On assiste au découplage entre religion et culture traditionnelle, ce qui s'est déjà fait dans le christianisme (sous l'effet de la sécularisation) et ce qui se fait aujourd'hui en islam, sous l'effet de la mondialisation et de la déculturation. L'islam qui prend racine en Europe n'est pas un islam «civilisationnel»: il se veut pure religion, détaché des cultures d'origine.
Tous les sondages d'opinion le montrent: les thématiques de l'immigration, de l'Islam sont en chute libre et sont passées largement derrière les inquiétudes économiques. La réalité de la France est qu'elle est en train de réussir son processus d'intégration. Les populations d'origine musulmane de France sont globalement les plus laïcisées et les plus intégrées d'Europe, grâce à un taux élevé de mariages mixtes. Pour moi, le signe de cet apaisement est précisément l'effondrement du Front national.
«“Ce que Sarkozy propose, c'est la haine de l'autre”», propos d'Emmanuel Todd recueillis par Jean-Baptiste de Montvalon et Sylvia Zappi, Le Monde, 26 décembre 2009 (lire en ligne)
Justin Vaïsse
Avec le plus grand nombre de musulmans en Europe — des musulmans dont l'intégration à la nation est, pour la plupart et depuis longtemps, une réalité — et une politique publique plus adroite qu'il n'y paraît, la France, qu'on savait «fille aînée de l'Église» depuis le VIIIesiècle, fait désormais figure de «fille aînée de l'islam» d'Europe, le pays où les formes nouvelles de cette religion et des cultures qui lui sont associées peuvent s'épanouir dans un contexte séculier moderne, pour son plus grand bénéfice. Ce que nous voyons émerger depuis plusieurs années, c'est un islam français, pour ne pas dire gallican (puisqu'il n'y a pas d'Église musulmane qu'on puisse ainsi qualifier), respectueux de la laïcité et imprégné de culture politique française. L'islam de France, pour prendre une formule trop souvent répétée, a définitivement remplacé l'islam en France.
Intégrer l'Islam, Justin Vaïsse, éd. Odile Jacob, 2006, Introduction: La France, fille aînée de l'islam d'Europe,p.17
Christopher Caldwell
Que Renan, Malcolm X et le jeune Inayat Bunglawala aient raison ou non de penser que l'Islam l'emporte sur toutes les différences sociales, culturelles et nationale, les conditions sont mûres pour la fusion des diverses communautés musulmanes d'Europe en une identité unifiée.
Une révolution sous nos yeux. Comment l'Islam va transformer la France et l'Europe, Christopher Caldwell(trad. Johan Frederik Hel Guedj), éd. Toucan, 2011, p.350
La France aura des problèmes sociaux spectaculaires, mais ses traditions républicaines lui donnent la meilleure chance de pleinement assimiler les enfants et les petits-enfants d’immigrés. C’est le seul pays où un équivalent européen du rêve américain est probable.
Une révolution sous nos yeux. Comment l'Islam va transformer la France et l'Europe, Christopher Caldwell(trad. Johan Frederik Hel Guedj), éd. Toucan, 2011, p.399-400
Marwan Muhammad
Qui a le droit de dire que la France dans trente ou quarante ans ne sera pas un pays musulman? Qui a le droit? Personne dans ce pays n'a le droit de nous enlever ça. Personne n'a le droit de nous nier cet espoir-là. De nous nier le droit d'espérer dans une société globale fidèle à l'islam. Personne n'a le droit dans ce pays de définir pour nous ce qu'est l'identité française.
Propos qu'aurait tenus Marwan Muhammad à la mosquée d'Orly en août 2011.
