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une arme à projectile accéléré par une force électromagnétique, semblable à celle qui fait tourner le moteur homopolaire De Wikipédia, l'encyclopédie libre
Le canon électro-magnétique, connu aussi sous le nom anglais de railgun — ou rail gun — d'où la traduction canon à rails – à ne pas confondre avec l'artillerie lourde sur voie ferrée (1914-1918 et 1939-1945) – est une arme à projectile accéléré par une force électromagnétique, semblable à celle qui fait tourner le moteur homopolaire.
Le concept sous-jacent est probablement aussi ancien que la découverte de la force de Laplace (avec une proposition en France dès 1884, puis 1908, et une tentative de développement pendant la Première Guerre mondiale qui fut abandonnée faute de résultat probant). Sa réalisation opérationnelle n'est toujours pas d'actualité. Il n'existe actuellement que des prototypes.
Le concept consiste à établir une différence de potentiel électrique entre deux rails parallèles conducteurs de l'électricité et à insérer entre eux un projectile conducteur pouvant glisser ou rouler dessus, en faisant contact. Dès que le contact a lieu, un courant électrique circule entre les deux rails, un champ magnétique naît et le projectile est accéléré par la force de Laplace (interaction entre le courant qui circule dans le projectile et le champ magnétique créé).
Le canon électrique, à propulsion électromagnétique, ne doit cependant pas être confondu avec une autre forme, le canon magnétique, où le champ magnétique est parallèle à l'axe, et où le projectile, au lieu d'être parcouru par un courant, est ferromagnétique.
On peut néanmoins, pour augmenter la force du canon électrique, renforcer le champ magnétique en ajoutant, de part et d'autre du plan formé par les deux rails, des aimants créant un champ magnétique, perpendiculaire à l'axe, et de sens approprié pour s'ajouter au champ engendré par le courant.
Les deux rails métalliques parallèles sont connectés à un générateur électrique, formant ainsi un circuit ouvert. Dès qu'un objet conducteur est inséré entre les rails, le circuit est fermé, et un courant le suit, allant du pôle + du générateur, par le rail +, l'objet posé, le rail –, vers le pôle – du générateur.
Ce courant crée dans la boucle ainsi formée un champ magnétique de valeur B, qui s'enroule autour de chaque élément conducteur d'après la loi de Biot et Savart ou le théorème d'Ampère. En supposant la boucle dans un plan horizontal, le champ magnétique créé va donc être vertical dans le plan de la boucle. Il est donc perpendiculaire au courant d'intensité I et exerce donc sur lui, d'après la loi de Laplace une force d'intensité B × I par unité de longueur.
Cette force, agissant sur le projectile, va le propulser le long des rails, et on peut montrer qu'il s'éloigne du générateur, agrandissant ainsi la surface de la boucle. C'est une conséquence de la loi de Lenz, plus générale. La force de Laplace propulse le projectile et exerce aussi de fortes contraintes sur les rails, le générateur et, éventuellement, sur l'aimant.
Comme le champ magnétique B est proportionnel à l'intensité I du courant, la force de Laplace est proportionnelle au carré de l'intensité.
Une intensité d'un million d'ampères pourrait exercer sur le projectile une force inouïe, et il pourrait atteindre de très hautes vitesses. On a réussi à atteindre 20 km/s avec de petits projectiles projetés sur les rails par une explosion. La NASA a créé et testé un railgun dont le projectile peut atteindre les 9 000 km/h (2,5 km/s) et toucher une cible de 5 m d'envergure à 350 km du point de tir. La grande quantité d'énergie électrique nécessaire est la contrepartie aux munitions lourdes et explosives à transporter avec une arme de tir conventionnelle.
Rails et projectile doivent être construits de matériaux résistants et conducteurs. Ils doivent résister à la violence du projectile accéléré, et à la chaleur développée par l'effet Joule du courant très élevé, aux frottements, et aux décharges électriques des contacts mobiles, qui provoquent des dégâts sérieux aux surfaces.
Le canon doit aussi encaisser le recul dû à l'accélération du projectile, comme dans n'importe quelle arme. Le point d'application exact de cette force de recul est encore sujet à controverse. Les traditions de l'artillerie veulent que ce soit sur la culasse de l'arme, c'est-à-dire la partie du circuit qui ferme la boucle en regard du projectile, mais certains s'appuient sur le théorème de Maxwell-Ampère pour affirmer qu'il est réparti tout au long des rails[1]. C'est probablement vrai stricto sensu, mais si l'on néglige les vitesses en jeu par rapport à celle de la lumière, l'approximation des artilleurs reste convenable.
