la naissance de Jean le Baptiste qui eu lieu « aux jours d'Hérode, roi de Judée[19] »[20],[21]. Toutefois, les auteurs qui recherchent une harmonisation des deux textes, notent que dans cet évangile Jésus naît seulement six mois après le Baptiste. Ils considèrent cette donnée suffisamment solide pour en conclure que Jésus est lui aussi né au temps d'Hérode.
Dans Matthieu, cette référence à Hérode se place dans le récit de la venue des rois mages, du massacre des Innocents, et de la fuite en Égypte. Chez Luc il se place dans le cadre d'un parallélisme entre les annonces miraculeuses, à six mois d'intervalle, des naissances de Jean le Baptiste et de Jésus. Hérode a régné sur la Judée de -37 à sa mort en -4[22].
Reste que l'évangile de Luc parle explicitement du recensement de Quirinius, qui est un événement dont la datation en 6 - 7 ap. J.-C. est très solide[20],[23].
Les partisans de l'harmonisation des données de ces deux évangiles émettent en général l'hypothèse que Quirinius aurait pu être deux fois légat de Syrie et aurait effectué les deux fois un recensement qui aurait aussi touché la Palestine. Ainsi, Daniel Rops remarque qu'une inscription trouvée à Ankara parle de trois recensements ayant eu lieu en -28, le suivant en -8 et le troisième en 14 ap. J.-C. En supposant que Quirinius fut deux fois Légat de Syrie, Daniel Rops se pose la question de savoir si Quirinus a pu procéder au recensement de -8. Toutefois, comme on dispose à cette date de la liste des légats de Syrie, et que Quirinus n'y figure pas, il suppose alors que celui-ci aurait pû être nommé une première fois Légat dans la période 4 - 1 av. J.-C., « moment où la liste des Légats en syrie que nous possédons a une interruption. Mais comme il le dit lui-même « -4 ce n'est pas -8 »[24]. ». Il suppose donc qu'il y eu encore un autre recensement situé entre -4 et -1, mais que celui-ci n'aurait pas été inscrit sur le marbre d'Ancyre[24]. Personne ne peut prouver qu'une telle chose est impossible. Néanmoins, force est de constater qu'il n'y a pas le moindre élément historique qui vient appuyer au moins une de ces suppositions.
Un autre problème demeure, c'est qu'à cette date c'est Hérode le Grand qui régne sur la Judée et la Galilée, et normalement l'empire romain n'a aucun pouvoir sur ces territoires pour y effectuer un recensement[25].
D'autres considèrent que le recensement de Quirinus n'est qu'un motif littéraire permettant de justifier la naissance de Jésus à Bethléem, ville de David. C'est le cas de Michael Grant (« Sa date de naissance devrait être réassignée entre 6 et 4 av. J.-C., bien que certains préfèreraient 11 ou 7 »)[26].
La datation qui résulte de ces suppositions est reprise par un très grand nombre d'auteurs, qui sont souvent théologiens. Ainsi pour John Paul Meier : « Jésus (Hébr. Yeshua‘) est né vers la fin du règne d’Hérode le Grand (dans les années 7 à 4 avant notre ère). Sa mère s’appelait Marie (Hébr. Miryam) et Joseph (Hébr. Yôseph) était le nom de son père. Il est peut-être né à Bethléem en Judée, la ville de David (Lc 2,4), mais plus vraisemblablement à Nazareth en Galilée, un bourg de campagne ignoré et isolé (Jn 1,46). Quel qu’ait été le lieu exact de sa naissance, c’est à Nazareth qu’il a grandi. »[27], Michel Quesnel : « on peut émettre l'hypothèse raisonnable qu'il naquit autour de 5 ou 6 avant notre ère »[18], Pierre Geoltrain : « ce qu'on peut avancer comme faits jalonnant la vie de Jésus se réduit à peu de choses. Juif de Palestine, né en 6 ou 7 avant notre ère, il a une trentaine d'année lorsqu'il apparaît dans le cercle des disciples de Jean Baptiste »[28].