Cultures, métissages et paranoïa, Albert Le Dorze, éd. L'Harmattan, 2014, p.284
Azouz Begag
Si on ajoute aux nombre de Maghrébins, le nombre des mariages mixtes, plus celui des convertis et celui des autres populations: Turcs (près d'un million), Sénégalais, Maliens, Comoriens, Béninois, Mauritaniens, Égyptiens, Burkinabés, Ivoiriens, Camerounais, Éthiopiens, Tchadiens, Somaliens, Pakistanais, Mauriciens, Indiens, Bosniaques... en prenant soin d'inclure leurs enfants... on peut arriver à 10 millions de personnes qui, de près ou de loin, sont «culturellement» musulmanes. Soit 15% de la population française.
La Faute aux autres, Azouz Begag, éd. L'Esprit du printemps, 2017, p.175-176
«Ce chiffre est bidon, c'était de la provocation médiatique», concède aujourd'hui Azouz Begag, interrogé par l’AFP. […] Azouz Begag préfère désormais parler «d'une dizaine de millions de personnes qui ont une identité composée d'Islam» en France, un chiffre qui […] ne repose sur aucune base scientifique.
«20 millions de musulmans en France? Ils sont environ 4 fois moins, selon les estimations les plus sérieuses», Rémi Banet, AFP, 17 mai 2018 (lire en ligne)
Jean-Paul Gourévitch
En France, la population musulmane, qui ne comptait que 550 000personnes en 1962, a atteint 1,4 million en 1973, 3 millions en 1985, 5 millions en 1998, environ 7 millions aujourd'hui [en 2007].
Les Migrations en Europe: les réalités du présent, les défis du futur, Jean-Paul Gourévitch, éd. Acropole, 2007, p.362
La communauté musulmane au sens large du terme compte aujourd'hui [en 2017] environ 8,5 millions de personnes.
Les Véritables Enjeux des migrations, Jean-Paul Gourévitch, éd. Éditions du Rocher, 2017, p.111
François Héran
Parce qu'un quart de la population est lié à l'immigration sur une ou deux générations, dont une moitié environ, soit le huitième de la population, a une origine musulmane (ce qui ne veut pas dire nécessairement une pratique religieuse). Dès lors qu'on atteint de telles proportions, il devient absurde de soutenir qu'un quart ou même un huitième de la population vivant en France, française dans sa grande majorité, ne serait pas intégré.
Avec l'immigration: Mesurer, débattre, agir, François Héran, éd. La Découverte, 2017, p.11
Gilles Kepel
L'ancienne ville des rois [Saint-Denis] puis de la Révolution et de la classe ouvrière est devenue La Mecque de l'islam en France.
SaphirNews: Comment expliquez-vous le décalage entre les chiffres [sur le nombre de musulmans en France]? Ne pensez-vous pas que vos chiffres sont sous-estimés sachant que les moins de 18 ans et les plus de 50 ans sont exclus des statistiques? Patrick Simon (démographe à l'Ined): Le chiffre de 2,1 millions que nous obtenons diffère des estimations habituelles pour plusieurs raisons.
Tout d'abord, nous ne recueillons l'information que pour les personnes âgées de 18 à 50 ans mais le chiffre total de musulmans inclut également les plus de 50 ans et les moins de 18 ans.
Par ailleurs, la plupart des estimations sont fondées sur l'origine des personnes et non sur leur déclaration en matière de religion. Sont considérés comme «musulmans» tous les immigrés venant d'un pays à dominante musulmane ainsi que tous les descendants de ces immigrés nés en France.
Cela est relativement inexact: d'une part, parce que de nombreux pays à dominante musulmane comprennent des minorités non musulmanes; d'autre part, parce que tous les habitants de ces pays ne se considèrent pas nécessairement comme ayant une religion.
C'est encore plus vrai pour les descendants nés en France. Entre 20 et 30% des descendants d'immigrés du Maghreb nés en France se disent sans religion. Doivent-ils être considérés de «culture musulmane»? C'est une question intéressante du point de vue de la sociologie de la religion mais, d'un point de vue démographique, nous avons retenu une définition plus étroite où nous respectons la déclaration des personnes. Il en va de même pour les catholiques.
