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structure regroupant des experts et produisant des études De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Un think tank (prononcé en anglais : [θɪŋk tæŋk][N 1]), groupe de réflexion[1] ou laboratoire d'idées[2],[3] est un regroupement d'experts au sein d'une structure de droit privé. Certains sont financés par des organismes étatiques. L'activité principale d'un think tank est de produire des études et d'élaborer des propositions, le plus souvent dans le domaine des politiques publiques ou de l'économie. Il réunit souvent autour d'une personnalité politique ou d'un parti politique des personnes désirant réfléchir sur une base non professionnelle à des problèmes relevant des politiques publiques.
En 2012, 6 603 think tanks[4] étaient répertoriés dans le monde, 6 480 en 2010[5] et près de 11 175 en 2020[6]. La création de think tanks a été massive de la fin des années 1960 au début des années 2000. Au plus fort de leur croissance, vers l'année 1996, il se créait dans le monde près de 150 think tanks par an. Depuis, la progression de leur nombre a fortement ralenti aux États-Unis[5], mais elle s'est accélérée en France, de même que s'est renforcé leur poids sur la décision politique[7]. Les États-Unis restent le pays qui compte le plus de think tanks, suivi depuis quelques années par la Chine[8].
Les think tanks ne visent pas seulement à réaliser des études originales. Un de leurs principaux objectifs est d'adapter les idées existantes aux « besoins et contraintes du monde politique »[9].
Les rôles des think tanks sont nombreux. Ils contribuent à la vie publique en faisant le lien entre le monde de la recherche et celui de la politique, et apportent une rigueur académique à l'étude des problèmes contemporains.
Pour James McGann (en), directeur du Think Tanks and Civil Societies Program (en) à l'université de Pennsylvanie et éditeur du classement mondial des laboratoires d'idées, ceux-ci « aident à mettre au point les agendas politiques et dressent des ponts entre le savoir et le pouvoir[8] ».
Pour Richard N. Haass[10], les laboratoires d'idées contribuent de cinq façons à la politique publique :
Plusieurs variétés de think tanks se distinguent :
La Fabian Society, créée à Londres en 1884 pour promouvoir des réformes sociales, est considérée comme le plus ancien think tank[18]. Viennent ensuite la Fondation Carnegie pour la paix internationale (1910), créée par l'Institut économique de Kiel (Allemagne, 1914), et enfin l’Institute for Government Research qui deviendra la Brookings Institution (1916). À la fin de la Première Guerre mondiale émergent deux think tanks consacrés aux relations internationales : Royal Institute of International Affairs (1920) et le Council on Foreign Relations (1921)[19].
La Seconde Guerre mondiale et l'immédiat après-guerre voient l'émergence de nombreux think tanks : American Enterprise Institute (1943), Rand Corporation (1946), Société du Mont-Pèlerin (1947), Institute of Economic Affairs (1955), Hudson Institute (1961)[19]. Et c'est en Allemagne qu'entre 1945 et 1975 apparaissent 40 % des think tanks[20].
Depuis 1973, une montée en puissance de think tanks proches de Reagan et de Thatcher est observable dans les pays anglo-saxons tel que : Heritage Foundation, Cato Institute, Adam Smith Institute (qui aurait été destiné « à contrer les idéaux keynésiens »[21]). Les think tanks vont d'une certaine façon suivre et amplifier les divergences idéologiques qui commencent à se creuser dans ces pays. En réaction, des think tanks plus progressistes vont être créés, tel l'Institute for Public Policy Research. Néanmoins, durant cette période, ce sont plutôt les think tanks conservateurs qui vont être les plus influents et donner le ton. En politique internationale, le Project for the New American Century, créé en 1977, aura une forte influence sur le président George W. Bush, notamment dans sa politique irakienne[22].
