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recueil de poèmes de Victor Hugo De Wikiquote, le recueil de citations libre
La Légende des siècles est un recueil de poèmes de Victor Hugo, conçu comme une œuvre monumentale destinée à dépeindre l'histoire et l'évolution de l'Humanité. Écrits par intermittence entre 1855 et 1876, tant ses projets sont nombreux en ces années d'exil à Guernesey, les poèmes furent publiés en trois séries : en 1859, en 1877 et en 1883. Portée par un talent poétique estimé comme sans égal où se résume tout l'art de Hugo, après l'accomplissement des Châtiments et des Contemplations qui lui ont ouvert de nouveaux horizons, La Légende des siècles est considérée comme la seule véritable épopée française et, suivant le jugement porté par Baudelaire, comme la seule épopée moderne possible.
Livre qu'un vent t'emporte
En France, où je suis né !
L'arbre déraciné
Donne sa feuille morte.
L'aurore apparaissait ; quelle aurore ? Un abîme
D'éblouissement, vaste, insondable, sublime ;
Une ardente lueur de paix et de bonté.
C'était aux premiers temps du globe ; et la clarté
Brillait sereine au front du ciel inaccessible,
Étant tout ce que Dieu peut avoir de visible ; (...)
L'espace vagissait ainsi qu'un nouveau-né ;
L'aube était le regard du soleil étonné.
Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Échevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l'homme sombre arriva
Au bas d'une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatigué et ses fils hors d'haleine
Lui dirent : "Couchons-nous sur la terre, et dormons."
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un œil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l'ombre fixement.
"Je suis trop près", dit-il avec un tremblement.
Sur la porte on grava : "Défense à Dieu d'entrer".
L'œil était dans la tombe et regardait Caïn.
Et le démon reprit son oeuvre sous les voiles.
"Quelle hydre fait-il donc ?" demandaient les étoiles.
Et le monde attendait, grave, inquiet, béant,
Le colosse qu'allait enfanter ce géant ;
Soudain, on entendit dans la nuit sépulcrale
Comme un dernier effort jetant un dernier râle ;
L'Etna, fauve atelier du forgeron maudit,
Flamboya ; le plafond de l'enfer se fendit,
Et, dans une clarté blême et surnaturelle,
On vit des mains d'Iblis jaillir la sauterelle.
Iblis leva les yeux, et tout à coup l'infâme
Ébloui, se courba sous l'abîme vermeil ;
Car Dieu, de l'araignée, avait fait le soleil.
Quel dieu, quel moissonneur de l'éternel été,
Avait, en s'en allant, négligemment jeté
Cette faucille d'or dans le champ des étoiles ?
Lui, reprit : "Sur ma mort les anges délibèrent ;
L'heure arrive. Écoutez. Si j'ai de l'un de vous
Mal parlé, qu'il se lève, ô peuple, et devant tous
Qu'il m'insulte et m'outrage avant que je m'échappe ;
Si j'ai frappé quelqu'un, que celui-là me frappe."
Et, tranquille, il tendit aux passants son bâton.
Une vieille, tondant la laine d'un mouton,
Assise sur un seuil, lui cria : "Dieu t'assiste !"
L'œil du peuple était doux comme un œil de colombe
En regardant cette homme auguste, son appui ;
Tous pleuraient ; quand, plus tard, il fut rentré chez lui,
Beaucoup restèrent là sans fermer la paupière,
Et passèrent la nuit couchés sur une pierre.
La terre a vu jadis errer des paladins ;
Ils flamboyaient ainsi que des éclairs soudain,
Puis s'évanouissaient, laissant sur les visages
La crainte, et la lueur de leurs brusques passages ;
Malheur à qui faisait le mal ! Un de ces bras
Sortait de l'ombre avec ce cri : "Tu périras !"
Ce n'est pas une bête en son gîte éveillée,
Ce n'est pas un fantôme éclos sous la feuillée,
Ce n'est pas un morceau de l'ombre du rocher,
Qu'on voit là-bas au fond des clairières marcher ;
C'est un vivant qui n'est ni stryge ni lémure ;
Celui qui marche là, couvert d'une âpre armure,
C'est le grand chevalier d'Alsace, Eviradnus.
"Madame, avez-vous bien dormi ?"
"Place à Tout ! Je suis Pan ; Jupiter ! à genoux !"
La rose épanouie et toute grande ouverte,
Sortant du frais bouton comme d’une urne verte,
Charge la petitesse exquise de sa main ;
Quand l’enfant, allongeant ses lèvres de carmin,
Fronce, en la respirant, sa riante narine,
La magnifique fleur, royale et purpurine,
Cache plus qu’à demi ce visage charmant,
Si bien que l’œil hésite, et qu’on ne sait comment
Distinguer de la fleur ce bel enfant qui joue,
Et si l’on voit la rose ou si l’on voit la joue.
En partant du golfe d'Otrante,
Nous étions trente ;
Mais, en arrivant à Cadiz,
Nous étions dix.
Tout à coup, au moment où le housard baissé
Se penchait vers lui, l'homme, une espèce de maure,
Saisit un pistolet qu'il étreignait encore,
Et vise au front mon père en criant : "Caramba !"
Le coup passa si près, que le chapeau tomba
Et que le cheval fit un écart en arrière.
"Donne-lui tout de même à boire", dit mon père.
Que savons-nous ? Qui donc connaît le fond des choses ?
J'étais enfant, j'étais petit, j'étais cruel.
Cet âne abject, souillé, meurtri sous le bâton,
Est plus saint que Socrate et plus grand que Platon !
Léviathan ; c'est là tout le vieux monde,
Âpre et démesuré dans sa fauve laideur ;
Léviathan, c'est là tout le passé : grandeur,
Horreur.
Je vis dans la nuée un clairon monstrueux.
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