Les chiffres de 5 ou 6 millions sont surestimés, mais l'enjeu d'arriver au «vrai» chiffre du nombre de musulmans en France est assez limité. S'il s’agit de montrer que l'islam est devenu une religion importante en France: même 2,1 millions de musulmans suffisent à valider cette idée puisque l'islam se trouve être la deuxième religion après le catholicisme.
«Mosquées: à 2,1 ou 5 millions, les musulmans manquent toujours de places», propos de Patrick Simon recueillis par Hanan Ben Rhouma, Saphirnews.com, 21 mars 2011 (lire en ligne)
Charles de Foucauld
Ma pensée est que si, petit à petit, doucement, les musulmans de notre empire colonial du nord de l'Afrique ne se convertissent pas, il se produira un mouvement nationaliste analogue à celui de la Turquie […]. Si nous n'avons pas su faire des Français de ces peuples, ils nous chasseront. Le seul moyen qu'ils deviennent Français est qu'ils deviennent chrétiens. Il ne s'agit pas de les convertir en un jour ni par force mais tendrement, discrètement, par persuasion, bon exemple, bonne éducation, instruction, grâce à une prise de contact étroite et affectueuse, œuvre surtout de laïcs français qui peuvent être bien plus nombreux que les prêtres et prendre un contact plus intime. Des musulmans peuvent-ils être vraiment français? Exceptionnellement, oui. D'une manière générale, non.
Charles de Foucauld: explorateur du Maroc, ermite au Sahara, René Bazin, éd. Plon, 1939, p.443-444
Jean-Marie Le Pen
Ce qu'il faut dire aux Algériens, ce n’est pas qu'ils ont besoin de la France, mais que la France a besoin d'eux. C'est qu'ils ne sont pas un fardeau ou que, s'ils le sont pour l'instant, ils seront au contraire la partie dynamique et le sang jeune d'une nation française dans laquelle nous les aurons intégrés. J'affirme que dans la religion musulmane rien ne s'oppose au point de vue moral à faire du croyant ou du pratiquant musulman un citoyen français complet. Bien au contraire, sur l'essentiel, ses préceptes sont les mêmes que ceux de la religion chrétienne, fondement de la civilisation occidentale. D'autre part, je ne crois pas qu'il existe plus de race algérienne que de race française […]. Je conclus: offrons aux musulmans d'Algérie l'entrée et l'intégration dans une France dynamique. Au lieu de leur dire comme nous le faisons maintenant: «Vous nous coûtez très cher, vous êtes un fardeau», disons leur: «Nous avons besoin de vous. Vous êtes la jeunesse de la Nation» […] Comment un pays qui a déploré longtemps de n'avoir pas assez de jeunes pourrait-il dévaluer le fait d'en avoir cinq ou six millions? […] Et c'est vrai, la France a besoin de l'Algérie, peut-être plus que l'Algérie n'a besoin de la France.
Intervention du député Jean-Marie Le Pen pour soutenir le maintien de l'Algérie française, le , à l'Assemblée nationale.
Jean-Marie Le Pen, deuxième séance du 29 janvier 1958,Assemblée nationale, dans JO - Débats parlementaires - Assemblée Nationale (1958), p. 310-311, paru 1958, JO.
Raphaël Liogier
Les Français musulmans doivent réaliser qu'ils ne sont pas les éternels convives d'un repas, ils sont chez eux au même titre que leurs concitoyens non-musulmans.
Bien qu'il y ait eu des musulmans de manière continue depuis treize siècles dans notre pays, l'islam n'est pas encore perçu comme une religion autochtone. Il reste la foi d'hommes destinés à partir un jour. Et dans l'imaginaire collectif, il reste aussi une religion inassimilable, du moins aux yeux de beaucoup. C'est pourquoi on ne peut que souhaiter que des recherches historiques sérieuses soient entreprises. Si on constate que nous avons deux parents, quatre grands-parents, huit arrière-grands-parents, etc., on est bien obligé de conclure, si on fait ce calcul en remontant douze siècles en arrière, qu'en dehors des étrangers venus tout récemment, tous les Français de souche ont eu des ancêtres maghrébins ou espagnols musulmans, mais aussi goths ou celtes. L'identité française, c'est peut-être une culture dominante unique, mais sur le plan ethnique, c'est ce mélange et aujourd'hui, c'est ce mélange qu'il faut faire accepter.