En France, le poids de l'appareil d'État sur l'expertise a pu gêner le développement d'une pensée indépendante de l'État[23]. La création de l'IFRI en 1979 marque un tournant, alors que, parallèlement, la nécessité d'une réflexion et d'une pensée issues de la société civile se fait jour, et que l'idée que « la France perd la bataille de la diplomatie intellectuelle en Europe[24] » devient plus prégnante. Aussi, les années 1990-2000 voient-elles la création de nombreux think tanks[25] comme L'institut Montaigne (2000), La République des idées (2002), Fondapol (2004), précédés par la Fondation pour la Recherche Stratégique, (1992), l'Institut de relations internationales et stratégiques, Notre Europe (1996) et EuropaNova (2002). Dans les années 1990 et 2000, la haute administration se rapproche de l’entreprise et banalise le recours aux cabinets de conseil[26].
Cette montée en puissance des think tanks en France n'est pas isolée. En règle générale, la chute du mur de Berlin voit l'éclosion de nombreux think tanks, notamment dans les anciens pays communistes. Aux États-Unis, les démocrates et les libéraux, qui ont l'impression d'avoir en partie perdu la bataille des idées, vont étudier les moyens de renforcer les think tanks proches d'eux-mêmes et de mieux les financer, de façon à rattraper leur retard[27]. En fait, aux États-Unis, les liberals classés à gauche sont alors puissants dans les universités, mais leurs think tanks ont pris du retard.
Le programme « Think Tanks and Civil Societies Program (TTCSP) » créé en 1989 au sein de l’institut Lauder de l’Université de Pennsylvanie, publie annuellement depuis 2007[28] un index mondial des think tanks[29]. Résultat d'une enquête internationale menée auprès d’universitaires, donateurs publics et privés, décideurs politiques et journalistes, ce travail permet de classer plus de 6 500 think tanks en utilisant une série de 18 critères élaborés par le TTCSP[29].
Si l'on prend le détail par région, sur un total de 6 305 think tanks répertoriés dans le monde en 2009, l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient comptent 7,8 % du total des think tanks, l'Afrique subsaharienne 7 %, l'Asie 16,7 %, l'Europe 27,5 %, l'Amérique latine et les Caraïbes 10,8 %, l'Amérique du Nord 30 % et l'Océanie 0,5 %[5]. L'index réalisé par le département de l'université de Pennsylvanie permet de voir quels sont les think tanks importants selon ses critères dans chaque région.
Selon le rapport de l'Université de Pennsylvanie de 2010 — qui peut être sujet à certaines critiques méthodologiques[33] —, le top 25 s'établit ainsi :
En 2016, la Suisse comptait 73 think tanks, occupant ainsi la 15ᵉ place du classement de l’Université de Pennsylvanie[38].
Ces groupes de réflexion traitent principalement de questions économiques comme Avenir Suisse le think tank libéral qui développait des idées pour le futur de la Suisse[39], de questions relatives à la sécurité (Centre de Genève pour la gouvernance du secteur de la sécurité) ou encore à la politique étrangère (Foraus (de)). Parmi les think tanks les plus connus au niveau international figure le World Economic Forum, dont la rencontre annuelle à Davos est l’un des plus importants rendez-vous entre dirigeants politiques et économiques[40].
Les États-Unis est le pays qui compte le plus de think tanks[41] ; c'est même de ce pays qu'est venue l'expression de lobby pour les désigner. La capitale, Washington, compte 393 think tanks (un cinquième du total). Pour Peter Singer[N 2], cette ville est d'une certaine façon celle de « l'industrie des idées ». Les think tanks sont particulièrement nombreux sur Massachusetts Avenue, avec notamment la Brookings Institution (au sommet du classement depuis plusieurs années) et le Carnegie Endowment for International Peace.
Les think tanks ont une influence assez forte. L'idée du plan Marshall vient de travaux de la Brookings Institution[8]. L'Heritage Foundation, à travers notamment son Mandate for Leadership, a dressé les contours des politiques mises en œuvre par le président Reagan[8]. Plus récemment, certains think tanks ont soutenu la guerre en Irak, tandis que d'autres, quand la situation s'est dégradée, ont conçu entre 2004 et 2006 la politique alternative qui a été adoptée dans un second temps[8].
