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confrérie musulmane soufie De Wikipédia, l'encyclopédie libre
La Tijāniyyah ou ṭarīqah al-Tijāniyyah (en arabe : الطريقة التجانية (Al-Ṭarīqah al-Tijāniyyah), littéralement « la voie tijanie », variantes tidiane, tidjane, tidjanie) est une confrérie (ṭarīqah) soufie, fondée par Aḥmad Al-Tijānī en 1782[4],[5].
Confrérie tijanie | |
Situation | |
---|---|
Région | Maghreb, Afrique de l'Ouest, Afrique du Nord, Indonésie |
Création | XVIIIe siècle |
Type | Confrérie soufie |
Siège du califat | Aïn Madhi (Algérie)[1],[2],[3] |
Organisation | |
Membres | + de 200 millions en 2020 |
Calife mondial de la Tijāniyyah | Sīdī 'Ali Bel 'Arbi Tijani |
Autres noms | Aḥmadīyyah, Muḥammadīyyah, Ibrāhīmīyyah Ḥanīfīyyah |
Personnes clés | Sīdī Aḥmad Al-Tijānī (fondateur), Ibrahim Niasse |
Organisations affiliées | Islam, Sunnisme, Soufisme |
Site web | www.tidjaniya.com |
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Cette confrérie musulmane est la plus répandue d'Afrique de l'Ouest[6]. Elle est aussi largement présente au Maroc et en Algérie mais aussi de manière plus restreinte en Tunisie, Libye, Égypte, Indonésie et dans le reste du monde.
La tijānīyyah est née en l’an 1196 de l’Hégire (1781-1782 de notre ère) lorsque le cheikh Aḥmad Al-Tijānī, à 46 ans, lors d'une retraite spirituelle dans une oasis proche de Boussemghoun (Régence d'Alger), eut une expérience mystique en rencontrant le Prophète Mahomet dans un état de veille, en plein jour, lui annonçant qu’il est désormais son initiateur direct et le seul guide spirituel dont il aura besoin. Avec cette rencontre, il est investi d’une mission unique : guider les âmes vers Dieu sans autre intermédiaire.
La naissance de la ṭarīqah Tijāniyyah est marquée par ce lien direct avec le Prophète, une particularité qui en fait une voie spirituelle unique. Cette transmission directe confère à la Tijāniyyah un statut particulier. Le Prophète Mahomet lui ordonne alors de se détacher de toutes les autres voies et pratiques qu’il avait reçues auparavant, lui conférant l’autorisation exclusive de transmettre cette voie bénie.
Le (18 safar 1214 de l'Hégire), Sīdī Aḥmad Al-Tijānī reçoit le statut de « Pôle caché ». Dans la hiérarchie spirituelle islamique, cela en fait un médiateur privilégié entre le Prophète et les autres fidèles. On rapporte que le Prophète lui a conféré le rang spirituel du « Sceau de la Sainteté » (khātm al-awliyā'), lui révélant le Nom Suprême de Dieu (ism Allāh al-a'ẓam). Ce statut lui octroie une mission sacrée, celle de guider spirituellement les hommes et de servir de calife spirituel sur terre, assurant la médiation divine[5].
Son ordre prend rapidement une expansion importante sur la région à partir de Aïn Madhi, ce qui provoque l'inquiétude des autorités du diwan de la Régence d'Alger et il est contraint de se réfugier à Fès où il s'installe jusqu'à sa mort en 1815 sous la protection du sultan alaouite Slimane[6].
Son enseignement a été compilé par un de ses compagnons du nom de ʿAlī Ḥarāzim Barādah, dans Jawāhir al-Ma'ānī, un livre à propos de la vie et des enseignements de Sīdī Aḥmad Al-Tijānī. L'ouvrage avait déjà fait l'objet d'une glose marginale par le saint et érudit de la tijānīyyah, El Hadji 'Umar bin Said al-Futi (1796-1864)[5], dans Al-Rimāḥ (Les Lances).
Dans le cadre de sa résistance contre l'armée coloniale française, l’émir Abdelkader sollicita, en 1832, le soutien de Sīdī Muḥammad al-Ḥabīb al-Tijānī, fils de Sīdī Aḥmad al-Tijānī et dirigeant de la zaouïa tijāniyyah de Aïn Madhi. Cependant, Sīdī Muḥammad al-Ḥabīb refusa, affirmant que sa zaouïa se consacrait exclusivement aux affaires spirituelles et ne s’impliquait pas dans les conflits terrestres.