Malgré une hostilité le plus souvent très vive des Français à l'égard des musulmans, la France a fait du Moyen Âge à nos jours des emprunts culturels et humains à l'islam qui ont enrichi et continuent d'enrichir sa vie sociale et intellectuelle.
«Préface», Jacques Le Goff, dansHistoire de l'islam et des musulmans en France, Ouvrage collectif, éd. Albin Michel, 2007, p.13
Émile Mâle
C'est au cœur des montagnes du Velay, au Puy, que se trouvent les monuments qui témoignent le plus clairement en France de l'influence musulmane. L'étrange façade polychrome de la cathédrale éveille, avant toute réflexion, une confuse impression d'Orient. Mais dans le merveilleux cloître […] les arcades aux claveaux tour à tour noirs et blancs font penser aux arcs blancs et rouges de la mosquée de Cordoue. […] La cathédrale n'est pas le seul monument ou se retrouve l'Orient: Le Puy est la ville de France où les formes de l'art musulman se présentent le plus souvent aux yeux. […] Tout ici évoque l'Orient, cet éternel Orient qui a fasciné le moyen-âge et qui garde pour nous toute sa séduction.
«Les Influences arabes dans l'art roman», Émile Mâle, Revue des Deux Mondes, 15 novembre 1923, p.325, 326 et 329 (lire en ligne)
René Martial
Un fait qui est intéressant parce qu'il est contemporain, c'est le métissage qui se produit actuellement, discrètement, lentement, mais en augmentant chaque jour, entre Arabes et Français, et réciproquement. La religion, la civilisation, les coutumes, le genre de vie, la mentalité méditative, les qualités hospitalières, l'esprit de tolérance des Arabes exercent un grande attraction sur le Français. Surtout sur le Français cultivé.
La Race française, René Martial, éd. Mercure de France, 1934, p.101
Alain Gresh
Le racisme s'abrite de plus en plus derrière les «différences» culturelles ou religieuses, qui mettraient en danger l'identité de la France. […] sous couvert de critique de la religion, on stigmatise toute une communauté, renvoyée à son «identité» musulmane, qui serait «naturelle», «biologique». Cet amalgame entre religion et communauté est proprement scandaleux et il suscite aujourd'hui un trouble important chez ce que l'on nomme les «musulmans», y compris les athées ou ceux qui n'accordent aucun poids à la religion. C'est ce nouveau masque du vieux fond de racisme anti-Arabe et anti-Maghrébin conjugué avec l'idée d'une «menace» internationale que le terme «islamophobie» recouvre. [...] Il est évident qu'il y a un recoupement entre racisme anti-Maghrébin et islamophobie, sans doute renforcé par la visibilité d'une partie de la jeune génération, qui s'affirme «musulmane» sur la scène publique et ne rase plus les murs. Il se développe ainsi un nouveau racisme anti-Arabe, porté par une partie des intellectuels et des médias, qui se camoufle sous le drapeau de la lutte contre l'islam.
Extrait d'un texte paru le 4 mars 2004.
