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pasteur, figure de la Réforme protestante allemande (1489–1525) De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Thomas Müntzer (souvent orthographié en français : Münzer ou Muntzer, ou encore Munzer, ou en latin : Muncerus), né en 1489 (ou 1490) à Stolberg et mort le à Mühlhausen, est une grande figure de la Réforme protestante reconnu comme pasteur et prédicateur anabaptiste et un des chefs religieux de la guerre des paysans dans le Saint-Empire romain germanique au XVIe siècle. C’est un dirigeant révolutionnaire et l’un des principaux protagonistes de la Réforme, et plus particulièrement de la Réforme radicale.
Naissance | |
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Décès | |
Nom dans la langue maternelle |
Thomas Müntzer |
Formation |
Université de Leipzig (à partir de ) Université brandebourgeoise de Francfort (à partir de ) |
Activités | |
Conjoint |
Ottilie Müntzer (d) |
Conflit | |
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Mouvements | |
Personne liée |
Philippe Mélanchthon (épistolier) |
Site web |
Né de parents pauvres, Thomas Müntzer aurait perdu son père de bonne heure, et sa mère aurait subi des mauvais traitements sous prétexte d'indigence[2]. Son père est un pauvre artisan d'origine slave (Munczer), qui aurait fini ses jours pendu à la potence, sacrifié à l'arbitraire d'un comte. C'est donc livré à lui-même que grandit le jeune garçon, qui bénéficiera toutefois d'une « bonne éducation »[3],[4],[5]. Il étudia la théologie à l'université de Leipzig.
Il obtient sa première charge de prêtre auxiliaire dans la ville de Halle-sur-Saale (Saxe-Anhalt). Müntzer est d’abord un fidèle de Luther auquel il se rallie à Leipzig en 1519 et qui le nomme pasteur à Zwickau en Saxe en 1520. Une fois installé dans sa charge, Müntzer développe des idées personnelles sur la nécessité d’une révolution sociale[6]. Très vite, il veut atteindre la masse des analphabètes.
En 1521, il est donc dissident à trois niveaux :
À partir de fin 1523, Müntzer s’en prend dans ses écrits à Luther. Il profite de la révolte des Paysans pour répandre ses idées. En effet, l'agitation paysanne étant à son paroxysme en Saxe, il essaie de soulever les classes laborieuses contre les princes régnants et les ecclésiastiques. Il affirme que la trop forte quantité de travail nuit au salut des paysans car aliénés par l'obligation de cultiver, ils ne peuvent pas se consacrer à la Parole. Il prêche pour un rétablissement de l'Église apostolique par la violence s'il le faut, pour pouvoir préparer le plus vite possible le règne du Christ. Il a peut-être aussi participé à la rédaction des Douze Articles[7].
Finalement, après avoir été chassé de Zwickau à la suite d'une dispute avec le magistrat de la ville, puis de Wittemberg, et enfin d’Allstedt où il était arrivé en , Thomas Müntzer et son groupe prennent le pouvoir en février 1525 à Mühlhausen en Thuringe, où ils instaurent une sorte de théocratie « radicale et violemment égalitaire » et d’où ils participent, eux aussi, à la guerre des paysans[8].
Le , Thomas Müntzer et son armée sont aux portes de Frankenhausen, le 14, ils se mettent en ordre de bataille face aux adversaires et le a lieu le choc décisif. Ce jour-là, le soleil est providentiellement entouré d’une couronne inhabituelle. À cheval, Müntzer proclame à plus de 7 000 soldats paysans mal équipés et inexpérimentés que c’est un arc-en-ciel, signe de victoire. En fait, la bataille tourne au massacre : les deux armées princières composées de mercenaires professionnels lourdement armés, disposant de canons, commandées l'une par les ducs de Brunswick et de Saxe, l'autre par Philippe de Hesse, « le Magnanime », perdent six mercenaires pour massacrer environ 5 000 paysans.
Peu après, Müntzer est capturé dans une maison de Frankenhausen, où, blessé, il s'était réfugié. Après avoir avoué ses intentions subversives sous la torture, il se rétracte et, le , il est décapité à Mühlhausen (Thuringe) devant tout ce que la région compte de personnages de la haute noblesse. À l'attention du bon peuple, sa tête empalée est exposée sur les remparts de la ville.
Müntzer est un millénariste qui croit à l'avènement proche de Jésus-Christ, qui reviendra sur Terre pour procéder au jugement dernier. Il s'agit pour lui de préparer ce règne. En cela le théologien médiéval Joachim de Flore fut pour lui une source d'inspiration[9].
Dans des prêches et des écrits passionnés, il dénonce son ancien mentor, Luther, qu’il traite volontiers de menteur (« Lügner » en allemand), l'accusant de collusion avec les princes. Il rêve d’un avenir radieux où les opprimés prendraient la place de leurs oppresseurs.
