Convaincu d'être le seul à détenir la vraie foi, chaque groupe qualifiait en outre les deux autres d'«hérétiques», «mécréants» ou «infidèles». Ces qualificatifs étaient également appliqués aux juifs locaux, romaniotes de langue yévanique ou mizrahites de langue mizrahique.
Romioi (Ῥωμαίοι, Romées): les Romains d'Orient[2].
«Saracènes» (Σαρακηνοί): musulmans, selon la forme grecque Σαρακηνός du mot arabe sharqiyyin et par analogie avec les Saracènes bibliques.
Termes utilisés par les sources musulmanes:
«faranja» (adj. pl. فرنجة): forme arabe de francs.
Plus tard et par métonymie, le mot franc a fini, en Orient, par désigner tous les occidentaux, catholiques ou non (comme dans le cas du marchand Jacob Lejbowicz, surnommé Jacob Frank).
«rūm», «roum» ou «roumi» (روم): les byzantins, car jusqu'en 1557 l'adjectif «byzantin» n'existait pas, le nom officiel étant Empire romain d'Orient. Le mot arabe roumi a fini par désigner tous les chrétiens indifféremment de leur obédience[3].
Autres termes:
États «latins» ou «francs»: États dont le christianisme est catholique de rite latin et dont les langues sont le latin, l'italien ou le français.
«Levantin»: Oriental latinisé, parfois devenu catholique et intégré dans la société des royaumes croisés mais gardant ses rites et coutumes orientales[7].
«Poulain»: «Franc» (occidental) né dans le pays, hellénisé ou arabisé et connaissant ou ayant adopté la langue et les mœurs des Orientaux tout en gardant sa foi catholique[8].
«Chiennaille»: surnom péjoratif des croisés désignant les combattants musulmans, équivalent des surnoms kalbaكلبة ou eahiraعاهرة donnés par les musulmans aux chrétiens.
«Nègres»: nom donné par les croisés aux fantassins musulmans des armées de Saladin, originaires d'Afrique sub-saharienne; pas forcément péjoratif à l'époque car en ancien français, en langue d'oc et dans les autres langues romanes les mots nègre ou negro signifient simplement «noir»[10].
«Guèbre» (du persan گبر, gabr soit «zoroastrien»): devenu par métonymie synonyme de «Cafre»[12].
La Reconquista se déroule dans la péninsule Ibérique entre 711 et 1492. Ici aussi trois religions monothéistes sont en présence (chrétiens, musulmans, juifs) mais deux seulement se disputent le pouvoir politique et s'affrontent militairement (chrétiens et musulmans); ici aussi chaque groupe est convaincu de détenir la seule vraie foi.
Terminologie pendant et à l'issue la Reconquête ibérique
Mozarabe (de l’arabe مستعرب, musta’rib soit «arabisé»):
Usage dans l'historiographie chrétienne: chrétiens d'Al-Andalus.
Usage dans les royaumes chrétiens médiévaux: nom donné aux populations chrétiennes vivant en territoire sous domination musulmane et linguistiquement arabisées.
Usage dans les territoires sous domination musulmane: toute personne sans filiation arabe, linguistiquement arabisée, indépendamment de sa religion.
Exemple spécifique: le clan des Banu Qasi, issu d'une famille de nobles autochtones d'Hispanie (la famille Cassius), évoluant en zone frontière.
Mudéjar (de l'arabeمدجّن, mudaʒʒan soit «domestique», «domestiqué»): musulmans devenus sujets des royaumes chrétiens après le XIesiècle.
Nazaréen: terme d'al Andalus désignant les chrétiens.
Convivencia: terme moderne pour définir les périodes où les pouvoirs musulmans ou chrétiens tolérèrent sous leur autorité des croyants d'autres confessions.
Marrane: personne convertie au christianisme, mais pratiquant en secret (ou soupçonnée de le faire) sa religion antérieure. L'usage contemporain du terme a perdu sa connotation péjorative historique, mais il est souvent remplacé par crypto-judaïsme pour les juifs et takiya pour les musulmans.
Les noms composés modernes se référant aux personnes ou au pays, qui sont connotés par leur évocation du mélange, et reflètent mal en cela la diversité d'Al-Andalus, peuplé d'origines aussi diverses que d'Africains et de Syriens, compte tenu de la multitude des pays concernés par la conquête musulmane faisant suite à l'hégire.
arabo-berbère, arabo-musulman, hispano-arabe (population arabo-berbère installée en Espagne), hispano-mauresque (art), arabo-andalou ou arabo-espagnol (moins courant).
En outre, dans l'aire géographique où coexistèrent des États de confession musulmane et d'autres de confession chrétienne survivants de l'Espagne wisigothe, il était d'usage courant qu'un intervenant, qui passait la frontière pour offrir ses services à l'un ou l'autre des royaumes, soit connu sous un nom arabe et un nom chrétien, parfois de consonance gothique.
Le plus connu d'entre eux est le cid Campeador ou sidi Roudrigh (سد ردرع).
Usâma ibn Munqidh (1095-1188), Les enseignements de la vie, souvenirs d'un gentilhomme syrien, traduction d'André Miquel, Éd Imprimerie nationale, (ISBN2-11-080785-7), p.277 note no18
Le malentendu n'a pas disparu au XXIesiècle: en décembre 2020, l'arbitre roumain Sebastian Colțescu parlant à un de ses compatriotes a prononcé dans sa langue le mot negru («noir»), entendu par Pierre Webó comme négro; les joueurs des deux équipes quittèrent le terrain et la partie de football fut interrompue; l'enquête dissipa rapidement le malentendu, Colțescu et Webó se serrèrent la main, mais, médiatiquement lynché comme «raciste», Colțescu fut tout de même suspendu pour la saison pour «comportement inapproprié ayant mené à l'interruption d'un match»: (en-US) «Despite 'inappropriate behavior,' UEFA clears officials of alleged racist abuse during Champions League game», sur CNN (consulté le )