Si ce pays compte des think tanks conservateurs tel l'Heritage Foundation, il compte aussi des think tanks progressistes comme le Center for American Progress (créé en 2003) pour jouer, côté démocrate, un rôle similaire à celui de l'Heritage Foundation. À côté de ces think tanks engagés, le Council on Foreign Relations, la Brookings Institution et la Rand Corporation se veulent non-partisans. Il est possible de citer d'autres think tanks influents comme le Project for the New American Century[42], le Cato Institute (libertarien), la Hoover Institution, la Brookings Institution, la RAND Corporation, le German Marshall Fund of the United States ou encore l'American Enterprise Institute[43].
Il est à noter que souvent les think tanks servent de vivier pour les administrations américaines et, parfois, de base de repli en cas de changement politique ; les critiques concernant cette pratique parlent de revolving doors. Plus de 60 % des secrétaires d'État assistants du ministère américain des Affaires étrangères (State Departement) sont issus des think tanks[8].
Le Canada compte en 2013 plus de 130 think tanks. Le pays connait un véritable essor des think thanks qu'au cours du dernier tiers du XXe siècle. Il comporte aujourd'hui une diversité importante d'organisations œuvrant à produire et à diffuser des connaissances, des analyses et des commentaires liés aux politiques publiques fédérales, provinciales et internationales. Au Québec, on trouve l'Institut d'études internationales de Montréal (IEIIM) , le Centre de recherche interdisciplinairesur la diversité et la démocratie (CRIDAQ) ou encore le Centre d'études sur l'intégration et la mondialisation (CEIM).
Lancé en 2008 par le Centre de recherches pour le développement international (CRDI), l'initiative Think Tank (ITT) vise à renforcer les capacités des instituts indépendants de recherche sur les politiques publiques dans les pays en développement. Le Fraser Institute se classe 16e au rang des top think tanks mondial d'après le rapport 2018 Global Go to Think Tank Index Report du TTCSP Global Go To Think Index Reports.
La communauté politique canadienne du dernier tiers du XXe siècle a dû composer avec la croissance exponentielle des sciences sociales dans les universités et le déploiement particulièrement prononcé de ces sciences dans les débats publics et les forums d'élaboration des partis politiques. À partir de cette époque, la multiplication des think tanks canadiens participe à la constitution d'un contexte d'élaboration des politiques publiques plus ouvert et distendu, mais aussi plus compétitif et fragmenté[44].
La Grande-Bretagne compte en 2010 environ 278 think tanks. Le pays compte cinq think tanks classés dans le top 25 mondial[45] : Chatham House (quatrième), Amnesty International (cinquième), International Institute for Strategic Studies (quatorzième), Human Rights Watch (seizième), Adam Smith Institute (dix-neuvième). Le Royaume-Uni est particulièrement bien placé dans le domaine des think tanks concernant la « bonne gouvernance » et la « transparence » avec Transparency International (premier dans le domaine), Amnesty International (second), Human Rights Watch (troisième), Oxford Council on Good Governance (huitième), le Mo Ibrahim Foundation (onzième), Taxpayers Alliance (douzième)[46]. Le pays compte également trois think tanks de rang mondial au niveau environnemental[47] avec Chatham House, l’International Institute for Environment and Development et E3G, Third Generation Environmentalisme. Le Royaume-Uni compte aussi un think tank de niveau mondial dans le secteur des sciences et technologies[48] avec le Science and Technology Policy Research. Le pays a également trois think tanks affiliés à un parti politique de niveau mondial avec le Centre for Policy Studies, Demos et la Fabian Society[49]. Dans le domaine de la sécurité et des relations internationales, la Grande-Bretagne compte quatre des 25 meilleurs think tanks : International Institute for Strategic Studies (sixième), Chatham House (huitième), Human Rights Watch (douzième), ainsi que European Council on Foreign Relations (dix-septième)[50].
Bruxelles, siège de la Commission européenne, compte trois institutions à vocation mondiale ou européenne figurant dans le top 25 des meilleurs think tanks mondiaux : International Crisis Group (11e rang), Centre for European Policy Studies (15e rang), et Bruegel (think tank) (18e rang)[51].
