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Les canaux de la ville de Lille formaient un réseau dense, en majorité non navigable, constitué du XIe siècle au XVIIe siècle à l'intérieur de l'enceinte de 1670, complété au sud de ce rempart, sur le territoire des actuels quartiers Vauban-Esquermes et de Wazemmes par des aménagements réalisés au XVIe siècle (canal des stations) et au XVIIe siècle (canal Vauban et digue). Depuis un accord entre le Châtelain Jean et le magistrat de la ville lors de la canalisation de la Haute Deûle en 1271, l'ensemble de ces voies d'eau faisait partie du domaine communal y compris les bras de la Deûle qui les alimentaient en amont. Ces canaux insalubres ont été comblés ou recouverts à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle.
Avant l'émergence urbaine de Lille et la création de sa première enceinte, les cours d'eau s'écoulant à l'emplacement de la ville actuelle étaient limités aux bras de la Deûle et à trois modestes affluents, le Becquerel ou « Chaude Rivière » qui prenait sa source à Fives, la Riviérette dont la source était située approximativement à l'emplacement du carrefour du boulevard Jean-Baptiste-Lebas, de la rue Solférino, de la rue d'Arras, de la rue de Cambrai et un très court ruisseau à l'emplacement de l'actuel parc Matisse.
La Deûle se divisait en 2 bras en aval de la planche à Quesnoy, confluent situé à l'emplacement du quai de l'Ouest au bord de l'actuelle gare d'eau entre le canal de la Haute Deûle et le port de Lille au sud du quartier des Bois Blancs.
Avant les premières canalisations du Moyen-Âge, ces deux bras se confondaient peut-être dans une large zone humide.
Un troisième bras moins important, le Bucquet dérivait de la Haute Deûle au pont de Canteleu passait à l’emplacement de la partie nord de la Citadelle et rejoignait un bras principal à l'emplacement de l'angle de la rue d'Angleterre et de la rue Jean-Moulin dans le Vieux-Lille.
Ces bras se jetaient dans la Basse-Deûle (actuelle avenue du Peuple-Belge), cours aval unique de la rivière.
Les parcours originels de ces bras de la Deûle et de ses affluents avant le XIIe siècle ne sont pas déterminés avec certitude et font l'objet de débats entre historiens.
Le réseau qui se constitue du XIe siècle au début du XVIIe siècle est la résultante de canalisations d'écoulements naturels antérieurs, de creusements artificiels et de l'utilisation d'anciens fossés extérieurs de remparts transformés en canaux intérieurs lors des extensions de l'enceinte. Ces aménagements drainent la zone humide qui s'étendait dans le centre de la ville et permettent son urbanisation au Moyen-Âge.
Contrairement à ceux de la plupart des villes flamandes, tracés au milieu des rues, les canaux de Lille s'écoulaient à l'intérieur des îlots à l'arrière des maisons ce qui donnait un accès à l'eau aux habitants et favorisait les activités artisanales. À l'origine, les canaux étaient nettoyés par un effet de chasse, à la suite d'ouvertures périodiques des vannes au départ des fossés de l'enceinte. Ceux-ci étaient des réservoirs alimentés par la haute Deûle et le Fourchon. Cette configuration devient un inconvénient à la suite du détournement d'une grande partie des eaux vers les fossés de la Citadelle par le canal Vauban en 1669 puis par le canal de la Moyenne Deûle en 1750 ce qui tarit le Fourchon et par conséquent les fossés des remparts. Faute de courant, l'eau devient stagnante ce qui rend insalubres ces canaux étroits.
Ces voies d'eau étaient enjambées par de nombreux ponts, au passage de chaque rue, très rapprochés sur certains tronçons, par exemple rue des Ponts-de-Comines où des ponceaux donnaient accès à chaque maison de la rive sud-est (côté Saint-Maurice).
Ils passaient également sous les constructions, par exemple, le pont de la rue Esquermoise sur le canal de Weppes était bordé de maisons côté nord (vers la cathédrale). Cet ancien passage, actuellement piétonnier, est visible entre la rue de Weppes et la rue Thiers.
La cunette était le fossé en eau qui entourait les enceintes successives de la ville sauf la dernière, celle de 1858, où l'alimentation en eau du fossé était interrompue au sud de la ville. La cunette était alimentée par les bras de la Deûle, Fourchon, Arbonnoise, Bucquet, puis par le canal des stations qui était une dérivation artificielle de cette rivière et par ses affluents, Becquerel et Riviérette. La cunette alimentait elle-même les canaux intérieurs. Plusieurs parties de la cunette englobées dans la ville fortifiée lors de ses agrandissements sont devenus des canaux intérieurs.
Le canal de la Monnaie ou canal Saint-Pierre est l'ancien fossé de la partie sud-est de la première enceinte qui entourait le castrum mentionné dans la Charte de dotation de la collégiale Saint-Pierre de 1066. Ce fossé en contrebas de l'ancienne motte castrale arasée en 1848 où s'élève l'actuelle cathédrale Notre-Dame de la Treille était complété par un fossé en boucle. Ce fossé deviendra le canal du Cirque, du nom d'un établissement établi sur la motte au début du XIXe siècle .