Un certain nombre d'historiens estiment qu'il n'est pas possible de faire coïncider les données des évangiles de l'enfance, sans faire de nombreuses suppositions. Pour des auteurs comme Jacques Giri, qui ont fait le point sur les connaissances actuelles sur Jésus : au sujet de « la date de naissance, Matthieu et Luc sont incompatibles. En effet, Matthieu fait naître Jésus sous le règne du roi Hérode qui est mort en l'an -4, alors que, selon Luc, Jésus serait né au temps du recensement de Quirinius, lequel a eu lieu en 6 ou en 7[29]. ».
Pour ces auteurs, s'il fallait éliminer des données, ce serait justement celles fournies par les évangiles de l'enfance, car ceux-ci ont été écrits dans un tout autre but que de respecter l'histoire. En effet, les spécialistes s'accordent pour dire que les trois évangiles de l'enfance ont été écrits principalement pour répondre aux détracteurs juifs des nazôréens (les chrétiens d'origine juive). Ainsi,
Il s'agissait donc de répondre aux deux objections principales qui, pour les détracteurs juifs des nazôréens, prouvaient que Jésus ne pouvait pas être le Messie.
Pour ces auteurs, comme par exemple François Blanchetière « les récits relatifs à l'enfance de Jésus dont les fondements historiques sont loin d'être assurés doivent être abordés avec beaucoup d'acribie[4]. ».
Si donc on abandonne les récits de l'enfance, il reste entre autre :
Ces deux données seules sont déjà incompatibles. Plutôt que de multiplier des chaînes de supposition, il vaut donc mieux considérer que la date de naissance de Jésus est inconnue.
Il existe aussi des historiens, qui estiment que le recensement de Quirinius est une information à fort contenu historique. C'est par exemple le cas de l'historien et archéologue Gilbert Picard ou de Craig Alan Evans. Ils estiment donc que c'est sous Hérode Antipas et non Hérode le Grand que Jésus est né, vers l'an 6, année du début du recensement de Quirinius.
Gilbert Picard ne « comprends pas comment de nombreux auteurs ont pû écrire que l'évangile selon Luc place la naissance de Jésus sous Hérode le Grand », alors qu'il « ne parle de ce roi que dans son prologue[30], pour dire que les parents de Jean Baptiste, Zacharie et Élisabeth ont vécu sous son règne[31]. »
Il fait remarquer que son point de vue n'est pas nouveau, puisque déjà Michel Ginsburg[32], écrivait « sous le rapport fiscal, Hérode semble avoir joui de la plus grande indépendance que peut revendiquer un prince vassal[25]. » « Or si Rome avait procédé au recensement à l'époque d'Hérode, cette mesure administrative non seulement ne serait en aucune harmonie avec l'autonomie du royaume, mais supposerait le paiement régulier d'un tribut par Hérode; cependant nulle part dans les sources il n'est question d'un pareil paiement. L'histoire juridique de Rome ne connaît aucun cas où pareille ingérence aurait été faite dans les affaires intérieures d'un royaume vassal[25]. »
De même, selon Craig A. Evans, l'hypothèse selon laquelle « Jésus est peut-être né vers la fin du règne d'Hérode Archélaos, au moment du recensement « alors que Quirinius était gouverneur de Syrie » », ne doit pas être rejetée trop rapidement « compte tenu de la précision de l'évangéliste Luc sur d'autres questions relevant de la chronologie. » Pour lui, « il est donc possible que Jésus soit né en 6 ap. J.-C. et ait commencé son ministère dans la mi-vingtaine (au lieu de la mi-trentaine)[33]. »
Les objections qui soulignent les incompatibilités entre les différentes données fournies par les sources à notre disposition étaient présentes quasiment telles quelles il y a déjà un siècle. Depuis, des centaines et probablement même des milliers d'auteurs, souvent des théologiens ou des ecclésiastiques, ont tentés de les réfuter. Elles ont pourtant résisté à toutes ces tentatives de gens très érudits, et pour qui cette réfutation était souvent beaucoup plus qu'un simple exercice intellectuel. Quelques découvertes ont été faites durant cette période, dont par exemple la célèbre inscription d'Auguste à Ankara. Cela à permis à de nombreux auteurs d'échaffauder de très nombreuses hypothèses, toutes plus astucieuses les unes que les autres. Toutefois, les objections que l'on trouve par exemple dans le livre qu'Emile Littré a écrit avec David Friedrich Strauss en 1901[34], résistent toujours vaillamment à cette critique pourtant massive et très érudite.