Le fait que les institutions européennes aient souvent leur siège à Bruxelles explique aussi que la Belgique compte quatre think tanks affiliés à un parti politique figurant au top 25 mondial : le Centre for European Policy Studies, déjà nommé (8e rang mondial), la Green European Foundation (12e), la Foundation for European Progressive Studies (FEPS) (14e) et l'European Ideas Network (20e)[37]. La Belgique a aussi deux institutions dans le top 25 des think tanks en science et technologie : le Lisbon Council for Economic Competitiveness (18e) et l'Institute for the Encouragement of Scientific Research and Innovation of Brussels (ISRIB) (23e)[52].
Trois faits méritent d'être soulignés. L'Allemagne (où l'on utilise de préférence l'équivalent allemand Denkfabrik) est bien placée au top 25 des think tanks portant sur la science et la technologie : le Max-Planck-Institut (1er), la Bertelsmann Stiftung (« fondation ») (2e), le Zentrum für Entwicklungsforschung (ZEF)[52]. Par ailleurs, elle est en tête également du top 25 des meilleurs think tanks affiliés à un parti politique, avec quatre think tanks — Friedrich Ebert Stiftung (FES), Konrad Adenauer Stiftung (KAS), Fondation Heinrich-Böll, Friedrich Nauman Stiftung (FNS) — dans les cinq premiers mondiaux[37]. Enfin, de façon générale, ce pays est bien placé dans les classements : sept think tanks dans le top 25 d'Europe de l'Ouest[53], trois dans le top 25 des think tanks de développement international[54], quatre dans le top 25 des think tanks de l'environnement[55], trois dans le top 25 des think tanks sur la sécurité et les affaires internationales (la France en a quatre), deux dans le top 25 des think tanks sur l'économie politique domestique (intérieure), un dans le top 25 des think tanks en politique sociale[56].
Si la France a une longue tradition[57] de clubs et cercles politiques tels que le Club Jean Moulin durant les années 1960, le recours à une expertise professionnelle indépendante des structures de l'État est beaucoup plus récente, puisqu'un des premiers laboratoires d'idées financé par l'État, l'IFRI, a été fondé en 1979[57]. En 2011, selon les méthodes de classement du Global Go to Think Tanks (qui sont toutefois sujettes à caution pour leur opacité), la France en compterait 160, contre 190 en Allemagne, 300 au Royaume-Uni et 1 500 aux États-Unis[57]. En 2016, l'Observatoire européen des think tanks en a recensé 46 en France[58].
En outre, de 2010 à 2013, sous l'impulsion du Club Jade et de la Fondapol, le Forum des think tanks a rassemblé une quinzaine de think tanks du pays : EuropaNova, la Fondation Copernic, la Fondation Jean-Jaurès, la Fondation Res Publica, l'Institut Montaigne, Terra Nova, la Fondation iFRAP, etc. Fin 2011, alors que le débat sur la place de l'industrie commence à émerger en France, un laboratoire d'idées consacré à l'industrie est créé : La Fabrique de l'industrie, dont le conseil d'orientation comprend à la fois des représentants patronaux et des syndicalistes[59].
Créé en 2013, le think tank libéral Génération libre[60] est le seul think tank français à apparaître dans la liste « think tank to watch » du classement Global Go To Think Tank Index Report de l'université de Pennsylvanie[61]. Les sujets comme le revenu universel, la libéralisation du cannabis ou les effets pervers de la réglementation font notamment partie des travaux de think tank.