Les fossés de l'enceinte du début du XIIe siècle qui s'étend au sud-est de l'enceinte primitive pour entourer le forum sont à l'origine ;
Les fossés de l'enceinte qui a englobé les paroisses Saint-Maurice et Saint-Sauveur et l'ilot Rihour à la fin du XIIe siècle ou au début XIIIe siècle sont à l'origine du canal des Molfonds, du canal des Jésuites et du canal des Hibernois alimenté par la Riviérette créés lors de l'agrandissement de la ville en 1603.
Lors de l'agrandissement de la ville en 1617 au nord-est, du faubourg des Reignaux à l'îlot du Gard, le fossé de l'enceinte de l'ancien château de Courtrai détruit en 1599 est devenu le canal du Pont-de-Flandre.
Cependant, le fossé au sud de l'ilot Rihour, de l'emplacement de l'ancienne tour de l'Angèle, actuel square Morisson jusqu'à l'angle des actuelles rue Thiers et du Nouveau siècle) fut comblé lors de l'agrandissement de 1603. Lors de l'agrandissement de 1670, la partie de la première enceinte qui entourait le castrum, approximativement de l'angle de la rue d'Angleterre et de la rue Jean-Moulin au pont-neuf fut également détruite avec comblement de son fossé ainsi que, dans son prolongement au sud-ouest la partie de l'enceinte de l'agrandissement de 1370 autour du faubourg de Weppes (quartier Sainte-Catherine) jusqu'à la porte de la Barre.
Lors de la dernière extension de l'enceinte en 1858, la cunette du rempart de 1670 fut également comblée du quai du Wault à la Noble Tour.
La Haute Deûle est canalisée en aval de la Bassée en 1271[alpha 5].
Le canal des stations destiné à améliorer l'alimentation du canal du Haut-Hibernois jusqu'alors très envasé est creusé en 1565. Ce canal était une dérivation du Fourchon ou Arbonnoise près de l'actuelle place de l'Arbonnoise. Son cours correspondait à l'actuelle rue des stations puis longeait l'enceinte fortifiée de Lille (proche du boulevard de la Liberté) jusqu'au canal du Haut-Hibernois à proximité de l'actuelle place Jacquard[7].
Le canal Vauban est creusé en 1669 de l'emplacement de l'actuelle place du Général Leclerc approximativement jusqu'à celui de l'actuelle porte de Dunkerque pour acheminer les matériaux de construction de la Citadelle. Le canal Vauban après le prélèvement du canal des Stations, détourne la plus grande partie des eaux de l'Arbonnoise à Wazemmes (canal de Wazemmes). Avant cette création, le canal de Wazemmes ou Fourchon était le plus abondant des bras de la Deûle. Son parcours correspondait aux actuelles rues Auber et du Sabot.
La digue était un ouvrage défensif construit par Vauban de 1670 à 1693 pour protéger la ville en cas de siège par des inondations. La digue était une levée de terre dont le tracé était une ligne brisée partant de la porte Notre-Dame (emplacement de la place Richebé) et aboutissant au pont de Canteleu sur la Haute Deûle. Cet ouvrage ponctué de quatre redoutes était longé par un canal de 10 mètres de large bordé d'un chemin qui était une promenade appréciée. Le canal Vauban et le Fourchon traversaient la digue.
Le canal de la Moyenne-Deûle ouvert en 1751 entre la Citadelle et la Façade de l'Esplanade supprime la rupture de charge entre la Haute-Deûle et la Basse Deûle.
Le port Vauban est creusé dans les années 1860 sur le cours du canal Vauban près de l'église Notre-Dame de la Consolation lors de la rectification du cours de la Haute Deûle entre la Citadelle et le jardin Vauban. Une deuxième darse est ajoutée vers 1880.
Les canaux intérieurs, étroits, quasiment stagnants en raison du faible débit, établis sur la majorité de leur parcours, non au bord des rues mais à l'intérieur des ilots à l'arrière des constructions, étaient très insalubres. La création en 1751 du canal de la Moyenne Deûle qui consomme une grande partie de l'eau diminue encore le courant. Ils sont ainsi décrits par Victor Derode dans l’histoire de Lille et de la Flandre wallonne parue en 1848 :
« Ces canaux hideux, aux parcours en ligne brisée avec des jonctions à angle droit, des impasses, reçoivent l’eau des égouts, s’emplissent de vase, des déchets des usines et des fosses d’aisance ce qui contribue à en faire de véritables cloaques où une eau noire et infecte couvre à peine la fange qui obstrue le lit de la rivière. Les moulins et de fréquents barrages empêchent la navigation. »
Ces canaux sont recouverts ou comblés, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle pour la plupart, et jusque dans la première moitié du XXe siècle, les derniers supprimés étant le canal de la Monnaie en 1922, le canal du pont de Weppes et le canal du cirque en 1933, la Basse Deûle dans les années 1930, son assèchement complet devant l'hospice général datant de 1953.
