Alo
Royaume coutumier de la collectivité d'outre-mer de Wallis-et-Futuna De Wikipédia, l'encyclopédie libre
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Alo est l'un des trois royaumes coutumiers[2] qui constitue la collectivité d'outre-mer française des îles Wallis-et-Futuna. Ce territoire est constitué d'une grande partie de l'île de Futuna ainsi que de l'île d'Alofi.
Alo | |
Drapeau | |
Gravure représentant l'église d'Alo, tirée de l'ouvrage Le Martyr de Futuna de Claude Nicolet (1907). | |
Administration | |
---|---|
Pays | France |
Collectivité d'outre-mer | Wallis-et-Futuna |
Districts | 1 |
Chef-lieu | Ono |
Villages | 9 |
Roi coutumier (Tu'i Agaifo) Mandat |
Lino Leleivai depuis 2018 |
Premier ministre Mandat |
Petelo Ekeni Vaitanaki depuis 2019 |
Code postal | 98610 |
Code INSEE | 98611 |
Démographie | |
Population | 1 950 hab.[1] (2018) |
Densité | 37 hab./km2 |
Langues locales |
Français, futunien[Note 1] |
Géographie | |
Coordonnées | 14° 19′ 00″ sud, 178° 07′ 00″ ouest |
Superficie | 53 km2 |
Localisation | |
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Alo englobe les deux tiers orientaux de l'île de Futuna ainsi que l'île voisine d'Alofi.
Il compte en tout neuf villages :
Futuna se caractérise par son éloignement et son isolement au sein de l'océan Pacifique. Ne possédant pas de lagon, l'île est difficile d'accès par bateau[3]. Les premiers habitants arrivent vers 800 av. J.-C. Ce sont des Austronésiens, issus de la culture Lapita. À la même période, ils s'installent dans les îles et archipels voisins (Wallis, Tonga, Samoa, Niuatoputapu, Niuafo'ou) et développent une culture et une langue propre : c'est la naissance de la Polynésie ancestrale[4] . Cette période de l'histoire de Futuna est dénommée le temps de la « terre noire » (en futunien Kele ʻUli)[5] .
À partir de l'an 700, face à l'expansionnisme tongien dans la région, les habitants sont forcés de se replier vers l'intérieur des terres et construisent de nombreux forts (kolo)[6]. Vienne et Frimigacci en ont dénombré trente-cinq. À l'époque, Futuna est morcelée en de multiples groupes rivaux qui s'affrontent régulièrement, même si certains ont noué des alliances en cas de danger commun (les envahisseurs tongiens, par exemple)[7]. Ainsi, les futuniens réussissent à repousser l'expédition du chef tongien Kau'ulufonua fekai au XVe siècle[8]. Cette période dite de la « terre ocre » (Kele Mea), marquée par l'insécurité et plusieurs affrontements avec les tongiens, se termine vers 1700.
Durant cette période, les premiers visiteurs européens de Futuna, les Hollandais Willem Schouten et Jacob Le Maire, abordent l'île le et y restent huit jours, nouant des contacts avec la population futunienne.
La dernière période de l'histoire futunienne est dite de la « terre brune », (Kele Kula), en référence à la terre brune des tarodières : les habitants quittent les montagnes pour s'installer de nouveau en bord de mer[5]. Durant cette phase, les différentes entités politiques indépendantes et rivales de Futuna vont progressivement s'unifier. Les différentes places fortes (kolo) se rassemblent autour de chefs. Lorsque les missionnaires maristes français débarquent à Futuna le 7 novembre 1837, il ne reste plus que deux entités politiques rivales : le royaume de Sigave et celui de Tuʻa, bientôt renommé en royaume d'Alo[9].
Ces deux royaumes s'affrontent lors de la guerre de Vai, dernière guerre que Futuna ait vécu. Profitant du passage d'un navire baleinier australien, les Futuniens des deux camps échangent des cochons contre des fusils, ce qui leur permet de disposer d'armes à feu pour la bataille qui se déroule le 10 août 1839 de part et d'autre de la rivière Vai. Le royaume de Alo en sort vainqueur (malo) et Sigave est pillé. Le missionnaire Pierre Chanel en est le témoin et soigne les nombreux blessés qui reviennent du champ de bataille. Après la guerre du Vai, Niuliki devient roi de l'ensemble de Futuna jusqu'à sa mort en 1842[10]. Cette guerre fixe les frontières des deux royaumes et consacre la victoire de Alo sur Sigave.
Durant ce laps de temps, le missionnaire Pierre Chanel convertit une partie de la population futunienne au catholicisme. Il réside chez le roi Niuliki. Cependant, il provoque l'hostilité croissante des nobles futuniens et est tué par Musumusu, un parent de Niuliki, le 28 avril 1841. Son assassinat provoque la fuite des autres occidentaux présents sur l'île pour Wallis. Musumusu devient roi de Futuna à la mort de Niuliki. Le 26 janvier 1842, les maristes reviennent à Futuna, escortés par une corvette française et accompagnés d'un chef futunien, Sam Keletaona. Les vaincus de Sigave voient dans les missionnaires des étrangers qui peuvent apporter un appui face à Alo. Monseigneur Pompallier débarque à Futuna le 28 mai 1842 avec le roi de Wallis (Lavelua) et ses partisans. Ils sont reçus par Musumusu, mais très vite ce dernier est remplacé par Sam Keletaona, que les missionnaires soutiennent. 117 Futuniens sont baptisés[11]. Les maristes gagnent un pouvoir important à Futuna et à Wallis, et mettent en place une théocratie missionnaire qui leur permet de contrôler la population[12].