Selon Jacques Giri, « l'opinion la plus répandue parmi les chercheurs, y compris les chercheurs chrétiens, est que nous ne savons pratiquement rien de la naissance de Jésus[35]. ». Il n'est donc pas étonnant que nous ne connaissions pas sa date de naissance. En effet, nous ne connaissons pas la date de naissance de nombreux rois de l'époque, dont on peut pourtant écrire une biographie détaillée. Il n'est donc pas étonnant que la date de naissance d'un obscur charpentier né dans une province obscure de l'empire romain[7] soit inconnue. Cela n'a d'ailleurs strictement aucunne conséquence sur le personnage Jésus, même s'il semble que pour nombre d'auteurs chrétiens cette inconnue ne soit pas envisageable.
Le jour de Noël (le 25 décembre) où des populations de toute la terre fête la naissance de Jésus résulte d'une simple tradition. Au IIIe siècle Clément d'Alexandrie tenait pour que la naissance de Jésus soit fêtée le 19 avril; on proposait aussi le 29 mai, ainsi que le 28 mars[36]. En Orient, pendant longtemps on admit le 6 janvier[36], ce qui a donné naissance à la fête de l'Epiphanie, appelée « fête des rois » pour marquer l'avénement du roi d'Israël qu'était Jésus pour les premiers chrétiens. Pendant longtemps en Orient l'Epiphanie était à la fois la fête de l'avénement de Jésus (ou de sa naissance) et de son baptême par Jean Baptiste. En effet, seul le baptême, assimilé à l'onction (christos) du nouveau roi, était considérée comme la naissance du Christ. Rappelons d'ailleurs que les évangiles commençaient tous initialement par ce Baptème, avant qu'on adjoigne des évangiles de l'enfance au début de deux d'entre-eux. L'Epiphanie, cette fête du nouveau roi d'Israël est fêté largement au delà des seuls chrétiens. C'est seulement vers 350 que notre date traditionnelle de Noël parut établie, mais elle fut institutionalisée encore plus tard[36].
Selon Alexandre Najjar, la fête de Noël pour la date de naissance de Jésus, la date du 24 juin pour fêter celle de Jean Baptiste ont été institutionalisées au Ve siècle[37]. Les deux naissances sont ainsi placées à six mois d'écart, trois jours après chaque solstice, moment où avec un moyen d'observation rudimentaire, on peut voir que la durée des jours commence à augmenter (25 décembre), ou à diminuer (24 juin). On retrouve ainsi l'écart symbolique fixée entre les naissances de Jean Baptiste et Jésus, qui a été placé dans l'évangile de l'enfance ajouté à l'évangile selon Luc. Pour l'Eglise catholique alors que « le trône romain est devenu chrétien et l'Église est devenue une puissance[38] », il s'agit à la fois de « recouvrir » deux fêtes païennes par des fêtes devenues chrétiennes, mais aussi d'illustrer la phrase qu'aurait prononcé le Baptiste en parlant de Jésus: « Il faut que lui grandisse et que moi je décroisse[39]. » Pour Alexandre Najjar, « l'église a ainsi christianisé le vieux rite païen qui célébrait l'astre du jour: le soleil qui commence sa descente à partir du 21 juin symbolise Jean-Baptiste; quand il recommence sa montée à partir du 22 décembre, il représente Jésus[37]. »
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