Les 17 et , l'International Network of Business Think Tanks organise sa rencontre annuelle à Paris sur le thème « l'entreprise qui change le monde-Relever les défis du XXIe siècle »[62]. L'organisme se compose notamment de : l'Institut de l'entreprise (France), le Committee For Economic Developpement of Australia (CEDA), le China Institute for Reform and Development (CIRD), le Center for Finnish Business and Policy Studies (Eva), le CES-Ifo (Allemagne), la Japan Association of Corporate Executives (Keizai Doyukai), le Business Council of Latin America (CEAL), le Círculo de Empresarios (Espagne) et le Committee for Economic Development (États-Unis)[N 3]
Selon un article de Challenges, « La vérité sur le financement des think tanks »[63], publié en , les think tanks français restent de petites structures (en effectifs et en budget) par rapport à leurs homologues européens et américains et leur financement est souvent composé de subventions publiques :
À l'inverse, certains think tanks se caractérisent par un financement exclusivement d'origine privée, par choix ou par absence de subvention, la distinction n'étant pas toujours claire. C'est le cas notamment de :
L'Observatoire européen des think tanks, créé en 2006[64], produit depuis 2016 le label Think Tank & Transparent[65] dont les objectifs sont de normaliser l'écosystème français en identifiant les organisations dont les activités relèvent réellement de la définition de think tank et d'évaluer leur niveau de transparence, de gouvernance et de production principalement[66]. Le label Think Tank & Transparent serait réalisé de façon totalement indépendante et répond à un contexte général d'attentes très fortes des citoyens et de la société civile plus largement pour plus d'éthique dans le débat public. Ainsi, plusieurs administrations françaises[67] et organisations transnationales[68] ont-elles salué cette initiative.
En 2016, 46 organisations ont reçu le label les désignant comme think tanks sur une centaine d'organisations évaluées. Les trois think tanks qui obtiennent le grade A général reposant sur de bonnes pratiques en matière d'éthique comme en matière de performance sont l'Institut Jacques Delors-Notre Europe, l'IDDRI et l'iFRAP. Ce résultat semble plus pessimiste sur la réalité française que les chiffres avancés par le Global Go to Think Tanks. Dans l'évaluation de ce label, il ressort qu'environ 80 % des think tanks français labellisés sont opaques quant à leurs financements et présentent de forts déséquilibres dans leurs organes de gouvernance quant à la représentation des femmes. Cet observatoire publie des contenus destinés à ce type d'organisation et organise des conférences thématiques réunissant représentants de think tanks, élus, entreprises, médias et citoyens. Il a également décerné les Trophées des think tanks français entre 2011 et 2014[69]. Cet événement avait, lors de ses 3 premières éditions en partenariat avec CCI France et le CESE dont les membres élus prenaient part au vote, rassemblé plus de 40 think tanks français.
Avec 197 think tanks récencés en 2017, la France figure à la 6ᵉ place du classement établi annuellement par l'université de Pennsylvanie. Ce rapport répertorie et classe en effet près de 6 500 think tanks dans le monde dont la fonction première est de participer à la discussion publique sur des questions telles que les relations internationales, l'économie, la défense ou encore l'environnement.
Le laboratoire d'idées IFRI arrive d'ailleurs en tête des think tanks mondiaux si l'on laisse de côté les États-Unis.
Le monde politique utilise les think tanks pour les programmes électoraux. Le journal Le Monde, en , titre un article « Faut-il son think tank pour gagner la présidentielle ? »[70].
Toutefois, cet intérêt des partis politiques pour des cercles de réflexion externes doit être tempéré : en 2009, le Parti socialiste se dote de son propre « hub » (c'est-à-dire d'un centre de mutualisation), Le Laboratoire des idées alors que l'UMP créé un Conseil des think tanks et des clubs. Face à cela, de nombreux think tanks choisissent de se tenir éloignés des partis politiques et préfèrent affirmer leur indépendance. C'est notamment le cas de l'Institut Montaigne et le think tank européen EuropaNova[70].
La Tunisie compte une vingtaine de think tanks, leur activité s'est développée après la révolution de 2011[74]. Selon le rapport Global Go-TO Think Tanks Index 2015 publié par l’université de Pennsylvanie aux États-Unis[75], quatre think tanks tunisiens ont été sélectionnés parmi les 398 de la région MENA.
Néanmoins, et au-delà de ces quatre institutions, il existe plusieurs autres think tanks tels que notamment :
Ces think tanks ne sont pas tous actifs de la même manière. S'il y a ceux qui produisent régulièrement des rapports, organisent des conférences en tout genre, s’expriment dans les médias, d'autres sont des coquilles vides et ne proposent rien.