«À propos de l'islamophobie: Plaidoyer en faveur d'un concept controversé», Alain Gresh, lmsi.net (Collectif Les mots sont importants), 22 août 2013 (lire en ligne)
Charles Maurras
Cette mosquée en plein Paris ne me dit rien de bon […] [S]'il y a un réveil de l'Islam, et je ne crois pas que l'on en puisse douter, un trophée de la foi coranique sur cette coline [sic] Sainte-Geneviève où enseignèrent tous les plus grands docteurs de la chrétienté antiislamique représente plus qu'une offense à notre passé: une menace pour notre avenir. […] [E]n France, chez les Protecteurs et chez les Vainqueurs, du simple point de vue politique, la construction officielle de la mosquée et surtout son inauguration en grande pompe républicaine, exprime quelque chose qui ressemble à une pénétration de notre pays et à sa prise de possession par nos sujets ou nos protégés. […] Nous venons de transgresser les justes bornes de la tolérance, du respect et de l'amitié. Nous venons de commettre le crime d'excès. Fasse le ciel que nous n'ayons pas à le payer avant peu et que les nobles races auxquelles nous avons dû un concours si précieux [durant la Grande Guerre] ne soient jamais grisés par leur sentiment de notre faiblesse.
Le Français peut tenir des propos racistes à l'occasion, mais quand une femme lui plaît, il ne craint pas de la prendre pour compagne quelle que soit la couleur de sa peau. C'est la vraie raison de l'hostilité des Français au «foulard islamique». Symboliquement, le «tchador» dit aux non-musulmans: «ne touchez pas à nos femmes». Cette interdiction est intolérable au Français exogame. À l'inverse, elle ne gêne en rien l'Anglo-Saxon endogame, qui ne songe absolument pas à se mettre en ménage avec la Pakistanaise — ce qui n'empêche pas certains intellectuels français de confondre son indifférence au «voile» avec de la tolérance. En réalité, elle est de nature raciste: ne songeant pas à épouser la femme voilée, l'Anglais et l'Américain se moquent pas mal de la manière dont elle est habillée!
Jadis on eût exigé et on exigeait des Musulmans la conversion au christianisme pour être admis dans la communauté française; aujourd'hui que la France vit sous le régime de la séparation de l'Église et de l'État, il est tout naturel de fournir aux Musulmans la possibilité de suivre leur religion sur le sol de la métropole, mais les possibilités qu'on a créées sous forme d'une grande et belle mosquée de Paris et de la banlieue, sont tellement mesquines, que le but n'a pas été atteint.
La Race française, René Martial, éd. Mercure de France, 1934, p.257
Michel Orcel
J'ai suggéré, pour entamer cette réflexion, que la polémique autour du «voile» ne faisait peut-être que «voiler» d'autres questions restées en suspens, mais réglées depuis longtemps, non par la loi ou la jurisprudence, mais par une tolérance empirique. Expliquons-nous. Depuis l'émancipation des juifs sous la Révolution française, personne n'a jamais songé à contester aux adeptes du judaïsme leur pratique de la circoncision. L'arrivée massive en France d'immigrés musulmans, qui se livrent à la même pratique, n'a rien changé à cette situation, ou plutôt à ce «déni social de réalité» […]. Même si elle est beaucoup moins mutilante que l'excision, la circoncision religieuse n'en reste pas moins une ablation volontaire opérée sur un sujet incapable de s'y opposer mentalement ou physiquement. L'article 16-3 du code civil est sur ce point parfaitement clair […]. Une partie non négligeable de l'actuelle population française se trouve ainsi, de facto, dans l'illégalité la plus flagrante et serait donc passible d'une condamnation pénale… On mesure la justesse et, tout ensemble, la ridicule absurdité d'une telle conclusion. On mesure encore mieux l'imbécillité ou la mauvaise foi d'une querelle à propos du voile, quand on tolère en même temps, depuis plus de deux siècles, une mutilation, non pas thérapeutique, mais culturelle et/ou religieuse. […] En s'attaquant de front à la question du port du voile, la République française, laïque et démocratique, se voile les yeux sur d'autres pratiques, invisibles et non prosélytes, sans doute, mais mutilantes, radicalement illégales et pénalement condamnables… Cela donne à réfléchir.