Un problème plus important est que, par unité de longueur, les rails se repoussent de côté exactement comme le projectile est poussé vers l'avant (toujours perpendiculairement). Il leur faut donc résister à cette contrainte sans se tordre, et donc être très solidement fixés sur un bâti indéformable, mais isolant pour éviter l'induction de courants qui représenteraient une perte.
L'effet Joule, en chauffant les rails et le projectile, consomme une partie de l'énergie, aux dépens du rendement de l'installation. La chaleur développée par cet effet, ainsi que par les frottements du projectile, présente trois inconvénients principaux :
En pratique, dans la plupart des réalisations, les rails s'usent extrêmement rapidement. Les projectiles aussi, mais ils ne servent par principe qu'une seule fois. L'usure des rails limite le temps de vie du canon, et leur échange standard est difficile compte tenu de la solidité nécessaire de leur fixation et de la qualité exigée des contacts avec le générateur[2].
L'emploi de matériaux supraconducteurs est imaginable, mais pour le moment bien peu réaliste (température, résistance mécanique, etc.). D'autre part l'inductance du circuit limite le temps de montée de l'intensité du courant, limitant également le rendement moyen sur le temps total d'accélération.
Un arc électrique peut jaillir entre les rails, faisant ainsi un court-circuit destructeur et annulant l'effet sur le projectile. Certaines versions tentent d'exploiter cet effet d'arc électrique : un plasma est amorcé par une simple feuille de métal conducteur vaporisé par l'effet Joule ; ce plasma pousse alors le véritable projectile, non conducteur, comme les gaz d'un canon ordinaire, mais sans les problèmes liés à l'étanchéité et à la résistance mécanique nécessaires (le confinement étant réalisé par le dispositif électromagnétique).
Le générateur doit être capable de délivrer de très forts courants, contrôlés et durant le temps nécessaire à l'accélération du projectile. Pour mesurer l'efficacité du générateur, il faut essentiellement savoir l'énergie qu'il peut fournir, mesurée en joules. Un projectile de masse m, lancé à une vitesse v possède une énergie cinétique égale à ½mv2. L'énergie maximale utilisée pour un canon électrique a été de 33 millions de joules (MJ) le aux États-Unis[3]. Les formes usuelles de générateurs utilisés pour les canons électriques sont des générateurs impulsionnels à volant d'inertie et des capacités ; on peut également utiliser des SMES.
La filière du canon électrique permettrait de développer des armes dont les projectiles ne contiennent pas forcément d'explosif, comme les obus flèche, avec une très grande vitesse à la sortie de canon : 3 500 m/s, soit approximativement Mach 10 au niveau de la mer, ou plus. En comparaison, les obus flèche classiques actuels plafonnent à 1 800 m/s[4]. Ceci donnerait aux projectiles une énergie supérieure à celle d'un obus explosif de masse égale, et permettrait donc de transporter plus de munitions, en éliminant le danger du transport d'explosifs dans un char ou une tourelle de navire. Cependant, les problèmes d'usure des rails et des isolants doivent encore être résolus avant que le canon électrique puisse entrer en service opérationnel. Les Américains assurent pouvoir atteindre des vitesses comprises entre 7 000 et 9 000 km/h (1 950 et 2 500 m/s), et espèrent pouvoir atteindre rapidement des cibles à 185 km[5].
En raison de la grande vitesse initiale des projectiles, les canons électriques sont intéressants dans la lutte contre les missiles très rapides par la réduction du temps de vol. Une plus grande vitesse de sortie donne une plus longue portée, moins de flèche à la trajectoire, et moins de sensibilité au vent. Elle court-circuiterait ainsi les limites inhérentes aux armes à feu conventionnelles, qui limitent, en raison des lois de la détente des gaz, les vitesses des projectiles à environ 1,5 km/s et leur portée à environ 80 km[6].
Si l'on arrive à appliquer la technique à des armes automatiques à tir rapide, un canon électrique aurait des avantages en ce qui concerne la vitesse de tir. Les mécanismes d'une arme conventionnelle doivent assurer les manœuvres de culasse, le déchargement et le rechargement de chaque cartouche, tandis qu'un canon électrique, entre les coups, n'a qu'à assurer l'approvisionnement d'un nouveau projectile, et à fournir la puissance nécessaire au rechargement du générateur. Un canon de 10 MJ tirant à 1 coup/s aurait besoin ainsi d'une puissance d'alimentation moyenne de 10 MW, soit la moitié de la puissance électrique du porte-avions nucléaire Charles-de-Gaulle (sur une puissance totale de 61 MW fournie par les réacteurs)[7], et devrait assurer le refroidissement en continu de l'ensemble.