Le royaume de Sigave à Futuna signe un traité de protectorat avec la France en 1888, intégrant alors le protectorat de Wallis-et-Futuna.
Il n'y a pas à proprement parler de colonisation à Wallis-et-Futuna, le pouvoir du résident français se limitant aux affaires extérieures. Le résident habite Wallis et ne visite Futuna que quelques jours au total durant sa mission. Futuna reste donc très isolée et relativement indépendante du pouvoir politique français. Cette situation se poursuit jusqu'aux années 1960, l'administration française ne s'installant à Futuna qu'en 1959[13].
Frédéric Angleviel indique que pendant longtemps au XIXe siècle, les deux royaumes de Futuna sont très instables et sont souvent dans des luttes rivales chroniques, Sigave voulant prendre sa revanche sur Alo. Ces affrontements sont toutefois à remettre en parallèle avec la petite taille de la population (1200 à 1500 habitants)[14]. De manière générale, la royauté à Futuna est très instable, les deux rois (de Sigave et d'Alo) étant démis au bout de quelques années, voire quelques mois. Pour Jean-Claude Roux, cette instabilité est structurelle : entre 1900 et 1960, vingt rois se succèdent à Alo et treize à Sigave[15].
La Seconde Guerre mondiale ne bouleverse pas le quotidien de Futuna, contrairement à Wallis qui est investie par l'armée américaine qui y installe une base militaire.
Futuna, dépourvue de station de radio, se retrouve dans une situation délicate durant la Seconde Guerre mondiale puisqu'elle est totalement isolée et coupée du monde extérieur. Pendant deux ans, l'administration française (restée fidèle au régime de Vichy) et la mission à Wallis n'ont aucune nouvelle de Futuna et les habitants, privés des denrées de premières nécessité (farine, blé, huile, tissus...), survivent uniquement grâce à l’agriculture vivrière. L'arrivée des Américains à Wallis en 1942 rompt quelque peu cette situation, mais Futuna n'est pas occupée par l'armée américaine et reste très isolée. Le père 'O Reilly écrit : « [1945] Sans aucune liaison maritime, Futuna, sans farine sans sucre, sans remèdes et sans habits, connaît des jours difficiles. […] Le 23 juin 1946, un sous-marin américain de passage à Futuna donna à la mission, sans ravitaillement depuis 2 ans, un peu de farine. »[16]. Cet hydravion anti sous-marins rompt l'isolement de Futuna en emmenant 45 autochtones en Nouvelle-Calédonie : ils sont les premiers à s'engager hors de leur île natale[17].
Un des marchands de coprah aurait profité de la situation pour abuser des Futuniens, en échangeant du tissu pour les vêtements contre des parcelles de cocotiers. Il aurait même, selon Marcel Gaillot, troqué des sacs de coprah en guise de vêtement. À l'époque, la société futunienne n'est pas du tout monétarisée. Cependant, en 1945, le résident Mattei l'oblige à rendre les parcelles acquises frauduleusement[16].
Marcel Gaillot indique que Futuna est finalement reliée au monde extérieure uniquement en 1968, quand un aérodrome est construit à Vele. Jusqu'à cette période, les denrées et les courriers sont lâchés par avion ; l'unique moyen de communiquer est la radio[16]. L'isolement de Futuna se poursuit donc tout au long des années 1950 et 1960. Angleviel peut parler de « quasi-abandon »[17].
À Futuna, les deux royaumes changent régulièrement de souverain. Les différends politiques provoquent parfois de véritables « batailles rangées »[18] entre les villages d'Alo. L'influence de la mission reste très forte, en particulier autour du père Cantala qui dispose d'une autorité importante. C'est seulement en 1957, selon Frédéric Angleviel, que son départ et l'arrivée de deux gendarmes français « fait entrer Futuna dans l’ère de la normalisation administrative »[18].
En 1961, à la suite d'un référendum, le protectorat se transforme en territoire d'outre-mer (TOM) . En 2003, le territoire devient la collectivité d'outre-mer de Wallis-et-Futuna.
Le Tu'i Agaifo d'Alo dispose de cinq ministres, jouant le rôle de porte-paroles dans les conseils, mais ils ont une autorité limitée directement sur les chefs de village désignés par les familles princières qui peuvent démettre leur roi facilement.
Le roi d'Alo dispose de chefs coutumiers pour chaque village (Alofi, Kolia, Mala'e, Ono, Poï, Tamana, Taoa, Tuatafa et Vele).
Son royaume est sous son commandement et celui de ses chefs. La sécurité de la population est assurée par la Gendarmerie française.
La coutume ancestrale est l'une des valeurs sacrées des Futuniens. Le premier Roi d'Alo se nommait Fakavelikele[19].
La population de Alo était de 2 892 habitants en 2003, de 2 482 en 2008[20], de 2 156 habitants en 2013[21] et de 1950 habitants en 2018.
D'après le recensement de 2018, Ono (avec 524 habitants) et Taoa (avec 480 habitants), sont les deux villages les plus peuplés de l'île de Futuna. Le chef-lieu du royaume d'Alo est Ono[1].
La plupart des habitants sont d'origine polynésienne (97,3 %). On compte aussi quelques habitants d'origine européenne. La très grande majorité est de confession catholique.
L'économie est essentiellement rurale axée sur la pêche artisanale et l'agriculture océanienne vivrière pour les besoins locaux.
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