En juin 1838, face à une situation tendue et influencé par des rapports de fauteurs de troubles, l’émir Abdelkader marcha sur Aïn Madhi, déclenchant un siège qui dura plusieurs mois. Sīdī Muḥammad al-Ḥabīb et ses partisans résistèrent fermement, bien que des négociations infructueuses aient été tentées. Finalement, un accord permit aux habitants de la forteresse de quitter les lieux en sécurité, ce qui permit à l’émir d’entrer à Aïn Madhi sans effusion de sang.
Par la suite, des divergences d’approche face à l’occupant se manifestèrent parmi les différentes zaouïas tijānies. La zaouïa de Aïn Madhi, sous la direction de Sīdī Muḥammad al-Ḥabīb, ainsi que celle de Tamacine, adoptèrent une position de neutralité, refusant d’apporter leur soutien à l’émir. En revanche, la zaouïa de Tlemcen, dirigée par Shaykh Ṭāhir, soutint activement l’émir Abdelkader et proclama le djihad contre les forces françaises.
Finalement, l'émir Abdelkader se rendit compte de la sincérité de Sīdī Muḥammad al-Ḥabīb et lui rédigea une lettre d'excuses aujourd'hui conservée à Aïn Madhi[7].
Au milieu du XIXe siècle, 'Umar bin Said al-Futi, un Fulbe du Sénégal, assume la direction des Tijanis et le rôle de mujahid (guerrier de la foi), lançant un mouvement militant pour le djihad anticolonial en Afrique de l’Ouest, du Sénégal au Ghana et au Soudan nilotique[5].
Le contact direct avec le Prophète dont se prévalait le fondateur de la tijānīyyah est un atout important de la nouvelle confrérie dans la mesure où il raccourcit de façon spectaculaire la chaîne de transmission des fidèles (silsilah), rendant ces derniers plus proches de Mahomet[8] que ce dont pouvaient se prévaloir les autres confréries. La tijānīyyah se veut en outre exclusive alors que l'affiliation multiple à des tariqas était généralement admise[8]. Elle se heurta d'ailleurs rapidement aux autres tariqas qui dénonçaient cette arrogance[8].
La doctrine de la tijānīyyah est décrite comme l'accès à la connaissance de Dieu par le fanâ’ et le baqa’.
Elle doit sans doute une partie de son succès du fait qu'elle propose une voie plus sûre, plus rapide et moins ascétique que les autres ṭarīqah[8].
La doctrine de la tijānīyyah repose sur un ensemble de pratiques spirituelles spécifiques et sur une fidélité rigoureuse aux principes établis par le fondateur. Elle met l’accent sur une relation directe entre le disciple et le Cheikh (Sīdī Aḥmad Al-Tijānī), excluant toute affiliation à d’autres voies soufies[9]. L'essence de la Ṭarīqah est centrée sur :
La Ṭarīqah Tijānīyyah se distingue également par son respect de tous les prophètes et compagnons du Prophète Mahomet, tout en encourageant les disciples à s’éloigner de toute animosité envers la voie ou ses membres[9].
La ṭarīqah Tijānīyyah se compose de plusieurs litanies (awrād). Le disciple est tenu de les réaliser quotidiennement, ou hebdomadairement le vendredi pour la haylalah, sous peine d'excommunication de la ṭarīqah.
Pour réciter les litanies, le disciple tijānī doit être en état d'ablutions, il doit se trouver dans un endroit pur, de même pour ses habits et son corps. Sa ‘awrah doit être couverte, il doit avoir l'intention de réciter une litanie, et il ne doit pas parler du début à la fin.
Le lāzim consiste en la récitation, matin et soir, seul et à voix basse de :
La waẓīfah consiste en la récitation, matin et/ou soir, en groupe et à voix haute de :
La haylalah consiste en la récitation, tous les vendredis après la prière du ‘aṣr, en groupe et à voix haute de :
Dans la ṭarīqah tijāniyyah, le rôle de calife (ou khalife) revêt une importance centrale, car il s’agit de la figure spirituelle et administrative qui assure la continuité de la voie après le fondateur, Sīdī Aḥmad Al-Tijānī. Le calife est chargé de préserver et transmettre les enseignements de la voie, d'encadrer la communauté des disciples et de veiller à la conformité des pratiques spirituelles aux principes fondamentaux établis par le Cheikh. En tant que guide spirituel, il incarne les valeurs de la ṭarīqah et apporte une orientation éclairée face aux défis sociaux, politiques et spirituels que peut rencontrer la Voie et ses disciples. Sa fonction garantit l'unité de la voie et la pérennité de ses enseignements à travers les générations. Depuis le décès de Sīdī Aḥmad Al-Tijānī, il y a eu 12 califes que voici [11]:
Ces califes ont chacun contribué à préserver et à transmettre l'enseignement de la ṭarīqah tijāniyyah, assurant ainsi la continuité spirituelle et la gestion de la voie à travers les époques.
