La morale capitaliste, piteuse parodie de la morale chrétienne, frappe d'anathème la chair du travailleur; elle prend pour idéal de réduire le producteur au plus petit minimum de besoins, de supprimer ses joies et ses passions et de le condamner au rôle de machine délivrant du travail sans trêve ni merci.
Le Droit à la paresse, Paul Lafargue, éd. Oriol, 1883, Avant-propos, p. V
Les socialistes révolutionnaires ont à recommencer le combat qu'ont combattu les philosophes et les pamphlétaires de la bourgeoisie; ils ont à démolir, dans les têtes de la classe appelée à l'action, les préjugés semés par la classe régnante;...
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), partie Avant-propos,
p.
42
Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. Cette folie traîne à sa suite des misères individuelles et sociales qui, depuis des siècles, torturent la triste humanité. Cette folie est l'amour du travail, la passion moribonde du travail, poussée jusqu'à l'épuisement des forces vitales de l'individu et de sa progéniture. Au lieu de réagir contre cette aberration mentale, les prêtres, les économistes, les moralistes, ont sacro-sanctifié le travail. Hommes aveugles et bornés, ils ont voulu être plus sages que leur Dieu; hommes faibles et méprisables, ils ont voulu réhabiliter ce que leur Dieu avait maudit.
Le Droit à la paresse, Paul Lafargue, éd. Oriol, 1883, chap. 1 (« Un dogme désastreux »), p. 7
Jéhovah, le dieu barbu et rébarbatif, donna à ses adorateurs le suprême exemple de la paresse idéale ; après six jours de travail, il se repose pour l'éternité.
Et les économistes s'en vont répétant aux ouvriers
: Travaillez pour augmenter la fortune sociale
! et cependant un économiste, Destut de Tracy, leur répond
:
« Les nations pauvres, c'est là où le peuple est à son aise; les nations riches, c'est là où il est ordinairement pauvre. »
[...] Mais, assourdis et idiotisés par leurs propres hurlements, les économistes de répondre
: travaillez, travaillez toujours pour créer votre bien-être
! [...] Travaillez, travaillez, prolétaires, pour agrandir la fortune sociale et vos misères individuelles, travaillez, travaillez, pour que, devenant plus pauvres, vous avez plus de raisons de travailler et d'être misérables. Telle est la loi inexorable de la production capitaliste.
Le Droit à la paresse, Paul Lafargue, éd. Oriol, 1883, chap. 2 (« Bénédictions du travail »), p. 20
Notre époque est, dit-on, le siècle du travail; il est en effet le siècle de la douleur, de la misère et de la corruption.
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
73
Notre époque sera appelée l'âge de la falsification comme les premières époque de l'humanité ont reçu les noms d' âge de pierre, d' âge de bronze, du caractère de leur production.
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
73
Ô idiots ! c'est parce que vous travaillez trop que l'outillage industriel se développe lentement.
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
77
Pour forcer les capitalistes à perfectionner leurs machines de bois et de fers, il faut hausser les salaires et diminuer les heures de travail des machines de chaire et d'os. La preuve à l'appui ? C'est par centaine qu'on peut les fournir.
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
77
... La Farce électorale. Devant les électeurs, à têtes de bois et oreilles d'âne, les candidats bourgeois vêtus en paillasses danseront la danse des libertés politiques, se torchant la face et la postface avec leurs programmes électoraux aux multiples promesses, et parlant avec des larmes dans les yeux des misères du peuple et avec du cuivre dans la voix des gloires de la France; et les têtes des électeurs de braire en chœur et solidement: hi han! hi han!
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
83-84
Si, déracinant de son cœur le vice qui la domine et avalit sa nature, la classe ouvrière se levait dans sa force terrible, non pour réclamer les Droits de l'homme, qui ne sont que les droits de l'exploitation capitaliste, non pour réclamer le Droit du travail qui n'est que le droit de la misère, mais pour forger une loi d'airain, défendant à tout homme de travailler plus de trois heures par jours, la Terre, la vieille terre, frémissant d'allégresse, sentirait bondir en elle un nouvelle univers... Mais comment demander à un prolétariat corrompu par la morale capitaliste une résolution virile ?.
Le Droit à la paresse (1883), Paul Lafargue, éd. Le Temps des Cerises, 2002
(ISBN 2-84109-052-3), p.
85
Ô Paresse, mère des arts et des nobles vertus, sois le baume des angoisses humaines !
Le Droit à la paresse, Paul Lafargue, éd. Oriol, 1883, chap. 4 (« À nouvel air, chanson nouvelle »), p. 49
Nos machines au souffle de feu, aux membres d'acier, infatigables, à la fécondité merveilleuse, inépuisable, accomplissent docilement d'elles-mêmes leur travail sacré, et cependant le génie des grands philosophes du capitalisme reste dominé par le préjugé du salariat, le pire des esclavages. Ils ne comprennent pas encore que la machine est le rédempteur de l'humanité, le Dieu qui rachètera l'homme des sordidae artes et du travail salarié, le Dieu qui lui donnera des loisirs et la liberté.
Le Droit à la paresse, Paul Lafargue, éd. Oriol, 1883, Appendice, p. 54