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La controverse du 17e karmapa est liée à l'existence de deux candidats à la succession du 16e karmapa, chef de l'école karma-kagyu du bouddhisme tibétain. Orgyen Trinley Dorje est intronisé le au Tibet par le 12e Taï Sitou Rinpoché, le gouvernement chinois, et plusieurs hauts lamas dont le dalaï-lama. Trinley Thaye Dorje est intronisé en mars 1994 par Shamar Rinpoché et plusieurs autres grands lamas dont Béru Khyentsé Rinpoché.
Les karmapas, chefs de l'école Karma-kagyu, l’un des grands courants du bouddhisme tibétain, constituent la première lignée déclarée de tulkus, réincarnations de Düsum Khyenpa (XIIe siècle). Les critères de reconnaissance d'un successeur (essentiellement indications orales ou écrites laissées par le précédent karmapa, mais aussi rêves et intuitions de lamas consacrés et comportement de l’enfant réincarné) peuvent mener à la sélection de plusieurs candidats, ce qui induit parfois une controverse. Les tulkus détenant traditionnellement un certain pouvoir, des rivalités peuvent exister quand il y a plusieurs candidats. Ainsi, dans la lignée kagyupa, la reconnaissance des 8e, 10e et 12e karmapas donna lieu à des conflits, cependant tous vite résolus.
Le désaccord actuel s’enracine dans les luttes de préséance entre deux régents responsables des destinées de l’école Karma Kagyu et de la recherche du nouveau karmapa après la mort en 1981 de Rangjung Rigpe Dorje, le 16e Karmapa. Ce conflit serait compliqué par des enjeux financiers selon certains.
Les autorités chinoises ne permirent pas à Orgyen Trinley Dorje de se rendre auprès des détenteurs de l'enseignement de la lignée Karma-kagyu ni à ses détenteurs de lui rendre visite au Tibet. Par ailleurs, il subit une pression politique pour l'obliger à dénoncer le dalaï lama. Il s'enfuit du Tibet à la veille de l'an 2000[3].
Les indices principaux concernant la réincarnation du karmapa figuraient dans une lettre de prédiction laissée par le 16e karmapa, et une prédiction des 2e et 5e karmapas.
Les points d'opposition reposent sur des considérations en rapport avec les croyances de la lignée (en particulier les visions). Les partisans du karmapa Orgyen Trinley Dorje considèrent que le poème ayant permis de l’identifier a vraiment été remis par le 16e karmapa au 12e Taï Sitou Rinpoché. Celui-ci a recueilli le cœur du karmapa après l’incinération, indiquant que c’était un disciple très proche. L’approbation du dalaï-lama est un autre argument fort mis en avant. De nombreuses divinations, telles que celles de l'oracle de Néchung ont confirmé par deux fois qu'Orgyen Trinley Dorje était le karmapa.
Les partisans d’Orgyen Trinley Dorje sont présents au Tibet et dans le reste du monde. Ils le présentent comme une promesse d’unité pour le bouddhisme tibétain, du fait de ses rapports privilégiés avec le dalaï-lama.
Le 14e Shamar Rinpoché a signé la lettre de reconnaissance d'Orgyen Trinley Dorje, et ensuite s'est rétracté sous l'influence de son entourage. Shamar Rinpoché déclare avoir signé la reconnaissance uniquement par respect pour le 14e dalaï-lama qui l’avait déjà approuvée. Les partisans du Shamarpa soutiennent que jamais par le passé la reconnaissance d'un Karmapa n'a été soumise à l'approbation du Dalaï-lama ou de n'importe quel hiérarque d'une autre lignée que celles des Kagyu, alors qu'Orgyen Trinley Dorje a été reconnu en premier par Sitou Rinpoché ainsi que par Gyaltsap Rinpoché.
Le grand tertön Chogyur Lingpa, visitant le monastère de Karma à Nagchen à l´est du Tibet, eut de Padmasambhava la vision prophétique des 21 incarnations du Karmapa. Voici comment il décrit sa vision du 17e Karmapa :
« Sous un arbre verdoyant sur une montagne rocheuse se trouve la dix-septième incarnation du Karmapa en compagnie de Kèntin Tai Sitou. Par la fusion de leurs esprits en un seul, l’arbre des enseignements du Bouddha fleurira et portera des fruits abondants, l’essence véritable des transmissions de Gampopa. »
Selon certains, le paysage s'apparente au monastère Shérab Ling, siège de Taï Sitou Rinpoché en Inde.
Aussi le 5e Karmapa écrivit-il une prophétie décrivant les difficultés qui surviendront à l'époque des 16e et 17e Karmapas et interprétée de diverses manières pour appuyer un candidat ou un autre :
« Dans la lignée des Karmapas, de la 16e à la 17e réincarnation, l'enseignement bouddhiste en général et la lignée Karma Kamtsang en particulier, hiberneront telles les abeilles. La lignée de l'empereur de Chine verra venir sa fin et son pays sera dominé par le plus fort. Depuis le nord jusqu'à l'est, le Tibet sera envahi, encerclé, tel le diamant serti... Qu'importe l'erreur, celui auquel tu t'adresseras s'opposera à toi. La bonne conduite dégénèrera et la mauvaise fleurira... Dans la succession des Karmapas, vers la fin de sa 16e vie et le début de la suivante, celui au samaya brisé émergera tel le lama nommé Na-tha, et siégera sur le trône. Par les pouvoirs de ses aspirations que nul ne peut comprendre, le Dharma du Karmapa sera presque détruit. Alors, celui dont les aspirations sont antérieures et positives, une émanation de Padmasambhava, viendra de l'ouest. Le cou ceint de fourrure et l'esprit rapide et furieux, la colère compassionnelle au cœur, il proclamera les paroles du Dharma. Celui-ci, au teint basané et aux yeux protubérants, vaincra l'émanation qui a brisé le samaya. Il protégera le Tibet pour un temps, et alors le bonheur régnera, comme la joie de voir se lever le soleil. C'est ainsi que je vois l'avenir de la communauté tibétaine. Même si l'un vient, dont les aspirations antérieures s'élèvent en karma positif, parce que le Dharma est sur le déclin et les intentions mauvaises des maras ont porté leurs fruits, le bonheur aura du mal à naître... »
En 2018, Orgyen Trinley Dorje et Trinley Thaye Dorje se rencontrent dans une région rurale en France et publient une déclaration commune datée du 11 octobre exprimant le souhait de résoudre les divisions dans l'intérêt commun de la lignée karma-kagyu[7],[8].
Le 20 octobre 2019, ils composent une prière de longue vie pour la réincarnation de Mipham Chokyi Lodro[9],[10].
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