Aucune route n'était tracée dans la forêt; mais, avec l'instinct du chasseur et la science du marin, il n'eût qu'à jeter un coup d’œil sur la terre et le ciel pour s'orienter à l'instant; il s'avança donc sans hésitation, comme s'il eût été familier avec ces immenses solitudes; plus il pénétrait dans la forêt, plus elle prenait un caractère grandiose et sauvage. Peu à peu la voûte feuillée s'épaissit au point que le soleil cessa d'y pénétrer; les arbres poussaient rapprochés les uns des autres, droits et élancés comme des colonnes supportant un toit impénétrable à la lumière. Le vent lui-même passait sur ce dôme de verdure, mais sans se glisser dans ce séjour des ombres: on eût dit que, depuis la création, toute cette partie de la forêt avait sommeillé dans un crépuscule éternel.
Le Capitaine Pamphile(1839), Alexandre Dumas, éd. Gallimard, coll.«Folio Classiques»,2003 (ISBN978-2-07-042652-2), chap. XII Comment le capitaine Pamphile passa deux nuits fort agitées, l'une sur un arbre, l'autre dans une hutte,p.165
Du haut d'un tertre ils aperçurent le dessus de la grande forêt qu'ils étaient en train de traverser. Elle était fourrée comme une peau de mouton. Elle couvrait un pays bossu, bleu sombre, sans grand espoir. Les arbres se réjouissaient égoïstement de la pluie proche. Ces vastes étendues végétales qui menaient une vie bien organisée et parfaitement indifférente à tout ce qui n’était pas leur intérêt immédiat étaient aussi effrayantes que le choléra.
Voici le bois des contes, avec ses loups mangeurs d'hommes, ses sorcières et ses géants, mais où l'on trouve aussi le bon chasseur, les haies de roses de la Belle au Bois dormant, à l'ombre desquelles le temps suspend son vol.
Traité du rebelle(1951), Ernst Jünger(trad. Henri Plard), éd. Christian Bourgois, 1981, p.75
Le recours aux forêts demeure possible, lors même que toutes les forêts ont disparu, pour ceux-là qui cachent en eux des forêts.
Graffiti/Frontalières(1966), Ernst Jünger(trad. Henri Plard), éd. Christian Bourgois, coll.«10/18»,1977, p.179
C'est au cœur de l'hiver qu'il m'arrive de glaner auprès de mes pins quelque chose de plus important que la politique des bois ou les nouvelles de la météo. Cela arrive de préférence par quelque soirée lugubre, quand tous les détails superflus sont ensevelis sous la neige et que le silence de la tristesse élémentaire pèse à nouveau sur toute forme de vie. Mes pins se tiennent droits comme des piquets, chacun sous sa charge de neige, en rangées successives; dans la pénombre derrière eux, je sens la présence des autres par centaines. Dans ces moments-là, je ressens une curieuse transfusion de courage.
Almanach d'un comté des sables, Aldo Leopold, éd. Aubier, 1995 (ISBN2700728475), partie I («Almanach d'un comté des sables»),p.118
J'aime la forêt. On vit mal dans les villes: il y a trop d'humains en rut.
Ne vaut-il pas mieux tomber aux mains d'un meurtrier que dans les rêves d'une femme en chaleur?
Ainsi parlait Zarathoustra, Friedrich Nietzsche(trad. Georges-Arthur Goldschmidt), éd. Le Livre de Poche, coll.«Les Classiques de Poche»,1972 (ISBN978-2-253-00675-6), partie I,chap. «De la chasteté»,p.72
Dans la rêverie d'Edgar Poe, pour un rêveur vivant, fidèle à la clairvoyance du rêve, comme Edgar Poe, une des fonctions du végétal est de produire de l'ombre comme la seiche produit de l'encre. A chaque heure de sa vie la forêt doit aider la nuit à noircir le monde.
L'eau et les rêves — Essai sur l'imagination de la matière(1942), Gaston Bachelard, éd. Le Livre de Poche, coll.«Biblio Essais»,1993 (ISBN978-2-253-06100-7), partie IV,chap. II Les eaux profondes — Les eaux dormantes — Les eaux mortes, «L'eau lourde» dans la rêverie d'Edgar Poe,p.67
La forêt de Cahoonzie ne ressemblait pas tellement à la Kadicha, mais, en y pénétrant, Gibran sentit ses souvenirs d’enfance remonter à la surface comme une épave. Les cascades, les rochers, les conifères, les oiseaux... Comment ne pas penser à la Vallée sainte en s’immergeant dans cette oasis de verdure?
Kadicha, Alexandre Najjar, éd. Plon, 2011, p.217
Si vous mettez dix survivalistes dans une forêt pendant des mois, explique-t-il, ils vont s'entretuer et détruire la forêt. Si vous mettez dans la même forêt dix Amérindiens, non seulement la forêt sera plus belle et productive, mais ils auront constitué une tribu, une vraie communauté d'humains en lien avec les autres êtres vivants.
Une autre fin du monde est possible, Gauthier Chapelle, éd. Seuil, 2018 (ISBN9782021332582), p.24
Ce manque de considération des forestiers pour la forêt et ses habitants me désole profondément. Une forêt, c'est avant tout une communauté d'arbres qui accueille d'autres communautés végétales et animales. Lorsque l'équilibre sylvestre est ébranlé, ce sont toutes les communautés qui sont fragilisées. La forêt, c'est le reflet de la vie: complexe, mystérieuse, changeante. Elle offre à ses habitants ressources, protection, ombrage, réconfort, beauté et, surtout, elle est d'une grande importance biologique.
L'homme-chevreuil, Geoffroy Delorme, éd. Les Arènes, 2021 (ISBN9791037502810), p.177
La forêt est féconde, elle nous apporte nourriture et médicaments. Sans elle, nos paysages ne seraient que désolation et la vie serait réduite au silence le plus complet. C'est elle qui purifie l'atmosphère et nous permet de respirer l'oxygène, indispensable à tous les êtres vivants. Sans la forêt, il n'y a pas de vie animale, alors respectons-la, respectons les animaux qui y vivent et n'oublions pas, par égoïsme, cette dette que nous avons envers elle.
L'homme-chevreuil, Geoffroy Delorme, éd. Les Arènes, 2021 (ISBN9791037502810), p.251
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