Le chaféisme, aussi orthographié shafiisme ou chafiisme, est l'une des quatre écoles (madhhab) de jurisprudence (fiqh) de l'islam sunnite. Elle est fondée sur l'enseignement de l'imam Ash-Shâfi'î (767-820) et de ses disciples. Il est considéré comme un compromis entre les écoles hanafite et malikite.

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Mosquée Al-Azhar, fondée en 970, est une des plus anciennes mosquées du Caire et le siège de l'université al-Azhar.

L’école chaféite s'appuie principalement sur le Coran et les hadiths pour prescrire la charia[1],[2]. Là où les passages du Coran et des hadiths sont ambigus, l’école a d'abord recours à l'ijmâ'– le consensus des ouléma (communauté des érudits musulmans)[3]. Si aucun consensus n'existe, l’école chaféite fait appel à l'effort d'interprétation (ijtihad) d'un compagnon du prophète musulman Mohammed, puis à l'analogie (qiyâs)[1].

Bagdad et Le Caire étaient les principaux centres du chaféisme. Depuis ces deux villes, la doctrine chaféite s’est répandue dans diverses parties du monde musulman. Au IVe siècle du calendrier hégirien, La Mecque et Médine sont devenues les centres principaux de l'école chaféite en dehors de l'Égypte. Au cours des siècles précédant l'émergence de l'Empire ottoman, l'école chaféite était celle qui comptait le plus de mouqallidoune (personnes faisant son taqlid) sur la planète. Ce n’est que sous les sultans ottomans au début du Xe siècle du calendrier hégirien que les chaféites perdirent de leur puissance. En effet, à cette époque là, les hanafites furent investis du pouvoir judiciaire à Constantinople et dans les autres grands centres du califat ottoman, tandis qu'au même moment le jafarisme s'implantait en Perse (un bastion du chaféisme qui donna au madhhab certains de ses plus grands noms) où le chiisme duodécimain était devenu religion d'État en 906 AH. En dépit de ces changements de nature politique, les peuples d'Égypte, de Syrie et du Hedjaz continuèrent de suivre le madhhab chaféite[2]. Aujourd'hui, il reste prédominant au Yémen, en Afrique de l'Est, en Égypte, au Kurdistan, au Daghestan, au Kerala, en Asie du Sud-Est (Indonésie, Thaïlande, Philippines, et c'est le madhhab d'État en Malaisie et à Brunei[4]) et dans la communauté javanaise du Suriname.

En 2016, un concile, inauguré par le grand imam de l'Azhar, Ahmed al-Tayeb, rassemblant 200 personnalités sunnites du monde entier, s'est réuni dans le but de définir l’identité de ceux qui se font connaître comme « les gens du sunnisme » par opposition aux différents groupes considérés égarés. A l'issue de leurs travaux, les dignitaires sunnites sont convenus qu'au niveau du droit, les chaféites sont bien des gens du sunnisme [5],[6].

Formation du madhhab

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Répartition des écoles juridiques dans l'islam contemporain. Madhab chaféite en bleu foncé.

L'imam Ash-Shâfi'î combina en quelque sorte le fiqh du Hedjaz (madhhab maliki) avec celui d'Irak (madhhab hanafi) et créa ainsi son propre madhhab (école de pensée). Il rassembla les règles en dictant à ses élèves dans un livre nommé Al-Hujja (l'évidence). Cette rédaction se fit en Irak en 810 et certains de ses élèves apprirent son livre et le propagèrent, tels que l'imam Ahmad et Abou-Thawr, qui fondèrent chacun leur école (seule celle d'Ahmad eu l'occasion de survivre).

Il se rendit ensuite en Égypte pour étudier sous l'imam Al-Layth ibn Sa'd (en), mais ce dernier décéda peu avant son arrivée ; il put néanmoins étudier son madhhab de par ses élèves qui y étaient toujours présents.