L'idéologie de Müntzer peut se résumer en trois mots :
Le cadre théologique, dans lequel s’inscrit la conscience qu’il avait de sa mission, reste difficile à définir. En tant que théologien réformé ayant reçu une formation académique, il respectait la tradition confessionnelle de l’Église médiévale, mais il y mettait parfois des accents « personnels ». Sa proclamation était centrée sur la tâche de démasquer la foi « imaginaire », sur l’indispensable chemin de souffrance qui menait vers la foi vraie dans l’imitation du Christ, sur l’annonce du Jugement divin, dans le but de rétablir l’ordre originel de Dieu, avec la souveraineté immédiate de Dieu sur les hommes et des hommes sur les créatures. Dans son argumentation, Müntzer prenait appui sur la Bible, qu’il comprenait comme une unité conformément à la tradition de l’Église primitive. Dans son ensemble, l’époque apostolique avait pour lui une fonction normative plus forte que pour la plupart des théologiens de la Réforme. Pour la description du processus du salut, il utilisait des formes de pensée et d’expression de certains spirituels (pneumatikos) médiévaux ; pour ses annonces du Jugement et de l’avenir, il s’inspirait aussi de la tradition apocalyptique. Müntzer a combiné ces éléments traditionnels et ainsi associé les idées du processus de salut individuel avec une vision de la refonte du monde face à l’imminence du Jugement. La crainte des créatures (des puissants) était remplacée par la crainte de Dieu, et c’est bien là qu’était enraciné son appel à s’opposer résolument aux institutions fondées sur la crainte des créatures[10],[11].
Les réformes liturgiques de Thomas Müntzer, qu'il a entreprises lorsqu'il était pasteur d'Allstedt, entre 1523 et 1524, et qu'il a développées dans deux manifestes (Allstedter Kirchenampt et Deutzsch-Evangelisch Mesze), sont d'excellents exemples de la refondation d'une pratique cultuelle proprement protestante. Cette facette de l’œuvre de Müntzer, tout autant que ses compositions musicales, a exercé une influence bien au-delà de la mort du réformateur. Ses messes en allemand, dans lesquelles il a veillé à ne s'écarter qu'à la marge du rite catholique (en latin) et des heures canoniales, pour cependant en mettre le texte à portée des fidèles germanophones, ont été préservées et réimprimées à de multiples reprises dans plusieurs paroisses de Saxe et de Thuringe pendant plus de quatre siècles – sans toutefois que le nom de Müntzer y apparaisse.
Les écrits liturgiques de Müntzer constituent une tentative de transposer directement en allemand le texte des hymnes en latin (chant polyphonique) chantés à Allstedt. Par là, Müntzer est un pionnier de la messe en langue vernaculaire en Allemagne moyenne. Son impatience de transposer la richesse de la théologie protestante dans une liturgie proche des gens est manifeste et à Allstedt elle obtint d'emblée un énorme succès. Martin Luther et son entourage posaient un regard sceptique sur les réformes liturgiques de Müntzer, non qu'ils en condamnassent le contenu théologique, mais bien plutôt le souci d'adhésion que l'imprudent Müntzer manifestait.
Il faut supposer que la décision de Luther, d'orchestrer en 1526 sa Messe allemande, non sur les airs polyphoniques, mais plutôt sur des airs populaires d'Allemagne, se fonde sur l'intention consciente de se démarquer de Müntzer, après que la répression de 1525 (écrasement de la Révolte des paysans de Thuringe) eut montré combien la Réforme pouvait servir de prétexte aux autorités pour réprimer les conflits sociaux. Le mépris de Luther pour les réformes liturgiques de Müntzer (« Imiter, c'est bon pour les singes ») revient sans cesse en conclusion de ses Propos de table.
L’insistance de Müntzer sur la foi vécue par expérience, sa critique du baptême traditionnel et de l’ordre social existant, tout comme sa façon de prendre modèle sur l’époque apostolique rencontrèrent rapidement un certain succès là où se faisait jour une conception de la foi différente de celle des réformes de Luther et de Zwingli. Ses écrits influencèrent les proto-anabaptistes tel que Hans Denck de Nuremberg, le groupe de Conrad Grebel à Zurich, ainsi que des spiritualistes comme Sébastien Franck ou Valentin Weigel. Par la suite, Gottfried Arnold œuvra à nouveau pour une réception, même si ce n’était pas sans réserve. C’est surtout par les écrits polémiques de Wittenberg que la participation de Müntzer à la guerre des Paysans fut gardée en mémoire par les générations futures, de sorte qu’il fut considéré longtemps comme l’archétype du fanatisme et de la rébellion. Bien que ne partageant pas sa foi chrétienne, Engels, Marx et Kautsky verront en Thomas Müntzer un des premiers communistes, un révolutionnaire social à l’ombre de la croix. Puis plus tard, des chrétiens comme Vernard Eller et d'autres verront en lui le précurseur d'une forme d'anarchisme chrétien.
L'influence de Thomas Müntzer sur l’histoire du culte protestant et sur la piété de l’imitation du Christ, ainsi que son rôle dans la constitution d’une critique de l’autorité établie et d’une doctrine de la résistance confèrent à Thomas Müntzer une importance historique notable même s’il reste globalement ignoré dans les études sur la Réforme, en raison de son profil de religieux exalté et radical[8].
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