On assiste depuis plusieurs années à l'émergence, dans le discours politico-médiatique, d'un nouveau groupe de type racial, les «Musulmans», qui n'était auparavant qu'un qualificatif religieux. On peut comparer ce passage du religieux au racial à l'histoire des Juifs en Europe. L'expression «les Juifs» y désigne traditionnellement «un peuple», une «nation», ce que portait le mouvement sioniste, ou même une «nationalité», dans l'URSS de Staline. C'est-à-dire que faire ou non partie d'un groupe «les Juifs» , au niveau individuel, ne relève pas d'une foi ou d'une pratique religieuse, ni même de l'adhésion à un ensemble de valeurs culturelles; c'est par la naissance et de manière définitive qu'on est ou non Juif, ce qui détermine bien un groupe de type racial, même si, depuis quelques décennies, la destruction de la majorité des communautés juives d'Europe lors de la Seconde Guerre mondiale et la culpabilité collective à ce propos ont légèrement desserré l'étau identitaire. Durant des siècles, l'antisémitisme banalisé a séparé les juifs d'Europe des populations parmi lesquelles ils vivaient. Or, ces dernières années, l'expression «les Musulmans» a acquis ce même sens racial. Être assigné à ce nouveau groupe signifie être en marge de la nation, si ce n'est tout à fait à l'extérieur. Ceci révèle à la fois l'influence, d'une part, de l'histoire coloniale française, car en Algérie ce qui faisait l'indigène c'était sa qualité de «musulman», qui n'avait rien à voir avec la foi ou la pratique, et, d'autre part, de la mondialisation, au sens où, en Europe comme ailleurs, la catégorie «Musulmans», est fréquemment utilisée pour définir un groupe racial.
Les Ghettos de la nation, Jérémy Robine, éd. Vendemiaire, 2011, p.181-182
Jean Delaunay
Les engagés algériens et marocains constituaient l'essentiel des troupes du Corps Expéditionnaire Français d'Italie. Ils ont fait la preuve de leur bravoure et de leur fidélité à la France […]. Il en résulte que nous avons une immense dette de reconnaissance à la fois vis-à-vis de ces soldats maghrébins et de leurs descendants, et vis-à-vis de leurs chefs.
«Préface», Jean Delaunay, dansDe Sétif à Marseille, par Cassino: Carnets de guerre de Jean Lapouge, sous-lieutenant au 7e RTA, Jean Lapouge, éd. Anovi, 2006, p.9
Jacques Marquette
Il serait inadmissible que dans la communauté française de demain, les héros de la campagne de libération, descendants des glorieux tirailleurs qui à l'Alma, à Solférino, à Wissembourg, à Verdun et devant la ligne Maginot versèrent leur sang pour la France continuent à être traités en Français auxiliaires.
Une France nouvelle pour le monde nouveau, Jacques Marquette, éd. La Maison française, 1944, p.133
Henri-Irénée Marrou
Comment ne me sentirais-je pas solidaire de ceux que l'ordonnance du a appelé «les Français Musulmans»? Les ayant conquis autrefois, nous les avons pris en charge; aussi bien n'avons-nous jamais hésité à les intégrer à notre nation, aussi longtemps qu'il s'agissait de travailler pour elle dans nos usines et nos chantiers, de combattre ou de mourrir: hier encore, traversant la Beauce, je me suis arrêté devant un cimetière militaire à dénombrer les tombes marquées du croissant de l'Islam — soldats tombés pour la France, sacrifiés pour retarder la retraite de l'été 40…
Extrait d'un texte paru dans le Monde du .
Crise de notre temps et réflexion chrétienne de 1930 à 1975 (recueil), Henri-Irénée Marrou, éd. Beauchesne, 1978, «France ma patrie»,p.176
René Martial
La langue arabe, comme la religion coranique, font partie maintenant de la patrie française et de ce chef ont droit de cité. Les Arabes n'ont-ils pas donné sans compter leur sang pour la France en 1870 et en 1914, n'ont-ils pas pris part à toutes nos expéditions coloniales? Pourquoi donc ne pas prendre vis-à-vis d'eux, de leur psychologie, de leur langue, de leur religion, toutes les mesures qui leur sont dues?
La Race française, René Martial, éd. Mercure de France, 1934, p.258
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