Probablement, le plus ancien système constamment satisfaisant a été construit par la Defence Research Agency (Agence de recherche de défense) britannique sur le champ de tir de Dundrennan à Kirkcudbright (Écosse). Ce système est opérationnel depuis plus de 10 ans[Quand ?], dans un service d'étude des balistiques interne, intermédiaire, externe et terminale, et a battu plusieurs records de masse et de vitesse.
Le canon Pegasus lancé en 1987 et construit par l'institut franco-allemand de recherches militaire de Saint-Louis (ISL) pouvait tirer en 1998 un projectile d'un kilogramme à la vitesse de 2 600 m/s pour une puissance de 15 GW. En comparaison, le même projectile à poudre ne dépasserait pas 1 800 m/s[8],[9]. En 2024, L'ISL dispose de « plusieurs démonstrateurs en laboratoire », dont le canon NGL-60 [New Generation Launcher], un lanceur de calibre 60 mm capable de tirer des projectiles de l’ordre du kilogramme, et le canon RAFIRA [RApid FIre RAilgun], un lanceur de calibre 25 mm pouvant tirer des salves de projectiles de petit calibre à des cadences de tir extrêmement élevées »[10],[9].
Les États-Unis (DARPA) depuis les années 1970, dans le cadre de l'« initiative de défense stratégique » du président Ronald Reagan, surnommée la « guerre des étoiles », financent des expériences de canon électrique.
L'Institut de technologie avancée de l'université du Texas à Austin a construit des canons électriques capables d'envoyer des obus perforants en tungstène d'une énergie de 9 MJ[11]. Cette énergie est suffisante pour lancer un obus de 2 kg à 3 km/s, et à cette vitesse, une tige de tungstène ou autre métal dense, peut facilement pénétrer dans un char, et peut-être passer à travers.
Le Centre de guerre navale de surface des États-Unis à Dahlgren (Virginie) y a testé un prototype de canon électrique, livré par BAE Systems, qui a accéléré un obus de sept livres (3,17 kg) à Mach 7, conçu pour être poussé jusqu'à 32 ou peut-être même 64 MJ[12],[13].
Le principal problème auquel la marine doit faire face dans ses mises au point est l'usure rapide des rails provoquée par l'énorme chaleur du tir. Les armes de ce genre devraient être assez puissantes pour provoquer un peu plus de dommages qu'un missile BGM-109 Tomahawk conventionnel, pour une fraction du coût[14].
En , la marine américaine a testé un canon électrique avec complément magnétique : il a tiré un obus à 2 500 m/s avec 10 MJ. On prévoit d'augmenter sa vitesse initiale jusqu'à 8 300 m/s, avec une précision suffisante pour toucher une cible de 5 m à 360 km, avec une cadence de tir de 10 coups/min. On pense le réaliser vers 2020–2025[15].
Le , le canon de 10 mètres et de 54 tonnes de BAE Systems à Dahlgren (Virginie) a projeté un objet d'une vingtaine de kilogrammes à 160 km. Sa vitesse de sortie était approximativement mach 5 et l'énergie nécessaire était 32 MJ. À terme, la marine des États-Unis d'Amérique espère augmenter la portée du canon jusqu'à 320 km[16].
Le premier prototype a été livré le par BAE Systems à la Navy qui a pu effectuer ses premiers tests fin . Ce canon a une capacité de 32 mégajoules, sachant qu'un mégajoule correspond à une voiture d'une tonne lancée à 160 km/h[5].
En 2018, des photographies montrait ce qui était présenté comme un canon électro-magnétique installé au niveau de la proue du navire d’assaut amphibie Haysang Shan de l'armée populaire de libération (APL) chinoise. Plus récemment, le quotidien South China Morning Post [édité à Hong-Kong] a assuré que la Chine venait de mener une campagne d’essais avec un canon électromagnétique décrit comme étant « le plus puissant du monde » sans qu'aucune image ne soit présentée.
Le 17 octobre 2023, l’agence du ministère japonais de la Défense pour la technologie, les acquisitions et la logistique [ATLA] a publié une vidéo montrant un canon électromagnétique en action, depuis un navire de la Force maritime d’autodéfense japonaise[17].
Les Railguns sont souvent utilisés en science-fiction ou dans des jeux vidéo pour figurer des fusils de précision très puissants, des systèmes de destruction très puissants ou des armes tirant à travers les murs (les projectiles étant tellement rapides qu'ils traversent le mur sans perdre appréciablement de leur énergie cinétique). La distinction avec les canons magnétiques (« coilguns »), ou rayons de la mort (« rayguns »), y est souvent floue.
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