Le centre intellectuel, culturel et historique de la tijānīyyah est Aïn Madhi en Algérie où se trouve le siège du califat avec le palais de Kourdane[3]. Le ksar abrite également la zaouïa mère de la confrérie qui conserve les tombeaux des chefs de la famille Tidjani[13]. En outre, Boussemghoun, où Aḥmad Al-Tijānī vit Mahomet en état de veille et où il résida pendant 13 ans, est le centre le plus important[3].
La ville de Fès au Maroc où Aḥmad Al-Tijānī a vécu une partie de sa vie (surtout vers la fin) et où se trouve son mausolée, est le lieu de pèlerinage de la tijānīyyah le plus visité dans le monde surtout par les ressortissants de pays subsahariens (Sénégal, Mali...).
Au Sénégal, autre place forte de la tijānīyyah, on peut visiter la cité de Kaolack où se trouve le tombeau de celui faisant partie de ceux qui l'ont plus vulgarisée dans ce pays, Elhadji Abdoulaye Niasse. Son fils, Elhadji Ibrahima Niass, a pour sa part propagé la tijānīyyah surtout en Afrique et dans les coins les plus reculés du globe. Il s’était proclamé détenteur de la Fayḍah Tijānīyyah, une branche de cette confrérie donnant accès à la connaissance divine et dont la venue avait été annoncée par Cheikh Aḥmad Al-Tijānī vers la fin de sa vie. C’est d’ailleurs pour cette raison que Cheikh Ibrahim Niass est aujourd’hui le plus connu de cette confrérie et ses disciples sont estimés à plus de 90% des adeptes de la tijānīyyah dans le monde. Bien avant Elhadji Abdoulaye Niass, Cheikh Oumar Foutiyou Tall était également un grand propagateur de la tijānīyyah au Sénégal et en Afrique de l’ouest. Il initia dans la voie, Elhadji Malick Sy, un autre grand de la tijānīyyah qui repose dans la cité de Tivaouane. Il faut aussi ajouter la cité de Médina Gounass, entre autres foyers très importants de cette voie majoritaire au Sénégal, comme en témoignent ses multiples mosquées qui résonnent dans chaque quartier à l'aube et au crépuscule, après les prières canoniques, au son des litanies de la voie, à l'heure de la waẓīfah, ces séances de dhikr collectif, propres à la tijānīyyah[14].
La tijānīyyah trouve son origine à Aïn Madhi[15], puis s'est diffusée dans un premier temps autour de Boussemghoun dans le désert algérien.
La tijānīyyah s'est ensuite répandue dans le reste du Maghreb et, de façon limitée[8], en Arabie saoudite.
Elle a surtout traversé le Sahara pour se diffuser en Afrique de l'Ouest (Mauritanie, qui allait devenir avant le Sénégal une plaque tournante[8] de la confrérie, Sénégambie, Mali, Burkina Faso), région où elle est aujourd'hui la confrérie la plus répandue, tout particulièrement au Sénégal, où elle jouit d'une influence inégalée[6].
Elle s'est implantée plus tard au Tchad, au Cameroun[16], au Soudan[8], au Nigéria, en Indonésie et au Pakistan. Elle est également présente en Libye, en Égypte, en Syrie, en France et aux États-Unis.
Le djihad mené entre 1852 et jusqu'à sa disparition en 1864 par El Hadj 'Umar Tall, chef de guerre, érudit musulman, fondateur de l'éphémère empire toucouleur et membre de la tijānīyyah, à travers toute l'Afrique de l'Ouest, contribua beaucoup à la diffusion de cette dernière dans la région[17]. Il revint du pèlerinage auréolé du titre de calife de la ṭarīqah en Afrique sub-saharienne, conféré par Muḥammad El GHÄLI, sur recommandation d'outre-tombe de Seydina Cheikh Aḥmad Al-Tijānī, fondateur de la voie.
Au Sénégal, deux dynasties familiales relaient le message spirituel de la tijānīyyah[6]:
Dans le centre, on retrouve El Hadji Amadou Dème (1890-1973), grand savant et écrivain à Sokone (Siné-Saloum).
Dans la région de Thiès, Elhadji Aḥmadou Barro Ndieguene (1825-1936 ?)[18] diffusa aussi la voie.
Les villes de Louga[3] avec Cheikhna Abbas Sall (1909-1990), Médina Gounass avec cheikh Mohamad siradji Dini Ba (1900-1980)[19], Bandiagara (Mali) et Chinguetti (Mauritanie) sont également des villes significatives.
Ses Khalifs:
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