Au Maroc, de nombreux think tanks ont émergé ces dernières années. AMAQUEN, fondé par Abdennasser Naji en 2003, est un Think Tank dans le domaine de l'éducation à travers ses publications (rapports), sa revue scientifique internationale "The Journal of Quality in Education", et son colloque international (CIMQUSEF). Selon Marianne Republic, AMAQUEN est un think tank leader dans les questions relatives à l'éducation. Le Temps[79] et Jeune Afrique[80] citent ainsi le Centre d’études et de recherches en sciences sociales (Cerss), créé en 1993 et ancré dans le milieu universitaire ; le Cercle d'Analyse Politique (CAP), que Jeune Afrique lie à l’Union socialiste des forces populaires ; l’Institut royal des études stratégiques, proche du pouvoir royal ; et l'Institut Amadeus, lui aussi lié au gouvernement, selon Le Temps. Ce journal note également la relative faiblesse des think tanks universitaires, liée à la faible densité de l'enseignement supérieur au Maroc. Plus récemment, en 2011, la Fondation Diplomatique[81] — organisme sans appartenance politique, et lié au magazine marocain des relations internationales Diplomatica — s'est spécialisée dans les relations sud-sud ayant pour cadre le Maroc. En 2014, le Policy Center for the New South (PCNS)[82] voit le jour. Ce think tank vise à contribuer à l’amélioration des politiques publiques, aussi bien économiques que sociales, qui concernent le Maroc et l’Afrique, en tant que parties intégrantes du Sud global. Le Policy Center a réussi à s’imposer dans le classement mondial des think tanks, publié annuellement par Pennsylvania University (TTCSP).
Sous l'impulsion de Xi Jinping de nombreux think tanks « aux caractéristiques chinoises » ont vu le jour (on parle même de « printemps des think tanks »). Cependant, cette émergence rencontre de nombreuses difficultés, à commencer par une soumission trop importante au gouvernement et notamment au Département de la Propagande, bien qu'ils puissent être issus d'entreprises ou de médias chinois[83]. Outils de l'influence chinois et de légitimation de la politique chinoise, ils peinent à jouer leur rôle d’espace destiné à l’opinion publique et à diversifier leurs thématiques d'études[84]. Les think tanks chinois peinent également à s’internationaliser.
L'influence de certains intérêts privés sur les médias, via notamment les think tanks, a été étudiée par Noam Chomsky et Edward Herman dans leur livre La Fabrication du consentement, et théorisée en partie via leur modèle de propagande[85]. L'histoire des think tanks néolibéraux, leur finalité et leurs liens avec les lobbies financiers ont fait l'objet d'une enquête approfondie de Roger Lenglet et Olivier Vilain dans Un pouvoir sous influence : quand les think tanks confisquent la démocratie.
Pour certains, les laboratoires d'idées sont particulièrement influents dans le réseau des médias pour diffuser le schéma « Peur, incertitude et doute » ; tels The Heartland Institute, le DCI Group et le Hudson Institute, opérant sur la contestation du consensus scientifique produit pour décrire le réchauffement climatique ; les intérêts stratégiques pour l'industrie pétrolière et l'industrie lourde sont en effet considérables concernant la contention de toute législation dans ce domaine.[réf. nécessaire]
Par ailleurs, notamment aux États-Unis, la multiplication des think tanks induit une tendance parmi les moins établis d'entre eux, ou parmi les plus abondamment pourvus par les groupes financiers : ils sont rendus plus sensibles aux exigences des entreprises et des groupes de pression[8]. Alexis Corbière, alors responsable des études du Parti de gauche, dénonce également les think tanks français comme « des lobbys malins qui, sous un vernis scientifique, prétendent produire des idées non partisanes, alors qu’ils défendent les intérêts généraux des groupes privés qui les financent »[26].
Pour Grégory Rzepski, journaliste spécialisé dans l'étude des médias, la plupart des think tanks français contribuent à maintenir l'ordre social ou à défendre la politique étrangère des États-Unis. Leur « consanguinité » — nombre de think tanks recrutant les mêmes collaborateurs — les conduirait à défendre des analyses proches, tout en bénéficiant d'un large accès aux médias : « La totalité des cercles de réflexion ayant accès aux médias dominants sont répartis sur un spectre idéologique étroit, de l’ultralibérale Fondation Ifrap au social-libéral Terra Nova »[26].
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