En Égypte il assimila donc le fiqh de l'imam al-Layth et fit rédiger son al-Madhhab al-Jadîd le nouveau madhhab, par opposition à al-Madhhab al-Qadîm qu'il avait en Irak) à ses étudiants dans un livre qu'il nomme Al-Umm. En effet ce voyage en Égypte le confronta à de différentes méthodes d'analyse de hadith et de raisonnements qui induisirent des changements nombreux de ses avis qu'il avait eu en Irak.

Sources et méthodologie

Les sources sont, par ordre d'importance :

  1. Le Coran : c'est la source première et l'imam Ash-Shâfi'î l'utilisa sans restriction.
  2. La Sunna : Ash-Shâfi'î n'utilisait que les hadiths qui étaient scrupuleusement sahîh (authentiques), et rejeta les conditions fixées par Abou Hanifa ou Mâlik en la matière. Ash-Shâfi'î est aussi reconnu pour sa contribution aux critiques de hadiths.
  3. Le consensus des compagnons (Ijma') : Ash-Shâfi'î le considérait comme la troisième source de loi islamique, pourtant il émit des doutes sur des cas rapportés de ijma' si bien qu'il ne l'acceptait que quand il était fermement établi.
  4. L'opinion individuelle d'un compagnon : si des sahabas diffèrent sur un point, on se réfère à l'opinion qui convient la plus aux sources premières, rejoignant ici Abou Hanifa.
  5. Le raisonnement par analogie (Qiyâs) : considérée comme méthode valide dans la déduction de lois, il considérait néanmoins sa propre opinion inférieure aux preuves établies par l'opinion d'un compagnon.
  6. L'Istishab (recherche de connexion entre des situations) : Ash-Shâfi'î rejeta les principes d'istihsân (pouvoir judiciaire discrétionnaire des fuqaha dûment qualifiés) d'Abou Hanifa[7] et d'istislâh de l'imam Mâlik considérés comme forme de bidʻah (innovation), puisque selon lui ces méthodes étaient fondées sur un raisonnement humain dans des domaines où des lois étaient établies des sources mentionnées plus haut. Cependant aux prises avec des problèmes similaires Ash-Shâfi'î dut recourir à un principe similaire à l'istihsân et à l'istislâh, qu'il nomma istis'hâb. Signifiant littéralement "rechercher un lien", il cherche à renvoyer un ensemble de circonstances postérieures à des circonstances antérieures. Ceci est fondé sur la supposition que des lois de fiqh appliquées en certaines conditions restent valides tant qu'il n'est pas établi clairement que ces conditions ont changé. Si par exemple quelqu'un est absent un si long moment qu'on pense qu'il est peut-être mort, alors par istishab toutes les lois seront appliquées comme s'il était certain qu'il est en vie.


Élèves et savants chaféites célèbres

Classiques (jusqu'au XIIe siècle de l'Hégire)

Contemporains (à partir du XIIIe siècle de l'Hégire)

Répartition géographique

Entre les deux « blocs » que représentent les Hanafites, présents en Asie mineure de la Turquie à l’Afghanistan et les Malikites, présents notamment en Afrique du Nord, l'islam chaféite est typique des régions frontalières (Égypte, frontières de l'Arabie Saoudite, Caucase) et des régions limitrophes de l'Islam (Afrique de l'est, océan Indien, Indonésie). C'est une tradition consensuelle et volontiers syncrétique, qui sépare rigoureusement politique et religion[9].

En France

L'islam chaféite est relativement minoritaire parmi les musulmans de France, mais est prépondérant dans le département de Mayotte et parmi la population issue de l'immigration comorienne[9].

Voir aussi

Bibliographie

  • Mohammad Aboû Zahra (trad. de l'arabe par Michel Galloux), L'imam Ach-Châfî : sa vie et son époque, ses opinions et son fiqh, Paris, Al Qalam, , 472 p. (ISBN 978-2-909469-64-5)
  • M. Yahia, Shafi'i et les deux sources de la loi islamique, 2009, turnhout: Brepols Publishers, (ISBN 978-2-503-53181-6)
  • Al-Hadjj Nouredine Aïouaz traduction du Matn Al-ghayah wa t-Taqrib du chapitre de la purification à celui du pèlerinage.

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

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