Lors de l'agrandissement de 1858, les anciens remparts sont arasés et la cunette comblée au début des années 1860 de la porte de la Barre à la Noble Tour, à l'exception de la porte de Paris préservée. Le boulevard de l'Impératrice, actuel boulevard de la Liberté et le boulevard Louis XIV sont tracés à leur emplacement. La riviérette, modeste ruisseau qui s'écoulait à l'est de l'actuel boulevard Jean-Baptiste-Lebas, disparaît en même temps.
La digue est arasée au cours de la m̩ême période avec suppression du canal qui la longeait, également de la partie du canal des stations et du Fourchon entre les anciens remparts et la digue (approximativement entre le boulevard de la Liberté et la rue Solférino).
Le canal des stations de la rue Solférino à la place de l'Arbonnoise est recouvert un peu plus tard en 1883.
Quelques tronçons du Fourchon subsistent jusqu'au début du XXe siècle au sud de la rue Colson entre le boulevard Vauban et la rue Nationale.
À Esquermes l'Arbonnoise divisée en bras multiples reste au début du XXe siècle, jusqu'à son assèchement qui s'achève dans les années 1930, une vaste zone humide entre la rue de Turenne, la rue d'Isly et le boulevard de la Moselle (boulevard de ceinture de l'enceinte des années 1860).
A l'extérieur de ce boulevard, dans le quartier des Bois-Blancs, les bras de l'Arbonnoise disparaissent lors de l'aménagement du port de Lille dans les années 1950.
Le port Vauban est fermé en 1961 et comblé pour construire des logements et des bureaux. Il n'en reste aucun vestige.
Au nord des anciens remparts, dans l'autre zone inondable entre Fives et les alentours de l'ancien fort Saint-Agnès (emplacement actuel des gares et d'EuraLille), la Chaude Rivière n'a été recouverte progressivement qu'au cours de la première moitié du XXe siècle.
Le réseau des anciens cours d'eau a presque entièrement disparu. Quelques traces dans le Vieux-Lille permettent de deviner leur passage.
Les fossés longeant des maisons témoignent de l'existence d'anciens canaux, celui de la place Gilleson derrière la cathédrale à l'emplacement du canal du Cirque recouvert en 1933, celui entre les maisons qui bordaient le canal de la Baignerie entre la rue des Bouchers et la rue de la Baignerie.
On peut deviner le passage du canal de Weppes le long des maisons bordant la rue éponyme, le fond des fossés étant le niveau des anciens quais, celui de la rue, actuellement zone 20 et passage piétons-cycles, étant la couverture de l'ancien canal qui passait sous une maison de la rue Esquermoise et se prolongeait par le canal de l'Arc sous l'actuelle rue Thiers.
Quelques tronçons des anciens canaux ont été recouverts et non comblés, notamment le canal Saint-Pierre ouvert à la visite lors des journées du patrimoine et le canal des Jésuites visible dans les locaux administratifs de la Préfecture, rue de l'hôpital-militaire. Le vestige du moulin Saint-Pierre rue de la Monnaie rappelle le passage du canal Saint-Pierre arrivant sur la Basse Deûle.
La voûte du passage de l'ancien canal dans la courtine du rempart côté ville subsiste rue militaire .
Le quai du Wault, ancien port amont dont l'existence avait été menacée dans les années 1960 par le projet d'un parking a été maintenu en eau bien que le passage navigable vers le canal de la Moyenne ait été interrompu.
La large avenue du Peuple belge avec son passage sous le pont-neuf témoigne de l'existence de l'ancien port. Le premier niveau des immeubles du « rang du plat d'eau » bordant l'avenue du Peuple Belge, de part et d'autre du Pont-Neuf qui enjambait le port disparu et les escaliers d'accès à ce pont, laissent deviner l'ancien quai. On aperçoit au rez-de-chaussée et haut de la cave de l'immeuble du rang du plat d'eau de l'avenue du Peuple belge en aval du pont-neuf, le débouché de l'ancien canal souterrain de la citadelle (détournement du Bucquet en 1670).
Le canal de la Moyenne Deûle resté en eau le long de la façade de l'esplanade n'est plus une voie navigable : il est devenu une impasse depuis l'interruption de la liaison avec la Basse Deûle sous le pont Sainte-Helène à Saint-André à la suite de la création du canal à grand gabarit à l'ouest de la Citadelle.
Le nom d'un petit nombre de rues en garde le souvenir : rues de la Chaude Rivière et du Becquerel à Fives, rue des Fossés qui rappelle ceux à l'origine du canal des Molfonds et du canal des Jésuites, rue des Molfonds, rue des Ponts-de-Comines, rue des Poissonceaux perpendiculaire à l'ancien canal, rue de la Baignerie, rue de la Riviérette, rue des Stations, place de l'Arbonnoise, rue de la Piquerie qui évoque une ancienne pêcherie.
La rue du pont à Fourchon ouverte en 2001 dans le quartier des Bois Blancs rappelle par son bassin central la bifurcation des deux bras de la Deûle, Arbonnoise et Haute Deûle.
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